Malheureusement, encore aujourd’hui, la Synagogue Rumbach est un joyau insoupçonné quand on évoque le patrimoine juif à Budapest. Ce magnifique bâtiment est injustement relégué au second plan, bien qu’il soit l’œuvre – le seul en Hongrie – d’Otto Wagner, l’architecte autrichien mondialement connu. Ses bâtiments Art Nouveau comptent parmi les sites les plus populaires de Vienne, mais la synagogue a été construite dans le style mauresque de son maître, Ludwig Förster.
La renaissance de la Synagogue rumbach
La synagogue de la rue Rumbach Sebestyén, restaurée dans une beauté à couper le souffle, brille à nouveau dans sa lumière d’origine. En se promenant au milieu du centre de Budapest, cela peut paraître étrange, mais la synagogue, désormais appelée uniquement Rumbach, a été construite dans une petite rue sans nom.
La réhabilitation a reçu la reconnaissance du Comité national hongrois de l’ICOMOS pour les rénovations de monuments les plus exemplaires. Les architectes ont réussi à reconstruire authentiquement les espaces à l’aide des éléments restants et ont répondu avec élégance aux attentes de nos jours.
un bâtiment entre modernité et tradition sacrée
Non il n’y a pas que la plus grande synagogue d’Europe à découvrir pour comprendre et visiter l’ancien quartier juif de Budapest et la vie communautaire des Juifs de Hongrie.
Cette synagogue est une des premières et aussi la seule œuvre d’Otto Wagner, du grand maître de la sécession viennoise, à Budapest. Il n’avait que 26 ans lorsqu’il a remporté le premier projet de sa vie d’architecte grâce à un appel d’offres. Il a ainsi pu créer la synagogue – en avance sur son temps – avec une structure moderne, une structure légère, soutenue par des éléments de support métalliques.
Sur le terrain acheté en 1865, Otto Wagner créa un complexe particulier. Le bâtiment se compose en réalité de deux parties. L’aile donnant vers la rue abritait les appartements des personnes qui servaient la synagogue (le rabbin, le chantre et le serviteur). Le Talmud Torah, l’enseignement religieux, y avaient lieu aussi.
Un style byzantin : comme un écho à l’âme mauresque
Le bâtiment rouge, bleu et or, portant des caractéristiques byzantines et mauresques, a une façade jaunâtre bordée de rayures rouges à l’extérieur, sur lesquelles on peut voir de petites tours ressemblant à des minarets. A l’intérieur se dresse son magnifique dôme de 28 mètres de haut, qui confère à la fois une profondeur et une hauteur à couper le souffle. Le bâtiment est divisé en deux parties: la façade de 4 étages, où se trouvaient autrefois les appartements du rabbin et du chantre, ainsi que l’école de filles de la communauté, et la synagogue elle-même, qui suit avec sa forme octogonale le style des anciens temples.
Le caractère unique du bâtiment tient au fait que, bien que son aspect fasse écho à l’architecture sacrée traditionnelle, il s’agit d’un bâtiment structurellement moderne avec une structure légère, s’appuyant sur des éléments de support métalliques. L’intérieur du bâtiment est un espace octogonal avec un dôme de 28 mètres de haut. La bima, la plateforme de lecture de la Torah, se situe au centre, et selon la tradition, dans la partie orientale se trouve l’Armoire de la Torah, qui contient les rouleaux de la Torah. La synagogue ouvre les portes en 1874. Elle pouvait accueillir 1 265 personnes. Dans les années 1900, il fallait acheter un billet en avance pour les grandes fêtes, si on voulait s’asseoir.
Le bâtiment a été construit dans le style byzantin et ses éléments décoratifs, notamment les parties des parapets de la galerie des femmes, font écho au style mauresque. Le rouge et le bleu dominent l’espace de la synagogue, le rouge étant la couleur du cœur, le bleu celle de l’esprit.
Au milieu de cette place centrale se trouve la Bima, le pupitre de la lecture de la Torah, qui après la rénovation peut être abaissé et caché sous le sol sur simple pression d’un bouton: cette solution permet au bâtiment d’être non seulement un lieu religieux , mais aussi un lieu d’événements culturels. Lors de la restauration, les éléments restants ont été renouvelés dans leur forme originale, mais certains éléments architecturaux ont dû être remplacés par une reconstruction. Il est intéressant de noter que le sol en mosaïque devant l’armoire de la Torah est en grosse partie de l’époque: l’explication en est que l’œuvre d’Otto Wagner a été récupérée il y a des décennies, et les pièces de mosaïque ont été conservées par un artiste hongrois, reposées récemment.
Aux étages avec des espaces pour des ateliers, des rencontres professionnelles, des conférences, des événements artistiques, des soirées, et des rencontres écrivains-lecteurs.
A ne pas manquer au troisième étage,l’exposition interactive où on peut revivre les deux à trois cents dernières années à travers l’histoire de la famille Politzer, qui – dans son caractère exceptionnel – illustre le destin juif dans le contexte de l’histoire hongroise.
Une nouvelle série de concerts „I have lost my heart in Budapest” a débuté à la Synagogue Rumbach, dans ce bâtiment vieux de 150 ans. Des œuvres célèbres et populaires sont interprétées lors du spectacle.
Le tournant tragique pendant la 2ème guerre mondiale
Hélas, le sort du bâtiment prit une tournure négative dans les années 1940. Environ 15 000 à 20 000 personnes y attendaient leur sort, ce qui devint en août 1941 une déportation vers Kamenyeck-Podolskij, en Ukraine. Ce fut la première station sanglante de Shoah en Hongrie. En 1944, elle fut rattachée au ghetto. Lors du siège de Budapest, la synagogue fut gravement endommagée. Cependant, la défaite de la révolution de 1956 a définitivement scellé le sort de la synagogue et les membres de la communauté ont cherché une nouvelle patrie, le dernier rabbin de la synagogue, Benjamin Fischer, a émigré à Londres.
La communauté, qui était alors réduite à 60 personnes, ne pouvait pas assumer les charges de la rénovation et de l’entretien de la synagogue, ce qui a entraîné la fermeture du bâtiment en 1959 en raison de son état de danger. Après de très nombreuses années et de longues négociations, un contrat de soutien exceptionnel a été signé en 2015, grâce auquel la reconstruction a commencé en 2016, et a duré jusqu’en décembre 2021. La reconstruction a remporté le prix ICOMOS en 2020 et la construction a été médaillée par le prix architectural Nívó.
Il vaut la peine de visiter le Rumbach non seulement pour la beauté du bâtiment, mais aussi parce que l’exposition permanente au 3ème étage permet de découvrir l’histoire de la communauté juive hongroise, qui, à travers l’histoire de la famille Politzer, présente le destin d’une famille juive du début du XVIIIe siècle à nos jours. Le bâtiment accueille également des événements culturels et des concerts.
Informations pratiques
Les heures d’ouverture (à partir du 15 avril) : dimanche-jeudi de 10h00 à 18h00. Vendredi : 10h00-16h00, fermé le samedi.
La synagogue en période d’hiver n’est malheureusement ouverte aux visiteurs que le dimanche, mais les groupes peuvent la visiter à d’autres moments aussi après réservation préalable.
Les heures de prières sont en général de 8h30 à 9h30.
Site officiel de la synagogue Rumbach
Comment y aller ?
1074 Budapest Rumbach Sebestyén 11-13
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Je m’appelle Viktoria Varga, guide professionnelle francophone à Budapest et en Hongrie et je suis spécialisée sur l’histoire juive hongroise. Je pourrais vous faire découvrir l’ancien quartier juif de Budapest et toutes ses histoires et anecdotes, mais aussi sur toutes les facettes de ma belle ville.