Jeongnyeon : A star is born raconte l’histoire d’une jeune femme ambitieuse qui dans les années 50 au sortir de la guerre rêve de rejoindre à Séoul une troupe de gukgeuk, théâtre traditionnel coréen. Entre itinéraire personnel, passion artistique, quête identitaire et aspirations, ce drama coréen est résolument féministe.
Entre quête artistique et histoire d’émancipation personnelle
Jeongnyeon : Une étoile est née est une adaptation du webtoon « Jeong Nyeon », créé par Seo Ireh et illustré par Namon. Ce webtoon, publié sur Naver, est une œuvre à la fois féministe et innovante qui explore le monde du gukgeuk, théâtre traditionnel féminin coréen, dans un contexte de reconstruction sociale et artistique des années 1950.
Le saviez-vous ? Le gukgeuk est un genre artistique traditionnel coréen qui combine théâtre, danse et pansori (un peu l’équivalent de l’opéra en Occident) qui a la particularité d’être exclusivement pratiqué par des femmes… Il a été enregistré au patrimoine mondial immatériel de l’Unesco.
L’histoire met en lumière la lutte d’une jeune chanteuse pour s’émanciper et réussir dans un univers masculin et conservateur, tout en abordant des thèmes liés aux identités et aux relations LGBTQ+ dans une société encore très réticente à ces sujets. Malgré la force du webtoon et son engagement, le drama de Jung Ji-in a largement étouffé cette dimension dans son scénario.

La relation entre les chanteuses, qui était centrale dans l’œuvre originale, a été considérablement simplifiée, voire effacée. L’adaptation a opté pour une représentation plus prudente, évitant toute affirmation explicite des relations amoureuses ou lesbiennes préférant des sous-entendus à la place. Cette décision a désespérément réduit la profondeur émotionnelle et la complexité des personnages, limitant l’impact de leurs trajectoires affectives et sociales, et trahissant finalement l’esprit du webtoon.
Une thématique lesbienne hélas aseptisée
Ce choix de la production peut s’interpréter comme une censure culturelle, influencée par les normes sociales sud-coréennes encore anciennes concernant la représentation LGBTQ+. La série se concentre principalement sur la quête artistique et l’émancipation collective, mais au prix d’une mise en retrait des sujets LGBTQ+ qui auraient pu apporter une richesse dramaturgique supplémentaire. La comparaison avec le webtoon original montre à quel point cette adaptation a été volontairement aseptisée, privant le récit de ses airs subversifs et authentiques.




En dépit de ses faiblesses scénaristiques, cette œuvre demeure une réussite remarquable pour les amateurs de gukgeuk et de pansori. J’ai été embarquée par son audace à revisiter le genre historique sous un prisme féministe et culturel contemporain. « Jeongnyeon » s’impose comme une série essentielle du néo-sageuk, ouvrant de nouvelles voies narratives tout en conservant le respect des codes traditionnels. Même si la représentation des relations amoureuses entre femmes reste incomplète et parfois voilée, la série mérite d’être vue pour son apport unique, sa volonté d’innovation dans un cadre classique et, disons le, le jeu époustouflant de Kim Tae-ri le charme de Shin Ye-eun dans ce rôle androgyne.
Retrouvez l’interview de Shin Ye eun à propos de son rôle de Heo Young-seo





Avis en bref sur Jeongnyeon : A star is born
Fiche technique :
Titre : Jeongnyeon
Pays : Corée du sud
Production : 2024
Réalisateur : Jung Ji-in
Scénariste : Choi Hyo-bi
Acteurs : Kim Tae Ri, Shin Ye-eun, Ra Mi-ran, Jung Eun-chae, Kim Yoon-hye
Synopsis : Dans les années 50, alors que la guerre vient de se terminer, une jeune femme pauvre et pêcheur de palourdes ambitionne de quitter sa province pour rejoindre une compagnie théâtrale réservée aux femmes à Séoul.
Critique : Ce drama coréen Jeongnyon : a star is born raconte une quête artistique à travers l’univers du gukgeuk, théâtre traditionnel féminin coréen et dévoile un itinéraire émouvant d’une jeune femme dont la tentative d’émancipation dans un monde très masculin est audacieuse. La série revisite le genre historique sous un prisme féministe et culturel contemporain. Il est regrettable que les thématiques et représentations lgbtq+ sont bien trop éludées.

C’est hélas très fréquent que les dramas coréens gomment les thématiques lgbtq+ alors qu’elles sont la force d’un webtoon. D’où mon admiration pour l’adaptation japonaise de Our Youth qui l’a largement dépassé par rapport à ce que propose le webtoon coréen dont la série est adaptée. Je vais néanmoins découvrir avec plaisir cette oeuvre, car le contexte développé m’intéresse et surtout la difficulté de cette quête artistique…