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Yap: l’île du passé et du présent en Micronésie

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Sur l’île de Yap, les femmes peuvent montrer leurs poitrines, mais pas leurs genoux. Les hommes ont des sacs à main. Et tout le monde crache rouge.

Yap micronesie

 

Dans le minimarché où je déambulais en quête de pitance pour midi, elle était là, papotant avec deux autres dames, en train de fourguer dans son caddie un paquet de céréales « Weetabix ». Elle portait un lavalava (sarong) bleu marine, probablement tissée dans son village, et c’est tout.

J’ai encore cette image ancrée dans ma tête. Il émanait d’elle une dignité tranquille, à l’instar de tous les habitants de l’île qui m’ont fait l’honneur de partager leur culture et leur quotidien.

Yap est unique. Cet Etat des Etats fédérés de Micronésie ne s’est ouvert au tourisme qu’en 1989. Pendant des siècles, ses habitants ont utilisé des pierres vaguement sculptées en guise de monnaie, la plus imposante du monde : certaines pierres mesurent deux mètres. Malgré quatre colonisations – espagnole, allemande, japonaise et américaine-  Yap a conservé sa culture et ses traditions. Une culture bien vivante, mystérieuse et bien souvent invisible, et dont les principaux éléments sont inscrits dans la Constitution.

Point de chichis et de pacotilles sur Yap. Il faut demander la permission avant de visiter un village. Les « maisons pour hommes », nichées au creux de la mangrove omniprésente, sont toujours interdites aux femmes. Les maisons communautaires, construites en bois de mahogany, servent régulièrement comme lieux de rencontres où se prennent les principales décisions politiques ou autres. On y boit aussi beaucoup (pas mal, en fait).

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(Maison communautaire de Yap. Photo Damien Personnaz. 2010)

Contrairement aux autres îles d’Océanie, les insulaires de Yap n’ont pas été submergés par les influences étrangères pour la bonne raison que leur culture était déjà suffisamment forte à leur arrivée.

Est-ce forcément une bonne chose ? Le respect à la lettre des coutumes et des traditions ne se fait-il pas au détriment du progrès, lequel n’est pas forcément et toujours pernicieux ?

La réponse ne varie pas : Oui, notre culture est une bonne chose. « Vous (moi, vous, les autres, les touristes, les visiteurs et les investisseurs potentiels) êtes les bienvenus, mais il s’agit de respecter notre culture et notre identité ».

Le passé et le présent se télescopent donc dans les deux rues de la capitale, Colonia. Les enfants vont à l’école, les rues sont propres, les canettes de coca usagées terminent leur carrière dans des poubelles, les femmes aux seins nus papotent à la sortie du mini supermarché qui vend des tas de choses en plastique, les hommes arborent tous des sacs à main tressés en feuilles de pandanus.

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Le chef de l’atoll lointain de Ifaluk. Il s’appelle Manu. (Photo Damien Personnaz/ Yap/ 2010)

Et il y a aussi les flaques de sang éparpillées un peu partout dans les rues et qui sèchent au soleil.

Réflexion faite, ce n’est pas du sang. Mais plutôt des crachats de noix de bétel que les insulaires de 17 à 77 ans mâchouillent à longueur de journée et crachotent quand la mixture, mélangée avec du tabac, devient un peu trop envahissante dans leur bouche rouge vif. La vie quotidienne des insulaires, déjà peu agitée, devient léthargique en fin de journée. Exemple :

–          Bonjour Madame, pourriez-vous me donner deux bouteilles d’eau ?

–          Bonchour. Quoich ?

–          Les deux bouteilles d’eau, là, dans le frigo, derrière vous.

–          Chais bouchteilles d’eauch ?

–          Oui, s’il vous plaît.

Le message met un certain temps à se frayer un chemin dans le cerveau de la dame aux dents rouges et aux yeux dans le vide.

–          Merci, Madame.

–          De riench. Bonche choirée, Monchieuch.

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On s’y fait très vite.

Monter dans un taxi dont la passagère aux seins nus envahit l’espace aussi sûrement qu’une méduse dans un bac à sable ? On s’y fait. Oublier les mots « grognons, stress, insécurité et d’autres synonymes » en l’espace d’une poignée de minutes ? On s’y fait.  Se faire appeler par son nom un peu partout le deuxième jour ? On s’y fait.

La simplicité et la gentillesse des insulaires de Yap restent dans le cœur bien après que les larmes du départ se soient séchées.

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