Dr Romantic Teacher Kim : un formidable drama coréen médical sur fond de romance

Dr Romantic, Teacher Kim (Nangmandakteo Kimsabu / 낭만닥터 김사부) est un excellent drama coréen médical en 2 saisons de 20 épisodes de 60 min qui vous réserve une plongée dans l’univers des urgences en Corée du Sud, tour à tour dans un prestigieux hôpital de Seoul et dans un petit hôpital de campagne dépourvu de tout : l’hôpital Doldam. Un petit bijou d’émotions empreint d’humanisme, conjuguant avec brio réalisme des scènes d’action et des actes médicaux ou chirurgicaux en immersion et décryptage de la société, romantisme attendrissant et leçons de vie tout en justesse, sans échapper à une critique du système social et médical coréen.

A découvrir sur Netflix jusqu’au 14 Octobre 2022 et également sur Viki et sur Dramapassion. Alors n’attendez pas pour la dévorer! Elle est géniale !

Dr romantic : une formidable équipe autour d’un personnage exceptionnel

Captivante, et même addictive, cette fiction diffusée en 2016 sur SBS bénéficie d’une superbe réalisation de Yu In Sik et d’une écriture ciselée du scénario et des personnages imaginés par Kang Eun-Kyung. La scénariste n’a pas seulement réussi son trio de protagonistes, mais elle a soigné la personnalité et les expériences de ses personnages secondaires qui forment une équipe redoutablement efficace, où chacun, à sa manière, contribue à la solidarité, la cohésion et au bon fonctionnement voire parfois au sauvetage de l’hôpital Doldam …. Malgré les décors vieillissants quelque peu miteux et l’environnement en apparence peu avenant, tout donne envie de s’attacher à cet hôpital de province et à sympathiquer avec son équipe si impliquée, aux antipodes avec les gros blocs ultra formatés et hyper modernes des grandes villes. Ce lieu que la plupart des mutés ont envie de quitter au début devient plus qu’un hôpital : une famille mue par des idéaux.

Dr romantic est portée par le charisme du personnage de Boo Yong Joo / professeur Kim (interprété par le bluffant Han Seok Gyu), un chirurgien brillant et atypique, entêté, au fort caractère, qui un jour a disparu d’un hôpital de Seoul après des manoeuvres de l’institution, alors qu’il était promis à une carrière prestigieuse. Faute de se racheter d’une erreur qu’il ne se pardonne pas quand il était encore un professionnel soumis aux injonctions du système, il engage toute son existence au seul combat qu’il juge honorable et qui lui permet de devenir meilleur : se dédier à ses patients et tout faire pour les sauver. A ses côtés, Kang Dong Ju (charmant Yoo Yeon Seok), jeune chirurgien au parcours scolaire exemplaire, un peu tête à claque, déterminé mais partagé entre son idéal de sauver des vies et l’objectif d’atteindre ses ambitions dans un système discriminant qui ne reconnaît jamais les plus pauvres et Yun Seo Jeong (Seo Hyeon Jin très attachante), chirurgienne passionnée tourmentée par un drame survenu quelques années auparavant quand elle a fait la connaissance de Kang Dong Ju et en quête de reconstruction pour faire face à ses démons personnels. Leurs alliés comme leurs adversaires, des plus farouches aux plus serviles, complètent une palette de personnages certes très normés, mais tous essentiels et enthousiasmants pour garantir l’efficacité des effets dramatiques et comiques, parsemés tout au long de chaque épisode.

Tous les épisodes sont d’une grande qualité et fluidité : ils alternent à merveille l’univers professionnel et ses aléas entre salles d’urgences, bloc opératoires et couloirs ou salles de repos et les rares moments que le personnel peut s’accorder en privé. Ils dépeignent un portrait édifiant de la société coréenne avec une fine analyse des relations humaines, d’autant plus éclairantes que les situations graves révèlent les côtés plus sombres et faibles des personnes impliquées directement ou pas. A la faveur d’une réalisation musclée surtout dans la première moitié de la saison 1, le rythme est intense, pour ne pas dire intensif, au point qu’on ait presque l’impression parfois d’être dans le bloc ou la salle en train s’immerger au plus près des patients et de participer aux opérations. On ne s’ennuie pas une seconde, mais surtout, on est empporté dans un tourbillon d’émotions passant ainsi des sourires et des rires aux larmes en permanence. Dès les premières minutes, on est happé par l’histoire ou plutôt entraîné par le flot des histoires du quotidien – car il n’y a pas qu’une intrigue, mais un fil conducteur autour duquel on déroule les situations et explore les difficultés et épreuves d’un petit hôpital provincial : accidents domestiques, abus de l’armée, carambolage, accidents spectaculaires, opérations rares, épidémie, tout y passe. Quelques personnages plus folkloriques offrent des scènes cocasses et divertissantes pour contrebalancer avec le climat oppressant de l’hôpital.

En premier ou en arrière-plan, on n’échappe pas aux conflits de personnes notamment grâce à la rancune entre Boo Yong Joo / professeur Kim et son ancien supérieur et aux manigances des puissants et de l’institution qu’ils protègent pour leurs intérêts financiers et personnels. La spectatrice curieuse que je suis a eu de plus en plus envie de suivre l’itinéraire de chacun face aux situations et aux dilemmes rencontrés et pas seulement la destinée des héros. Plus on pense cerner un peu mieux le Professeur Kim, entre quelques souvenirs qui recomposent son passé et permettent de comprendre la trajectoire par laquelle il est devenu qui il est, plus il surprend, se dépasse et excelle dans la dramaturgie et l’approfondissement des émotions et surtout il pousse les personnages à s’interroger sur leurs choix et la liberté qu’ils ont face à leurs actes ou leurs renoncements, plutôt que de se placer dans une position victimaire facile.

Une jolie romance à la fois tendre et passionnée

Contrairement à ce que j’imaginais, la romance entre Kang Dong Ju et Seo Jeong que l’on entrevoit dans le premier épisode, avec un baiser volé si prometteur et magnifiquement réussi, inerve toute la série avec une évolution parfaitement dosée et stimulante. Tout d’abord en filigrane, elle prend peu à peu son envol vers la moitié de la première saison et occupe de plus en plus de place, apportant aussi un souffle plus humoristique et des touches de légèreté bienvenues dans cet hôpital exposé à une telle succession de chaos et de moments de surtension.

Cette approche permet pleinement d’explorer les nuances de chaque personnage et les liens qui se tissent au fur et à mesure qu’ils évoluent et se confrontent à eux-mêmes. La complicité entre ces collègues devenus des quasi étrangers, puis des amis et de plus en plus proches au fil des épisodes saute aux yeux dès les premiers échanges de regards. Malgré l’obstacle initial qui va faire basculer la destinée des personnages et densifier leur relation psychologique, puis toutes les tentatives de Kang Dong Ju pour percer à jour les sentiments de Seo Jeong, on ressent toute l’affection et la bienveillance que les héros éprouvent et tout ce qu’ils sont prêts à consentir comme sacrifices pour être proches, veiller l’un sur l’autre et se protéger. Impossible de lutter contre une telle évidence.

La relation dans la première saison de Dr Romantic a beaucoup de charme, car elle s’appuie sur l’attente respecteuse et sur l’apprentissage de chacun face à ses erreurs de débutant et le difficile équilibre entre vie professionnelle et personnelle, quand on ne s’appartient plus vraiment et se dédie totalement à son métier. L’alchimie entre les héros rend leurs scènes en commun très touchantes, y compris lors des tensions qui peuvent les opposer. Grâce à des jeux de lumière très bien travaillés, les scènes de baisers sont exquises et tout le romantisme insufflé dans les 21 épisodes se trouve presque condensé dans la toute première embrassade qui prend un peu le spectateur par surprise, mais donne le la aux rapprochements tout aussi réussis par la suite.

Des réflexions sur l’éthique médicale et la morale personnelle des médecins

Dr Romantic est très riche en réflexions sur l’éthique médicale, la morale personnelle et sur le sens à donner à son métier de médecin dans une Corée très formatée, où les hôpitaux modernes des grandes villes ont des conditionnements et des règlementations, qui génèrent discriminations et injustices et entretiennent ambitions et carriérisme, rentabilité et judiciarisation, au détriment de la santé et du bien-être des patients. Elle sonde l’humanité des médecins et par effet miroir ce que peut être la robotisation et la servilité de certains professionnels par confort personnel et l’inhumanité inhérente à la compétition qui régit la majorité des relations professionnelles et ce, dès l’école. L’épatant Professeur Kim aux méthodes déconcertantes n’a pas son pareil pour nous embarquer dans ses idéaux, défendre ses convictions quitte à défier les plus hautes autorités et se mettre en danger. Son courage et sa noblesse de caractère, malgré certains de ses comportements dignes d’un Dr House mélangé à un Good Doctor, forcent l’admiration, autant que la justesse des leçons qu’il délivre sans moralisme et sans jamais imposer la moindre certitude pour mieux laisser les personnages tracer leur chemin et comprendre qu’ils ont le choix, même s’ils sont persuadés de ne pas l’avoir à cause de la façon dont la société coréenne et le système médical en particulier sont organisés et conditionnés. La confiance dans l’engagement pour servir les autres avant soi-même et la liberté de choix sont les clés de sa pédagogie.

Qu’est-ce qui fait un bon médecin et comment le devenir si on ne se connaît déjà pas soi-même ? La question parcourt l’ensemble de l’oeuvre à travers des situations et des cas de conscience qui obligent à se demander s’il est si important d’être le meilleur médecin et comment parvenir à trouver sa voie en restant fidèle à ce qu’on est… Un médecin doit-il et peut-il prendre parti face à un patient, quel que soit son statut et les agissements dont il s’est rendu responsable ? Si le serment d’Hippocrate ne laisse aucun doute sur la réponse à donner, la confrontation à la réalité et la rencontre entre victimes et coupables s’avère peut-être moins évidente. Nos chers médecins et aides soignants n’échappent pas au puissant sentiment de culpabilité, à la peur, aux mensonges ou aux actes de lâcheté qu’on peut être tenté de faire en croyant faire progresser sa carrière, aux doutes sur les choix qu’ils font pour leurs patients et à la gestion des émotions quand l’issue n’est hélas pas celle espérée.

Dr Romantic est une pépite surprenante, lumineuse et trépidente. Entre deux interventions médicales ou chirurgicales qui ne cachent pas grand chose de la réalité des Urgences, s’y entremêlent rires et larmes, doutes, remises en question et convictions, drames et moments plus légers, histoires d’amour et amour de son métier, des relations fortes entre personnages avec un méchant de l’histoire plus convenu, mais qui met bien en lumière le fonctionnement du système médical et hospitalier coréen et hélas beaucoup des conséquences inhérentes à la gestion par la concurrence, l’argent, le légalisme, l’optimisation et la rationnalisation à outrance. Le questionnement des méthodes et des principes est passionnant. Si comme moi vous n’aviez pas été très tentés par Dr Romantic à cause du titre suggérant une sorte de comédie romantique un peu niaise ou un nanard dans le milieu médical, une sorte de Grey’s anatomy à la sauce coréenne, il n’en est rien. Foncez! Vous ne le regretterez pas. La série est un divertissement de référence dans son domaine : la 2ème saison réalisée 4 ans plus tard a confirmé son succès populaire (27,1% d’audience pour le final, 27,6% pour la saison 1) et une 3ème a été annoncée pour 2023.

Pas encore convaicus? N’hésitez pas à lire la très bonne critique de Romantic Doctor Teacher Kim chez Stellarsisters.