SEX x FRIEND ? est un court métrage japonais de Katsuhide Yamago traitant de la solitude chez les homosexuels à travers une histoire d’amis avec des bénéfices.
Le poids de la solitude : une vision homosexuelle du Sontaku au Japon
A voir avant que le court-métrage Sex x Friend ? ne quitte prochainement la plateforme Gagaoolala. Autant je suis une grande fan de la plupart des séries BL japonaises, de beaucoup de films, mais je n’ai guère trouvé de court-métrages vraiment impactants parmi les oeuvres que j’ai croisées. SEX x FRIEND ? est la 1ère partie d’une histoire dont la suite est proposée dans HIV × Love? qui comme son nom l’indique prolonge la réflexion sur fond de positivité au VIH, de sentiment de peur et d’exclusion dans une société comme la société japonaise, où la séropositivité reste très stigmatisée …
Réalisé par Katsuhide Yamago SEX x FRIEND ? sonde l’inextricable solitude à la limite de la dépression d’un jeune homme pour qui le sexe semble avoir une fonction apaisante même si c’est très illusoire et instantané. C’est donc les retrouvailles de deux sex friends, Hayato et Jiu, pas tout à fait que des amis mais pas des amoureux potentiels, seulement des amants périodiques qui soulagent ensemble l’urgence de leurs besoins. L’un aimerait plus. L’autre est en quête d’amour sans toujours savoir ce qu’il met sous ce terme.
En 10 min, on ressent très bien l’errance émotionnelle, la quête idéale vaine, le pouvoir éphémère de la sexualité pour oublier le vide de sa vie avec une scène charnelle très crue et tellement représentative de l’état d’esprit de ses protagonistes… Ce film m’évoque surtout la peur de perdre le seul refuge envisageable et fait un écho douloureux à l’impuissance, que peut générer la solitude en tant que poison insidieux permettant de refuser ce à quoi on aspire vraiment.
Katsuhide Yamago livre une vision homosexuelle assez personnelle du sontaku, un phénomène qui n’est pas seulement présent au Japon mais qui atteint là-bas un niveau assez alarmant. Il s’agit d’une forme de conjecture ou de supposition sur les sentiments d’autrui pour « lire l’atmosphère et de savoir quand se retenir, pour ne pas franchir la frontière » et de ne pas engager une trop forte intimité, évaluée davantage en terme d’investissement émotionnel que par rapport à la sexualité, à cause de la pression des conventions sociales. Au risque de bloquer et de se priver de l’opportunité d’une vraie relation.
HIV x Love ? : l’appréhension de la séropositivité
HIV x Love ? est donc la suite de Sex x Friend ?. Ce court métrage, primé dans plusieurs festivals, prolonge la réflexion autour des comportements à risques, et de la séropositivité, puisque Yuto poursuit ses aventures sexuelles en privilégiant les rapports protégés jusqu’à ce qu’il cède à un partenaire et apprenne dans la foulée que Hayato a été testé positif.
Si Sparkle est la quintessence de son travail, Katsuhide Yamago, le réalisateur, confesse qu’il s’agit ici de son oeuvre la plus personnelle, puisqu’il s’est inspiré de sa propre histoire et a restitué le plus fidèlement possible les échanges avec un ami pompier. Certes, dans certains pays, le sida est devenu une sorte de maladie chronique presque banale avec laquelle on vit en prenant des médicaments, mais au Japon, la stigmatisation reste très forte et le sentiment d’isolement et d’incapacité à pouvoir poursuivre une vie normale domine chez beaucoup de gays séropositifs. Incarnés par Ep et Kei, les protagonistes sont toujours aussi directs et efficaces dans leurs interactions.
La peur, la solitude intense, le sentiment que la mort vient remplacer la quête d’amour comme perspective, la détresse face à la situation de Hayato et l’impression de voir sa vie sexuelle condamnée (malgré les préservatifs), sont évoquées en quelques minutes touchantes, qui montrent bien que même face à un amant ami, le sida est une épreuve qu’il est difficile de partager, même si Yuto s’efforce de rassurer et de distraire son ami de son mieux. Les échanges sont très simples et naturels lors de cette balade au bord de l’océan qui avec peu de choses restitue la véracité du drame personnel que constitue l’annonce de la séropositivité. Les dialogues ne cherchent à pas à donner une leçon de morale, mais juste à transmettre un état d’âme dans une expérience critique et une appréhension d’une maladie, qui reste toujours excluante.
Sélections et prix : Rainbow Reel Tokyo: Tokyo International Lesbian & Gay Film Festival 2018, KASHISH Mumbai International Queer Film 2018, Five Continents International Film Festival 2018
Où visionner Sex x Friend et Hiv x Love ?
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