A Mayotte, île française de l’océan indien où l’islam est très fortement majoritaire, les nouvelles unions polygames et la justice musulmane vont être proscrites. Certains hommes grincent des dents. Les femmes, elles, sont plus partagées.
Le gouvernement a décidé, dit-il, « de mettre un terme à l’inégalité entre hommes et femmes en matière de mariage et de divorce, poursuivant ainsi la modernisation du statut civil de droit local applicable à Mayotte ».
Cette île, au sud de l’archipel des Comores, deviendra en 2011 le 101ème département français.
La nouvelle loi interdit de contracter, à l’avenir, de nouvelles unions polygames, et ce sans condition d’âge. Cela va dans le sens des souhaits d’une majorité des habitants. Mais pas de tous.
A Mayotte, le mariage d’un homme avec plusieurs femmes étant toléré, certaines femmes ont dû accepter de « cohabiter » avec d’autres. Par ailleurs, l’ordonnance relève de 15 à 18 ans l’âge légal minimum des femmes pour se marier, comme en métropole et dans les DOM. La répudiation est également abolie.
Elle supprime également la justice « cadiale », une justice rendue par des juges musulmans pour des Mahorais relevant du statut personnel de droit local, dont le fonctionnement « est incompatible avec des principes républicains ».
Compétents pour le mariage, la filiation, la répudiation, les successions, les donations – les cadis ont été installés par les colonisateurs français au XIXe siècle.
Selon un récent sondage, près de 30% des femmes sont en faveur de la polygamie, ou ne sont pas contre.
Pourquoi ?
Outre le respect de la tradition et d’une certaine interprétation du Coran, une partie des femmes de polygames voient dans leur situation une assurance contre toutes sortes de malheurs conjugaux qui sont monnaie courante sur l’île.
Surtout, la majorité de ces femmes ne se font pas d’illusions sur leur mari, qui sont aussi des hommes africains, habituellement assez « olé-olé » sur la bagatelle.
Rivales, la ou les autres épouses du mari sont aussi des égales. Elles partagent les mêmes contraintes et éventuellement les mêmes souffrances. Elles deviennent mêmes des alliées lorsqu’il s’agit de dissuader l’époux d’avoir des aventures extra-conjugales. Contrairement aux maîtresses — illégitimes, mystérieuses et insaisissables — elles ont forcément un nom, un visage, et elles ne salissent pas l’honneur de leur « co-épouse ».
Pour des femmes persuadées que leur mari ne peut leur être fidèle, ces avantages constituent des arguments en faveur de la polygamie.
Que dit le Coran? Réponse dans le verset 3 de la sourate 4 évoquant le mariage: « Et si vous craignez de n’être pas justes envers les orphelins… Il est permis d’épouser deux trois ou quatre, parmi les femmes qui vous plaisent, mais, si vous craignez de n’être pas justes avec celles-ci, alors une seule, ou des esclaves que vous possédez Cela afin de ne pas faire d’injustice (ou afin de ne pas aggraver votre charge de famille) » .
Le Coran permet donc aux hommes de prendre plusieurs épouses, mais n’en fait pas un dogme. Au contraire, il pose une série de conditions qui sont autant de facteurs limitant le recours à cette forme de mariage et qui en font un cas particulier.
Avec l’île de la Réunion, Mayotte abrite la plus forte concentration de musulmans en France.
Avec cette nouvelle ordonnance, la France, laïque et républicaine, vient remettre l’église et le code civil français au milieu des villages de l’océan indien.