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Ce vendredi 2 Novembre a lieu à Peynier (13790), au Rocher de la Garenne / Sentier des Volontaires ukrainiens, une cérémonie en hommage aux légionnaires ukrainiens qui, en 1940, s’étaient engagés dans l’Armée française. De quoi s’agit-il ?
De tous temps, l’Ukraine fut l’objet des convoitises de ses voisins proches et d’envahisseurs plus lointains, tartaro-mongols, moscovites, turcs , polonais, autrichiens, allemands, russes et même lituaniens (de 1345 à 1569) !
A partir des trois partages de la Pologne-Lituanie (1772, 1793 et 1795), la nation ukrainienne est scindée en deux entités distinctes, l’une dépendant de l’empire russe, l’autre de l’empire autrichien. Après la période troublée qui a suivi la Première Guerre mondiale, la révolution bolchevique et une éphémère indépendance (22 Janvier 1918), la partie ex-autrichienne, avec Lviv comme ville principale, est intégrée à la Pologne en 1921, et la partie ex-russe, avec Kyiv comme capitale, est intégrée à l’URSS créée en 1922. L’Ukraine transcarpatique vote son rattachement à la Tchécoslovaquie et la Bucovine le sien à la Roumanie.
Le traité de Versailles faisait obligation à la Pologne de donner une large autonomie à la Galicie peuplée d’Ukrainien, ce qu’elle ne fera jamais. L’Ukraine soviétique connaîtra, elle, un calvaire sous la dictature stalinienne, avec notamment l’Holodomor, génocide par la faim, en 1932 – 1933.
Après l’invasion de la Pologne en Septembre 1939, conformément à l’accord Molotov – Ribbentrop, une République Socialiste Soviétique d’Ukraine sera formée en Août 1940.
Le 15 Septembre 1939, l’Ambassadeur de Pologne en France lance un appel à la mobilisation de tous les ressortissants polonais en France, y compris donc les Ukrainiens possédant un passeport polonais. Ces derniers se retrouvent devant un dilemme : soit refuser leur incorporation dans l’armée polonaise qui occupait leur nation et les traitait en citoyens de seconde zone, soit accepter de la rejoindre en dépit de leur idéal d’indépendance.
En effet, le 4 Janvier 1940, un accord est signé entre le Président du Conseil français, Edouard Daladier, et le général Wladyslaw Sikorski, chef des armées polonaises exilé en France, pour la constitution d’une armée polonaise de 84 000 hommes sous commandement en chef de l’armée française. A noter que, en vertu de cet accord, les engagements des Ukrainiens, qu’ils soient citoyens polonais ou tchécoslovaques, dans la Légion Etrangère sont rejetés.
Le général Wladyslaw Sikorski |
Pourtant, la ténacité des Ukrainiens, et notamment du Bureau de l’Union Nationale Ukrainienne, finira par payer, et ils auront alors le choix de s’engager soit dans l’armée polonaise, soit à la Légion Etrangère. Sur 7 000 dossiers de volontaires, ce sont ainsi 5 000 Ukrainiens aptes au service qui vont rejoindre principalement les 21e, 22e et 23e Régiments de Marche de Volontaires Etrangers (RMVL). Ils vont participer à la Campagne de France dans les Flandres, sous Sedan, sur la Somme (Mai 1940) et jusque sur la Saône (Juin 1940), laissant sur les champs de bataille des centaines de tués. On assistera même au paradoxe que la dernière résistance « pour l’honneur de l’Armée française » dans la région de Lyon, le 19 Juin 1940, ait été l’œuvre des Légionnaires ukrainiens d’un Bataillon de marche formé à Sathonay et des Tirailleurs du 25e Régiment de Tirailleurs Sénégalais, au sein d’un groupement aux ordres du Général de Mesmay. (Rappel : le Maréchal Pétain a demandé un armistice aux Allemands le 17 Juin).
Le 19 Juin 1940 à 16H10, les Allemands entrent dans la Préfecture de Lyon. Toute résistance devient inutile et les légionnaires survivants se replient sur Grenoble afin d’échapper à la capture et éventuellement rejoindre une autre zone de défense.
A suivre……
Après l’armistice
Depuis le 20 Juin 1940, les légionnaires ukrainiens battent en retraite après les combats pour la prise de Lyon. Ils arrivent le 22 Juin vers midi à Grenoble sans s’y arrêter, de façon à ne pas être pris par l’ennemi.
Le lendemain, ils apprennent que la convention d’armistice franco-allemande a été signée le 22 Juin 1940 à 18H30, dans la Forêt de Compiègne, dans le wagon de l’armistice de 1918. Les combats prennent fin et, le 25 Juin 1940, la France est coupée en deux par la ligne de démarcation, véritable frontière entre la zone occupée au nord et la zone libre au sud. La veille, 24 Juin, à 22H, les légionnaires ukrainiens étaient arrivés en train à Aix-en-Provence. Ils sont approximativement 950.
Le 27 Juin au matin, les Ukrainiens partent à pied vers la petite ville de Fuveau (immédiatement à l’est de Gardanne, donc au nord-est de Marseille). La guerre est finie mais, pour autant, les légionnaires ukrainiens ne sont pas démobilisés, alors que la démobilisation des unités françaises a commencé. Le bruit court, même, qu’ils pourraient être envoyés au Maroc.
Le 8 Juillet, à l’occasion d’une marche vers le village de Peynier(à 8 km à l’est de Fuveau), les Ukrainiens décident de sculpter un Tryzub (Trident, blason de l’Ukraine) sur un rocher, le rocher de la Garenne, en souvenir du séjour en ces lieux de 8 à 900 légionnaires ukrainiens. Les gravures, à la symbolique ukrainienne et légionnaire, ont été vraisemblablement terminées le 16 Juillet 1940 et seraient l’œuvre d’Ivan Kurok.
Ce n’est qu’à partir de la fin Juillet 1940 que les légionnaires ukrainiens recevront leurs ordres individuels de démobilisation, accompagnés d’une prime. C’est une nouvelle fois l’occasion pour les Ukrainiens de protester auprès des autorités administratives françaises qui ont inscrit « Polonais » dans la case de la nationalité. Certains devront attendre le mois d’Août, voire plus tard, pour être rendus à la vie civile.
Certains Ukrainiens reprendront le combat en 1944, rejoignant la Résistance ou, à nouveau, la Légion Etrangère, afin de ne pas être rapatriés de force dans une Ukraine devenue soviétique, exemples de la reconnaissance et de l’intégration d’immigrés ukrainiens devenus « fils de France, non par le sang reçu mais par le sang versé ».
Le 30 Juin 2007, la municipalité de Peynier a inauguré le « Sentier des volontaires ukrainiens » et, le 2 Novembre 2008, la Légion Etrangère a apposé une plaque commémorative au pied du rocher de Peynier, commémorant les volontaires ukrainiens. Depuis, une cérémonie a lieu chaque 2 Novembre à l’initiative de l’ADVULE (Association des Descendants des Volontaires Ukrainiens de la Légion Etrangère).
NB : articles largement inspirés du livret de 51 pages « Légionnaires ukrainiens à Peynier », de Jacques Chevtchenko, dont il peut être fait l’acquisition auprès de l’ADVULE.
Photos des cérémonies d’hommage du 2 Novembre
Voici ci-dessous quelques photos prises pendant les cérémonies qui ont eu lieu le 2 Novembre à Peynier (Bouches-du-Rhône) en hommage aux volontaires ukrainiens engagés dans la Légion Etrangère en 1940.
de g. à dr. : MM Pinier et Siegel, de la Fédération Nationale des Combattants Volontaires, le Général de Saint Chamas, commandant la Légion Etrangère, Mme Annick Bilobran , Présidente de l’ADVULE, M. Vozdigan, Condul d’Ukraine à Marseille. |
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