On n’a plus le droit de « m’emmerder ». Disert et érudit il vous charme en un clin d’œil ! Pétillant et beau il a dû faire chavirer plus d’un cœur ! Ce soir, à Hammamet, en bord de mer dans un petit paradis, lové dans un jardin luxurieux , je partage avec Zorba et ses amis, un somptueux dîner qui fera ce cette soirée une mémorable journée de fin d’été…
Nous sommes à nouveau chez KB, le jeune retraité-évadé de la semaine passée et sa table est conviviale et hospitalière !
Zorba sort du lot. Il tient à bien lacer ses baskets blanches et à garder le torse nu, arborant fièrement et sans arrogance son buste musclé.
Ses yeux pétillent d’intelligence et, tout comme Ulysse, il semble à 56 ans (qu’il ne porte pas et point) revenir d’un long voyage, plein d’usage et de raison !
Il arbore derechef sa philosophie de la vie et son approche de l’Autre:
C’est un Amazigh, un Berbère du sud tunisien qui a élu domicile au Cap Bon, après plus de dix à Paris. De Zorba il a l’allure et le portrait. A Hammamet il vient trouver refuge, paix et vie dans une maison, voisine, en bord de mer !
-« A mon âge, on n’a plus le droit de « m’emmerder ». Ce qui me reste à vivre est inférieur à ce que j’ai déjà vécu et je veux maintenant me consacrer à moi-même. J’ai assez donné. »
-« Ah ! Les femmes ! Je les aime que voulez-vous ? Mais que pouvez vous faire avec votre épouse après la naissance de deux fils, jumeaux, et d’une fille ? L’appeler maman ou ma chère petite sœur ? Pourtant le leur ai tout donné, temps, amour et argent ! »
-« En vérité, c’est pire que cela ! Un mari n’est plus synonyme que de « banque » et tout ce qu’elle aime dans cette vie se sont ses enfants auxquels il ne faut pas toucher. La louve protège sa meute, bec et ongles tendus ! Quant au géniteur, son mari, il sera le grand oublié de l’histoire…sauf dans son rôle d’éternel banquier ! »
Du nerf de la guerre il dit :
-« l’argent est devenu la véritable religion du pays et éliminé la majorité de nos nobles valeurs ! Tout est négociable et l’avidité n’a plus de limites. C’est fort inquiétant et je me révolte. »
Pourquoi les Juifs ont-ils quitté la Tunisie ?
-« C’est fort simple et c’est un concours de plusieurs facteurs réunis :
1/ Quand A. Ben Salah instaura son désastreux système coopératif, les juifs de Tunisie perdirent également leurs terres et eurent très, très peur.
2/ Leurs enfants allèrent très tôt étudier en France. Suivent amours, mariages et installation en France. Rares sont ceux qui ont supporté l’éloignement de l’enfant qui ne veut plus revenir en Tunisie.
3/ La France, pour isoler les indépendantistes en herbe, offrit au lendemain de la grande guerre, à tous les juifs tunisiens, d’obtenir immédiatement un passeport français.
4/ La guerre de six jours, en Israël, en juin 1967, leur fit peur de ne pas être dans un pays non juif et sécurisant !
5/ l’Etat d’Israël qui prenait pied promettait à toute la diaspora juive du Maghreb et d’Europe centrale monts et merveilles. Les petits commerçants et de la Goulette et de la Hara de Tunis furent les premiers à partir et peut-être les premiers à regretter l’exode.
A cette époque, juifs et musulmans vivaient dans les mêmes quartiers et mangeaient le même pain… mais hélas, ces cinq points éloignèrent nos frères juifs tunisiens de la patrie !
Dieu merci ils sont maintenant très nombreux à revenir vers leur Tunisie, leur terre, avec passion et joie !
Zorba a décidé de quitter toutes ses attaches et de vivre de ses rentes
tout en assumant son rôle de chef de famille et le plus souvent possible il habite ce havre de paix à Hammamet, avec ses amis retrouvés, tous préretraités, autour d’une bonne table et d’une enfance retrouvée !
Daurades et loups se succèdent sur notre table. Un bon thon rouge venu de je ne sais d’où se laisse manger et déguster comme du caviar. Les fromages aux fines herbes accompagnent des bières glacées et souvent panachées. De beaux et gros raisins rouges ferment la marche avec un bon thé vert à la menthe…
Au loin, le ressac de la mer se confond avec le bruit du silence et la plate-forme pétrolière du Cap Bon jaillit à l’horizon de mille lumières…
L’amour est le credo de Zorba le Berbère et les femmes resteront cette légère ondée qui inonde son cœur et qui lui donne envie de continuer, dans la joie, le voyage de la vie !
De Tunis il connaît tout un chacun et de la politique mondiale toutes ses arcanes et n’a d’hantises que des barbus. Du monde il fuit les despotes et en Obama il voit une lueur, un espoir d’équité ! Mais saura-t-il se libérer du carcan des diasporas ?
De son regard intelligent crépite une petite voix fluette et joviale : « Aimez-vous les uns les autres et foutez-moi la Paix » semble dire Zorba en continuant à distribuer son amitié et son amour à son giron!
Merci Amigo de cette si belle et riche soirée de septembre, à Hammamet, où nous fûmes tous conquis par ton charme, ta grandeur d’âme et ta gentillesse!
ADIOS ZORBA : Kalimera, kalinichta et kalispera!