Le gros bourg d’où part la randonnée sommeille au bord de l’Yonne par 47° 32’ de latitude Nord et 3°37’ de longitude Est. Perchée sur un éperon qui domine la rivière, sa collégiale regarde passer les marins d’eau douce en croisière sur le canal du Nivernais et les touristes en route vers Vézelay , sa basilique, ses musées et ses marchands du Temple. Vous garerez sans peine votre voiture sur le parking de la gare. La munificence municipale a installé un banc à l’ombre des arbres qui entourent cet espace.
Rappel de la règle du jeu : Le parcours proposé à la sagacité des blogo-randonneurs ou des rando-bloguistes ne comporte aucun nom de commune. Seuls sont cités les lieux-dits, hameaux et points « remarquables ». Il s’agit d’une boucle dont la longueur totale est d’une petite trentaine de kilomètres. Elle peut facilement être raccourcie. La totalité du parcours est accessible aux Vététistes.
(IGN 2721 Ouest et 2621 Est)
Le randonneur, soucieux de jeter un ultime coup d’œil à sa carte ou d’assurer les nœuds de ses lacets appréciera cet équipement à la fois simple, solide et bien situé, qualités essentielles et, quelquefois, trop négligées. Moi qui vous parle, je connais au moins un quartier de ma préfecture préférée où un urbaniste chic et choc a semé, en guise de bancs, des blocs de granit qui ont l’aspect guilleret de pierres tombales posées sur champ et sur lesquels les amoureux de Brassens n’auraient jamais pu se bécoter vu qu’il est impossible de s’y asseoir. Passons ! Je ne vous ai pas fait prendre votre sac, vos chaussures, votre veste rouge siglée Lafuma et vos bâtons télescopiques pour disserter sur la question des bancs (sur laquelle il me faudra revenir un de ces quatre), mais pour pratiquer pendant les six ou sept heures qui vont suivre l’activité physique régulière, équilibrée et naturelle connue sous le nom de marche à pied en terrain varié.
En route donc et suivez, sur une cinquantaine de mètres la départementale 100 (nombre facile à retenir) en direction du sud avant de tourner sur la droite et de franchir successivement un passage à niveau dont les deux portillons auraient bien besoin d’être repeints (mais RFF a certainement d’autres soucis) et le vieux pont qui enjambe le canal lequel attend, lui aussi, une incertaine réhabilitation (mais VNF manque de moyens).
Vous voilà de l’autre côté de l’eau. Tournez à gauche et en avant pour quelques hectomètres sur le chemin de halage. Le temps de caler votre sac et de faire remarquer qu’en dépit de prédictions pessimistes le temps est plutôt beau et vous êtes arrivés sur une nouvelle départementale. Elle porte le numéro 321 et, plein ouest, vous fait traverser l’Yonne qui court sur des herbiers peuplés de blanchailles qui servent de garde-manger à des hérons illettrés qui, n’ayant jamais lu La Fontaine, avalent indifféremment vairons, goujons, gardons et petits barbillons (ce pitoyable alexandrin en hommage à notre fabuliste national).
La route contourne une entreprise de transports en commun et monte sur un semblant de crête en se dirigeant vers le nord. A une encablure du hameau de Magny, elle se noie dans une route dont vous n’avez pas à vous soucier étant donné qu’en face de vous s’ouvre un beau chemin de terre qui, par Les Marsuriaux, la Queue de Coulanges, la Pièce du Puits et le Bois Plat (qui porte ce nom par antiphrase) vous conduit à la Montjoie. Pour les ignorants, on rappellera qu’une Montjoie est, en général, le point d’où les pèlerins découvrent, pour la première fois, le sanctuaire, but de leur pèlerinage. Voit-on de ce lieu les tours de la Madeleine ? C’est plus qu’improbable, mais sait-on jamais, j’ai peut-être mal regardé ou alors dans la mauvaise direction.
Nouvelle route à prendre vers la gauche direction le hameau des Maisons qui abrite ses fermes et ses résidences secondaires à l’ombre de la forêt de Frétoy (ici, un bref passage sur la carte 2621 Est s’avère nécessaire). Dans le hameau, sur la droite, le chemin de la vallée s’en va en pente douce vers les champs où, victime de la culture intensive il disparaît sous les labours. Ce n’est pas très grave, les cailloux font de la résistance et on suit facilement sa trace jusqu’à la Pointe des Quatre Vallées où il réapparaît pour vous conduire, sur la droite à la troisième départementale de la journée (n° 39 à l’inventaire).
La chaussée glisse tranquillement entre des bois de feuillus parsemés de quelques bouquets de pins . Vous vous y engagez résolument (après la caillasse, un peu d’honnête goudron repose les voûtes plantaires) direction nord-nord est, jusqu’à une fourche où elle se sépare en deux branches. Sur chacune les panneaux indicateurs envoient au même village. Prenez celle de gauche, elle monte certes, mais raisonnablement, entre le Crôt Pèlerin et la Roche Eboulée jusqu’à une manière de plateau où une halte s’impose, histoire de contempler un paysage d’ondulations douces, tissé de bois et de champs avec, au loin, la surprise d’un village ou d’une ferme isolée.
L’arrivée au village évoqué plus haut, permet d’apprécier le pragmatisme d’ancêtres qui ont su à merveille utiliser les qualités défensives du site (cette phrase n’est pas extraite du Guide Vert même si elle mériterait d’y figurer). Si le cœur vous en dit, faites un détour par l’église. Outre ses, indéniables, qualités architecturales, cet édifice honore Saint Adrien dont la Légende Dorée nous apprend que, martyrisé sous l’empereur Maximien, il vint après son supplice, chercher Nathalie sa femme pour l’emmener avec lui au Paradis. Pendant que vous y êtes, vous pouvez pousser jusqu’à ce qui reste des remparts en méditant sur ce bel exemple d’amour conjugal.
Revenez sur vos pas en remettant à un autre jour la visite à la partie basse du bourg et à la chapelle qui se dresse au milieu du cimetière et qui n’est pas dénuée de mérite. Gagnez la maison de retraite et, de là, rejoignez le bon chemin qui, entre la Côte aux Dames et la Forêt, passe devant un transformateur, puis descend dans la vallée de Lésigny. Juste avant que le chemin ne remonte, prenez sur la droite une piste qui vous amène à mi-côte et de là, encore une fois à droite, une autre qui redescend dans le vallon et, entre bois et champ, vous ramène vers la départementale 100. Il faut suivre le goudron, sur deux petits kilomètres en direction de La Gravelle et du troisième village de l’itinéraire, lequel, outre ses ponts, est équipé d’une boulangerie, d’une boucherie, d’une gare (aléatoire) et d’un hôtel-restaurant à l’enseigne de l’Etoile. On y sert, pour une somme modique, un de ces menus roboratifs qui vous requinquent un travailleur et vous retapent le plus flapi des pèlerins ou la plus éreintée des randonneuses. Tous ceux qui, à un moment ou à un autre, ont braillé les couplets du grand métinge du Métropolitain seront contents d’apprendre que Camélinat (l’orgueil –ye- du Parti) est né natif de ce lieu où il est enterré et où une rue (celle de l’Etoile justement) porte son nom.
Après le café (compris) il est temps de repartir. Il suffit de suivre la route qui passe devant l’auberge jusqu’à la Cour des Mailly.
Là, on laisse sur la gauche une gentilhommière dont il n’est pas sûr que les tours et les mâchicoulis soient tout à fait authentiques et on prend, le second chemin qui monte dans une côte en direction de la Grande Pièce. Entre blé et colza à moins que ce ne soit entre orge et avoine, on arrive à une mare apparemment sans grenouilles puis à une petite route. Ne vous laissez pas tenter par la voie qui vous fait face mais faites quelques pas sur la gauche pour prendre, à une soixantaine de toises sur la droite, un autre chemin qui vous mènera à la lisière du bois des Gatelleries puis à un carrefour où vous obliquerez en direction du hameau du Bois du Fourneau. C’est le seul passage où vous risquez de crotter vos chaussures et le bas de vos guêtres, en récompense, il vous suffit d’aller tout droit et de regarder, de temps en temps sur votre droite, pour avoir, sur la vallée de l’Yonne des échappées aussi belles qu’inattendues.
En arrivant au bois des Coquards, les balises jaunes d’un sentier de petite randonnée vous accueillent. Suivez les. Elles vous guideront jusqu’à la vallée de Vaulabelle et de là aux Goulots puis à la Roche à Grillot d’où votre chemin va grimper doucement vers un relais de téléphonie mobile à côté duquel vous trouverez un terrain de foot et ses vestiaires ainsi que la Croix de Saint Pèlerin. De là, une dizaine de minutes suffit pour rejoindre votre conduite intérieure. C’est une confortable descente entre maisonnettes et pavillons. Les coucous et les nids de violettes qui ont enchanté votre journée, laissent la place aux jacinthes, jonquilles, narcisses et tulipes des jardinets à pelouses et allées en pavés autobloquants. Des chiens aboient avec une vigueur inégale. Des gnomes à brouette ou à pipe font la nique à des cigognes résolument immobiles et des nymphes et dryades, imitation pierre, veillent sur des fontaines qui alimentent des bassins en plastique imputrescible. Un chat écaille de tortue se faufile sous une haie fraîchement taillée, des draps bleus flottent au vent et un mouflet, haut comme trois pommes à genoux, poursuit le premier papillon de la saison. Dans le petit bar de la place de la Gare, il est tout juste l’heure de siroter la première gorgée d’une bière qui a la couleur des fleurs de cornouiller.
Chambolle
[ndlr : les photos proviennent de mon album personnel; elles ont été prises aux abords de la région décrite dans cette ballade, mais dans un sens très large et ne se superposent pas au texte ni à la carte !]
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