Voyage Armenie. Le monastère Noravank est situé dans le sud de l’Arménie dans une gorge aux paysages superbes. Ce monastère, également nommé Noravank d’Amagh(o)u, (en arménien Նորավանք, littéralement le « nouveau monastère ») daterait des IXème et Xème siècle, pour ce qui est de l’église originelle, mais le complexe a été agrandi et refondé entre les XIIème et XIVème siècle, pour devenir le le mausolée des princes Orbélian.
Voyage Armenie : Monastère Noravank
Le monastère Noravank recèle dans le gavit (salle de réunion) les mausolées de rois. La transmission du trône ne s’effectuait pas forcément par droit d’aînesse mais le roi choisissait le fils qui jouait le mieux aux échecs. C’était la garantie d’un esprit réfléchi apte à la stratégie, ma foi pas une mauvaise façon d’assurer sa succession ! Endommagé par le tremblement de terre de 1321, le moutier fut reconstruit probablement par Momik, l’architecte des princes Orbélian.
On observe surtout les deux sculptures réalisées par lui sur le tympan : la Vierge à l’enfant aux ornements de lettres arméniennes liés de feuilles de vigne et de fleurs et, sur la fenêtre supérieure, Dieu, le Christ et Adam. L’humain a la tête caressée par le Père tandis que la colombe lui envoie son souffle. Une vraie bande dessinée pour les chrétiens : Dieu donne la vie aux humains, puis la vie éternelle avec son Fils.
Des inscriptions datent de 1232 et 1256 sur la partie inférieure des murs qui a résisté aux séismes. Sur une pierre tombale un chevalier attaque un lion – allégorie du prince Orbélian Elikoum, surnommé le Lion. Il reste quelques traces de fresques en rouge et noir. Sur une autre, un lion case son corps dans l’étroit rectangle ; il est obligé à de curieuses contorsions pour présenter sa tête de face.
L’architecte Momik, qui était également écrivain, miniaturiste et architecte, a sculpté lui-même sa pierre tombale avant de mourir. Il serait né vers 1260 et mort vers 1339 ; il a été le peintre et l’architecte de la famille des Orbélian. Par rapport aux tombes royales et princières, la sienne est toute petite et bien plus sobre, placée à droite de l’église. Il est écrit : « Souviens-toi, Christ, et bénit l’âme de Momik ». Humilité chrétienne, bien qu’il ait prénommé son fils Askandar – Alexandre. Ses khatckars (croix) de Noravank sont si finement sculptés qu’ils ne sont plus sur site mais dans les musées.
Les familles en visite, aujourd’hui, n’ont plus le sens du sacré. Elles parlent dans le sanctuaire, entrent les épaules nues, boivent entre les chapelles, grimpent ici ou là. Les vieilles tombes sont un chez eux, les églises sont à elles ; elles y vivent comme dans leur maison, sans plus de façons. Je prends en photo une jeune fille aux traits doux qui se fait photographier par sa sœur dans l’église, près de l’autel.
Un escalier étroit grimpe sans parapet par un double rang de marches en trapèze, jusqu’au premier étage de l’église Surb Astvatsatsine créée par Momik en 1339. Les parents y placent souvent leurs petits pour faire la photo souvenir. Facile à monter, il est beaucoup plus difficile à redescendre : nombre sont piégés par le vertige, les filles plus que les gars. J’en ai vu redescendre sur les fesses, en fermant les yeux et se raclant l’épaule au mur. Punition de Dieu pour la frivolité ambiante ? Cet étage à l’escalier aérien servait aux moines à prier et à recopier des manuscrits.
Le soleil vertical délivre une chaleur de four et toute ombre est bienvenue, même de pierre. Les photos familiales sont l’occasion de grimaces face au ciel incandescent. J’en profite pour prendre des visages immobiles qui ne me regardent pas.
Nous prenons un déjeuner de salades et poulet frit sous la tonnelle du restaurant près de l’enceinte. Il y a même cette fois-ci des herbes aromatiques telles que coriandre, persil plat et aneth frais, et de la betterave rouge râpée à la crème aigre, tous ingrédients et préparations typiquement russes.
Nous reprenons le bus, heureusement climatisé. Nous buvons tout ce que nous pouvons acheter comme bouteilles d’eau de source de 50 cl. Dans les voitures arméniennes, les enfants sont torse nu ; ils n’enfilent une chemise ou un débardeur que lorsqu’ils sortent : peu de peau en public. Les petites filles n’ont pas cette aise, elles doivent rester habillées comme elles sont.
Le diesel peine à grimper jusqu’aux 2330 m du col Saravan. Le chauffeur coupe plusieurs fois la climatisation pour gagner de la puissance. Nous effectuons un arrêt au col. Un monument pompier y a été érigé à l’époque soviétique, comme si la route était une victoire humaine sur la nature. Les familles ne dédaignent pas de se faire photographie devant… D’un tuyau coule une source fraîche et personne ne manque de venir remplir ici sa bouteille.
L’altitude permet à l’herbe de rester verte tandis que les basses plaines sont desséchées sauf près des rivières. Les paysans locaux sont venus vendre leurs fruits au col, près de la source. Notre guide arménienne nous achète pour quelques drams un sac d’abricots. Ils sont pâles mais bien mûrs et parfumés. L’inverse de ceux qu’on trouve à Paris, bien oranges mais durs et encore verts !
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