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La Première Guerre mondiale : à son évocation, surgit dans les esprits l’image des tranchées et des poilus se terrant dans la boue ou montant à l’assaut des positions ennemies. Les tranchées sont devenues le symbole de la Grande Guerre.
La Première Guerre mondiale est souvent associée à la guerre des tranchées. En effet, 1914-1918 a vu se mettre en place une forme totalement nouvelle de guerre, marquant ainsi une vraie rupture avec les formes de guerre habituelles.
La première guerre mondiale : Une guerre de siège
La Première Guerre mondiale avait débuté par une guerre de mouvement. La bataille de la Marne, du 6 au 9 septembre 1914, permit aux Franco-Britanniques de repousser les Allemands qui menaçaient Paris. Puis, jusqu’en octobre, chacune des deux armées ennemies tentèrent d’envelopper l’autre par le nord : c’est ce qu’on a appelé la « course à la mer » : chacun tenta de prendre de vitesse son ennemi en le débordant par le nord. Aucun n’y parvint et la bataille des Frandres, qui s’acheva en novembre 1914, marqua la fin de la guerre de mouvement. Une nouvelle forme de combat s’imposa : la guerre de position – ou guerre de siège. C’est ce que fut la guerre des tranchées.
En effet, après la bataille de la Marne, les Allemands n’étaient pas menacés par l’ennemi : celui-ci, épuisé et manquant d’assurance après les hécatombes qu’il avait subies en août, n’exploita pas son avantage. Alors, dès que ce fut possible, les Allemands aménagèrent des fortifications et se mirent à creuser des tranchées pour établir une position défensive. Or, ces défenses sont impossibles à détruire car les Alliés manquent d’artillerie à tir courbe. En conséquence, dès la fin septembre, le général Foch, qui s’attend à une attaque allemande, ordonne que « les positions soient maintenues inviolables et que toutes occasions favorables soient saisies pour passer à l’offensive ». La guerre de position est née : il s’agit de tenir sa position et de tenter de chasser l’ennemi de la sienne. On parle parfois de guerre de siège : c’est vrai dans la mesure où les Allemands peuvent être considérés comme les assiégés car ils campent sur le terrain conquis dans une position défensive et parce que les Français, les Anglais et les Belges sont assimilables aux assiégeants par la volonté de libérer la France et la Belgique de la présence ennemie ; mais l’expression n’est pas adéquate car, théoriquement, dans un siège, les assiégés sont coupés de l’extérieur. Or, en 1914-1918, les ennemis, même s’ils s’assiègent mutuellement, restent en contact avec leur arrière par où arrivent renforts et matériel. Sur le front ouest, tout un réseau de boyaux, de tranchées et de barbelés s’étend sur 650 kilomètres, de la mer du Nord à la Suisse. Le front oriental reste plus mouvant, malgré la victoire remportée sur les Russes par les Allemands en août 1914 à Tannenberg : il ne se stabilise qu’à partir de la fin 1915. Cependant, la guerre de tranchées telle qu’elle existait sur le front ouest n’eut pas lieu. Quant à l’affrontement entre Italiens et Austro-Hongrois, le cadre naturel des Alpes empêche de constituer un réseau continu de tranchées mais offre des sites défensifs dans la roche.
Le dispositif était le suivant : une première tranchée, en première ligne, séparée des positions ennemies par quelques centaines de mètres, voire quelques dizaines seulement. Entre les deux, le no man’s land, hérissé de barbelés. D’autres tranchées, construites en parallèles, sont situées et espacées de quelques centaines de mètres et communiquent avec la première ligne par des boyaux. Une deuxième position est établie quelques kilomètres en arrière pour les postes de secours ou le casernement. Pendant quatre ans, les ennemis se font face. Et pendant quatre ans, ils vont essayer, par des offensives, d’user l’adversaire ou de revenir au mouvement. En 1915, Français et Anglais tentent de percer en Champagne et en Artois. C’est un échec mais ces attaques ont eu le mérite d’empêcher les Allemands de mettre tous les moyens pour battre les Russes dès cette année-là pour ensuite placer toutes leurs forces sur le front ouest. De février à décembre 1916, avec la bataille de Verdun, l’Allemagne cherche à « saigner à blanc » l’armée française, selon l’expression de von Falkenhayn. La même année, les Anglais, avec un fort soutien français, engagent l’offensive de la Somme, qui vise à user le plus possible l’armée allemande. En 1917, la bataille du Chemin des Dames est encore une terrible hécatombe pour les Français. Enfin, dans la première partie de l’année 1918, les Allemands lancent plusieurs attaques (en Flandre, en Picardie, en Champagne et sur le Chemin des Dames) qui sont vaines. Ces échecs répétés s’expliquent par plusieurs facteurs. D’abord, même si l’infanterie parvient à s’emparer des premières lignes, elle ne peut s’y maintenir car l’artillerie chargée de l’appuyer ne peut pas progresser dans le no man’s land, paysage chaotique labouré par les obus, où agonisent les blessés et où pourrissent les cadavres. Ensuite, l’ennemi, n’étant pas isolé car en relation avec ses arrières, reçoit des renforts en hommes et matériel, ce qui a pour effet de freiner puis d’enliser l’offensive. Enfin, l’artillerie, pièce maîtresse dans la guerre des tranchées, ne se tait jamais : elle vise à créer des brèches au sein du dispositif ennemi pour ensuite s’engouffrer à l’intérieur. Fin juin 1916, lors de la bataille de la Somme, la préparation d’artillerie franco-anglaise n’avait eu aucun précédent depuis le début du conflit. La capacité d’artillerie des deux camps s’équilibre et, en conséquence, il est impossible d’échapper à la guerre de siège.
La guerre des poilus : Combattre dans les tranchées
Généralement profondes de 2 à 3 mètres et larges de 50 à 80 centimètres, les tranchées sont en perpétuel aménagement. Des étais en bois sont placés sur les parois et des planches au sol pour éviter la boue. La lutte contre la boue : c’est ce qui a le plus marqué le combattant. Un rédacteur du Bochofage, un journal de tranchée, écrit : « L’enfer, ce n’est pas du feu. Ce ne serait pas le comble de la souffrance. L’enfer, c’est la boue. » Toutefois, les tranchées allemandes sont mieux aménagées que celles des Français et des Britanniques. Ils disposent parfois de véritables réseaux souterrains, d’abris en bétons avec chauffage et électricité. L’infanterie occupe une bonne partie de son temps à aménager et à renforcer les tranchées.
Faire la guerre dans les tranchées, c’est s’adapter à une forme de combat radicalement nouvelle. Lors d’une offensive, les soldats doivent donner l’assaut en sortant de la tranchée pour se diriger sur la première ligne ennemie. L’attente précédant l’attaque était particulièrement angoissante, comme l’atteste cet extrait d’un journal de tranchée, L’Argonnaute :
« A quatorze heures, la troisième section de la cinquième compagnie attaquera la barricade. […] Je regarde encore ma montre… quatorze heures, presque. Le sergent Lair qui commande le petit groupe d’attaque a fait le même geste que moi. Nous regardons encore… Cinq minutes et un bond dans l’inconnu. […]
Les quinze hommes de l’assaut sont là, dans le boyau, l’air tranquille. Ils attendent la minute décisive. […] Deux ou trois hommes seulement paraissent nerveux. Ils regardent à droite et à gauche avec une sorte d’inquiétude animale. » [1]
Au moment de l’attaque, les soldats sortent de la tranchée en montant à une échelle qu’ils ont nommée « échafaud ». Les mitrailleuses ennemies font des ravages, fauchant les hommes les uns après les autres. Un autre texte, extrait d’un journal de tranchée intitulé L’Écho de Tranchées-ville, datant du 28 octobre 1915, donne un aperçu terrifiant de ce qu’était l’assaut :
« La fusillade crépite là-bas devant nous. Les mitrailleuses dévident leurs rubans de mort. Tac, tac, tac, tac. Nous rejoignons les camarades, mais, horreur, nous nous heurtons à une barrière de fils de fer barbelés intacte et profonde de plus de trente mètres. Pendant ce temps, les mitrailleuses ennemies continuent : tac, tac, tac, tac tandis que nous voyons à droite, à gauche, les camarades tomber et joncher la terre. […] En avant, quelques poilus qui ont réussi à se couler sous les fils de fer atteignent la tranchée des empoisonneuses. Ils sautent dedans mais hélas on ne les a pas revus… » [2]
Les armes utilisées au front sont principalement la mitrailleuse, indispensable pour répondre à une attaque massive, la baïonnette fixée au bout du fusil, la grenade à main ou à manche pour le combat rapproché et le corps à corps. Les Français, dès 1915, ont troqué le pantalon rouge, qui faisait des soldats de vraies cibles vivantes pour l’ennemi, contre l’uniforme bleu horizon, beaucoup plus discret. Tous les soldats sont aussi équipés de casques afin de se protéger des bombardements. Car l’artillerie joue un rôle prépondérant dans la guerre de siège : les Allemands possèdent un mortier léger, le Minenwerfer, dont les tirs s’abattent verticalement sur les combattants ennemis. Les Français, dans la seconde moitié de 1915, reçoivent le crapouillot, un matériel portable pour la tranchée. Quant à l’artillerie lourde, elle est beaucoup plus puissante mais, comme nous l’avons évoqué plus haut, les capacités de destruction des deux camps tendent à s’égaliser, empêchant la fin de la guerre de siège.
Une autre forme de combat, souterraine, fait son apparition : en effet, des galeries sont construites, sous terre, jusque sous les positions ennemies et l’on y place des mines que l’on fait ensuite exploser. Ainsi, à Vauquois, un petit village situé entre Meuse et Argonne, Français et Allemands se livrent, de l’été 1915 à 1917, à une guerre de mines qui bouleverse le paysage. Par exemple, le 3 mars 1916, une mine allemande de quatre tonnes explose sous les tranchées françaises qui sont ainsi rayées du paysage, enterrant les hommes vivants. Dix jours plus tard, les Français font sauter une mine de douze tonnes qui provoque la formation d’un cratère de 45 mètres de diamètre et de 12 mètres de profondeur. La partie en surplomb qui se forme est alors prise par les Français. Enfin, le 14 mai, une nouvelle mine allemande explose, formant un cratère long de 70 mètres et profond de 30 mètres. En 1918, les Allemands se retrouvent encerclés et coupés de leurs arrières lors de la contre-offensive alliée et se rendent.
Enfin, une arme nouvelle terrorise particulièrement le combattant : les gaz asphyxiants. Ils sont utilisés pour la première fois par les Allemands le 22 avril 1915. S’ils ne sont pas très meurtriers, en raison des équipements de protection rapidement mis au point par l’ennemi, la terreur qu’ils procurent était bien réelle, notamment parce qu’ils infligent une mort totalement nouvelle.
Le quotidien des poilus : Vivre dans les tranchées
La vie dans les tranchées est extrêmement difficile : les « poilus » – appelés ainsi parce qu’ils ne se rasent plus – vivent tantôt dans la boue, tantôt dans la poussière, toujours parmi les rats et assaillis par les poux. Ils restent en général une quinzaine de jours en première ligne, parfois sans eau pour se laver. L’odeur des cadavres en décomposition et des déjections, les hommes agonisant sur le no man’s land, l’artillerie ennemie qui fait pleuvoir ses obus, en rajoutent encore dans l’horreur et dans la fatigue physique et psychologique. Ces conditions totalement nouvelles et épouvantables de la guerre ont amené à une « brutalisation » des hommes qui font preuve d’une cruauté dont ils ne se seraient pas crus capables en temps de paix : on exécute des prisonniers, on utilise des civils comme boucliers. Ou encore, quand le soldat guette au loin la tranchée ennemie, il peut se comporter tel un chasseur épiant sa proie, attendant avec impatience la vue d’un soldat ennemi qu’il prendra plaisir à tuer…
La montée en première ligne est un moment éprouvant également : le trajet se fait de nuit, avec trente kilos de paquetage sur le dos et dans les boyaux boueux.
Pendant les moments d’accalmie, les soldats s’occupent. L’écriture d’abord. Les lettres aux proches sont très nombreuses. Elles traduisent le lien très fort que les combattants ont gardé avec l’arrière : ils s’inquiètent de l’état des récoltes ou des résultats scolaires de leur progéniture… Les poilus ont créé, dès les débuts de la guerre de siège, des journaux de tranchée, que nous avons déjà évoqués pour les citer. Les hommes tiennent aussi des carnets personnels.
L’artisanat de tranchée a été un aussi passe-temps dont on a beaucoup de témoignages : obus ou douilles sculptés, briquets, instruments de musique, bagues, grenades, armes blanches, cadres pour photo, tabatières… Beaucoup de ces objets font office de cadeaux aux proches lorsque le soldat revient en permission. D’autres sont destinés au propre usage du combattant, parfois comme talismans. Ces activités multiples (écriture, artisanat…) montrent que les hommes n’avaient totalement perdu leur humanité au front.
Dans les conditions aussi terribles que celles de la guerre de siège, comment les soldats ont-ils tenus ? Le patriotisme a joué un rôle très important avec l’hostilité à l’égard de l’ennemi : pour les Français, l’Allemand est le « Boche », pour les Anglais le « Hun » ; aux yeux des Allemands, le Français est le « Franzmann » et le Russe un sous-homme. Chaque camp prétend défendre la civilisation, sa patrie, sa famille. Par ailleurs, la solidarité qui se crée entre les « frères d’armes » permet aussi de supporter les horreurs de la guerre.
Le retour au mouvement : la fin de la guerre de siège
La guerre de siège prend fin en 1918 avec l’échec des offensives allemandes commencées en mars. En effet, les Allemands, soulagés à l’est – ils ont signé la paix de Brest-Litovsk avec les bolcheviks le 3 mars –, cherchent à percer le front ouest avant que l’arrivée des Américains fasse sentir tous ses effets – les États-Unis sont entrés en guerre l’année précédente aux côtés des Alliés. Ils enfoncent le front en Picardie, en Champagne, en Flandre et se rapprochent dangereusement de Paris. Cependant, ils ne parviennent pas à effectuer la percée tant souhaitée depuis quatre ans. Et, au contraire, ce sont les Alliés qui lancent une contre-offensive à partir de juillet 1918 et permettent le retour à la guerre de mouvement. Ce retour s’explique par plusieurs facteurs : l’utilisation des tanks, arme nouvelle apparue en 1916 mais réellement opérationnels à partir de l’été 1918 ; le rôle de l’aviation alliée dont les escadrilles dominent les airs en 1918 et survolent et bombardent les lignes ennemies ; l’apport américain qui permet un remplacement des effectifs plus fréquent ; l’épuisement des armées allemandes après leur offensive qui ne disposaient plus d’effectifs de réserve.
La guerre du XIXe siècle est morte dans les tranchées : la guerre de 1914-1918 marqua le début d’un terrible XXe siècle qui s’illustrera par bien d’autres horreurs.
[1] Cité par AUDOIN-ROUZEAU, Stéphane et BECKER, Annette, dans La Grande Guerre. 1914-1918, Paris, Gallimard, « Découvertes », 1998, p. 130.
[2] Ibid., pp. 131-132.
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