Ici on noie les Algériens, film documentaire de Yasmina Adi, revient sur la répression sanglante de la manifestation du 17 octobre 1961.
Film documentaire historique
Le rassemblement du 17 octobre 1961 avait pour but de manifester contre le couvre-feu imposé à la population algérienne vivant en France. Il fut brutalement réprimé et une véritable chasse à l’homme s’organisa dans les jours qui suivirent. Il y eut beaucoup de morts, beaucoup de blessés et des reconduites manu militari en Algérie. Puis le silence tomba.
Ce documentaire donne la parole à ceux qui ont manifesté ainsi qu’aux femmes qui n’ont jamais vu revenir leur proches. L’ennemi, comme le nomme l’une des témoins, n’est visible que par des bandes sonores appelant les forces de police à arrêter le plus de manifestants. Si je reconnais à ce documentaire sa qualité esthétique et la cohérence de sa ligne (ne donner la parole qu’aux victimes),
j’avoue avoir ressenti des manques lors de sa projection. Tout d’abord la musique m’a gênée à quelques reprises et j’ai du mal avec les éléments de mise en scène dans les documentaires historiques. J’ai toujours l’impression que cela pollue le propos. Ensuite donner la parole aux victimes est compréhensible, mais cela ne permet pas d’avoir une vision complexe, exacte de ce qui s’est passé. On cherche dans ce documentaire les traces de commanditaires, on s’étonne de l’évocation des harkis en parlant des forces de police, on comprend à demi la chronologie des faits.
La réalisatrice a présenté ce documentaire comme un travail mémoriel et non historique. Ce qui est effectivement le cas, mais personnellement le mémoriel sans le travail historique 1. ne m’intéresse que très peu (j’ai appris deux, trois choses sur cette soirée du 17 octobre 1961, mais je voudrais maintenant en savoir plus sur Papon, sur la présence des Harkis, etc.) 2. me parait vide, superficiel. On oppose souvent les deux démarches, or on peut parfaitement retranscrire la mémoire d’un fait, d’un témoin en l’accompagnant, en l’incluant dans une recherche historique. C’est ce que fait Lanzmann par exemple quand il s’entretient avec les survivants de Sobibor et lorsqu’il lit à la fin de son documentaire l’intégralité des comptes des exécutions du camp.
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