J’ai tendance à parler de choses sérieuses – c’est dans ma nature réactive et dans mes gènes de capricorne. Au point que j’en ai oublié que la Thaïlande était un pays de vacances, de farniente, de retraites ensoleillées, de plages à cocotiers et de bars, de rencontres faciles, de mariages rapides – heureux ou pas – d’amours éternelles d’une nuit ou d’une heure – tarifées ou pas – de paysages sublimes dans le sud, – the « Deep South » comme ils disent – où des insurgeants islamiques jouent avec des explosifs qui font des morts presque chaque jour… mais qui va en vacances à Yala ou Narathiwat ? Qui connaît seulement le nom de ces provinces ?
C’est un très beau pays la Thaïlande, très accueillant. On y revient toujours lorsqu’on y a goûté. On est bluffés, nous français, venus de ce pays de râleurs, de sempiternels mécontents, de petites phrases et de grosses polemiques. On se dit – éblouis – que le bonheur existe. On l’a rencontré ! Ici ce n’est pas comme dans la rengaine de ce chanteur « c’est quand le bonheur ? » Le bonheur en Thaïlande c’est ici et maintenant. Dès la descente d’avion pour nous, touristes, passants, résidents, explorateurs, trekkeurs sur les chemins balisés ou non de ce pays défrichés par les GI’s il y a plus de 40 ans (on leur doit Pattaya, sublime ex petit port de pêche. Pattaya devenu un endroit où l’on pêche autre chose que le poisson (tok plaa). On « tok farang » ici. Mais si par inadvertance j’écris « farang tok » au lieu de « tok farang » ce n’est plus « pêche au farang » mais « farang tombe »… Ça arrive, surtout à Pattaya.
Mon père soutient toutes les causes de la terre, à chaque fois que je lui rends visite il est en train de signer des chèques pour des associations. Et elles sont multiples. « Pourquoi » me demande-t-il « je ne reçois pas de demandes pour la Thaïlande ? » C’est vrai la Thaïlande n’est pas un pays pauvre. C’est même un pays assez riche, mais avec des richesses mal réparties. Un pays où on ne croise quasiment que des 4×4 que les français ne peuvent plus se payer (réflexion de mon « chéri » arrivant à Paris : « pourquoi les français n’ont que des petites voitures » ?) Oui la Thaïlande est un pays riche pour un petit pourcentage de la population, les bien-nés (qui se prennent pour l’élite) contre les pauvres (qu’on traite de « khwaï : buffle)
Alors pourquoi sont-ils heureux les thaïlandais ? Parce que c’est bien ce qu’ils donnent à voir non ? Parce qu’ils ne savent pas pleurer, parce qu’ils ne savent pas qu’ils ont des droits, parce qu’ils sont habitués à une justice à deux vitesses dans leur pays où l’on absout certains criminels à l’occasion de la fête de papa, alors que ceux qui ouvrent trop la bouche peuvent être dénoncés et emprisonnés avec chaines aux pieds.
Alors toujours heureux les thaïs ? ils se taisent parce qu’on leur a appris depuis la naissance à respecter les riches. Et quand on ne peut pas parler, s’exprimer… reste l’alcool. Ils sont heureux à ce prix les thaïs ! Depuis 20 ou 30 ans, la consommation d’alcool c’est la fuite, l’oubli… et le plaisir immédiat. Smile, smile, smile.
Le docteur Paritat Sipakit du « Suan Preung Psychiatric Hospital » de Chiang Mai que j’ai consulté alors que j’écrivais « là où s’arrêtent les frontières » (un de mes personnage s’y fait soigner.. dans la fiction bien-sûr), m’expliquait : « La consommation d’alcool et ses myriades de conséquences mène aux problèmes mentaux… et le pire c’est que cette consommation d’alcool n’est pas contradictoire avec la culture. Alors c’est ok… et les femmes, les filles s’y mettent aussi. Cela mène à des taux de suicide élevé. (Sans parler des accidents). Chiang- Mai, Lamphun, Lampang, Chiang Rai ont le taux de suicide le plus élevé de toute la Thaïlande ».
Le bonheur a un prix.
Le sourire a un prix.
Le silence a un prix.
Mon « cheri » qui se refugie dans le silence…. Dans le sommeil. Ou la meditation.
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