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Poursuivons l’exploration de l’histoire de la Lettonie. Après la création du duché de Courlande (Kurzemes un Zemgales hercogiste) en 1561 – 1562 par son premier duc, Gotthard Kettler, évoquons Dorothée de Courlande et la vie mouvementée de la duchesse de Dino.
Histoire de la Lettonie
Le dernier duc de Courlande, Peter von Biron, régna de 1769 à 1795, date à laquelle (28 Mars 1795) le duché fut annexé par la Russie et où il se retira en Silésie, à Sagan. Peter eut six filles de sa troisième épouse, Anna Charlotte Dorothea von Medem, dont quatre survécurent. La quatrième, Dorothée, bien qu’ayant été reconnue par le duc, a toutefois vraisemblablement comme père biologique un homme d’Etat polonais, le comte Aleksander Batowski. Elle est née à Friedrichsfelde, près de Berlin, le 21 Août 1793 et fut élevée au Palais de Courlande, 7 Unter den Linden. C’est elle qui nous intéresse.
Dorothée de Dino |
Après les défaites prussiennes de Iéna et Auerstaedt, et l’entrée de Napoléon à Berlin, la famille s’exile brièvement à Mitau (Jelgava) en 1809 – 1807, endroit que la jeune Dorothée trouve « horrible, froid et inconfortable » ; mais elle y rencontre le comte de Provence, futur Louis XVIII.
Lors du congrès d’Erfurt (27 Septembre – 14 Octobre 1808), réunion entre Napoléon 1er et Alexandre 1er pour réaffirmer l’alliance conclue lors du Traité le Tilsit l’année précédente, Talleyrand (Charles-Maurice de Talleyrand-Périgord, prince de Bénévent), qui n’est plus Ministre des relations extérieure depuis Août 1807 mais qui conseille toujours Napoléon, qui cherchait une riche héritière pour son neveu, obtient du Tsar que celui-ci intervienne auprès de la duchesse Anna Dorothea pour favoriser le mariage du dit-neveu, Edmond de Talleyrand-Périgord, avec Dorothée, âgée alors de 15 ans (et qui aurait préféré le prince Adam Czartotyski, de 25 ans son aîné). Le mariage est célébré à Francfort-sur-le-Main les 21 – 22 Avril 1809, alors que les hostilités viennent de reprendre entre la France et l’Autriche (12 Avril 1809 : début de la cinquième coalition). Dorothée, d’éducation allemande, devient donc comtesse Edmond de Périgord, mais est plongée en milieu français, donc ennemi ; ses trois sœurs aînées n’assistent d’ailleurs pas au mariage.
Charles-Maurice de Talleyrand-Périgiord |
Bien qu’ayant eu trois enfants (Napoléon-Louis en 1811, Dorothée en 1812 et Alexandre en 1813), le couple aura un mariage malheureux, Edmond étant plus attiré par le jeu, la guerre et … les autres femmes. Leur vie conjugale s’arrête de facto avec le départ d’Edmond à la campagne de Russie. Néanmoins, Dorothée mettra encore au monde, le 29 Décembre 1820, Joséphine Pauline, dont la paternité est souvent attribuée à Charles-Maurice de Talleyrand, l’oncle, et en 1825 Julie-Zulmé dont on ne sait pas exactement qui est le père !
Depuis le congrès de Vienne (1er Novembre 1814 – 9 Juin 1815), où Charles-Maurice de Talleyrand représente la France, Dorothée est entrée dans l’intimité de son oncle par alliance. C’est elle qui fait les honneurs du palais Kaunitz où Talleyrand donne des réceptions brillantes qui participeront certainement au fait que la France sorte intacte du congrès. En 1816, Dorothée s’installe chez Charles-Maurice à Paris et ils ne se quitteront plus. Ils partagent leur temps entre Paris (que Dorothée n’aime pas) et Valençay où Charles-Maurice a acheté un château en 1803. Le 2 Décembre 1817, le Roi de Sicile dote Talleyrand du duché de Dino, une île au large de la Calabre. Comme le titre est immédiatement transmissible à ses neveux, Dorothée devient duchesse de Dino.
En 1924, Dorothée, qui avait déjà obtenu la séparation de biens, divorce d’Edmond, ce qui prête à la critique parisienne. En 1828, elle achète le château de Rochecotte, à Saint-Patrice (à l’ouest de Langeais), afin de se sentir vraiment chez elle. Elle s’y plait beaucoup, et elle est en outre plus proche de son amant du moment, Théobald Piscatory dont elle avait eu une fille, Antonine-Dorothée, née en 1827 et qui acheta au même moment le château de Chérigny dans la Sarthe. Elle suit toutefois Charles-Maurice de Talleyrand à Londres de 1830 à 1834, où il avait été nommé ambassadeur. Talleyrand meurt le 17 Mai 1838, entouré de Dorothée et de Pauline.
Un mot au passage sur Pauline. Elle épouse Henri de Castellane en 1839. Ils ont deux enfants : Marie Dorothée Elisabeth (1840 – 1915) qui épouse en 1857 le Prince Antoine Radziwill ; et Antoine (1844 – 1917) qui sera lui-même le père du fameux dandy Boni de Castellane (lequel passe son enfance au château de Rochecotte). Veuve en 1847, Pauline vit le plus souvent à Rochecotte où elle mène une vie simple et dévote. Elle décédera en 1890. Le souvenir de ses bienfaits reste encore vivace aujourd’hui à Saint-Patrice.
Le château de Rochecotte |
Il y aurait encore beaucoup à dire sur Dorothée de Dino. A partir de 1838, elle se partage entre Paris, Berlin, Rochecotte et Sagan qu’elle rachète en 1844 à son neveu, Constantin de Hohenzollern. En 1847, elle donne Rochecotte à sa fille Pauline de Castellane et résidera alors dans la principauté de Sagan, en Basse-Silésie, où elle possède 5 villes, 171 villages et 8 000 âmes et où son règne sera un bienfait. Venant encore parfois à Paris et à Berlin, elle finit toutefois sa vie dans la solitude et la mélancolie le 19 Septembre 1862, des suites d’un accident de voiture en Juin 1861.
A l’occasion des Journées du patrimoine 2012 (15 et 16 Septembre), mais aussi du 150e anniversaire de la mort de Dorothée de Dino, le château de Rochecotte, aujourd’hui hôtel-restaurant de grande qualité, accueillera une exposition et des conférences sur « Dorothée de Talleyrand-Périgord, duchesse de Dino » et sur « La Courlande et la France »
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je vous signale la parution d’un magnifique livre d’ Imants Lancmanis sur Anna Dorothea , la mère de Dorothee
Divine Dorothée.
La dernière duchesse de Courlande
À la fin du XVIIIe siècle en Courlande (l’actuelle Lettonie), la charmante Dorothée von Medem (1761-1821) épouse, à 18 ans, Pierre de Biron, dernier souverain de ce duché indépendant, de près de quarante ans son aîné.
Esprit cultivé acquis aux Lumières, célébrée pour sa beauté, la duchesse de Courlande est appréciée de tous. Elle tente de préserver le rôle de son pays dans le jeu diplomatique d’une Europe en plein bouleversement, travaille à réconcilier son mari avec la noblesse courlandaise soucieuse de ses libertés, mais ne parvient pas à donner un héritier mâle au duché.
Amie des philosophes et muse des artistes, cette femme exceptionnelle séduit la société aristocratique et intellectuelle de son temps, à la cour de Russie, à Berlin, à Paris ou en Italie.
Après l’abdication du duc, elle séjourne en France et devient l’amie et la confidente de Talleyrand. Elle marie alors sa dernière fille, la future duchesse de Dino, avec le neveu et héritier du célèbre diplomate, d’où une importante descendance française.
À travers des centaines de reproductions, cet album retrace la vie de la “divine Dorothée”, à la charnière des Lumières et du romantisme. Il présente les lieux où elle vécut ainsi que de très nombreux souvenirs, peintures et documents la concernant. Cette iconographie exceptionnelle et souvent inédite sert de trame à un récit érudit et captivant.
Historien de l’art letton, Imants Lancmanis (né en 1941) fut directeur du musée du château de Rundāle de 1976 à 2019. Il est l’auteur de plusieurs ouvrages sur l’architecture baroque et sur l’art des XVIIIe et XIXe siècles en Lettonie. Divine Dorothée est son premier livre traduit en français.
Illustré de 345 photos. Index de près de 500 noms. Tableaux généalogiques.
Préface de David Gaillardon.
Paris, Lacurne, 2021. In-4, 19,5 x 25,5 cm, cartonné, 424 pages. 55 €
Signature de l’ouvrage par l’auteur
le mardi 21 septembre à partir de 18 h 30
à la Librairie Lardanchet
100, rue du Faubourg Saint-Honoré ; Paris VIIIe