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Vivre en Thaïlande : Comprendre pour aimer ou aimer pour comprendre ?

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40 ans déjà : mon histoire complexe avec la Thaïlande

Je rentre d’une semaine passée entre Mae Jaem, Mae Hong Son et Mae Sariang… Des heures passées sur une vieille pétoire dont les cale-pieds étaient déglingués, appareil photo sur le dos caché sous un sac plastique, visage non protégé du soleil par une crème sans doute plus cancérigène que le soleil lui-même, un soleil pas très visible mais dardant quand même ses rayons ultraviolets au travers des nuages qui eux, larguaient de façon sporadique leurs pluies soudaines et violentes.

On roule sous cape plastique pendant la saison des pluies. Elles ne me font pas peur, je ne crains que pour mon compagnon ultrasonique. Suis un peu méfiante aussi des routes bourbeuses, avec toujours à l’esprit un accident de moto survenu sur la route de Mae Jaem justement. Mais comme dit l’autre ou plutôt comme disaient les deux autres : « C’est mon choix » même si parfois il m’arrive de me dire que je serais mieux à la terrasse du « Why Not » de Nimmanheimin à siroter un vin italien conseillé par Emilio le sicilien.

vivre dans un village karen


Piak mon guide Karen de 40 ans, aux allures de gamin mal douché dont le nom signifie « trempé, « mouillé », mène correctement son engin payé – et il en est fier – avec ses propres deniers il y a déjà 17 ans !

40 ans ! « Il ne les fait pas » remarque une lectrice sur FB. Elle a raison. «  Mais »  ajoute-t-elle « peut-être ne sait-il pas vraiment son âge » ! C’est fou les idées qu’on se fait quand on vit à Paris… Eh oui, les Karens savent compter, écrire et surtout parler plusieurs langues : bien souvent deux dialectes Karen, le birman, le thaï – et, comme Piak –  l’anglais. Un anglais appris dans une université Rajabhat où il a obtenu son diplôme de guide. Un anglais bien meilleur que celui parlé par tous les français rencontrés sur mes chemins de traverse.

Depuis ? Depuis 40 ans… l’âge de mon guide justement. 1972 … l’année de mon premier grand voyage en Asie, à  Ceylan (on ne disait pas encore Sri Lanka). 40 ans en juillet. Il va falloir que je me réserve une surprise pour fêter cet anniversaire épique….

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Je ne suis pas qu’une farang friquée et privilégiée qui se créé des petits frissons en allant se promener chez les « pauvres » comme l’a fait remarquer un lecteur amical…. Il y a 40 ans, je n’étais ni friquée ni privilégiée. J’avais juste commencé à travailler tôt. Ceci dit, même à 20 ans, je ne me suis jamais déguisée en backpacker, en  routarde ou en beatnik. 

 » Anti voyageuse  »  j’étais peut-être, comme l’écrivait alors Muriel Cerf. Plus curieuse de découvrir le monde réel que de l’étudier sur les bancs des universités que je n’ai pas fréquentées. Se méfier des apparences… en tout cas, ne pas s’en contenter.

Grace à mon allure « proprette » (je vous jure qu’on me l’a parfois reprochée), je suis entrée partout. Je ne me suis jamais droguée non plus, pourtant au Laos dans les années soixante-dix c’était sacrément tendance. J’ai attendu d’avoir un âge canonique pour fumer des joints avec mon ami Ek le chanteur Isan.

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Ma vie a été plutôt chaotique et aventureuse et j’ai tout autant aimé les dorures des palais, mes aventures amoureuses avec un ministre malais (lire THEATRE D’OMBRES), mes dîners avec quelques « excellences » asiatiques (c’est ainsi qu’on appelle les ambassadeurs) que de vivre dans un village Karen et dormir sur une natte tandis que j’essayais d’inculquer l’alphabet anglais à des mômes un peu morveux. (Rien de péjoratif, il fait froid dans les montagnes le long de la frontière birmane en hiver et presque  tous les enfants ont des rhumes ou pire). Toute aventure est passionnante ou plutôt tous les personnages croisés sont intéressants, le reste n’est que décor.


Aujourd’hui mon compagnon thaïlandais est un ancien soldat du roi. Il était lieutenant-colonel dans l’armée de terre, chargé à une époque de la surveillance des trafiquants de drogue le long de la frontière birmane ! (et là il faudra lire « LA OU S’ARRETENT LES FRONTIERES » à  paraître bientôt aux Editions de la Fremillerie)


Je n’écris pas pour une brochure d’agence de voyage même si je n’évoque pas certains problèmes dont on me fait reproche dans quelques commentaires sur ce blog. Je ne les ai pas fait paraître… c’est mon droit, après tout je ne sais pas à qui je parle ni à qui je réponds, tandis que j’avance, moi,  à visage découvert.

Pour la « réalité » thaïlandaise dont vous, lecteurs inconnus, semblaient si fiers de connaître les arcanes, je ne vous ai pas attendus pour lire les livres et articles dont vous me conseillez la lecture. Et quoi ? Je n’ai pas vraiment envie de me faire chasser de ce pays ou de voir mes écrits « bloqués » (The army maintains a special unit tasked with tracking and identify lese-majeste offenses through 24 hours sweeps of websites, according to a leading NGO activist with close ties to security forces. The army unit works closely with the Department of Special Investigations (DSI), had superior surveillance technology than the ICT Ministry, aimed to focus on « high profile » offenders with the highest audience reach, and was known to visit them at their homes according to the expert)

Messieurs les critiques, au lieu de conseiller mes lectures, demandez-moi plutôt ce que je n’ai pas lu, et ne comptez pas sur moi pour vous dire ce que je pense sur telles relations entre une certaine personne et les insurgeants musulmans du sud par exemple, ou de dévoiler les rapports d’ambassadeurs aux personnalités internationales avant leur visite en Thailande ou des livres écrits par quelques intellectuels ou journalistes vivant aujourd’hui à Singapour ou à Londres….


Allez, je serais curieuse de lire vos courageux blogs et vos articles (surtout si vous vivez en Thaïlande), moi je vais continuer d’écrire mon blog, à ma façon, avec mes idées et en continuant de lire des journaux censurés ou des articles de journalistes qui s’autocensurent…Mais pas seulement…. Et je vous saluerai lorsque vous signerez vos critiques ou vos commentaires.

Au fait, j’étais derrière les barricades de mai 2010 à Bangkok. Pour me donner des frissons ? Non, j’y avais quelques amis (dont je ne montrerai pas les photos) et j’aime comprendre plutôt que critiquer. Vous ne me retrouverez jamais sur aucun forum ni blog dont pourtant certains racontent n’importe quoi. Chacun est responsable de ses écrits. Et je ne suis pas censeur.

Si j’avais les « guts » (je préfère le mot anglais à sa traduction française…), j’écrirais comme Marcel Jullian m’avait appris à le faire… et je le cite « J’écris comme je l’entends et je vous emmerde.. » (Eh bizarre, il vient de me taper sur l’épaule pour m’encourager… Juju, je sais que tu aimais Muriel Cerf, accueille-la bien où que tu sois… même si je ne crois pas des masses au paradis…Muriel fut la pionnière des amours singulières et surtout interculturelles… C’est à elle que je pense aujourd’hui en écrivant cette chronique … pas très politiquement correcte.

Comportement 2 ou 3 étoiles ?

« Etrangère de l’intérieur » lorsque j’y vis, j’aime observer la Thaïlande de loin, lorsqu’après plusieurs mois immergée dans sa culture, je ressens la nécessité de m’en éloigner, agacée souvent par des comportements contre lesquels je ne peux rien (à quel titre et de quel droit d’ailleurs ?), ni même autorisée à en parler : adoration sans remise en question, fatalité, goût des apparences, importance démesurée accordée « à la face ».

Bien sûr en tant que touriste tout cela est follement exotique et amusant : les photos jusqu’à la lassitude du  roi et de sa petite goutte de transpiration royale qui tombe de son nez (message subliminal  : le père travaille pour nous jusqu’à la transpiration), la first lady et son maquillage d’opéra-chinois, les histoires de fantômes (phi)  qui squattent même les films des réalisateurs les plus intello, les policiers qui, chaque fin de mois, peuvent remplir les caddys de leur femme ou de leur « mia noi »(selon leur grade et statut), en  “taxant” les gamins et filles qui roulent sans casque sur leur engin à deux roues… La Thaïlande est un terrain d’observation intéressant pour les curieux et les romanciers (John Burdett par exemple ou Christopher G. Moore)

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Je change d’objectif lorsque je pense à la Thaïlande depuis Paris. Immergée, en elle, avec un super grand angle, au point de faire partie du décor, j’adopte, de loin et par force, la longue focale et là, je ne vois plus que ce qui me manque : la gentillesse, la légèreté, le sourire… le reste – en raison de ce 200 mm – devient flou.

Certains détails ont le don de m’irriter sur place. D’ici, ils me font sourire.

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Les Etats-Unis auront probablement contribué à donner à ce pays une image de royaume d’opérette … on ne pouvait qu’être heureux au « pays du sourire » (terme probablement inventé par les américains), ce pays dirigé par un séduisant roi et sa femme  – une des plus belles du monde à  l’époque –  si loin de ces horribles pays communistes qui tombaient les uns après les autres comme dans un jeu de dominos. Merci Monsieur Kissinger d’avoir inventé ce terme : la « théorie des dominos ». Pour parfaire cette image idyllique l’Amérique n’a pas hésité à créer une opérette : « Le roi et moi » et deux films sur le même sujet.

Le premier avec Yul Brynner et Deborah Kerr, le second – « Anna et le roi »-  avec Jodi Foster  et l’acteur chinois Chow Yun Fat. Les américains n’ont pas été payés de retour car ce dernier, tourné en Malaisie,  est toujours interdit en Thaïlande. Pour quelles mystérieuses ou inavouables raisons ? Le roi joué par un chinois ? (alors qu’il y a du sang chinois dans la dynastie des chakri..) Ou l’improbable idylle entre le roi Mongkut et Anna Leonowens, la gouvernante anglaise rigide et pas sexy une miette au demeurant, selon les photos de l’époque ?

Pour en revenir a aujourd’hui, lorsque nous nous déplaçons vers les frontières birmanes, mon ami thaï porte toujours son uniforme militaire (ca lui vaut salut et respect aux différents points de contrôle), A Mae Sot, dernièrement, il avait contacté quelques personnalités locales afin que je puisse entrer dans le camp de réfugiés de Mae La pour la venue de Aung San Suu Kyi.

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« Je me suis adressé a elles avec une certaine légèreté, et même en plaisantant » m’a-t-il confié « car je n’ai que 2 étoiles sur mon uniforme ».

« Et alors si tu en avais eu 3 ? » (Il a droit à cette troisième étoile en raison de ses services). Je lui demandais, faussement innocente.  Il est bon mime. Il a loupé une carrière de mauvais comédien (j’ai dit une bêtise ? alors c’est que vous ne regardez jamais les films ou les soaps à la télévision thaïlandaise). Il mime alors la rencontre supposée avec un uniforme et ses 3 étoiles. Plus rien à voir avec le comportement de frère-aîné sympa et blagueur.

Avec 3 étoiles, on ne sourit plus en formulant une requête auprès d’un « inferieur », le minimum c’est de montrer une certaine condescendance distante envers le « petit-frère »… car la Thaïlande est le pays de la verticalité entretenue et malheur à qui ne respecte pas cet ordre établi bien ancré dans les gènes de tout thaïlandais digne de ce nom.

Assez de force pour changer la vie en chanson?

J’ai, dans mon cœur et mes souvenirs, des milliers d’histoires concernant la Thaïlande, d’où cette facilité à écrire chaque matin sur le sujet, depuis maintenant plus de quatre mois. Aujourd’hui, parce que tout va vite, on ne prend plus le temps d’approfondir les choses, on aimerait que les évènements qui font la « une » des journaux puissent être résumés en quelques lignes, quelques mots. 

Lorsqu’on me demande : « Alors qu’est-ce qu’il s’est passé à Bangkok » ? Ou : « Ça y est, c’est fini maintenant les révoltes de Bangkok » ? Je me ferme comme une huître. Car il est évident qu’on ne peut résumer en une phrase, la révolte d’un peuple, le terrain, sur lequel a germé cette violence, les coutumes et la culture qui ont été le terreau de cette même violence…Alors je suis tentée de tomber dans la banalité, au risque de passer pour une ignare, ou alors, de commencer à expliquer…au risque de passer pour une « emmerdeuse ».

Assez de force pour changer la vie en chanson? 1

Donc, ce blog accueille mes écrits et je les publie…avec un MERCI à vous qui avez la patience et la curiosité de me lire. C’est aussi que votre amour ou votre envie de savoir ne sont pas superficiels – car, oui, je sais – mes articles sont en général assez longs.

Le monde est complexe, les évènements politiques le sont également. La simplification mène au rejet de l’autre, à la haine et, fatalement, à l’incompréhension. Et c’est ce qui est en train de se passer en Thaïlande, en particulier sur le « net », où l’on est ami /ennemi, pour/contre. Un monde binaire et antagoniste qui ne laisse plus la place à la complexité, à la discussion, et finalement à l’écoute de l’autre.

(Je vous parle comme un Sage, mais je peux vous assurer que j’aime, moi aussi, avoir raison… et c’est là où ça devient intéressant… car il faut trouver des arguments pour convaincre l’autre). Donc, les réactions sur « Facebook » sont d’une extrême violence en Thaïlande en ce moment. Sans doute n’y a-t-il  pas d’autres endroits « ouverts » pour se faire entendre, et  là serait leur  seule excuse. Plus de 280 000 abonnements y ont été enregistres depuis les émeutes de Bangkok. Puisque les médias traditionnels se sont rangés du côté du gouvernement et que les moyens de communications « rouges » ont été muselés, le « net » offrirait donc une porte de sortie, un moyen de laisser échapper sa colère… ou sa haine.

Eh bien moi, j’aimerais vous faire entendre autre chose. Malheureusement pas la voix du chanteur-compositeur, mais seulement ses paroles. Des paroles qui ont été créées tout spécialement pour moi et qui étaient destinées à un documentaire que je faisais  à  l’époque (c’était en 2000) sur la vie en Isan. Il s’appelle Ek –  Worawout Na lek – (Ek étant la façon thaïe de prononcer Ex). Il était en photo dans mon blog d’avant-hier avec les deux grands-mères de « little Michèle »

Des paroles traduites du thaï en français… et qui, du coup, n’ont  plus tout à fait la même saveur que dans leur langue originelle…

La Bataille pour la vie

Notre cœur est fort et il faut se battre pour vivre

Lorsque nous sommes épuisés

Nous nous arrêtons, mais un moment seulement

Et puis nous retournons au travail

Nous n’avons pas peur d’être épuisés

Notre cœur a la force du diamant

Et nous sommes aussi ardents que le feu

Car notre sang est thaï

Mais  avant tout, nous sommes Isan

Le sang des Isan est un sang pur et fort

Car toujours il  faut nous battre

Nous battre contre le vent et la pluie

Et aussi contre le changement des saisons

Notre cœur alors, résonne comme le gong des temples

En dépit du travail si dur

Rien ne nous fait peur

Car nous avons assez de force en nous

Pour changer la vie….

Le gouvernement thaï aurait dû écouter ces paroles écrites en 2000 ! Et puis encore ceci, pour la nostalgie et pour aider à  mieux comprendre ce peuple fort et tellement simple.

La Nostalgie du retour

Lorsque je regarde les vertes rizières

Lorsque frissonnent les feuilles des arbres

Et que les grenouilles croassent

A moment de la saison des pluies

Crevettes, crabes, escargots et poissons

Sont alors faciles à attraper !

Lorsque j’entends la douce musique

Du khaeen et du phin*

Lorsque les rizières se transforment en champs d’or

Et que l’eau retient les légumes

Le généreux peuple Isan aime aider et partager

Lorsque l’heure arrive de la moisson

Ils sont heureux, hommes et femmes, ensemble, pour travailler

Si heureux lorsqu’ils se regardent

Les femmes Isan si belles !

Alors tout respire le charme

Le cœur est plein et généreux

Dans cet endroit où fleurit la tradition

Oh oh oh ! Si beaux et tranquilles paysages

Que les hommes et les femmes ont dû quitter

Pour aller travailler dans la cité

Oh ! Revenir enfin à la maison !

Là où ils sont nés

Là où sont restés grands-parents et bébés

Qui les attendent. Oh ! Qui les attendent !

Ils sont pauvres et pourtant généreux

Pauvres mais si riches de tant de qualités !

*Instruments de musique traditionnels Isan


Les médias étrangers sont, en ce moment, dans le collimateur du gouvernement thaïlandais. Ils sont accusés  de « partisanisme » et  de ne rien comprendre à la politique thaïe. Le terme général est « despicable », «  ignoble. « Despicable media » Une « vile presse étrangère » qui aurait réduit le conflit thaï  à une simple bataille des « pauvres » contre « l’élite ».

Notre perception des problèmes thaïs est sûrement faussée par notre culture. Nous, occidentaux, nous nous exprimons souvent « directement », parce que nous pensons, à juste titre ou pas, que la ligne droite est le plus court chemin vers la vérité. Tandis qu’en orient, on userait plutôt de détours et de circonvolutions pour exprimer des faits qui nous paraissent élémentaires. Cette idée toute faite du « simple » et du « compliqué » serait donc réciproque….

Le gouvernement thaïlandais n’apprécierait donc pas les reportages et articles de la presse étrangère ! Pourquoi pas ! Mais n’est-il pas un tout petit peu offusqué par le discours du gouverneur de Bangkok qui vient de déclarer, texto : « Nous venons de vivre les pires moments de notre histoire en 227 ans. Buildings brulés, bâtiments publics et privés endommagés, Bangkokiens traumatisés. La plus grave crise historique que Bangkok ait connue. Lorsque pour la première fois, la capitale thaïlandaise était saccagée, c’était par des étrangers. Cette fois, en dépit de l’accusation anonyme mettant en cause des Cambodgiens, ce sont des thaïs qui ont saccagé leur capitale ».

Pas un mot de compassion sur les plus de 80 tués, les milliers de blessés, et les « disparus » habituels. C’était pourtant des civils en majorité, des reporters, et même du personnel médical. Les bâtiments auraient donc plus d’importance que les gens en Thaïlande ! Alors non, je ne comprends pas cette Thaïlande la.

Sans doute, lorsqu’on aborde les problèmes politiques, faudrait-il s’abstenir de toute émotion. Pas facile ! Je ne suis sûrement –  et à ma modeste mesure – qu’un « ignoble média » puisque j’ose écrire sur la Thaïlande ! Il y a effectivement beaucoup de choses que je ne comprendrais jamais dans ce pays bouddhiste où je veux bien admettre que l’on puisse renaître dans un moustique ou un éléphant, mais de la à accorder des grades militaires à certains animaux… il y a une royale marge !

Bref, en 2001, j’écrivais dans « Chronique de la vie ordinaire d’une farang en pays isan » : « Dans un pays étranger, la barrière de l’exotisme passé, est-on plus apte a comprendre l’autre ? Sans doute, mais lorsque la langue demeure une énigme, on est encore un peu sourd. Voila pourquoi j’ai décidé de me battre avec les signes de l’alphabet thaï, ses 44 consonnes, ses 32 voyelles, ses 5 tons, et cette autre façon de s’exprimer et de penser. Il m’a fallu appréhender une autre grille de lecture. Passer de l’individualisme de ma culture à l’esprit collectif asiatique. Passer de l’ordre de la phrase française avec substantifs, genres, accords et conjugaison, à une juxtaposition de mots qui n’ont de sens « qu’ensemble ». Du cartésianisme à  un mode de pensée communautaire où le fonctionnement de la raison et de l’intelligence tiennent compte de la position sociale et du respect des conventions, où le groupe prime toujours sur l’individu. Un apprentissage qui ne se fait pas sans remises en questions profondes et laisse des traces indélébiles au point de « décentrer » complètement une façon de respirer et de réfléchir. L’expérience faite, on ne revient jamais au point de départ. Voila pourquoi je suis « marquée » par l’Asie et pourquoi il est plus difficile de vivre dans mon pays aujourd’hui : « Décalée » en France, « déplacée » en Thaïlande. Je ne me plaindrais pourtant pas de cet état quasi schizophrénique.

Des milliers d’heures pour mémoriser les signes et les centaines d’exceptions. Toujours un papier dans la poche pour écrire des phrases  à  l’infini. Au restaurant. Pour m’isoler, lorsque le monde tournait autour de moi sans que je m’y intéresse. Avant de dormir. En me réveillant. Jusque dans mon sommeil, A chaque mot appris, la barrière entre « eux » et moi perdait de sa densité. Enfin je m’approchais d’eux, j’allais les comprendre. J’allais entrer dans « leur » monde ! Quelle prétention de ma part ! Oui, je connais des thaïs aujourd’hui, je peux les toucher, les écouter, faire un bout de chemin avec eux, mais les comprendre ? Leur langue, moyen de communication ? Véhicule pour échanger avec l’étranger ? Ou simple instrument utilisé dans le but de rendre les rapports légers, flatteurs et agréables entre seuls initiés » ?

Alors, faut-il essayer de comprendre pour aimer ou aimer sans comprendre ? J’opterai toujours pour la première solution, même si je suis et reste un « vil média du net ».

rayon de soleil en thailande

Thaïlande : la fierté d’être un pays libre : « Vous n’aurez pas, ma liberté de penser »

De quoi les thaïs étaient-il ou – sont-ils encore ? – le plus fiers ? Faites un sondage, le consensus est général : « Nous sommes un peuple libre. Jamais colonisé. « Meuang thaï » (เมืองไทย) = « pays libre ». Libre de quoi ? Je demandais, curieuse. « Euh… » C’est là où les choses commençaient à se compliquer, et je n’ai jamais pu obtenir de réponses précises à cette question précise, tant cette notion de liberté était si évidente, qu’il n’était pas nécessaire d’en faire une liste exhaustive.

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Jarre de terre cuite,avec de l’eau fraiche, mise a la disposition des visiteurs dans toutes les maisons traditionnelles

A les regarder vivre et rire, je me disais que leur sens de la liberté paraissait simple, voire primaire, et  en fin de compte, pas si négligeable que cela. Se retrouver en famille. Aller ensemble au temple. Monter à 10 ou à 15 dans un pick-up pour visiter tous les sanctuaires bouddhistes de la région. Prendre une cuite dans un bar avec des copains. Danser aux fêtes traditionnelles.

Manger à n’importe quelle heure du jour ou de la nuit.  Déambuler dans les « shopping malls » et même dans les « Lotus » (ces supermarchés genre Auchan)  et tiens ! même dans les Auchan, depuis qu’ils se sont installés en masse dans le pays… la journée entière. Juste pour regarder…. si pas pouvoir acheter. Juste pour prendre le frais dans l’air conditionné… si pas d’air conditionné à la maison, ou simplement électricité trop cher…

Libre d’aller dans m’importe quel restaurant avec sa propre bouteille de whisky sous le bras. Libre d’attraper des animaux ou insectes dans la forêt. Libre de pêcher dans n’importe quel cours d’eau, lac ou étang, de cueillir les fruits et baies sauvages qui poussent, eux aussi, en liberté.

En poussant un peu plus loin l’investigation, ce sens et ce goût de la liberté, on les retrouve chez presque tous les hommes thaïs dont on sait l’irresponsabilité ancestrale en ce qui concerne  les devoirs conjugaux. Combien de « farangs » mariés à des thaïes élèvent le premier enfant d’un « mari » volage ? Et combien de femmes thaïes élèvent, seules, leurs enfants, abandonnées par un mari irresponsable, infidèle, ou simplement préférant la compagnie de copains dans les bars ? Ou trouvant plus d’agrément, escortés de jolies hôtesses, toujours à la recherche d’un « protecteur », d’un « sponsor », ou d’un « mari », provisoire ou définitif ?

A la condition de – non pas « si affinités », mais « si ressources suffisantes ». Le côté pratique l’emporte toujours sur le côté romantique en Thaïlande. Après tout, « L’amour ne fait pas manger » comme dit le proverbe. « Ils sont élevés comme ça » disent les mères. « Epouser un mari thaï, c’est accepter un enfant de plus à  la maison » disent les femmes réalistes.

« Meuang thaï »  « pays libre », donc, jamais colonisé… La leçon a été bien apprise et retenue, et elle a la vie dure. Les américains – ou plus précisément les Etats-Unis – n’ont jamais occupé le pays comme des colonisateurs, mais en y installant leurs bases (Udon, Ubon) afin de pouvoir aisément bombarder le Vietnam, ils faisaient de ce pays, un bastion irréductible contre le communisme, un bastion de la liberté !…

(Il faut se souvenir de cette époque : Mao en Chine, L’oncle Ho au Vietnam, le Pathet Lao au Laos, les Khmers Rouges au Cambodge…), tous ces pays basculaient alors dans le communisme. Grâce à la manne américaine, qui renforçait le pouvoir des militaires au pouvoir, la Thaïlande ne succombait pas au « péril rouge », et restait debout face à la frayeur viscérale des américains de voir « l’effet domino » se propager dans tout le sud-est asiatique.   (Expression inventée par Henry Kissinger je crois).

Alors « Meuang thaï », pays libre, non colonisé ? Goût de la liberté – réelle ou illusoire -qu’importe !  – Pas seulement pour les thaïs, la liberté !  Pour certains visiteurs, touristes, exploiteurs, profiteurs, opportunistes, industriels… libres de piller la forêt, de saccager l’environnement (allez du côté de Chon Buri), libres d’acheter le sexe à bas prix, le sexe le plus accessible du monde (non, depuis ça s’est étendu..), libres pour les pédophiles ou les vicieux d’assouvir leurs penchants pour…. et pour trois fois rien.

Sans ressentir le moindre remord, avec même parfois le sentiment qu’ils rendaient service à la famille, avec même l’impression de « faire une bonne action »… Et puisqu’ils font ça en rigolant, le sexe n’est jamais tout à fait triste en Thaïlande, n’est-ce pas ! Et la notion du bien et du mal  n’est  pas la même en pays bouddhiste, elle n’a rien à voir non plus avec notre sens du péché, notre sacré morale judéo-chrétienne.

Le sexe en Thaïlande est un jeu, ce qui compte c’est le prix qu’on lui donne. Tout s’achète et il y a un prix pour tout : une heure, une nuit, une vie. « You happy » ? Et voila, tout le monde est content. Le touriste avec ses souvenirs, la petite paysanne isan avec l’argent qu’elle va pouvoir envoyer à ses parents. Libre de vendre son corps et son sourire, car elle n’a qu’une seule obligation, elle : celle de s’occuper de ses parents. De les entretenir dans leurs vieux jours. En terre bouddhiste, le péché, ce n’est pas vraiment le sexe, c’est ne pas s’occuper des parents âgés. ….

Et la liberté de penser alors ?  « Penser ensemble », « penser en commun », « penser comme les autres », c’est rassurant, mais « penser par soi-même » ? Au pays de la liberté, c’est une notion que certains sont peut être tentés d’explorer. Le moment n’est peut-être pas tout à  fait propice, et puis ça renvoie à l’idée de « contradiction », de « confrontation », et finalement…de « solitude, » Et ça… ce ne sont pas des mots vraiment thaïs. Pas encore…

L’Histoire bégaye…(ou la mémoire courte)

Tuer pour restaurer la paix. La paix à quel prix ? Et à quoi sert de gagner une bataille si c’est pour risquer de perdre la guerre ?

L’Histoire de la Thaïlande n’arrête pas
de se répéter….alors, pour tous ceux qui ne la connaîtraient pas, qui l’auraient
oublié ou qui auraient envie de connaître ce pays au-delà des clichés, un
petit rappel:

« En dehors d’une période très courte –  de 1973 à 1976,  le gouvernement de la Thaïlande a toujours
été soutenu par un régime militaire. Après cette courte période de réelle
démocratie, c’est un ancien général qui revient au pouvoir. Les manifestations
reprennent dans les rues de Bangkok opposant étudiants proches de la gauche et
de l’extrême gauche (le Parti Communiste Thaïlandais) aux militaires d’extrême droite. Un jeu perdu d’avance
pour les manifestants. Il faut se rappeler le contexte de cette époque :
le bloc de l’ouest, Etats-Unis en tête, soutient la droite thaïlandaise dans le
cadre mondial de la guerre froide et de la lutte contre le communisme. Alors l’armée
tire sur les étudiants et sur les syndicalistes qui se sont joints à eux, Elle
massacre ses propres enfants. Jusqu’en 1992, les coups d’état se succèdent,
mais cette année là, pour la première fois, la classe moyenne se joint aux étudiants,
pour s’opposer à l’extrême droite militaire. Plus de deux cent mille
manifestants réclament le départ du général Suchinda. En vain. Après l’échec
des négociations, l’état d’urgence est décrété. Les manifestants marchent quand
même en direction de la « Government House » mais sont stoppés au
pont « Phan Faa ». De violents affrontements éclatent entre
protestataires et militaires. Près du « Democracy Monument ». Ils
font des dizaines de morts et des centaines de blessés. Des milliers
d’opposants ou sympathisants sont arrêtés, battus, torturés. Un vrai massacre
dans les rues de la capitale. La télévision, aux mains de la junte, montre des
bandes d’insurgés s’engouffrant dans le hall de l’hôtel Royal afin d’échapper
aux fusils des militaires. A l’intérieur de l’établissement, des soldats
humilient les étudiants, les forcent à descendre les escaliers à quatre pates,  à  s’agenouiller dans le hall ».

J’ai rencontré Khun
ISSARA (Monsieur Liberté… c’était son surnom) il y a plus de 6 ans.

–         « Ces étudiants étaient comme mes
enfants (Look khong shan), je me devais de les protéger. C’était mon devoir.
Bien sûr, il y avait eu des magasins pillés, des voitures brûlées, c’est la
conséquence malheureuse de toute révolte…des événements que la presse aux
ordres du pouvoir s’est empressée de qualifier de « vandalisme gratuit
commis par des protestataires enragés ». Dans la nuit du 18 au 19 mais,
j’ai reçu plusieurs coups de téléphone anonymes menaçant de faire sauter mon
hôtel. Mais à aucun moment je n’ai pensé fermer mes portes aux manifestants. Le
matin du 19 mai 1992, les forces de sécurité passent mon hôtel au peigne fin, à
la recherche des émeutiers. Sans résultat, Après leur départ une quarantaine de
jeunes émergent de leurs cachettes. Ils auraient été arrêtés et sans doute
exécutés si nous les avions laissés sortir ».

Monsieur Issara avait donné
à  chacun des étudiants refugiés chez
lui, des uniformes aux couleurs de son hôtel. En un tour de magie, avec des
badges épinglés sur leurs uniformes, une quarantaine d’étudiants s’est trouvée
ainsi promue serveurs, liftiers, réceptionnistes, bagagistes, femmes de
chambre. On sait que plus tard, l’hôtel a croule sous les bouquets de fleurs
offerts par les familles des étudiants. Protégés par Khun Issara. Et l’hôtel
est devenu le symbole de la liberté en Thaïlande.

En 1976, c’était les
étudiants qui se rebellaient.

En 1992, durant ce
‘Black May » la population urbaine – middle class – se joint aux
étudiants.

En Mai 2010 (sera-t-il
aussi le « bloody may 2010») ? c’est le peuple, les pauvres les
laissés pour compte qui se révoltent.

L’Histoire bégaye ?
Pas complètement. En 1992, le soulèvement s’est soldé par un spectacle assez
réjouissant, vu et applaudi à la télévision, par le pays entier : Les
généraux qui se battaient pour le pouvoir – Suchinda et Chamlong –  non pas à genoux, mais à plat ventre, comme il
se doit, devant sa majesté le roi de Thaïlande qui les sermonne devant
toute la société thaïlandaise. S’ils ont perdu la face, ils n’ont, en contre
partie, jamais été poursuivis pour leurs actes criminels et ne seront jamais
appelés devant un tribunal. Justice ne sera jamais rendue aux centaines de
morts et disparus dont on n’aurait, pour certains, retrouvé aucune trace  à  ce
jour….

L’histoire bégaye ?
Pas complètement. Les étudiants sont absents des contestations aujourd’hui.
Et si certains ont accusé les leaders rouges d’être des communistes, (possible,
je ne sais pas)…  la masse des
protestataires, elle, attend toujours un signe du « père

R - PARIS21

Pendant ce temps, a Paris, manifestation bleue du personnel hospitalier, avec occupation, hier, de la gare Montparnasse… Je n’ai pu m’empêcher de photographier.. c’était juste en face de chez moi….

De Tiananmen à Bangkok … Des yeux et des oreilles ou comment échapper à l’Histoire ?

D’abord je tombe par hasard sur cette phrase, notée sur un des minuscules carnets qui me suivent un peu partout : « Nous avons besoin de l’histoire dans son intégralité, non pas pour retomber dedans mais pour lui échapper » C’est de Ortega y Gasset (« un philosophe sous Franco »)…Intéressant, non ?

BLOG Yunnan 7

Puis j’ouvre le « International Herald Tribune », comme presque chaque matin et lis : « Un éditeur de Hong Kong – le New Century Press – s’apprête à sortir un manuscrit de 279 pages en chinois, sur les événements de Tiananmen il y a 21 ans, manuscrit écrit par Li Peng, Premier Ministre chinois de l’époque, proche des radicaux et de Deng Xiaoping. L’éditeur  ne peut garantir l’authenticité absolue de ce « journal », le manuscrit lui étant parvenu par l’intermédiaire d’un anonyme, mais une étude approfondie tendrait à prouver que Li, aujourd’hui âgé de 81 ans et en mauvaise santé, en serait bien l’auteur ».

au bord de la route dans le yumnnan 14

Deng, l’ancien leader communiste de 1989, aurait demandé aux militaires « d’essayer de limiter le nombre de morts lorsqu’ils chasseraient les étudiants protestataires de la place Tiananmen, mais de se tenir prêts toutefois  à « verser le sang » si cela s’avérait nécessaire.

Les chiffres concernant le nombre de morts cette nuit du 3 au 4 juin 1989, sont toujours contestés. Les officiels parlent de 200, les activistes, eux, de 1000. De plus ils  assurent qu’il y aurait encore entre 70 et 300 protestataires détenus en prison à ce jour. Vingt et un ans plus tard !

groupe de femmes âgées en thailande

Le « South China Morning Post » journal en langue anglaise de Hong Kong, a obtenu une copie de ce manuscrit, et écrit : « Les manifestants de 1989 voulaient renverser le Parti Communiste et créer le chaos »… ce qui serait en complet désaccord avec les mémoires de Zhao Ziyang, Premier Ministre de 1980 à 1987 (également édité au « New Century Press »), opposé, à l’utilisation de la force contre les étudiants de Tiananmen (Il fut viré plus tard par les conservateurs et son livre est interdit sur le continent chinois). Dans ce livre, il écrit : « Les étudiants ne voulaient pas le chaos, mais seulement des réformes. Pas la révolution » !

lanternes en chine dans le yunnan

Enfin je tombe sur cette réflexion d’un éditorialiste du Bangkok Post : « Le vieil ordre social ne peut survivre que par des réformes, ou alors il s’effondrera, et si un Ordre Nouveau devait s’imposer, ça ne serait sûrement pas joli. Les « rouges » souhaitent un nouvel ordre social. Les démocrates, soutenus par les militaires, veulent restaurer l’ordre ancien. Les actions violentes de ces dernières semaines sont nées de cette dangereuse confrontation ». Le gouverneur de Bangkok,  membre du parti démocrate, a, de son côté,  déclaré au même « Bangkok Post »  que son administration allait installer un énorme appareil de sécurité  – « Bangkok Renaissance » – avec des vidéos de surveillance un peu partout dans la capitale, mais aussi un réseau de 300 000 volontaires, qui deviendront les yeux et les oreilles du gouvernement dans leur vicinité ».

Des vigiles politiques, comme en Chine, à Cuba, en Birmanie ? …  Parler va donc devenir dangereux en Thaïlande ? Écrire sur le net  l’est déjà. Et penser, alors ?

Et en France ? J’apprends en écoutant en podcast « Le masque et la plume », que Gérard Mordillat vient de préfacer ainsi une nouvelle traduction – édulcorée –  du « Capital » de Marx : « La France n’a pas besoin de réformes mais d’une révolution ».

Et enfin, un jeune philosophe allemand –  Richard Prech –  surnommé le « pop philosophe » d’après le magazine « Le Point », interroge : « Est-il vrai que Badiou a du succès en France ? Un maoïste ! Vous êtes fou ! Vous ne retenez donc aucune leçon de l’Histoire » !

Et voilà, la boucle est bouclée. En Chine, les étudiants voulaient des réformes, en Thaïlande, les “rouges” veulent des reformes, en France on réclame la révolution !!!

vieil homme assis avec une canne et homme sur son vélo en chine Yunnan, 3

Liberté, liberté chérie…

Blog MIXED ETHNIES50

Thaïlande, terre de liberté ou  « des hommes libres », selon la traduction littérale de son nom… ?  Hummmm… Le sens de la tradition, de l’étiquette et des convenances sont tellement ancrés dans la conscience des thaïlandais qu’ils ne ressentent plus le poids de ces contraintes. Elles l’ont modelé depuis la naissance, depuis des générations. Ils se croient libres parce qu’ils peuvent sans aucun problème s’endormir là où ils éclusent leur bière ou leur whisky.

Un lit n’est même pas nécessaire, c’est d’ailleurs une invention récente pour les gens des villages. Ils peuvent quitter leur maison à tout moment, partir pour une autre province, ils savent qu’ils trouveront refuge chez quelqu’un, famille ou ami. C’est ainsi. L’hospitalité thaïe est simple : un espace sur le plancher ou le carrelage, un oreiller et un peu de riz gluant et toujours de la bière au frigo.

Impossible pour un thaïlandais de laisser transparaître le moindre signe apparent de colère, d’agacement ou d’énervement. Tout sentiment doit être contrôlé pour faire place à une attitude réservée et lisse. Le sourire masque, en toutes circonstances, les peines, les colères, la gêne, la haine ou la timidité. L’inconvenance absolue est de « perdre le contrôle ». Qu’importe les vrais sentiments, l’essentiel est d’avoir salué correctement. D’où la critique quasi systématique de beaucoup d’occidentaux connaissant mal la Thaïlande : « les thaïlandais sont dissimulés ». Oui, ils le sont, question de culture. Tout est dans l’apparence, à la surface des choses. Ce poids de la tradition n’est pas toujours visible aux étrangers tant l’obligeance, la gentillesse, le sourire sont – non pas la seconde nature des thaïlandais – mais, finalement,  leur vraie nature.

 « Aujourd’hui un poids supplémentaire vient peser sur leurs épaules.  Afin d’éradiquer toute critique en ligne sur la monarchie vénérée, le gouvernement a renforcé les lois concernant la liberté d’expression sur la toile, et vient de bloquer 113 000 sites. L’internet thaï est en train de devenir un désert. La paranoïa qui s’est emparée du gouvernement, fait de plus en plus ressembler la Thaïlande à la Birmanie ou à la Corée du nord » lit-ont du côté de l’AFP.

« Bangkok refait la fête, comme s’il n’y avait pas de lendemain, tandis que dans les bidonvilles, les plus pauvres ont peur » (Agence Associated press)  « Dans le bidonville de Klong Thoei à Bangkok, on ne sait plus à qui parler » disent ceux qui ont manifesté avec les « rouges ». Ils ont pris l’habitude de regarder au –dessus de leur épaule. « Et si on venait nous arrêter pour nous interroger ? qui s’occuperait de nos enfants ? » demande une femme. Et puis ceci encore : « Nous sommes physiquement indemnes, mais émotionnellement, nous sommes abattus. Cette époque baigne dans un étrange climat de peur ». « Nous sommes une société en guerre contre elle-même » titre le journal « The Nation ».

Le tout nouveau gagnant de la palme d’or à Cannes, Apichatpong Weerasethakul a déclaré : « La nouvelle loi sur le cinéma permet aux censeurs d’interdire tout film qui menacerait l’ordre social, la morale ou la sécurité nationale. On ne peut pas faire un film sur la politique, la religion ou tout autre sujet, alors il ne nous reste plus qu’à nous replier sur les comédies ou les drames.

La peur est le maître-mot » a encore ajouté le cinéaste, comparant la situation actuelle de la Thaïlande à celle de l’Europe de l’Est dans les années 60/70, lorsque les cinéastes avaient recours au cinéma symbolique plutôt que de s’attaquer aux problèmes de front. Mon film « Uncle Boonmee » est une parabole d’un cinéma agonisant, et on peut en relier la trame à la censure d’aujourd’hui. Les gens du gouvernement essayent de vous dire ce qui est bien, ce qu’il faut porter, la bonne chose à faire ou quel est le langage national correct, des choses comme ca… » a encore expliqué le cinéaste .

L’alcool, dérivatif puissant chez les pauvres est une façon d’oublier la dureté des temps…. Il est à craindre que cette consommation n’augmente étant donné  le climat actuel de peur, renforcé par les prédictions alarmantes d’astrologues qui voient « de la violence à l’horizon.

Blog 1 - MIXED ETHNIES71

Comme une larme !

Liberté, je crie ton nom !

La liberté a une saveur différente selon que l’on vit en France, aux Etats-Unis, ou… ailleurs.

Si, aux Etats-Unis, liberté d’expression et liberté d’opinion sont prônées comme des étendards, si les sensibilités les plus violentes peuvent s’y exprimer, il est en revanche quasiment impossible de parler de sexe à une émission de grande écoute.  On peut même dire que le sexe est tabou dans ce grand pays puritain où fleurissent, de plus en plus nombreuses, les nouvelles religions (enfin…sectes : voir Les renouveaux charismatiques, scientologie etc.…).

En France, le sexe est dans tous les discours et émission TV et radio – comme une provocation – Le « cul » n’est pas un problème et les activités extra conjugales d’hommes politiques ou d’état ne gênent personne. En revanche, on est limités par un grand nombre de délits d’opinion (racisme et homophobie).

En Thaïlande, on ne peut soulever la moindre critique concernant la famille royale, sans tomber sous le coup du crime de lèse-majesté (loi qui vient encore d’être renforcée) et qui vous met en prison pour 15 ans, sans avocat pour vous défendre. Qui oserait ? Dans les pays musulmans… on peut battre sa femme (il est bien connu que « Si vous ne savez pas pourquoi, elle, elle le sait »), mais prononcer le nom d’A…. autrement que pour l’adorer est une autre histoire….

porte d'entrée en chine

Finalement le meilleur moyen pour désamorcer tous ces interdits et tabous (devenus obsessions parfois), ne serait-il pas de pouvoir exprimer librement toutes ces opinions ? Parler ouvertement de A…. ou de B……. ou du C.. sans risquer la prison, le lynchage ou une amende ? (remplissez les cases).

Depuis que j’ai fait de « jungle book » (à ne pas confondre avec « le livre de la jungle » de  Kipling), mon livre de chevet, j’apprends « qu’en septembre 2004, Thaksin Shinawattra, alors Premier Ministre, avait attaqué en diffamation, une certaine Supinya, responsable d’une ONG, parce qu’elle s’obstinait à poser les « bonnes » questions (celles qui dérangent.) A savoir : Pourquoi le pays a-t-il le quasi monopole des médias ? Pourquoi vingt ans après la chute de la menace communiste, et quinze ans après la fin de la guerre froide, l’armée était toujours propriétaire de deux chaînes de télévision et de centaines de radios stations ? Où allaient les profits ? Comment se faisait il que les demandes de libéralisation des médias, si intenses après les démonstrations violentes de l’armée en 1992, soient restées sans réponses à ce jour ? Pourquoi la Thaïlande, qui se voulait un des pays leaders d’Asie, capitale de la mode et du tourisme, avait-elle encore les médias d’une  république bananière ? ». C’était en 2004… et aujourd’hui ?

colonnes en chine

Les temps changent mais rien de changent. « Same same but different » disent les thaïs. Et pour reprendre les termes de Marcela Iacub, auteure française d’origine argentine, qui a la réputation de manier  paradoxe, insolence et provocation : « La liberté individuelle est une fiction nécessaire pour le fonctionnement d’une démocratie »… et bon (mais pas nouveau) sujet de bac : « L’état a-t-il le monopole de la violence légitime » ?

petit chinois derrire la porte

Pour terminer sur une note d’humour, je croise régulièrement des américains d’origine russe, qui vivent depuis longtemps aux Etats Unis ; Ils viennent souvent a Paris et habitent au-dessus de chez moi. Entre deux portes, nous échangeons des propos futiles ou intenses, mais toujours joyeux. Comme j’évoquais ce problème de la liberté d’expression, ils me répliquaient :  « En Russie on est libres »….

« Ah oui » ??

« De dire qu’Obama est un mauvais président » !

Thailande : Idées reçues et remise en question sans complaisance…

Dans un article du « Bangkok Post », la journaliste Sawaï Boonma écrit, dans un bel examen de conscience : « Les thaïs devraient se poser des questions sur eux-mêmes au lieu de toujours pointer du doigt et d’accuser d’improbables responsables extérieurs.

La Thaïlande, pays du sourire et de la bienveillance bouddhiste ? Bien sûr nous donnons la nourriture aux moines et nous faisons des dons aux temples, en pensant que tout cela est dénué d’égoïsme. Mais au fonds nous faisons cela exclusivement pour nous-mêmes, dans l’espoir d’une vie future meilleure et surtout pour être plus riche. Ça n’est, ni plus ni moins, qu’une sorte de troc. Rien de vraiment généreux là-dedans.

Beaucoup des 30 000 temples bouddhistes ont été construits – très souvent l’un à côté de l’autre – parce que lorsque nous ne sommes pas d’accord avec l’un, nous en construisons un autre à côté. Les mouvements associatifs n’ont jamais vraiment fonctionné en Thaïlande, autre indication de notre incapacité à tolérer différents points de vue. Nous pardonnons facilement au nom de cette sacro sainte philosophie du « maï pen raï », en fait, c’est un simple reflet de notre indifférence. Bien sûr nous n’admettrons jamais cela, et au journal je me suis fait traitée de tous les noms pour avoir osé écrire cela »…

Pourillustrer ce commentaire courageux et lucide, j’aimerai vous faire lire ce que j’écrivais le 15 juillet 2004 dans mon « YIM LAEAW KO YING » (« Souris et tue »). Bien sûr il faudra aller jusqu’au bout. Bien sûr je vous demande beaucoup de persévérance, mais prenez votre temps ou lisez-le-en plusieurs fois. En me relisant, je n’ai pu retenir mes larmes… d’impuissance.

Ek, mon ami et assistant, se propose de me faire connaître de jeunes délinquants, abandonnés ou fugitifs, ayant trouvé refuge dans un  marché central de la ville. J’hésite d’abord à m’aventurer dans cet endroit lugubre de la nuit, premières marches vers une descente aux enfers et puis –  inconsciente ou pas –  je me décide à l’accompagner. Prête à frotter ma curiosité incorrigible à la misère de quelques petits démons à visages de chérubins. Le  souvenir que me laissent ces rencontres du «  troisième type »  est totalement olfactif. Une odeur d’abîme, de crasse,  de pestilence… J’ai envie de me sauver, dégoûtée par la puanteur qui se dégage de  l’endroit.

A sa seule évocation, l’odeur me revient, incontrôlable, terrible. Pourtant ces enfants, ces adolescents de 10 à 20 ans survivent là, dans ces trous à rats, et je suis venue pour les rencontrer, alors je franchis ce barrage du dégoût qui m’a prise à la gorge dès l’approche du marché couvert et de ses rangées sombres qui servent d’entrepôts à des centaines de petits boutiquiers. Les enfants sont là. Affalés. En groupe. Protégés par des morceaux de plastique ou de papier journal, avec à leurs pieds, des chiens galeux et écorchés et, tout proche, des étals de viande rouge, des têtes de cochons poisseuses de graisse, des poissons nerveux, gigotant dans leurs bacs à eau, des marchands de tissus endormis, des échoppes de bouffes fumantes et de fleurs délicates.  Cris et rires fusent dans l’indifférence ou l’impuissance générale.

A ma première visite  j’ai ma caméra à la main, ce qui fait disparaître tous les gamins d’un coup !  Éparpillés, telle une volée de moineaux. Je leur ai fait peur, mais je reste. Je m’obstine. J’économise ma respiration et inhale par petites bouffées, mais rien à faire, j’ai l’odorat sensible. C’est de naissance. Un avantage parfois. Une horreur dans ce marché de terre battue où mes pieds s’enfoncent dans la boue visqueuse où se mêlent sang de poulet, eaux sales et minuscules petits tubes pressés jusqu’au trognon. « Les tubes de colle que « sniffent » les gosses », me précise Ek.

Des tubes de colles éparpillés par dizaines. Mais pas seulement ! Le sol est aussi jonché de petits sachets plastique au fond desquels traînent encore des traces d’un liquide poisseux et jaunâtre : la colle,  « kaao ». « Kaao », « colle »,  a quasiment la même sonorité que « khaâo », « riz » –  Et bien entendu, un peu plus tard, lorsque mes petits démons à tête d’ange, emportés par la curiosité pour la « dame blonde » s’agglutinent autour de moi, je leur propose – pour les amadouer  et sur les conseils d’Ek –  un peu d’argent que je confie à l’un d’entre eux pour « kin khaâo », « manger du riz », je me plante dans la prononciation et annonce : « kin kaao » « manger de la colle » ! Les rires explosent, joyeux, spontanés comme tous les rires d’enfants. Je suis sans grande illusion sur l’utilisation de ces quelques  bahts, pourtant l’aîné du groupe, Khaï, exhibe fièrement un sachet de riz gluant qu’il partage avec les autres mômes autour de lui. Une partie de l’argent aura quand même servi à acheter un semblant de nourriture.

Au cours de cette première rencontre, les enfants m’approchent et me touchent. Je n’ai pas encore gagné totalement leur confiance au point de pouvoir les photographier. Ils ont encore peur que je sois une sorte d’agent venu les espionner pour le compte de leurs parents ou de la police, mais je glane quelques informations sur le prix de la colle, le magasin chinois qui les approvisionne, les villages d’où ils sont originaires, pourquoi ils ont fuit l’école ou leur famille. L’histoire se répète inlassablement : père absent, mère dans un bar ou dans une usine à la ville, grand-mère impuissante à élever un adolescent épris d’indépendance.  Désir impérieux de se « retrouver ensemble » de « voir du pays » et surtout… «D’être libre » !… A une cinquantaine de kilomètres du village, Udon a un goût excitant d’évasion.

Certains commerçants ont pitié de ces enfants perdus et leur jette des restes de nourriture ou quelques pièces contre de menus services. Suffisamment pour se payer les 10 ou 20 tubes de colle qu’ils « sniffent » le soir venu.  Pour rêver. Pour ne pas avoir faim. Pour croire qu’ils sont libres. Au cours d’autres visites, toujours effectuées avec Ek, les langues se délient. Ma caméra les amuse et ils jouent  les vedettes face à mon objectif. Ils ont compris qu’ils n’avaient rien à craindre de moi. A chaque fois, je donne un peu d’argent. Toujours à Khaï, l’aîné, un grand garçon maigre, le corps bleui de tatouages. Visage long et délicat. Yeux langoureux d’Indien. Beau et élégant dans sa semi-nudité. Racé dans sa façon de m’embrasser la main à chacune de nos rencontres. Gracieux et charmeur lorsqu’il me raccompagne jusqu’à la voiture et m’ouvre galamment la portière. Il insiste pour porter mes appareils et mon sac. Je les lui abandonne volontiers, même si plus tard, je les nettoie à l’alcool. L’odeur de crasse et d’urine est tenace.

Maintenant je sais qu’ils attendent mes visites.  Pas seulement pour l’argent, mais pour l’inattendu de ces entretiens. A force de volonté, j’ai dominé ma répulsion de la puanteur. Je viens aussi parce que je les aime bien et parce que, incorrigible, je crois pouvoir les raisonner. Mais de quel droit ? J’en ai presque honte. Les plus jeunes n’ont pas plus de dix ans. Et entre temps des filles sont venues rejoindre le groupe.  Beaux et perdus, définitivement peut-être,  le sachet plastique collé au visage, ils inspirent goulûment le produit toxique qui les fait planer et détruit irrémédiablement leurs neurones. Somchaï, un adolescent d’une quinzaine d’années, cheveux orangés, petite gueule d’affranchi qui a goûté à d’autres plaisirs défendus que la colle, me confie son admiration pour les hommes « farangs » Il arrive tout juste de Pattaya où il « travaillait » me dit-il.

Ce qu’il pense des « farangs » ?

« Ils sont gentils  parce qu’ils me donnent de l’argent »

De l’argent contre ce corps maigrichon et sale ! Le savent-ils ces « farangs » d’où viennent ces mômes ? Et s’ils savaient, cela changerait-il quelque chose à leur désir trouble de posséder la chair fraîche de ces gamins crasseux et égarés ?

De retour chez moi, colère et impuissance mêlées m’envahissent. J’embarque Ek quasiment de force jusqu’au magasin chinois où les enfants s’approvisionnent en colle. J’en demande un tube. Regard impassible de la vendeuse. Aurais-je une fois de plus réclamé du « riz » au lieu de la « colle » ? Non, on m’a bien comprise, et on me répond « qu’il n’y en a pas ». Pourquoi les enfants auraient-ils menti ?

Plus tard, je tente de soulever  ce problème avec des professeurs d’Udonphit. Mission ratée. On me dévisage placidement. Avec incrédulité peut-être. Qu’est-ce qu’une « farang »  cherche dans ces endroits mal famés et probablement dangereux ? Non, ils ne connaissent pas ces gamins. Ils ne connaissent pas le marché non plus. Pourtant il est à deux pas de l’école !  Visages lisses. Regards vacants. Sourires gênés.  Non,  pas gênés !  Indifférents. Quoi ? Je me mêle de ce qui ne me regarde pas ?  Au nom de quoi ? D’une simple curiosité de « farang » ?  C’est cela ?

Et si c’était vrai ?  Si ça n’était que cela ?  J’ai fait de bonnes photos après tout ! Je refuse  ce constat d’impuissance.

Trop difficile à admettre.

Alors je me fais une promesse : celle de ne pas fermer la porte à l’espoir et  de tenter « quelque chose ».

Liberte, egalite, fraternite, bon sens…

« Trop de lois tuent les lois. Trop de lois infantilisent » Je cite un lecteur britannique du Bangkok Post. Il continue : « Les pays occidentaux sont en train de régresser avec trop de lois restrictives, trop de règlements de « political correctness ». La FA (Football Association of England) par exemple, poursuit en justice un blanc qui a appelé un noir, « noir » au cours d’une dispute sur le terrain. La cour n’a pas donné suite, mais si ça avait été l’inverse, le noir aurait-il été poursuivi ? » « Trop de règlements émanant de l’Union Européenne ont tué l’Europe. Ces énarques non élus promulguent des lois sans consultation du peuple, au nom de la démocratie alors qu’un des principes de la démocratie c’est la liberte. (Liberte, Egalité, Fraternité).

Les blancs sont-il des méchants définitifs que des lois sont nécessaires – et jusqu’à présent à sens unique – pour les punir d’être les descendants de colonialistes, d’occupants, d’esclavagistes ?… mais le monde s’inverse en permanence, les esclavagistes aujourd’hui sont les richissimes moyen orientaux vis-à-vis des asiatiques qui les « servent »en général (Un Quatari a l’équivalent de 8 « esclaves », pardon serviteurs ou servantes à son service)

L’égalité pour moi c’est : les mêmes lois pour tous, blanc ou noir. J’ai assisté un jour et je l’ai raconté ici, à une insulte d’un noir à l’encontre d’une petite blanche, étudiante travaillant dans un coffee shop. C’était pire, c’était « Sale race ». La petite pleurait, tout le monde a baissé le nez dans son café.

La Thailande est-elle une démocratie, un pays raciste ? Ce que je sais c’est que les thaïlandais sont considérés comme « un des » ou « le » peuple le plus gentil de la planète. Chacun vivant ici peut apprécier la façon dont il est traité. On respecte les professeurs, les personnes âgées, les étrangers. On parle poliment et l’un des termes de base du comportement thaï c’est « krengjai » : avoir peur de gêner, d’offenser, de ne pas être à la hauteur de l’interlocuteur, se mettre en position humble face à lui, faire attention de ne pas lui faire perdre la face etc…

Les thaïs respectent les « autres » en général, pas de «  tu » ou de « vous » ici, mais « nong »« petit
frère », « Phi » « grande sœur ».., respect de la hiérarchie familiale même pour les étrangers, et quand on s’adresse à eux en utilisant le terme générique « khun », ce mot est dérivé du sanskrit et veut dire, « vénéré » Dans la réalité, les thaïs ne sont pas aussi « touchy » que nous européens concernant les appellations…, ils appellent les noirs des « niggros », les jaunes de Chine, du Japon, de Corée, des « djeks », les gens du Moyen Orient et d’Inde, des « khaeeks» et les blancs des « farangs ».

Je suis pour l’égalité des droits et des devoirs et pour le respect réciproque. En un mot pour la fraternité à la thaïe ! Un peu d’air, moins de lois et de règlementations qui infantilisent. Moins de « politiquement correcte » qui nivelle tout. Nommons un chat un chat et so what ? J’ai une femme de ménage que j’appelle ainsi. Elle fait 3 heures de ménage par semaine dans mon appartement, comment devrais-je l’appeler « technicienne de surface » ? Elle fait mon ménage, et je lui fais la bise, je l’écoute me raconter ses problèmes comme une amie, et elle écoute les miens, elle est pleine de bon sens. Ne pourrait-on avoir ce bon sens bordel de merde ? Ce qui est insultant ce ne sont pas tant les mots que le détournement des mots pour cause de fausse pudeur. Est-ce insultant de dire aveugle, sourd ?

Le lecteur british du Bangkok Post ajoute : Les asiatiques ne doivent pas copier l’occident… Eh ! Rassurez-vous monsieur Wilcox, c’est déjà fait, les thaïs regardent de plus en plus vers l’extrême est : Corée, Japon, Chine…..

L’envers du décor

J’ai retrouvé dans le fond d’un tiroir, des négatifs noir & blanc que j’ai fait numériser. Ils sont de très mauvaise qualité, mais les regards sont là : provocateurs, fragiles, revenus-de-tout, malicieux et même séducteurs, fraternels tendres et pathétiques et pourtant toujours prêts à exploser d’un rire espiègle. Relire ma note publiée le 4 juin « Idées reçues et remise en question sans complaisance ». J’y faisais allusion à l’égoïsme, supposé ou réel, des thaïlandais, en citant la journaliste Sawaï Boonma. Et j’y évoquais l’attitude indifférente des professeurs de l’école de Udon – où jetais alors assistante de français – concernant ces enfants perdus sniffeurs de colle, leur drogue bon marché..

Les souvenirs ne sont pas des données informatiques, ils sont patchworks complexes d’histoires, d’images et d’émotions. Ce  bref retour sur l’année 2004 et la replongée dans mes « chroniques d’une farang en pays isan » ont titillé mes neurones, et de connections en émotions, m’ont fait revivre une rencontre aussi belle et qu’éphémère : celle avec un jeune instituteur thaïlandais. Il venait une ou deux fois par semaine passer une heure dans les détritus puants de ce marché en pleine ville, à deux pas de l’hôtel Baan Chiang, pour – bénévolement et de sa propre initiative – apprendre à lire à ces adolescents-fugueurs, qui, l’espace d’une leçon, oubliaient de sniffer leur drogue porteuse d’oubli mais destructrice de neurones.

Ce souvenir fragile est  une petite lumière dans la nuit du désespoir.

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Michèle Jullian

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