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Trouville, le havre des artistes

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 trouville plage (WinCE)

 

 

 

Trouville, contrairement à Deauville, a eu l’avantage d’être découverte, non par des financiers et des
promoteurs, mais par des artistes. En ce coin privilégié du littoral, ils se sont toujours sentis chez eux ; ce, depuis le temps où la mère Ozerais accueillait Alexandre Dumas. A sa suite,
d’autres artistes s’y sont installés, y ont résidé, peint, écrit, tourné des films, photographié, construit. Autre avantage, qui n’est pas l’un des moindres, Trouville a su grandir sans se
défigurer. Cela grâce aux personnalités éclairées qui se sont succédées pour lui donner le visage qu’elle a aujourd’hui : Couyère l’artisan des premiers travaux d’infrastructure, le comte
d’Hautpoul, le baron Clary et, à partir de 1935, le bienfaiteur de la ville, dont le quai porte le nom, Fernand Moureaux. Quant au nom de Trouville, d’où provient-il ? Sans doute d’un toponyme
hybride, mi-roman, mi-scandinave. Le trou ou Thörulfr dériverait du nom du possesseur du lieu,  à l’origine un Viking prénommé
Turold, l’un de ces nombreux et fameux navigateurs qui descendirent des brumes de Norvège ou du Danemark à bord de leurs drakkars et surent faire souche en épousant des jeunes filles du cru, nous
donnant l’exemple d’une assimilation parfaitement réussie.

 

A une heure du matin, le samedi 4 janvier 1549, le sire de Gouberville quitta Honfleur avec chevaux
et valet. Il partait en pleine nuit pour «avoir la grève », c’est-à-dire profiter de la marée basse pour atteindre Trouville au passage de la Touques. Dans l’ombre nocturne, les cavaliers
avaient à éviter les moulières et roches noires, mais le chemin était plus aisé, plus court que les mauvaises routes de l’époque.
Il s’agit bien de Trouville où le bac et ses passeurs étaient utilisés lorsque l’heure tardive et le flot, grossi par la marée montante, incitaient
à la prudence. Mais le jour, on n’était point contraint à cela. Les cavaliers passaient la rivière à gué et les piétons utilisaient la barque de traversée. A marée haute, un bateau passager de
plus grande taille embarquait les uns et les autres.

 

Aux alentours de 1600, Trouville était déjà un havre, c’est-à-dire un abri, un refuge pour les navires. En 1599,
Robert Esnault d’Hennequeville arme un bâtiment pour aller s’approvisionner en sel jusqu’aux rivages de Galice et il n’est pas rare que d’autres armateurs envisagent des courses jusqu’en Ecosse,
au Portugal, au Pays-Bas et à Terre-Neuve. A Trouville, en ces temps anciens, on pouvait être à la fois cultivateur, propriétaire de saline, maître et bourgeois de navire. Au XIXe siècle,
Flaubert parlera d’une falaise surplombant des bateaux. Avant d’être reine des plages, Trouville fut d’abord et avant tout …un port.
Quand la population commença de s’accroître à la fin de l’ancien régime, le village initial, aux masures couvertes de chaume, était devenu trop étroit au pied du vallon de Callenville. Désormais les demeures ne cesseront plus de gagner sur la dune et d’occuper les étendues sableuses de la péninsule de
la Cahotte. C’est ainsi qu’un certain Pierre Grégoire Ozerais fait l’acquisition d’une portion de terrain en herbe le 17 mai 1783 pour y construire une maison, qui deviendra peu de temps après
l’auberge du Bras d’or, tandis que la bourgade de pêcheurs poursuit tranquillement son développement. La construction navale prospère et le quai ne sert plus seulement à l’accostage des
barques de pêche, mais au déchargement des navires marchands.


Mais voilà que par une journée de l’été 1825 arrive d’Honfleur, à marée basse, par le chemin de grève, un peintre de 19 ans qui va poser son chevalet et planter son parasol sur les bords de la
Touques. Il s’appelle Charles Mozin et il est tellement séduit par le paysage qu’il décide de résider là un moment et prend pension à l’auberge du Bras d’or. Bien que celle-ci ne soit pas
particulièrement confortable, le lieu l’enchante et le jeune peintre ne se lasse pas de dessiner Trouville sous toutes ses facettes : ses collines verdoyantes, ses pêcheuses sur la plage, ses
barques dans la tempête, son estuaire au flux ou au jusant et, par-dessus tout, les ciels qui varient de couleur et d’intensité à chaque heure. Mozin vient de lancer Trouville sans le savoir. Il
est bientôt rejoint chez la mère Ozerais par Eugène Isabey, Paul Huet, Alexandre Decamps et Alexandre Dumas. Si bien que le monde élégant n’a plus qu’à suivre, après qu’il y ait été encouragé par
les descriptions de Dumas et les toiles de Mozin.

Une des premières personnalités à acquérir une demeure sera la comtesse de Boigne, célèbre mémorialiste, qui achète en
mars 1850 quarante ares d’une propriété qui faisait autrefois partie du presbytère de l’église Saint Jean-Baptiste, acquise par un cultivateur lors de la vente des biens du clergé. Elle et son
ami le duc Pasquier, ancien conseiller d’état et préfet de police de Paris, membre de l’Académie française, seront les personnalités influentes qui contribueront à la prospérité de la
région.

 

Le 1er juillet 1847 a lieu l’ouverture du nouveau Salon des bains de mer sur un terrain ayant
appartenu au docteur Olliffe, ce même docteur qui avait incité le frère de l’empereur, le duc de Morny, à s’intéresser aux étendues marécageuses qui se déployaient à perte de vue de l’autre côté
de la Touques… Mais pour lors, Deauville n’existe pas et Trouville brille déjà de tous ses feux. Les bains de mer sont à la mode,  la petite ville
ayant pris le relais de Dieppe lancé par la duchesse de Berry. En 1845, le comte d’Hautpoul est élu maire. Il est le fils du général d’Hautpoul, tué à la bataille d’Eylau et de la princesse de
Wagram, fille du maréchal Berthier. C’est lui qui  va marquer le paysage architectural de la ville, alors que son épouse s’emploiera à des tâches
charitables. Tandis que le comte termine les travaux de l’église Notre-Dame des Victoires, offrant sur sa cassette personnelle le maître-autel, l’une des cloches et la décoration picturale, la
comtesse Caroline inaugure ses orphelinats et ses maisons ouvrières. A ce moment, Trouville a doublé sa population qui s’élève au respectable chiffre de 3.504 h
abitants. Aux aristocrates du début, qui ont bâti les premières grandes villas, ainsi la villa persane de la princesse de Sagan, celles de Monsieur
de la Trémouille ou de la marquise de Montebello ou encore de Gallifet, s’ajouteront, à partir de 1860, la villa de Formeville, celle du docteur Olliffe, voisine de la villa de Monsieur Leroy
d’Etiolle, tant et si bien que le modeste petit port est devenu un lieu de villégiature recherché par des estivants tout autant épris de sport et de grand air que de confort et de
mondanités.

Les activités sportives constituent, en effet, un élément majeur de la vie balnéaire qui se doit d’être une fête
permanente. Aux bains de mer, appréciés pour leurs vertus thérapeutiques, et aux courses de chevaux pratiquées dans une région qui a la réputation d’être le paradis de ce noble animal,
s’ajoute la plaisance qui séduit une clientèle de plus en plus large. C’est à Trouville qu’est créée la Coupe de France en 1891 et en 1906 les épreuves de régates dureront deux jours et seront
remportées par une équipe allemande. Trouville aura aussi son vélodrome et, en 1893, le premier Paris-Trouville sera patronné par le Journal et ouvert aux vélopédistes comme aux
tandémistes. Comment s’ennuyer à Trouville dont la municipalité met sur pied une fête des fleurs avec un défilé de 300 voitures, des tournois de lutte, un championnat international de catch ?
Enfin il y a le casino qui a été complété par une salle de spectacle, si bien que cette fin du XIXe voit la cité au faîte de sa renommée.

 

C’est l’époque des artistes et des peintres et Dieu sait qu’ils seront nombreux à apprécier ce village
de pêcheurs qui avait tant séduit Mozin, du temps où il était inconnu, mais qui ne leur déplait pas aujourd’hui qu’il a été rattrapé par le succès. Dans les rues montantes couronnant sa colline,
sur la plage ou la jetée, on croise Boudin, Courbet, Whistler, Monet, Corot, Bonnard, Charles Pecrus, Degas, Helleu, Dufy, Marquet, Dubourg, pour ne citer que les plus prestigieux. Davantage que
le pittoresque, c’est la qualité de la lumière qui fascine, le duo subtil de l’eau et du ciel, les masses de couleurs distribuées par l’ocre des sables et les toilettes des femmes, les jeux
d’ombres perpétrés par les parasols et les ombrelles qui deviendront emblématiques de l’impressionnisme. Tous essaieront de rendre sensible les vibrations de la lumière, les glacis fluides qui
l’accompagnent et cet aspect  porcelainé dont parlait Boudin. Sans doute doivent-ils à cette atmosphère quelques-unes de leurs plus belles
toiles. Mais les peintres ne sont pas les seuls à être subjugués par la beauté des lieux : les écrivains ne sont pas en reste. Au manoir de la Cour Brûlée d’abord, ensuite dans celui des Mûriers
qu’elle fera construire, Madame Straus, veuve du compositeur Bizet, transporte et prolonge, à la saison estivale, son salon parisien. Après Flaubert, qui était tombé amoureux à Trouville de la
belle Madame Schlésinger : « Chaque matin, j’allais la voir se baigner. Je la contemplais de loin sous l’eau ; j’enviais la vague molle et paisible qui battait ses flancs et couvrait d’écume
sa poitrine haletante ; je voyais le contour de ses membres sous les vêtements mouillés qui la couvraient. Et puis, quand elle passait près de moi, j’entendais l’eau tomber de ses
habits » –
écrira-t-il de celle qui lui inspira le personnage central de son roman   « L’éducation sentimentale » – après Alexandre Dumas qui appréciait à
Trouville sa belle chambre à l’hôtel du Bras d’or et les repas c
opieux qu’on lui servait pour un prix dérisoire, apparaît, comme
le familier du s
alon de Geneviève Straus, Marcel Proust. Certes, il avait déjà séjourné avec sa mère à l’hôtel des
Roches-Noires, mais ce seront les vacances passées auprès de ses amis Straus et Finaly qui lui laisseront le souvenir le plus prégnant.  Il y
retrouvera ses camarades du lycée Condorcet, Jacques Bizet, Jacques Baignières, Fernand Gregh, Louis de la Salle, et se plaira à être l’un des habitués de ce cercle « 
Verdurin-sur-mer ».Le soir, on s’attardait à bavarder sous les tonnelles où couraient les ampélopsis et les chèvrefeuilles, tandis que Mme Straus, bien campée sur son  trône en rotin, bavardait avec Edgar Degas et Anna de Noailles, Guy de Maupassant et Abel Hermant, Léon Delafosse et Charles Haas.

Le train à voie étroite ramenait chaque été son lot de villégiaturistes. Les passagers descendaient
enveloppés dans des pelisses, les femmes dissimulées sous des voilettes qui les protégeaient des escarbilles. Les calèches attendaient devant la gare, inaugurée en 1863, trois ans après le pont
de la Touques et qui, dorénavant, reliait Trouville à Deauville, sa cadette. Après-midi embaumés sous les vérandas, siestes rêveuses derrière les jalousies, promenades dans les sentes qui
longeaient la mer, d’où l’on respirait le parfum mêlé de feuillées, de lait et de sel marin. «  Nous étions sortis d’un petit bois et avions suivi un lacis de chemins assez fréquentés
dans la campagne qui domine Trouville et les chemins creux qui séparent les champs peuplés de pommiers chargés de fruits, bordés de haies qui laissent parfois apercevoir la mer, (…) le plus
admirable pays que l’on puisse voir dans la campagne la plus belle avec des vues de mer idéales ».
(Marcel Proust – Lettre à Louise de Mornand – 1905 )

 

Quant à Deauville, elle commençait de s’émanciper et la période 1910-1912 sera décisive pour les stations des deux
rives de la Touques. Trouville n’était plus la seule à capter l‘attention ; il fallait compter avec Deauville. La lutte fut d’autant plus rude que s’y mêlèrent politique, lutte des classes et
rivalités de personnes. Ce fut entre autre la guerre des casinos. Les joueurs et les milieux mondains s’amusaient à parier sur l’un ou sur l’autre, selon la montée ou la baisse de leurs
actions…Mais bientôt la mise fut remportée par le magicien de la nuit Eugène Cornuché qui entraîna les initiés dans le somptueux établissement qu’il inaugurait à Deauville. Les Trouvillais
n’avaient plus que leurs larmes pour pleurer ; mais voilà que des nuages s’accumulaient à l’horizon et que le tocsin s’apprêtait à retentir dans toutes les églises de France : la déclaration de
guerre, cette guerre née de la compétition des grandes puissances européennes, eut lieu durant l’été 14 , si bien que les casinos rivaux se virent réquisitionnés comme « hôpitaux
complémentaires » et  les joueurs relégués à d’autres tâches.

 

Lorsqu’au début de 1916 les blessés furent transférés à la caserne Hamelin de Caen, les casinos furent
rendus à la vie civile et, dès septembre 1916, certaines personnalités politiques et mondaines s’activèrent pour redonner vie au vieux casino-salon dans le but de ramener une partie de la haute
société. Le 13 juillet 1917 au soir, la salle était comble et l’édifice cerné de lumière et, bien que la guerre perdura, les festivités avaient repris dans les deux stations. En 1922,
Cornuché,  qui avait fait la gloire du casino de D
eauville, reprenait pied à
Trouville. L’empereur des jeux mettait un terme à la compétition des deux casinos en les gérant l’un et l’autre et en faisant en sorte de les rendre complémentaires. Mais une station comme
Trouville pouvait-elle se contenter du seul produit des jeux ? Certes non !  Par chance, deux hommes se proposaient de se consacrer à sa modernisation
et à son embellissement ; un maire Fernand Moreaux ( 1863-1956 ) et un architecte Maurice Vincent. Moureaux écrivait ceci : «  Avec sa plage et son décor de verdure, notre cité devrait
être une station estivale de premier ordre. Si cette ville était dirigée par des hommes, artistes de goût, vous verriez un joyau de prix inestimable et rare ».
Le prix, il le paiera
souvent de ses deniers, en mécène éclairé et d’une folle générosité, qui ambitionnait de redonner au petit port, découvert par Mozin, fréquenté par Musset, Hugo, Flaubert, Gounod, Thérèse de
Lisieux, son caractère et son charme, tout en l‘actualisant, car il faut bien vivre avec son temps ; cela, sans omettre de renchérir sur son pittoresque. Ainsi vont s’élever sur les quais rénovés
et d’après les plans de Maurice Vincent, la nouvelle poissonnerie avec criée et se réaliser la normandisation des maisons qui bordent la Touques. En 1935 sort également de terre
l’établissement des Bains de mer, la piscine bleue. La reine des plages entend se rendre plus conviviale et y réussit, puisque arrivent, par cars entiers ou trains surprises, les nouveaux
vacanciers, impatients de bénéficier de l‘air vivifiant du littoral. Il est vrai que la population balnéaire a changé : celle du XIXe siècle était relativement homogène, constituée principalement
par l’aristocratie, les propriétaires et rentiers. Au début du XXe, et surtout après la guerre de 14, la noblesse s’est appauvrie et elle est peu à peu remplacée par des hommes d’affaires,
banquiers, industriels, directeurs de journaux, clientèle plus active et mobile. Ainsi le brassage amorcé à la Belle Epoque trouve-t-il son plein épanouissement. Cela a un coût : l’obligation de
s’adapter aux exigences de ces nouveaux estivants en agrandissant et en réhabilitant le capital hôtelier. Trouville possède bien deux hôtels de classe internationale, celui des Roches-Noires,
peint par Monet, où Proust a séjourné, et l’hôtel de Paris, mais ce potentiel est insuffisant ; aussi vers 1910 inaugure-t-elle le Trouville-Palace qui réunit les caractéristiques du palace
moderne : façade monumentale, larges fenêtres et chambres claires équipées de salles de bains.

 

C’est alors que la seconde guerre mondiale s’annonce et que Trouville  passe, sans transition, de l’heure des fêtes et des palaces, des bains de mer et des salles de jeux, à l’heure allemande. Le 19 juin 1940, dans une ville
presque déserte, les premières troupes montent à l’assaut des rues comme une sombre marée et, durant quatre années, Trouville et ses habitants vont connaître la vie rude et austère des occupés.
Officiers et sous-officiers  réquisitionnent immédiatement les hôtels, les villas, les immeubles, tandis que les avions anglais, qui tentent des
raids, provoquent les tirs des batteries ennemies. En 1942, lorsque commence la construction du mur de l’Atlantique en vue de repousser un éventuel débarquement, barrages, blockhaus se dressent
et les  ouvertures des villas et demeures du front de mer sont murées. Beaucoup de maisons seront évacuées et les habitants tenus à chercher asile
ailleurs. En juillet 1943, les Allemands d
étruisent la jetée- promenade qui permettait l’accostage des bateaux à vapeur en
provenance du Havre. En 44, les bombardements s’intensifient, entraînant des destructions importantes dans le patrimoine immobilier. Le 4 juin, on annonce que le débarquement est pour bientôt. Le
6 juin à 6 heures du matin, les Allemands font sauter les écluses du port de Deauville et un immeuble, rampe Notre-Dame à Trouville, est détruit parce qu’il gêne les tirs des canons installés à
l’arrière, ce qui, du même coup, pulvérise les vitraux de l’église toute proche, là où la petite Thérèse se plaisait à aller prier lors de ses vacances trouvillaises. Le 21 août, c’est au tour du
pont reliant Trouville à Deauville de sauter, causant de nombreux dégâts. Mais les alliés arrivent et le 24 août a lieu la libération. Les premiers à enjamber la Touques, sur les débris du pont,
seront les combattants belges de la brigade Piron. Hélas, la semaine suivante, le Havre est écrasé sous les bombardements alliés. Comment oublier autant d’épreuves ? Cette guerre a laissé des
traces durables; la Normandie a souffert plus qu’aucune autre région, les plaies seront longues à cicatriser. Le généreux maire Fernand Moureaux, l’haussmann trouvillais,
président-fondateur de l’apéritif SUZE, avance sur ses fonds personnels ceux nécessaires à la destruction des blockhaus. Il ne faudra pas moins de douze années pour réparer les dommages
immobiliers, déminer et redonner à la cité son cachet. Beaucoup de changements vont s’avérer inévitables : les grands hôtels seront reconvertis en appartements, un complexe nautique remplacera
les bains bleus et la magnifique jétée-promenade ne verra pas aboutir, hélas ! les plans élaborés pour sa reconstruction.

 

Dès 1950, l’hôtel des Roches-Noires, après avoir servi d’hôpital militaire, devient une résidence privée où Marguerite
Duras acquiert, en 1963, un appartement, ayant eu le coup de foudre pour ce village où tout le monde se connaît et dont elle disait qu’il possédait un charme très violent, immédiat. Le
flux et reflux de la mer, qu’elle aimait à observer de ses fenêtres, lui rappelaient le mouvement des eaux dans l’Indochine de son enfance. L’écrivain avait avec elle une relation intime,
viscérale, et avouait que lorsqu’elle quittait Trouville, elle perdait un peu de lumière. Elle y  séjournera souvent et y écrira La vie
matérielle, L’été 80, Yeux bleus, cheveux noirs ;
elle souhaitait d’ailleurs qu’on l’appelât Marguerite Duras de Trouville.

Il est vrai que les artistes n’ont jamais manqué à Trouville. A Flaubert, Maxime Du Camp, Maupassant, Proust
succédèrent des écrivains comme Duras, Modiano, Louis Pauwels ou Jérôme Garcin ; à Boudin et Corot, des peintres comme Hambourg, l’humoriste Savignac, le photographe Lartigue ; à Yvette Guibert
et Loïe Fuller, qui faisaient les beaux jours de L’Eden-Théâtre, des actrices et acteurs, tels qu’ Emmanuella Riva, Gérard Depardieu, Annie Girardot, Antoine de Caunes. Chacun a aimé ou aime à
marcher, à la fin du jour, sur la plage livrée aux seuls oiseaux de mer où « dans cette atmosphère humide et douce s’épanouissent, le soir, en quelques instants, de ces bouquets célestes
bleus et roses, qui sont incomparables et qui mettent des heures à se faner ».
( Marcel Proust – La Recherche ) 
 

Chacun y a ses habitudes : les fruits de mer aux Voiles ou aux Vapeurs pour les uns, les pâtisseries de
Charlotte Corday pour les autres, les pulls en c
achemire de la Petite Jeannette ou les vêtements marins du Loup de mer. De même
que chacun a son trouville :  rues étroites et pentues, quartiers pittoresques pour y flâner,  lieux de
solitude pour y rêver. Dans une ambiance bon enfant se mêlent les résidents, les pêcheurs, les saisonniers. Parce qu’on l’aime pour mille raisons, la France s’est émue lorsque sa célèbre halle
aux poissons a brûlé à l’aube du 24 septembre 2006. Les messages de sympathie et les dons affluèrent en si grand nombre que la municipalité a réagi avec une louable promptitude. Cette
halle a été reconstruite à l’identique pour que le visage de Trouville, si familier et apprécié, ne soit pas défiguré et que l’œuvre de Maurice Vincent, Halley et Davy retrouve sa
splendeur passée, ainsi qu’il convient à un édifice inscrit à l’inventaire des monuments historiques. Le destin de Trouville ne s’est-il pas inscrit dans la durée ?

 

 

 Armelle BARGUILLET  HAUTELOIRE

 

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Armelle Barguillet Hauteloire

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