Bienvenue parmi nous est un roman de Eric Holder, qui transporte le lecteur en Bretagne. Une artiste célèbre mais désabusé rencontre une fille paumée, sans avenir, et va entreprendre avec elle un voyage en Bretagne où ils trouveront tous les deux un nouvel espoir et une nouvelle raison de vivre.
« Ce fut peu avant la date anniversaire de ses soixante-deux ans que Taillandier prit la décision de se suicider. » Ca fait tout drôle de lire ces deux lignes en introduction d’un livre quand on vient, précisément, de fêter, soi-même, ce même anniversaire. On s’interroge, comment ce peintre célèbre qui, il est vrai, ne peint plus depuis sept ans, a-t-il pu avoir une telle idée ?
Certes, il souffre du cœur et il estime avoir atteint l’apogée de son art. Un suicide bien mis en scène pourrait donc être une sortie majestueuse, pleine de dignité, qui resterait à jamais dans la légende. Mais, comme toute histoire, celle-ci comporte sa part de hasard et le destin cette fois s’incarne dans la personne d’une fille paumée, comme « La fille tatouée » de JC Oates, que sa compagne prend, un jour, en stop.
La fille s’installe à la maison et, petit à petit, il s’intéresse à cette adolescente gauche et taciturne jusqu’au jour où elle s’enfuit subrepticement. Il loue alors, en cachette de sa femme, une voiture pour accomplir son suicide mais il rejoint la fille sur la route et commence alors un long voyage jusqu’à Coutance où la gamine veut revoir sa mère. Mais, une fois de plus, celle-ci la repousse et le peintre, ne voulant, ne pouvant, pas abandonner cette compagne malheureuse entreprend avec elle une sorte de « road movie » en terre bretonne, jusqu’en Pays nantais.
Au cours de cette grande vadrouille «une gamine qui n’avait pas de projets, (et) un homme qui n’en avait plus… » trouvent l’une sa personnalité et l’autre une nouvelle envie, raison peut-être, de vivre. Comme un moyen de donner du sens à une vie vide et sans intérêt pour lui et sans lendemain pour elle.
Ce petit roman minimaliste me rappelle l’atmosphère de ces fils « Nouvelle Vague » où la vie se mange au quotidien, sans réel souci du lendemain. Mais, il évoque surtout, pour moi, « La fille tatouée », le roman de JC Oates, avec son artiste riche et désabusé et sa jeune fille pas franchement belle mais réellement paumée. Dans ces deux huis clos qui rassemblent chacun deux protagonistes très différents, l’histoire n’évolue certes pas de la même manière mais on ne peut éviter de comparer ces ceux couples si improbables. Ce parallèle entre les deux romans pourrait être poussé un peu plus loin mais si Oates met l’accent sur la défaillance et la frustration sexuelle, Holder élude très chastement cette question pour laisser ses héros retrouver une certaine forme de pureté originelle qui pourrait être le moteur de leur raison de croire en un avenir possible pour chacun d’eux malgré la solitude pour l’une et la maladie pour l’autre.