La « République Guarani », un rêve massacré.
29 août,
Arrivée à Corrientes au camping Municipal qui pourrait être très joli dans son parc s’il n’était aussi sale. Le temps
tourne à l’orage et nous profitons d’une accalmie pour aller visiter le musée en bordure du Parana où sont exposées les sculptures du concours organisé tous les deux ans dans la ville et qui
reçoit des sculpteurs connu et des étudiants des beaux arts.
A l’entrée du camping un « palo boracho » ces magnifiques arbres en forme de bouteille, d’où leur nom. Par contre les arbre
aux grosses fleurs roses que nous avions vus et photographiés à Tigre et qu’on nous avait dit être des « palo boracho » sont en fait des kapokiers dont le fruit donne le kapok !!
Un « Palo borracho » à la forme si caractéristique. Il stocke dans son tronc en forme de bouteille non pas du vin mais de
l’eau !
30 août,
Résistencia. Nous nous garons dans le beau parc Mitre en bordure du Parana en laissant Zébulon sous la garde des chauffeurs
de taxi pendant que nous allons visiter la ville et le musée de l’artisanat. Le musée en lui même n’a rien d’exceptionnel, par contre nous rencontrons un gaucho très âgé qui fait des ceintures et
des harnais avec du cuir de vache séché au soleil qui est la façon traditionnelle des gauchos pour tanner le cuir et qui nous a raconté comment il est venu travailler au centre artisanal, il y a
une quinzaine d’années, à la suite d’un accident. Un jour, il avait pris un jeune cheval pas tout à fait « almanecado », joli mot qui vient de almanecer( aube, point du jour, lever du soleil ),
donc, :-), en français, pas tout à fait débourré, pour aller chercher un taureau. Mais, lorsque il à lancé le lasso court avec les deux boules, le jeune cheval prenant peur, a fait un écart, de
telle sorte que le taureau a pris une des boules sous l’oeil. Sur le coup, au moment où le gaucho tentait de renvoyer le lasso, le taureau les à chargés, le cheval s’est cabré de peur et pour se
libérer a piétiné son cavalier qui était tombé et sur lequel, le taureau s’acharnait déjà. Comme à cette époque là, il était déjà assez âgé, il n’a pas pu reprendre son travail de gaucho et est
venu là, au centre artisanal pour faire des harnais à double ou triple tresse de cuir et ces ceintures très larges de gauchos ornées de boucles d’argent et de broderies réalisées avec de très
fines lanières de cuir de chèvre, travail qu’il savait déjà faire lorsqu’il était gaucho, puisque paraît-il, autrefois les gauchos faisaient eux même leurs équipements en cuir.
Le soir, nous faisons étape à Itati dans la rue près de l’énorme basilique construite pour la Vierge d’Itati, une statue du
XVI° siècle et une des vierges les plus célébrées en Argentine. Rencontré en fin d’après midi, un couple de français qui eux ,voyagent avec une voiture de location et qui sont là jusqu’au début
octobre.
Corrientes : Au loin les jacaranda du Paraguay, les mêmes qui entourent la place à Résistencia et faisaient cette
lumière rose.
31 août,
Toujours le Chaco très vert et luxuriant bien plus agréable à traverser que les grandes plaines de champs de coton et de
cannes à sucre que nous avions traversé jusqu’à Resistencia .
Arrivée à San Ignacio en fin d’après midi où nous nous installons sur le parking jardin de l’hôtel Aventura qui accepte de
reçevoir les campings cars. Alors que je sors du centre d’informations touristiques pour réserver une visite en 4*4 des missions paraguayennes, nous rencontrons « Les Toto » un couple de
camping-caristes que nous avions rapidement croisés à Salta et à San Pedro de Atacama.
Le 1er septembre,
Dans la nuit le temps s’est mis à l’orage, orage qui durera toute la journée. Du coup notre expédition au Paraguay tombe à
l’eau, c’est le cas de le dire et nous restons au camping-car toute la journée. Je travaille sur le blog, avec difficulté : 4 heures pour télécharger quelques photos et une page ! et nous avons
Fred par Skipe que nous n’avions pas eu depuis plus de un mois, pour cause de vacances en France
Les pauvres restes de la réduction de Trinidad au Paraguay. Au premier plan…une termitière !
Le 2 septembre,
Il pleut toujours à verses mais nous décidons d’aller au Paraguay en bus. Attention, c’est toute une
expédition D’abord 1 heure dans un bus, très confortable jusqu’à Posada. Là, on prend un bus nettement moins
confortable jusqu’à Incarnation. Comme il est déjà 13 heures nous décidons de manger un bout puis nous allons au terminal des bus d’Incarnation pour prendre un autre car qui nous amène jusqu’à
Trinidad une des trois « réduction » Jésuite du Paraguay. Manque de bol, lorsque nous arrivons on nous annonce qu’il n’est pas possible de payer les billets d’entrée en pesos argentins ou plutôt
que oui, ils veulent bien des pesos mais à condition de nous rendre la monnaie en Guaranis ce que nous ne voulons pas, puisque nous sommes au Paraguay seulement pour la journée. On se fouille les
poches, et nous aurions la monnaie pour payer les entrées au tarif « Latino », un peu plus élevé que le tarif « locaux »mais moins cher que le tarif « étrangers » mais la fille de l’entrée ne veut rien
entendre ! Il n’y a pas un chat dans les ruines où nous serions seuls mais elle refuse de nous vendre les billets au tarif latino alors, on fait un tour par l’extérieur puis on repart attendre un
bus sur la grande route. Après 1/2 heure d’attente un vieux, vieux bus nous embarque jusqu’au terminal d’Incarnation . :-)) Mon siège est cassé et je suis assise par terre, tandis que trois rangs
plus haut Gil sur son siège fait la bascule avec son dossier cassé lui aussi …. Bref, cahotant, tant bien que mal, nous arrivons à Incarnation et là le trajet recommence, bus jusqu’à Posada,
avec une longue attente à la douane, le bus de Posada ne nous ayant pas attendus pendant que, contrairement au frontaliers, nous devons faire tamponner nos passeports, et puis Posada/ San Ignacio
encore 1 heure de bus dans un autre bus bringueballant qui à un moment se met à cracher de la fumée dans l’habitacle à la grande émotion des passagers, mais bon, il pleut toujours, qu’à cela ne
tienne, on ouvre grand les vitres pour évacuer les odeurs de plastique brûlé et on continue . Arrivée à San Ignacio à
21 heures trente ! Bien contents tout de même de notre journée et surtout d’avoir un nouveau tampon d’entrée en Argentine qui va jusqu’au 1er décembre, donc largement le temps d’attendre le
bateau à Buenos Aires .
Le challenge était, à cause du passeport temporaire de Gil, re rentrer en Argentine avant le 3 septembre pour avoir les six
mois de validité requis et que cette re-rentrée en Argentine nous permette d’avoir les 90 jours de transit temporaire qui se termine après le départ du bateau Challenge réussi
Le 3 septembre
Toujours la pluie, nous faisons tout de même un grand tour dans le village de San Ignacio, puis nous passons à la Réduction
jésuite pour voir si le son et lumière aura lieu ce soir, mais à cause de la pluie, bien entendu il est reporté. Nous décidons donc de rester un jour de plus pour voir si ça se lève.
Réduction de San Igniacio.
Le 4 septembre,
Ce matin beau temps, mais là, à l’heure ou j’écris, à nouveau ça se couvre…. On va tout de même aller visiter la
Réduction et on verra si ce soir il y aura ou non le show son et lumières….
Et oui, il s’est remis à pleuvoir ! Nous sommes allés visiter la réduction jésuite sous le parapluie ! Superbe
endroit d’ailleurs, construit en grès rose, la pierre de la région, mais à l’époque, les bâtiments étaient entièrement recouverts d’un enduit blanc obtenu à partir de coquilles d’escargots
pilées.
Les Missions jésuites comme celles que nous avons visité à Jésus-Maria étaient de grandes estancias où vivait une
importante communauté de religieux. Au contraire ce qu’on appelle » Réduction » relévent d’une expérience qui va à l’encontre des structures coloniales espagnoles de l’époque, les jésuites
affirmant vouloir « libérer » le peuple Guarani de la servitude en s’efforçant de comprendre la culture indigène et en fondant leurs relations avec les Guaranis sur l’échange de savoirs. Ils ne
remettent pas en cause l’autorité héréditaire des chefs, caciques et chamans, base de la structure sociale Guarani, ni leurs traditions, ni leur langue, allant même jusqu’à traduire les Ecritures
en Guarani, reconnu comme la langue officielle des missions. Bien entendu il reste des points de friction comme la polygamie des caciques, mais l’essentiel de la culture native est respecté,
faisant l’objet d’échanges culturels comme par exemple, la connaissance des plantes médicinales de la forêt, l’utilisation des différentes essences de bois pour la construction ou la menuiserie
etc… tandis que les jésuites transmettent leurs connaissances en matière d’architecture, d’ingéniéries, d’art ( sculpture de la pierre, du bois, peinture, musique…. ) Les Guaranis viennent
volontairement dans les réductions pour bénéficier d’une protection, d’une sécurité alimentaire, et de l’enseignement, la religion chrétienne est bien sur très présente, mais absolument pas
obligatoire.
Je ne suis pas très grande mais tout de même Ce cactus dans le jardin des jésuite à San Isidro est énorme !
Les réductions sont toutes construites selon le même plan d’ensemble :
Autour de la grande place centrale en forme de rectangle et faisant face à l’entrée de la réduction on trouve l’église et
le « collége »qui est la résidence des jésuites ( seulement deux ou trois religieux par réduction). A gauche en sortant de l’église, la maison du gouvernement et les maisons des caciques un peu
plus grandes que les maisons des artisans et des ouvriers agricoles. Sur l’aile droite de la grande place centrale, une rue entre les maisons donne accés à une autre place plus petite avec autour
les ateliers, forge, travail du bois, de la pierre, ateliers de fabrication d’instruments de musique ( violon notamment ) peinture, chant, dorure, imprimerie etc… c’est à la réduction de Loreto
qu’à été imprimé le premier livre en Amérique Latine et à Santa Maria Majore qu’à été écrit et imprimé le premier livre écrit par un guarani. Dans ces ateliers, les jésuites, soit les jésuites
résidents, soit des jésuites invités vennant d’autres réductions en visite,ou des Missions, transmettaient leurs techniques qui étaient ensuite enseignées aux enfants Guaranis par les artisans
ayant atteint un bon niveau d’expertise. Derrière la place des ateliers se trouvait l’école où les jésuites enseignaient les enfants des caciques. Derrière la résidence des jésuites,( le collège
) une galerie ouvrait sur le jardin des jésuites où ils faisaient pousser les légumes et les arbres fruitiers dont ils avaient besoin, pour leur consommation propre, ainsi que les plantes
médicinales endémiques dont ils avaient appris les vertus des Guaranis.
Derrière la maison du gouvernement se trouvaient des entrepôts où la nourriture était distribuée journellement sous
l’autorité des caciques, les Guaranis, traditionnellement nomades, n’ayant pas le sens du stockage de la nourriture. Derrière les maisons des artisans et des ouvriers, chaque famille disposait
d’une petite parcelle où chacun pouvait cultiver les légumes ou fruits de son choix. Autour de la réduction se trouvait la partie agricole, plantation de maté ( les jésuites ayant trouvé le moyen
de reproduire les arbres à maté ) de maïs, de manioc, élevage de bovins et d’ovins, où tous ceux qui n’étaient pas artisans travaillaient. La récolte ou les bénéfices revenant à la
collectivité.
Réduction de Trinidad au Paraguay
Au début du XVIII° siècle, cette forme de « colonisation » sommes toutes nettement plus acceptable que les autres, connait
une opulence extraordinaire. Les plantations de maïs, de manioc, de légumes et de maté prospèrent, favorisant ainsi une agriculture originale, fondée sur les traditions locales et tirant le
meilleur parti des ressources naturelles du pays. Les trente réductions jésuites en territoire Guarani, au Brésil en Argentine et au Paraguay passent de 29 000 habitants en 1647 à 141 000 en 1732
! Ils possédent en tout 200 000 têtes de bétail tandis que d’importants liens commerciaux les relient aux colons de la région mais aussi aux villes du sud comme Buenos Aires ou Santa Fé où elles
exportent leurs productions non seulement agricoles mais aussi industrielles: métallurgie, horlogerie.
Evidement, s’en est trop et pour les colons, et pour la Couronne d’Espagne, qui finit par expulser les jésuites des
missions et des réductions en 1768, ce qui sonne le glas de ce qui avait été appellé » La République Guarani ». Les Réductions seront définitivement détruites lors des invasions portugaise et
paraguayennes de 1816 à 1819,à ce moment là, la plus par des Guaranis s’exilent vers la région voisine dans les marais de Corrientes, espérant ainsi echapper à la servitude et à l’esclavage
promis et le pillage des matériaux au début du XX° siécle pour construire les demeures des nouveaux émigrants parachèvera le désastre.
- Les Maramures ; terre profonde et authentique de Roumanie - Juil 3, 2018
- Villages Saxons de Transylvanie ; une portée d’entrée en Roumanie - Juil 1, 2016
- Entre riante Bucovine et Transylvanie… - Juil 5, 2014