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Aung San Suu Kyi face à la volonté de réforme du régime birman

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Aung San Suu Kyi face à la volonté de réforme du régime birman? Est-elle manipulée? Peut-on croire à une véritable ouverture de la Birmanie?  

Deux ogres qui convoitent la Birmanie…


Décembre 2011.

« Daw » Aung San Suu Kyi va  pouvoir se présenter aux prochaines élections en Birmanie, mais que pourra faire cette femme frêle et forte, déterminée et douce contre les deux géants, les deux ogres qui prennent la Birmanie en tenaille ?

–          La Chine, à n’importe quel prix, veut l’accès à l’océan Indien, car si la Chine de l’Est progresse et s’enrichit, celle de l’Ouest végète dans ses montagnes, par manque de débouchés. Il lui faut donc un port sur le golfe du Bengale. Une sortie… et des promesses : « Vous serez riches demain chers compatriotes. » Avec ça, les Chinois sont capables de soulever des montagnes. Mais que ces promesses restent vaines, alors ils mettront la même force à se révolter. La Chine rêve et fait des plans d’autoroutes vers le golfe du Bengale et la création d’un port afin d’exporter encore plus de marchandises vers l’Ouest (les Birmans regarderont passer les trains ? ), tandis qu’elle pourra y faire venir les matières premières qu’elle est en train de piller à l’Afrique et le pétrole quelle achète aux pays du golfe persique. En 2016 on voyagera de Rangoon à Pékin en train rapide avec une extension ensuite vers Delhi et l’Europe (chic mais on sera complètement rétamés et on n’aura plus d’argent pour prendre ce train Europe-Chine).

–          L’Inde a aussi ses propres ambitions et les gouvernements indiens successifs, depuis 1990, ont cherché à faire revivre et renforcer ses liens avec l’extrême-Asie afin de se créer de nouvelles connections, en traversant la Birmanie donc, et en passant au-dessus de montagnes et de jungles jadis infranchissables.

La Birmanie : un enjeu crucial. A dangerous big game qui pourrait conduire au conflit entre les deux super puissances. Certains croient que le monde est le pays des bisounours et s’écrient : « mais ce sera la démocratie en Birmanie et elle sera ainsi traversée par une nouvelle Route de la Soie » (et de nouveaux Gengis Khan ??).

« Si ce scenario – le plus optimiste – se réalisait » écrit Thant Myint U (petit-fils de U Thant, secrétaire général aux Nations Unis dans les années soixante), « Si la Birmanie prenait un tournant pour le « meilleur » apparemment, après des décennies de conflits armés, si l’Ouest levaient les sanctions, si le pays se démocratisaient d’un coup et qu’il progresse sur la base d’une économie purement libérale, l’impact serait « dramatique » La Chine engloberait une nouvelle et vibrante démocratie, le Nord-Est de l’Inde cesserait d’être un cul-de-sac et deviendrait une sorte de pont vers l’Extrême Orient. La Birmanie deviendrait la proie et l’enjeu majeur dans cette partie du monde. »

Lire « Where China meets India » de Thant Myint U qui, dans ce livre, fait un portrait nuancé de son pays coincé entre les deux plus grands rapaces de la planète. La Birmanie deviendrait le « nouveau carrefour de l’Asie » (sous-titre de son livre) et un endroit stratégique de la plus grande importance pour la planète entière, avec ses ethnies ses milices, ses seigneurs de la drogue, ses ouvrières du sexe, ses hommes d’affaires sans scrupules et des millions d’émigrants flottant d’un côté et de l’autre d’une zone de frontières grises ».

Et la Birmanie risquerait de devenir le plus grand bordel de la planète, car passer du moyen-âge à l’ère du  fric à tout prix est…mortel.

« Je rappelle que la nouvelle capitale Naypyidaw a coûté plus de 6 milliards d’euros. Encore que ce chiffre ne tienne pas compte des salaires des ouvriers qui n’étaient pas payés ou plutôt à qui on donnait des concessions pour abattre des arbres dans la jungle. (Et du coup trafic intense du bois de teck avec la Thaïlande). Dans les environs de Naypyidaw, à Pyinmania, les birmans sont si pauvres qu’ils mettent leur « longyi » (sarong) au clou ! » (International Herald Tribune)

Déjà la Chine construit ses bordels, ses casinos, ses salons de massages au nord du pays, et Mandalay est en passe de devenir une ville chinoise (ce qui se passe au Tibet et au nord Laos)

Je ne peux m’empêcher de vous relater une légende racontée par un Karen : Ywa a créé de ses mains trois fils et leur a donné forme humaine. Le plus jeune était blanc. Ywa a donné le livre d’or aux Karens, le livre d’argent aux birmans et à l’homme blanc : le livre de papier »… Le papier… le papier monnaie ??

Tandis que j’écrivais cette note au Wawee café de Nimhanheimnin, entendant parler birman près de moi, je me présente. (Suis un peu « Marie-mêle-tout », mais c’est le meilleur moyen d’apprendre et d’avoir des informations de première main souvent). C’était des journalistes birmans : Than Lwin Htun chef de service à « Voice of America » à Washington (et en visite en Thailande) et Wai Moe, reporter à « l’Irrawaddy » de Chiang Mai…

Je leur ai lu ma note, l’occasion était trop belle…. Je les rencontre demain au siège de l’Irrawaddy.


Deux jeunes garçons Karen d’un camp de réfugiés

Volonté de réforme du régime birman?


« …..certains dissidents se demandent à voix basse… le quasi impensable… « Aung San Suu Kyi ne serait-elle pas manipulée par Thein Sein toujours soutenu par l’armée ? Ne serait-elle qu’un pion entre ses mains afin de briser l’isolement dans lequel se trouve le pays face à l’occident ? Contre une participation dans le futur gouvernement ? Si elle gagne 1 siège au gouvernement elle sera au mieux nommée ministre de la santé ou de l’éducation, des postes qui ne lui donneront pas le pouvoir politique et sûrement pas une influence quelconque sur l’armée. Elle pourrait être un excellent choix pour des rapports avec l’étranger afin de solliciter une aide pour la santé et des programmes d’éducation et également assister aux conférences internationales concernant le sida par exemple »  ( le sida, en diminution dans beaucoup d’autres pays, fait des ravages hallucinants au Myanmar) » ( ma note d’il y a deux jours :  « Aug San Suu Kyi manipulee » ?)

Dans le Figaro du 25 Janvier 2012 :

« Si Aung San Suu Kyi représente pour beaucoup le seul espoir d’un avenir meilleur en Birmanie, des dissidents chuchotent pour la première fois l’impensable «  n’est-elle pas manipulée par la junte pour séduire les gouvernements étrangers et obtenir la levée des sanctions « En autorisant Aung San Suu Kyi à participer aux élections partielles, le régime la neutralise à peu de frais s’inquiète son vieux compagnon de route Win Tin » (Florence Compain journaliste francaise basée à Bangkok pour le Figaro)

« Ce ne sont pas les 48 sieges a pourvoir qui modifieront l’équilibre du pouvoir » dit Win Tin.

Florence Compain cite également Bertil Lintmner, expert des arcanes de la politique birmane, « le ton conciliant que l’opposante adopte avec le nouveau gouvernement qui pourrait avoir ete soufflé par les Etats-unis. A la lecture de la Constitution on pressent que la Birmanie ne peut devenir une vraie démocratie mais plutot un état autoritaire à peine déguisé dont les Etats-Unis et l’occident s’accomoderont avec cynisme pour contrebalancer l’influence de la Chine »

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Aung San Suu Kyi manipulée?


« Nous ne pouvons encore accorder notre confiance à ce régime » m’écrit mon « petit frère », le moine Agga Nya Na… qui a trouvé refuge à Brooklyn après avoir participé à la révolution safran de 2007 à Rangoon. J’ai déjà raconté son épopée dans ce  blog (« last exit to Brooklyn »  « Histoire d’un moine » et « Irène dépêche-toi qu’on en finisse » entre autre). Je suis allée passer une semaine avec lui à New York où il fut mon guide, de Hyde Park au Musée Moma, du Pont de Brooklyn à l’Empire State Building. La française découvrant New York et le moine lutin qui marchait toujours trop vite avec ses tongs en plastique. Et moi, flâneuse, cliquant à chaque seconde sur les buildings de verre reflétant l’intensité du ciel après le passage de l’ouragan Irène. Nous sommes en contact permanent grâce à Facebook.

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« Bien que le régime ait relâché quelques 200 prisonniers politiques il y a quelques jours, nous sommes toujours préoccupés car à la moindre critique ils peuvent à nouveau être emprisonnés. La plupart de ces prisonniers ont déjà été relâchés et emprisonnés trois ou quatre fois, juste pour avoir pris la parole ». Condamnés au silence donc.

Agga Nya Na vit avec deux autres moines plus âgés dans un appartement de Brooklyn aménagé en petit monastère. Il continue : « Nous nous demandons si ce régime n’essaie pas de faire bonne figure vis-à-vis des Etats-Unis et de l’Union Européenne pour qu’ils lèvent les sanctions économiques. Nous sommes persuadés que le régime ne tiendra pas des élections libres et honnêtes en avril ». Celles auxquelles se présente Aung San Suu Kyi ». Chats échaudés craint l’eau froide. Ou plutôt moines persécutés connaissent la musique. Depuis plus de cinquante ans !

Parallèlement et pour corroborer les craintes de mon ami, Bertil Lintner, correspondant de la Far Eastern Economic Review et auteur de plusieurs livres sur la Birmanie, confirme : « La relaxe de 200 prisonniers politiques et la tentative de cessez-le-feu avec le KNU (l’armée rebelle karen) sont les dernières mesures prises par le président Thein Sein pour améliorer l’image du Myanmar sur le plan international et apaiser ainsi les critiques, aussi bien à l’intérieur du pays qu’à l’étranger ».


Ces changements en surface (il a écrit « cosmétiques ») dans ce pays de tradition militaire (et ça remonte à  bien avant l’occupation britannique), sont indubitables. C’est devenu aujourd’hui plus facile pour les citoyens ordinaires d’avoir certains accès a Internet, aux magazines et journaux locaux et à certains articles dont la publication était impensable i y a quelques semaines – Du moins à Rangoon – Sans parler de l’icône Aung San Suu Kyi qui a passé 15 ans de ces 21 dernières années en résidence surveillée et dont les photos sont maintenant en vente sur les marchés.

« Beaucoup de citoyens du Myanmar ont accueilli avec soulagement ces mesures dans ce pays sur lequel la pression de la junte est insupportable, autant que la mémoire se souvienne. Mais ces mesures de relâchement ne peuvent être assimilées à un « processus de réforme » qui exigerait des changements de structure et de constitution ». (Rappel : en 2008 les généraux ont obtenu la constitution qu’ils voulaient à travers des élections truquées et ils contrôlent aujourd’hui la majorité des sièges au Parlement, donc ils peuvent se permettre de faire quelques concessions mineures en réponse aux pressions internationales)

« D’autre part, certains dissidents se demandent à voix basse… le quasi impensable… « Aung San Suu Kyi ne serait-elle pas manipulée par Thein Sein toujours soutenu par l’armée ? Ne serait-elle qu’un pion entre ses mains afin de briser l’isolement dans lequel se trouve le pays face à l’occident ? Contre une participation dans le futur gouvernement ? Si elle gagne 1 siège au gouvernement elle sera au mieux nommée ministre de la santé ou de l’éducation, des postes qui ne lui donneront pas le pouvoir politique et sûrement pas une influence quelconque sur l’armée. Elle pourrait être un excellent choix pour des rapports avec l’étranger afin de solliciter une aide pour la santé et des programmes d’éducation et également assister aux conférences internationales concernant le sida par exemple »  (Je signale que le sida, en diminution dans beaucoup d’autres pays, fait des ravages hallucinants au Myanmar) »

Les militaires ont bien tout bétonné concernant leur pouvoir. Ce ne sera pas ce que croit trop facilement l’occident qui voit déjà Aung San présidente du pays (ce qui serait impossible de toute façon, c’est dans la constitution : quelqu’un qui aurait un parent, conjoint, enfant d’étranger ne peut accéder à ce poste. Au moins le film de Besson a expliqué cette partie de sa vie. Aung San  choisit son pays et le pouvoir éventuel à sa famille).

Dans une interview « candide » avec « The Australian », WinTin, un des fondateur  en 1988 de la LND (le parti d’Aung San) et emprisonné pendant 19 ans pour ses convictions, a déclaré « que les « reformes » sont un stratagème utilisé par la dictature du pays pour séduire les gouvernements étrangers et neutraliser Aung San » D’autres dissidents – anciens prisonniers politiques et leaders de groupes locaux de la société civile se plaignent que Aung San rencontre facilement les visiteurs étrangers les uns après les autres, mais n’a pas le temps de les voir, eux.

J’ai parlé dans ma note d’il y a 2 jours, de combats entre l’armee birmane et les Kachin au nord de la Birmanie… Je reprends les terme de Lintner : « Les Kachins ne se font plus d’illusions, Aung San n’a pas eu un mot de compassion dans ses discours ou dans une lettre, pour leur communauté bien que certains prêtres catholiques (une majorité de Kachin sont catholiques), aient expressément fait savoir à  Tante Aung San que des milliers de civils avaient dû fuir leur terre vers la Chine proche ou se terraient dans les églises, que les fermiers avaient été obligés d’abandonner leur récoltes et se trouvaient sous la menace permanente des autorités chinoises pas très sympathiques » (Comment la Chine voit-elle ces rapports nouveaux avec l’occident ? Hum)

Les saints doivent rester des sains. Les icônes des icônes.

Le pouvoir corrompt… Et dans l’un des pays les plus corrompus du monde !!!!

Pour terminer sur une note de dérision, je jette parfois un coup d’œil sur les « entrées » de mon blog et  sur le moteur de recherche Google… Et je viens de lire : « la junte birmane contre Michèle ». Je ne sais pas si je dois avoir un frisson ou partir dans un grand éclat de rire….

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 Aung San Suu Kyi, citoyenne d’honneur de Paris


 Aung San Suu Kyi ; une reine… sans gant en visite à Paris, mais au-delà du symbole, qu’en est-il de la situation en Birmanie?

L’émotion qui – souvent paralyse ou laisse sans voix – a un tout autre effet sur moi, elle est une sorte de moteur qui me pousse au-delà de certaines limites, surtout si j’ai un appareil photo à la main. Et à cette émotion, il me faut très vite des mots… ne serait-ce que pour la décanter (un terme qui s’applique davantage au vin, mais c’est celui qui me vient), pour la comprendre et éventuellement la partager.

Donc drôle de titre pour une émotion suscitée par la rencontre avec Aung San Suu Kyi hier à  l’hotel de ville où on lui remettait le titre de citoyenne d’honneur. Emotion de la revoir, dans les ors de la république (Bertrand Delanoë en Foucher !). Au-delà de ce qu’elle représente comme symbole de paix et d’espoir pour son pays et le monde, ce monde de violence, c’est la femme qui m’a éblouie… son allure de jeune-fille… son pas « glissé »… son sourire presque coquin parfois…son humour malicieux et complice…la poésie qu’elle a su mettre dans son texte de remerciement (lu en français s’il vous plait)… la paix tranquille qui se dégage de toute sa personne, fruit de longues méditations j’imagine… sa féminité absolue dans ses tenues toujours élégantes qu’aucun couturier JAMAIS n’égalera fut-il Dior, Yves-st-Laurent, Armani, Kar Lagerfeld ou Donna Karan etc.. Avec une autre qualité – inégalable dans le monde virtuel d’Internet ou tout le monde est le roi de son royaume, elle sait écouter. Ça, ça m’a frappé. Elle est attentive aux autres. Et puis elle est « « royale »

 Aung San Suu Kyi ; une reine… sans gant en visite à Paris

… royale, non pas à la façon des femmes politiques qui font tout pour plaire dans le but d’acquérir des voix et pour etre elues.

… royale, non pas à la façon des monarques condescendants devant lesquels les sujets se mettent à quatre pattes (suivez mon regard)

… non, Aung San Suu Kyi a un comportement modeste, donc royal.

 Aung San Suu Kyi ; une reine… sans gant en visite à Paris

A l’instant même ou j’écris ces lignes, mon ami japonais me tend le « International Herald Tribune » et là…..photo de deux bustes : l’un en vert pomme acidulé, genre bonbon anglais, l’autre, austère en costume et cravate club et je lis : « serrement de main historique ; A Belfast,  la reine Elisabeth  sert la main de Martin Mc Guiness (ex commandant de l’armée républicaine irlandaise).. Bon, historiquement c’est un évènement quand on connaît un peu l’histoire de ces 2 pays et leur haine réciproque, mais ce qui « m’interpelle » comme on dit en mauvais français aujourd’hui, c’est que pour ce « serrement de main historique », la queen a gardé ses gants blancs !

Aung San Suu Kyi, une reine qui tend la main


Flash ! La Lady, « ma reine » désormais, ne m‘a pas « serré la main », elle a pris ma main dans la sienne –  nuance –  et ces quelques secondes, avec le regard direct qui « allait avec », m’ont bouleversée. Rien d’hystérique, mais émotion si palpable qu’un journaliste de France Inter m’a demandé quelques mots pour tenter d’expliquer ce trouble.

 Aung San Suu Kyi ; une reine… sans gant en visite à Paris

Cette main tendue qui prend la mienne et ce regard direct et bienveillant m’ont renvoyé un autre flash… et je suis téléportée un peu plus de dix ans en arrière…  J’étais en Birmanie avec mon fils….

… Notre taxi s’arrête à un feu rouge dans Rangoon. A deux pas, une autre voiture s’arrête à notre hauteur : un car de police bourré de jeunes-gens – des étudiants – qu’on emmène comme du bétail dans la fameuse prison d’Insein (dont a parlé ASSK hier). Ils cherchent un peu d’air par l’unique ouverture fermée par des barreaux de fer. Ils s’y agrippent, et j’ai toujours en tête l’image de leurs mains. Nos regards se croisent… moi qui vient d’un monde libre et eux qu’on emmène surement a la torture et au silence pour avoir osé prononcer le mot « démocratie ». A cette époque, prononcer le seul nom d’Aung San Suu Kyi vous emmenait directement en prison et vous privait de tous vos droits, même les plus élémentaires. Le car va s’éloigner… je ne peux pas crier, sans prendre de risque… alors par la fenêtre ouverte de mon taxi je tends le bras avec le V de la victoire… Le seul moyen que j’ai trouvé pour dire «  je sais… et un jour peut-être… ». Mon fils me dit que je suis folle…. J’ai envie de crier et de pleurer, ils sont si jeunes, leur regard est si terrifié comme celui des enfants. Ils partaient vers l’enfer, nous rentrions a notre hôtel puis bientôt, et en quatrième vitesse vers Bangkok (pour sauver les photos d’enfants esclaves que j’avais prises en dépit de l’interdiction absolue…)

Je ne pouvais imaginer qu’un jour je tiendrai la main de la dame dont je savais que si mes lèvres – alors -formaient son nom je risquais de graves ennuis en tant que touriste, et eux, ces jeunes garçons, la mort ou la prison a vie.

Les photographes professionnels étaient coriaces, hier à l’Hôtel de Ville de Paris. Même confrérie, mais c’est chacun pour soi quand le moment est venu. Là, il faut suivre son flair et foncer et je suis capricorne, et je n’ai pas peur des coups… (si, si un coup d’objectif sur la tête, ça fait mal !!)

Avec Jean-Michel Ribes, l’homme de theatre

Avec le staff de Bertrand Delanoe

                                          Eclat de rire, sous l’oeil surpris du maire de paris

Une main nue. Un geste, un symbole… pas seulement. Une main tendue, ferme et douce, comme le V de la victoire à Rangoon.  Pour ceux qui sont encore enfermés là-bas, et pour ceux qui fuient vers la Chine un état Kachin toujours en guerre, et pour ceux qui survivent dans les camps et qui on peur de retourner « chez eux » qui n’est plus chez eux puisqu’on leur a volé, confisqué, pillé leur terre, la terre de leurs ancêtres…. Le reste… l’histoire nous le dira… si nous maintenons toujours la même curiosité et le même intérêt. Non pas seulement pour la Lady, pardon « ma reine », mais pour les peuples birman karen, kachin, shan, royinghias….


Je dedie cette chronique a mon amie Thanda (Khin Corail).. c’est grace a elle que j’ai pu etre la…elle aussi refugiee en France…

L’attente


Des images qui se passent de commentaires… Ils sont tous en attente de la « Lady » dans le camp de Mae La, District de Mae Sot, Thailande juin 2012

 Lattente,,,
 Lattente,,,
 Lattente,,,
 Lattente,,,
 Lattente,,,
 Lattente,,,
 Lattente,,,


Des « si », des « mais »… une seule certitude : l’incertitude

Elle est venue, la presse s’est bousculée pour l’interviewer, les photographes se sont battus pour tenter de « capter » son aura, les curieux et les fans se sont poussés du coude pour l’entr’apercevoir. A Mae La, c’était au cri de « Mae Suu Mae Suu »,  cri du cœur, de l’espoir, scandé par ceux qui voyaient en elle l’étoile qui les guiderait vers les chemins de la liberté. Aung San Suu Kyi a fait son pèlerinage en Europe… une tournée victorieuse pour beaucoup d’occidentaux qui la verraient déjà présidente de la Birmanie aux prochaines élections de 2015. (question posée un peu inconsidérément par presque tous les journalistes), MAIS

Bien sûr il y a un vent d’optimisme qui souffle sur la Birmanie, des prisonniers politiques ont été libérés (pas tous), la censure s’est assouplie, les paroles se libèrent (elles sont toujours « reportées » mais ne sont plus sanctionnées, il faut saisir la différence)  « liberté sous surveillance ». Les investisseurs étrangers se bousculent au portillon pour « investir » dans ce pays neuf, alors que l’Europe et l’Amérique sont en récession et que la Chine a follement besoin des matières premières dont sa petite voisine dispose en quantité.

MAIS… le pays est toujours en guerre contre lui-même (dans l’état Kachin aux frontières de la Chine) « C’est maintenant que tout commence fait remarquer la directrice adjointe pour l’Asie Pacifique, d’Amnesty Internationale. Et le champ d’action de Aung San Suu Kyi est inversement proportionnel à sa notoriété »

Pour comprendre il faut savoir deux ou trois petites choses –  MAIS, essentielles –  sur ce pays :  Le parti de Aung San Suu Kyi, le National Ligue for Democracy » (NLD) a peut-être gagné 43 sièges sur les 44 aux dernières élections législatives, MAIS cela ne représente pas plus de 7 % de tous les sièges au Parlement. « Son pouvoir est donc extrêmement limité ». Le problème, le hic, la pierre d’achoppement, c’est la Constitution (adoptée après un referendum truqué en 2008 (J’entends encore les voix de Xavério, Serpico, Celin, Mario…  « obligés » de voter… sinon on les menaçait de mort, sinon, on prenait leur terre, sinon…et avec la Tatmadaw le pire était souvent « pire » que les menaces. Ce referendum garantit 25% des sièges du Parlement aux militaires. Lesquels ont droit de véto sur tous les amendements. Quant aux autres partis (dont l’USDP, il est considéré comme véhiculant les intérêts politiques des militaires). Aucun changement important ne peut donc intervenir sans l’approbation de 75 % des membres du Parlement.

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« La constitution est telle et les procédures si complexes qu’il est impossible de changer les clauses de cette constitution qui, d’une manière ou d’une autre, privilégie en priorité les militaires » (toujours au pouvoir en dépit du changement d’uniforme) « Un exemple concret : l’une des premières sections de cette constitution garantit qu’en cas d’urgence, c’est le commandant en chef de l’armee qui exerce et prend en charge le pays et son pouvoir est souverain, après consultation avec le Président (lui-même ancien militaire). Aucune action en justice ne peut être prise à l’encontre de l’armée pour ce qu’elle a fait et ferait durant l’exercice de ses fonctions. Une autre clause dans cette constitution interdit l’accès au poste suprême à toute personne dont le conjoint ou les enfants auraient « fait allégeance à  une puissance étrangère ».TEXTO : vraiment du cousu main contre Aung San Suu Kyi qui a été mariée a Mikael Aris, un britannique dont elle a eu 2 fils (Les rois font pareil en Thaïlande).


« En 2008, les généraux ont obtenu – frauduleusement – la constitution qu’ils souhaitaient et ils contrôlent la majorité des sièges au Parlement. Ils peuvent donc se permettre de faire quelques concessions, en réponse a la pression internationale et obtenir ainsi l’aide et les investissements étrangers dont le pays a désespérément besoin » *  Tout est résumé dans cette phrase.

Les élections d’avril dernier n’affecteront pas les structures fondamentales du pays. Dans les 3 années à venir, les militaires ont tout pouvoir pour manipuler et neutraliser l’opposition – un art dans lequel ils sont passés maîtres depuis qu’ils sont au pouvoir en 1962.

Sans changements radicaux de la constitution – qui semblent improbables dans l’état actuel des choses – n’en déplaisent aux rêveurs, la Birmanie ne pourra briser la domination étouffante des militaires en place depuis des décennies.

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Reste encore le problème des guerres civiles entre armée- Tatmadaw – et armées rebelles ethniques. Ces groupes ethniques non birmans ne réclament pas leur indépendance mais un retour au système fédéral qui existait avant que les militaires ne prennent le pouvoir en 1962. MAIS il faudrait d’abord reconnaître l’identité de ces ethnies… avant même la construction de route, d’écoles et d’industries. MAIS sans amendement de la constitution, difficile d’imaginer la résolution de ces conflits.

« Et que se passera-t-il – ou plutôt que se passerait-il – SI Aung San Suu Kyi décidait de se confronter aux militaires en leur demandant une nouvelle constitution dont le pays a désespérément besoin pour « aller de l’avant » Elle a peut-être été reçue comme une héroïne durant sa « tournée triomphale en Europe » mais la route est longue vers la démocratie et la paix. En dépit de certaines réformes, les militaires sont toujours au pouvoir et qui que ce soit qui penserait que la Birmanie est proche d’une solution à ses problèmes ethniques et politiques se mettrait le doigt dans l’œil »


Ce qui est en italique est de Bertil Lintner, l’un des meilleurs spécialistes de l’Asie. Ce journaliste norvégien basé à Chiang Mai a écrit « Land of Jade, a journey from India through northern Burma to China » – “Aung San Suu Kyi and Burma’s struggle for democracy’ – “Blood brothers : crime, business and politics in Asia”- “Merchants of madness, méthamphétamines explosion in the golden triangle” – “The Kachin : lords of Burma’s northern frontiers”.

coucher de soleil en birmanie
Michèle Jullian
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