Le plus célèbre Africain de la planète, Nelson Mandela, a été emprisonné pendant 27 ans sur l’île de Robben, Robben Island, à sept kilomètres au large de la belle ville du Cap, en Afrique du Sud.
De tout temps, les îles ont été utilisées comme des prisons. Les îles d’Alcatraz, d’If, du Diable ou de Condao évoquent immanquablement des geôles sinistres, surveillées par des matons implacables et séparées du continent par une mer infranchissable.
Pour les militants du monde entier, Robben island constituait l’abomination suprême du régime de l’apartheid.
Visiter Robben Island: un symbole de l’apartheid
L’île de Robben, Robben Island, est un musée depuis 1997. Sa visite débute maintenant dans l’euphorie et la bonne humeur. Le vent tonique fait claquer les voiles du port de plaisance du Cap, les mouettes piaillent, la montagne de la Table règne au-dessus de cette belle ville au bout du continent noir. Les enfants sont excités, les parents déjà excédés.
On vous prend en photo quand vous embarquez dans le ferry de Robben Island. On vous invite à respecter les lieux une fois débarqué, après vingt minutes de traversée, ponctuée de séances de vidéos montrant ce que vous allez voir dans quelques instants. On débarque dans un petit port abrité, à côté d’une plage de galets gris où se dandinent des pingouins Africains et des phoques.
Il y a environ 13,000 pingouins Africains sur l’île. En 1800, ils avaient tous été éradiqués. (© Photo Damien Personnaz)
Le paysage de Robben Island est aride, presque pelé, rongé jusqu’à la racine par des hordes de lapins, aujourd’hui disparus. L’île fait trois kilomètres de long sur deux kilomètres de large, mais paraît plus grande qu’elle n’en a l’air.
La visite se fait avec des anciens prisonniers politiques, reconvertis en guides pour touristes. Billy Nair est l’un d’eux. Il a été emprisonné à Robben Island pour « sabotage ». Petit, un peu voûté, vêtu d’un blouson d’aviateur, il rit et sourit souvent. Il en connaît un rayon.
Le guide et ancien détenu, Billy Nair. (© Photo Damien Personnaz).
Tous les visiteurs de Robben Island ont la gorge serrée quand il évoque la discrimination existante encore dans cette antichambre de l’oubli.
Je me sens claustrophobe. Après deux mois de liberté totale entre l’île de l’Ascension et celle de Sainte-Hélène, le 30 août 2006, j’écrivais dans mon carnet de notes : « Prisonniers A, B, C, chaque lettre octroyant à untel les litres d’eau par jour. Le genre de cellule (deux mètres sur trois), le nombre de couvertures, la ration quotidienne. Dans la cour, on voit les photos officielles des prisonniers prises par un petit groupe de journalistes, triés sur le volet. Pour l’occasion et pour le show, les détenus étaient décemment habillés, propres, presque souriants ».
Il y a la queue devant la cellule de Nelson Mandela ; elle était comme les autres. Tout comme celle de Walter Sisulu ou de Jacob Zuma, l’actuel Président de l’Afrique du Sud qui assistera bien sûr au coup d’envoi de la Coupe de Monde de football, aujourd’hui même. Nelson Mandela n’y assistera pas: la mort de son arrière-petite fille dans un accident de voiture explique cela, ainsi que sa santé fragile.
La cellule de Nelson Mandela. Il passa 27 ans dans une cellule de trois mètres sur deux (© Photo Damien Personnaz).
La visite continue, cette fois à l’air libre. On voit le petit village où vivaient les gardiens. La vue sur la ville du Cap et sur la Table Mountain est magnifique. Chaque détenu pouvait la contempler pendant qu’il cassait des cailloux, été comme hiver.Il n’y a plus de prisonniers politiques depuis 1991, date qui marque la fin de l’apartheid. Toutefois, l’île a détenu des prisonniers de droits communs jusqu’en 1996.
L’île de Robben Island fut une prison de haute sécurité entre 1961 et 1991. Cette île-prison ne date pas d’hier. Depuis 1650, date à laquelle les colons hollandais ont débarqué autour du Cap de Bonne-Espérance, l’île a été utilisée comme centre pénitentiaire. Mais pas seulement : elle a abrité des malades de la lèpre et des handicapés mentaux entre 1846 et 1931, lesquels côtoyaient les prisonniers politiques et de droits communs.
Depuis son classement par l’UNESCO, il n’y a plus que des pingouins, des phoques, des touristes et un gardien de phare et sa femme qui font pousser des tomates et du basilic dans leur jardinet.
La ville du Cap et Table Mountain vues de Robben island. (© Photo Damien Personnaz).