1Q84 est une trilogie venue de la littérature japonaise contemporaine, écrite par Haruki Murakami. Une sorte de thriller fantastique qui nous embarque dans un monde à la dérive…
1Q84 livre 1 de Haruki Murakami ; un style confus
Le livre s’ouvre sur le personnage d’Aomamé. Elle est en retard pour un travail et ne sait pas comment faire pour se sortir d’un embouteillage sur une voie rapide de Tokyo. Le chauffeur de Taxi lui suggère alors d’emprunter un escalier de secours qui descend de la voie rapide à une autre voie de circulation juste en dessous. De cette manière, elle pourrait reprendre un taxi pour rejoindre le centre ville et arriver à son rendez-vous. Aomamé hésite puis se décide pour l’escalier…
Tengo est un professeur de mathématiques qui rêve d’écrire des romans. Il n’a pour l’instant rien publié mais il est soutenu par un éditeur hors-norme Komatsu. Ce dernier lui fait lire le roman d’une jeune fille de dix-sept ans, Fukaéri. Tous les deux trouvent le roman extraordinaire mais lui reproche son style. Komastu propose alors à Tengo, avec l’accord de la jeune fille, de réécrire le roman puis de la faire concourir au Prix des jeunes auteurs…
Aomamé arrive enfin à son rendez-vous. elle s’invite dans la chambre d’un homme d’affaire important et le tue sans laisser la moindre trace. Sa technique est très au point. Après avoir terminé sa mission, elle s’accorde un verre dans un bar chic de la ville. Depuis quelque temps, elle se voit en décalage avec le reste du monde. Des informations connues de tous lui sont inconnues, comme si elle ne les avait pas entendues ou qu’elle les avait oubliées. Pourtant Aomamé n’oublie rien. Elle pense que cette distorsion date d’un an, en 1983. Depuis, elle ne se sent plus dans la même réalité…
Tengo veut rencontrer Fukaéri avant d’accepter de réécrire son roman. Il va donc faire la connaissance d’une jeune fille étrange, dyslexique (elle n’a donc pas écrit le livre mais l’a dicté), membre pendant les dix premières années de sa vie d’une secte, les Précurseurs et qui prétend avoir été en contact avec les Little People. Tengo est fasciné autant par la jeune fille que par son livre…
Pour l’instant, je n’ai lu que le premier livre. Je ne peux donc pas me faire un avis définitif sur ce roman. J’adore le découpage du livre, l’histoire de ses personnages, les références à Orwell et les jeux autour de l’écriture et de la réécriture d’un roman. Je suis un peu déçue par le style de l’écrivain. Je m’attendais à un style très maitrisé, très difficile d’accès. En fait, le style est très simple et le roman se lit sans difficulté. C’est agréable mais pas transcendant. Enfin, quelques procédés narratifs m’ont gênée: quand lors d’une discussion entre deux personnages, l’auteur revient sur le fond de l’intrigue (comme si le lecteur en avait besoin pour suivre, procédé qui m’agace profondément) et quand il commence à expliquer les références à Orwell (1Q84, Q pour questionnement et Little People en référence au Big Brother). Je trouve toujours dommage d’expliquer des références ou des éléments d’intrigue à un lecteur, soit parce qu’on considère que son lecteur n’est pas capable de comprendre soit parce qu’on admet que son texte est trop confus. Dans les deux cas, c’est une erreur.
1Q84, livre 2 ; mise en place du symbolique
Le deuxième tome de 1Q84 reprend exactement là où s’était terminé le livre 1. Aomamé s’est vue confier une nouvelle mission, qui sera la dernière puisqu’elle doit mettre fin au Leader de la secte des Précurseurs. Ce travail accompli, Aomamé devra disparaître si elle ne veut pas mourir, tuée par les membres de la secte. Tengo retrouve Fukaéri et poursuit avec elle son exploration du monde de 1Q84: il découvre enfin ce qu’est la Chrysalide de l’air, comment les Mothers et les Daughters sont venues au monde et quel est son propre rôle comme Receiver face à Fukaéri qui vraisemblablement reste une Perceiver. Le monde de 1984 n’est plus, il ne reste que celui de 1Q84 peuplé par les Little People qui veulent accroître leur influence sur les hommes.
Comme dans le premier tome, l’auteur met en place avec une certaine lenteur l’intrigue dans laquelle vont évoluer les personnages. Il commence à donner de plus en plus d’éléments sur ce qu’est le monde de 1Q84, mais pour l’instant malgré l’abondance de précisions sur la chrysalide de l’air, et sur les couples Mother/Daughter, Perceiver/Recveiver, je ne vois pas bien où il veut en venir.
J’espère que la lecture du dernier tome viendra éclairer la symbolique mise en place par Murakami. Ce qui est étonnant dans cette trilogie (enfin pour les deux premiers tomes que j’ai lu pour l’instant), c’est la simplicité du langage de Murakami face à la complexité des symboles exposés. Même l’intrigue est relativement simple, notamment dans le livre 2. Pourtant la lecture de ce roman est obscurcie par les différents niveaux de lecture que Murakami crée et par les zones d’ombre qu’il laisse sciemment dans son écriture autour des Little People et de la Chrysalide de l’Air. Maintenant j’attends de lire avec impatience la fin de cette trilogie pour, je l’espère, bien saisir les intentions de l’auteur.
1Q84, livre 3 ; un monde à la dérive
Dernier tome d’une trilogie 1Q84 est un roman d’Haruki Murakami. Ou un thriller fantastique, inspiré de 1984 d’Orwell qui dépeint un monde à la dérive à travers le destin unissant Aomamé et Tengo…
Dans ce dernier tome de la trilogie 1Q84, Aomamé décide de ne pas suivre les conseils de sa protectrice pour avoir une chance (la dernière?) de revoir et de prendre contact avec Tenko. Ce dernier sous la surveillance des Précurseurs doit retourner dans la ville des chats, pour accompagner son père dans ses derniers instants. Fukaéri, sa tâche accomplie, retournera auprès de son maître, enfin libérée du poids des Little People.
Difficile de faire un bilan de la lecture de cette trilogie. J’ai beaucoup aimé le premier tome parce que l’auteur y mettait en place toute une série de thématiques intéressantes: la réécriture d’un livre, la secte des Précurseurs et les Little People, la déformation du monde de 1984 en 1Q84, le passage par le périphérique de Tokyo, les deux lunes, les Chrysalides de l’air.
Du deuxième tome, je ne garde que peu de souvenirs, il me semble que c’est là qu’il introduit la notion de « village des chats », dont je n’ai pas bien saisi toute la signification (un des personnages précise dans le troisième tome que cette mention était la manière pour Tengo de parler de ce nouveau monde de 1984, comme Aomamé parlait de 1Q84. Certes mais pourquoi les chats?).
Dans ce tome, on apprend que le leader de la secte viole des jeunes filles pré-pubères, qu’à ce titre, Aomamé va se charger de lui (et le libérer finalement), que les Chrysalides de l’air créent des doubles Daughter/Mother, Receiver/Perceiver, symbolisé dans le roman par la dualité lunaire. Le père de Tengo occupe une place plus importante dans ce tome, même si son obsession pour la redevance télé en tant qu’ancien collecteur ne m’a pas paru signifiante. D’autant que l’auteur dans les trois tomes s’autorisent parfois quelques dialogues entre personnages pour « expliquer » aux lecteurs certaines notions: c’est ainsi qu’Aomamé nous explique la déformation de 1984 (en revenant sur l’épisode de la charge policière contre la secte), que cette même Aomamé nous explique que Fukaéri a servi de transmission entre elle et Tengo en vue de la conception de leur enfant (au cas où on ne l’aurait pas compris). Ces passages m’ont d’ailleurs gênée à la lecture, je trouvais qu’ils alourdissaient énormément le récit. D’autres zones restent dans l’ombre: quel est le rapport entre les Little People et Big Brother par exemple?
Le troisième tome ne m’a pas complètement déçu puisque l’auteur boucle sa boucle. Retour sur le périphérique de Tokyo qui permet à Aomamé et à Tengo de quitter 1Q84 pour 1984. Ou pour un autre 1984. Qu’importe finalement. Plusieurs éléments restent en suspens: comme la mort de la policière (qui rappelle étrangement celle de la mère de Tengo), comme le collecteur de la redevance, émanation fantomatique du père de Tengo alors dans le coma. Et derrière ses symbolismes non résolus, je me demande quelle est le message de l’auteur dans un livre où une femme (Aomamé) pour se sortir d’un monde déformé va devoir concevoir, devenir une Mother, et grâce à sa daughter retrouver une place stable dans un monde. Je surinterprête peut-être mais après un premier tome revendiquant (ou présentant) une sexualité féminine très libre, je trouve que le troisième tome replace son héroïne dans un schéma plus traditionnel, ce qui me gène tout de même.
C’était mon premier livre d’Haruki Murakami. J’avais associé à son nom, une écriture exigeante, presque difficile à suivre. Effet de la traduction peut-être, mais je trouve son style agréable, facile à suivre et malheureusement un peu banal. Cependant, je conseille la lecture de cette trilogie qui ne manque pas d’intérêts malgré ces zones d’ombre.
« Écoute, Tengo. Voilà ce à quoi j’ai pensé. Ne serait-il pas envisageable
que la Fukaéri que nous avons vue, en fait, soit DAUGHTER , et que celle qui a été
laissée au sein de la secte, ce soit MOTHER ? »
Les paroles de Komatsu firent frémir Tengo. Jamais il n’avait envisagé les
choses ainsi. Pour lui, Fukaéri était un être réel. Mais présentée ainsi,
l’hypothèse de Komatsu était également plausible. « Je n’ai pas de règles. Alors
ne te fais pas de souci je ne serai pas enceinte. »
Or qui est enceinte ? Aomamé, Aomamé est la Mother, Fukaéri la Daughter. Vous faites une interprétation très occidentale à propos de la sexualité. Je n’ai lu aucune revendication de liberté sexuelle. D’autant plus que c’est un livre qui n’a que dix ans. Je comprends que ce livre parle surtout de littérature. Murakami dit ce qu’il pense de La recherche du temps perdu : c’est un roman qui ne dit rien aux Japonais. Tengo et Ishikawa sont l’un un auteur et l’autre son éditeur. Fukaéri est aussi un écrivain, mais elle écrit la réalité qui en fait est un monde parallèle, un monde imaginé par un auteur mais que l’illusion narrative rend réel dans le roman pour le lecteur. 1Q84 est le monde inventé par l’auteur. La littérature met en relation un romancier Perceiver avec un lecteur Receiver. J’interprète ça comme ça.