L’Algarve, pour moi, c’était le soleil, les plages interminables, les falaises dorées, et les cheminées de style mauresque. Mais ça, c’était avant… avant d’aller voir sur place. Et de découvrir une région infiniment plus variée et attachante. D’ailleurs, depuis mon retour je suis encore sous le charme, oui j’ai la saudade…
Il faut bien l’avouer: la côte sud-ouest de l’Algarve, très touristique, est un peu défigurée par le développement d’un urbanisme anarchique. De plus, l’été, elle est surpeuplée. Autant de raisons pour s’en éloigner : on découvre alors des endroits pleins de charme, de magie, et de mystère. Certains, comme Tavira, ont acquis une certaine notoriété. Mais la plupart de ceux que je vous propose ici restent encore largement méconnus et préservés des foules.
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Silvès, capitale maure
Comme on le sait, le sud de la péninsule ibérique fut occupé par les musulmans pendant près de cinq siècles. Silvès était leur capitale en Algarve. Bien que la ville fût très touchée par le tremblement de terre de 1755, il en existe de magnifiques restes. En particulier, le château, dont l’intérieur a été aménagé de manière moderne, tout en respectant l’esprit du jardin arabe. Le tour des remparts offre des vues superbes sur les alentours.
Comme partout en Algarve les orangers s’exposent, y compris dans les villes.
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Querença, village perché du Barrocal
Imaginez une place déserte au sommet d’un petit village perché. Un chat indolent vient vous quémander une caresse. Tout en haut, une vue à 360° sur les collines de l’Algarve.
Mais le Barrocal, c’est quoi au juste ? Tout simplement, les contreforts des serras, c’est-à-dire des montagnes. Une zone fertile, où l’on peut trouver à la fois des forêts et des cultures, des vergers d’orangers, parfois des amandiers.
Querença la bien nommée : son nom dérive peut-être du verbe querer, qui signifie à la fois aimer, vouloir, et désirer. Ici, même les toilettes publiques sont indiquées par des azulejos!
D’autres villages aux alentours méritent le détour comme Alte, Paderne, ou encore San Bras de Alportel. Chacun possède son atmosphère bien distincte. Alte, par exemple fait typiquement montagnard. Il faut dire qu’il se situe à près de 200 mètres d’altitude, d’où son nom peut-être ?
Le Barrocal et les serras comptent également de nombreux barrages. Voici une vue du lac de barrage de Bravura, où l’on peut naviguer à la voile.
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Cacela Velha : en attendant les pirates
Cacela Velha est un tout petit village au bord de la mer, qui a été très atteint par le raz de marée consécutif au tremblement de terre de 1755. Ses habitants ont alors fondé Vila nova de Cacela, à l’intérieur des terres. Il en reste une citadelle qui surplombe fièrement l’Atlantique, au-dessus des figuiers de barbarie.
Les rues paisibles et fleuries de Cacela Velha.
Le cimetière de Cacela Velha compte de nombreuses urnes funéraires. C’est peut être ici que l’on comprend le mieux le mot « saudade » que l’on trouve sur de nombreuses plaques. Il exprime à la fois le regret de ne plus jamais revoir la personne aimée, et le doux souvenir des bons moments passés avec elle.
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Caldas de Monchique : l’oasis
Caldas (chaudes, en portugais) nous indique qu’ici il y a des sources chaudes, connues depuis l’Antiquité puisque ce sont les romains qui ont décidé d’y mettre un therme. On peut se balader le long du ruisseau, en amont ou en aval. La végétation est tout simplement exubérante. En vous élevant sur les sentiers , vous découvrirez peu à peu les maisons cachées dans la verdure et les collines de la Serra de Monchique. A notre passage en octobre la Serra diffuse des odeurs subtiles et variées qui vont de l’eucalyptus aux nèfles.
Les collines de la Serra de Monchique ondulent jusqu’à la mer.
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Tavira : Macao comme si vous y étiez
Tavira : un mélange harmonieux des styles mauresque, orientaux, et baroque. Les toits de Tavira dit-on ont été inspirés par l’Extrème orient. Les portugais en ont rapporté la forme à l’issue de leurs premières explorations. On se souvient qu’ils furent les premiers européens à débarquer à Taïwan, qu’ils baptisèrent «Formosa » (la belle). Cette forme de toit est particulièrement efficace pour évacuer la pluie. Autant dire qu’en Algarve, elle est purement décorative!
Les tours de cette caserne ont quelque chose des châteaux japonais.
A la nuit tombée, la cathédrale domine les quais. A droite le pont dit « romain » qui fut en fait construit pendant la période arabe.
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La ria Formosa : entre terre, mer et ciel
La Ria Formosa est une lagune, une sorte d’immense estuaire parallèle à la mer. Elle s’étend sur une bonne soixante de kilomètres entre Faro et Cacela. C’est un parc naturel régional. Il est possible de l’explorer en bateau, depuis Faro, Olhão, ou Tavira. L’occasion de voir de nombreux oiseaux : hérons, grues… Ici, sur cette île près de Tavira, on se croirait dans la lagune de Venise.
L’île de Tavira sépare l’Atlantique de la lagune. Côté mer : une immense plage. Côté terre : quelques villas, des pins, des herbes à curry odorantes, et aussi des caméléons! L’Algarve est le seul endroit d’Europe où on peut en voir, mais bien évidemment ils sont difficiles à repérer.
A Faro, si vous arrivez en avion vous survolerez la lagune, alors assurez-vous d’une place au hublot …
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Castro Marim, citadelle oubliée
Castro Marim se situe juste au bord du Guadiana, le fleuve qui marque la frontière avec l’Espagne. Il y a quelques siècles, la mer arrivait à ses pieds, deux bonnes raisons d’en faire une citadelle… Le village se situe dans une petite vallée encaissée, dominée par un château d’un côté et une enceinte de l’autre.
Le château est un peu décati, mais il offre une vue imprenable. Son prix d’entrée est si modique qu’il serait vraiment dommage de ne pas y entrer. L’infant Henri le Navigateur y a fait ses classes. A l’intérieur de ses remparts règne une ambiance mi-tournoi de chevalerie, mi-OK corral.
Du haut des remparts s’étendent des marais salants à perte de vue. Castro Marim est d’ailleurs jumelée avec Guérande.
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La Serra do Caldeirão : un petit air de Brésil
L’Algarve est un grand amphitéâtre, qui descend en gradins vers la mer. Les gradins le plus haut à l’Ouest sont la Serra de Monchique, et à l’Est, la Serra do Caldeirão (montagne du chaudron). En s’éloignant de la mer, on pénètre dans un autre monde. La Serra do Caldeirão est une terre magnifique mais aussi ingrate, où la vie devait être très difficile. Ses habitants ont été nombreux à la quitter pour trouver un emploi sur la côte touristique. C’est pourtant une terre qui mérite d’être découverte. A chaque virage se révèle un paysage à la fois âpre et attirant… On a envie de partir au hasard sur ces chemins.
Cachopo est le gros bourg important de la serra. Dans ses petites rues, le temps semble s’être arrêté.
Si on poursuit encore quelques kilomètres, par une route étroite on atteint Mealha. Ce petit village a conservé quelques-unes de ses maisons rondes, les palheiros, qui comme leur nom l’indique servaient de réserve à foin. Ils nous arrivent directement du néolithique, où ils abritaient nos ancètres… Leur forme et leurs matériaux n’ont pas changé depuis.
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Estoi : un palais romantique délicieusement suranné
N’hésitez pas à pousser la porte de ce palais, qui a été transformé en pousada. Avec un sourire, même si vous n’êtes pas client, on vous laissera entrer. Les pousadas sont au Portugal ce que les paradores sont à l’Espagne, des demeures historiques transformées en hôtels.
Estoi est un parfait mariage du baroque portugais et du classicisme arabe, que l’on peut voir dans ses jardins et dans ses azulejos. Le palais a même sa chapelle privée.
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Les chapelles en os de Faro
La vie est courte, et nous ne sommes que peu de chose. C’est certainement le message qu’ont voulu nous léguer les bâtisseurs de ces chapelles, décorées de crânes et de fémurs. La première se trouve dans l’enceinte de la cathédrale, la Sé. La seconde, encore plus spectaculaire, est à l’extérieur, derrière l’église Nossa Senhora do Carmo.
Voyager dans l’Algarve en pratique
Bien entendu on peut venir en Algarve avec sa propre voiture si on habite le sud de la France ou l’Espagne. Mais pour le commun des mortels le plus pratique est d’atterrir à Faro, qui est desservie par de nombreuses compagnies aériennes low-cost.
Il existe un réseau de bus bien développé en Algarve, que l’on peut utiliser si on a le temps : presque tous les lieux cités ici sont desservis. Toutefois, avoir son propre véhicule est très pratique. Vous en trouverez à louer à Faro, à des prix abordables (attention aux tarifs trop bas toutefois: le loueur aura une forte tendance à se rattraper sur les extras voire à vous facturer très cher la moindre rayure).
Et surtout, un bon GPS s’impose car les panneaux routiers, vous n’en trouverez pas à chaque intersection, loin s’en faut… et dans les centre-ville, les rues sont pour la plupart restées dans leur jus, c’est-à-dire étroites ! Donc les sens uniques sont nombreux, et transforment le moindre déplacement en gymkhana.
N’oubliez pas aussi d’apprendre quelque mots de portugais ! Même si beaucoup d’autochtones parlent français et anglais, ce sera bien plus courtois. Après tout, dans notre pays nous n’aimons pas que les étrangers nous interpellent directement en anglais, en allemand ou en espagnol ! Donc évitons d’en faire autant hors de nos frontières.
Quelques bonnes adresses pour manger et loger dans l’Algarve :
Le B&B Quinta Tapada do Gramacho près de Silvès. A la campagne, près du fleuve Arade, très calme et extrêmement bien équipée. Grande salle très cosy et entièrement vitrée, avec cuisine, vous pouvez même y préparer vos repas. Kate et son mari sont hollandais, ils ont adapté cette ancienne exploitation au confort moderne. Ils vous accueilleront gentiment et sans chichis. Avec eux il vous faudra parler anglais, portugais, ou flamand. Et amener votre maillot de bain pour profiter de la piscine.
A Tavira : casa Beleza do sul, une vielle maison restaurée dans le respect de l’architecture du 18ème siècle. Plusieurs pièces aménagées en studio autour d’un patio-terrasse. Vue improbable sur les toits « Tesouro ». On peut se faire la cuisine si on en a marre d’aller au resto.
En parlant de resto à Tavira, je vous recommande la Cantinha do emigrante, un petit établissement qui ne paie pas de mine avec un décor mi-fruste, mi-naïf ; simple, mais vraiment excellent. Facile à trouver, sur la rive gauche du fleuve, à 5 minutes à pied du pont romain, juste à côté de l’église São Paulo.
Nous avions choisi de profiter des vacances de Toussaint, il y avait donc peu de monde en Algarve. Les températures sont très douces en journée (20 à 25° pendant notre séjour). Sachez qu’il peut pleuvoir toutefois en automne et que selon nos hôtes, le temps peut être très changeant. Mais vous trouverez toujours quelque chose à faire !
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Wow ! Quel article complet ! En couplant ces visites aux plus « connues », on a de quoi s’occuper bien une semaine !