Le 3 février, le cyclone Oli est passé tel Attila sur les récifs coralliens. Il a tout rasé, selon Serge Planes, directeur de recherche au CNRS qui dirige à Moorea l’observatoire de l’environnement. Jusqu’à 15 m de profondeur, les fragiles constructions calcaires n’ont pas tenu ; jusqu’à 30 m le massif a été partiellement détruit. Dans de nombreux endroit parfois, seule subsiste la dalle.
Déjà le réchauffement de la température moyenne des eaux marines n’encourage pas la vie corallienne. Ensuite l’étoile de mer Acanthaster mangeuse de coraux sévit depuis 2006. Mais là, c’est Attila ! Sous les pas de ses chevaux, disait-on, l’herbe ne repoussait pas. Oli a tout détruit jusqu’au tréfonds et il faudra des années pour que le corail repousse.
Mollusques et poissons vont être affectés par la disparition de la forêt corallienne. Car, même mortes, les structures servent de caches et de piège à plancton. Lorsqu’il n’y a plus rien, les bêtes sont vulnérables. Habituellement, il faut deux ou trois ans pour que reviennent le corail. Mais lorsqu’il doit repartir de zéro et s’ancrer sur la dalle du fond, il va plus lentement. D’autant que certaines algues prennent déjà la place, empêchant toute construction ! Non seulement elles occupent le terrain mais elles cachent en plus la lumière. Or, sans socle solide et sans lumière, le corail ne peut pas se développer…
L’observatoire de l’environnement de Moorea surveille depuis trente ans douze sites, en Polynésie française et dans cinq autres îles que sont Tonga, Samoa, les Cook, Kiribati et Wallis. Tous les deux ans, des plongées permettent de mesurer la proportion de corail vivant sur celle de corail mort et l’abondance de la faune associée au massif corallien. La température de l’eau a augmenté de 0,5° C en dix ans.
Sans être un fanatique de la conservation des conditions présentes pour l’éternité (fantasme mystique de certains écolos), force est de constater que les conditions de résilience du corail sont désormais difficiles. La Polynésie est en train de changer… et d’autres cyclones sont régulièrement prévus !
Entretien avec Serge Planes dans la revue La Recherche d’avril 2010, n°440, pp.20-21, 6€ en kiosque.