C’est via le décrochage Aix/Marseille du blog de Libé, que j’ai appris la nouvelle. Albert Camus, serait la «figure tutélaire» de Marseille capitale européenne de la culture 2013, comme l’annoncerait officiellement en septembre prochain, Jean-Claude Gaudin. A confirmer mais c’est du crédible et du lourd : « la plus grosse part d’un budget de 98 millions d’euros sera pour célébrer le grand écrivain ».
Cette nouvelle résonne particulièrement pour moi, qui est devenu méditerranéen à cause/grâce à Camus. Il n’est pas pour rien si je suis devenu marseillais d’adoption. La lumière qui l’habite a besoin d’un ciel azur pour être vécue. C’est mon père spirituel de l’absurde, et je conserve intacte une part de sa révolte permanente, pour essayer d’être un Sisyphe heureux. Auteur essentiel, il m’a donné la liberté en gage d’une exigence à vivre.
Alors, retrouver Albert Camus pour ses 100 ans comme l’auteur fétiche de Marseille 2013 aura une résonance toute particulière pour moi et bien d’autres. Je n’accroche pas trop à la polémique lancée dans Libé par Jean-Pierre Barou, avec un Camus passé au savon de Marseille pour une récupération d’ouverture omniprésidentielle. Que le Président Sarkozy lui voue un « culte » ne change rien. JC Gaudin n’est pas Sarkozy, et Bernard Latarjet veille au grain. Albert Camus est trop « explosif », trop indépendant pour souffrir aucune récupération. Il n’est pas soluble dans un seau de savon de Marseille, même concentré ! Il n’est pas plus soluble dans le Sarkosisme 1er (et possible 2nd millésime), que dans la pensée UMP. Même pas dans le socialisme !! C’est un auteur qui donne des armes de résistance contre le conformisme, un être épris de liberté qui donne la responsabilité de se révolter. Parce que c’est le seul choix possible, au bout du compte et des possibilités… Albert Camus était un révolté, un libertaire élevé à l’éthique qui ne faisait pas de concession contre aucuns des totalitarismes de son temps. Il est profondément actuel.
Alors, qu’Albert Camus soit l’auteur fétiche de Marseille 2013, capitale européenne de la culture est une grande et belle chose pour un auteur boudé par l’intelligencia franchouillarde. Il est accessible (trop ?), sa pensée brute parle à chacun sans les circonvolutions des classiques. N’y-a-t-il pas de temps plus absurde qu’aujourd’hui pour qu’il soit d’actualité ? Evidence, c’est un pont entre les deux rives de la méditerranée, l’Algérie en miroir de la Provence, Alger et Marseille villes blanches dans la transparence de la lumière… Si Marseille peut contribuer à faire connaître sa pensée, l’évènement n’aura pas failli.
C’est à tous les « camusiens » de Marseille et d’ailleurs, de veiller à l’impossible récupération et aseptisation de l’auteur. Camus permet de résister à l’air du temps : « La vie n’a pas de sens … mais nous savons aussi, et avec la même intensité, que certains hommes, eux, arrivent à donner un sens à leur vie, en quelques circonstances privilégiées. Lorsqu’ils aiment et créent. Lorsqu’ils arrivent en un éclair à discerner quelque chose qui ressemble au Bien, au Vrai et au Beau. Lorsqu’ils sont assez heureux pour avoir envie de protéger les instants de bonheur des autres … »
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Que Sarkozy l’aime bien, on s’en tamponne, Camus reste au firmament de nos plus grands et plus intelligents auteurs. Il est de ceux dont la lecture élève et ce n’est pas si courant. Et ça ne peut pas faire de mal à notre cher président…