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Cele kula, Тоur des Crânes, ossuaire et site commémoratif (Tourisme Serbie Niš)

cele kula cranes serbie

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cele kula serbie

Ćele kula, la « Тоur des Crânes »  (en serbe cyrillique : Ћеле Кула ; en turc : Kelle Kulesi) est un pense bête historique sinistre.  Tout voyage en Serbie devrait passer par la découverte de Cele kula. Ce lieu commémoratif est constitué de nombreux ossuaires, qui en font un site historique rare et instructif sur les guerres, l’occupation ottomane dans les Balkans et les soulèvement qu’ils générèrent.

Mon voyage à Nis ne pouvait aucunement se passer sans la visite de quelque chose qui est, selon toute vraisemblance, le seul monument de ce type dans le monde. Bien sûr, il y a des ossuaires partout, comme par exemple celui des catacombes parisiennes, qui ont été partiellement utilisées comme cimetière (suite au manque de la place, mortalité trop nombreuse, peut être même besoin de déménager certaines parties de Paris pour faire place à de nouveaux bâtiments?)… avec bénédiction bien sur.

CELE KULA, LA TOUR DES CRÂNES : OSSUAIRE ET LIEU COMMÉMORATIF 

De similaires ossuaires à celui de Céle Kula, près de Nis, peuvent être trouvés dans d’autres parties du monde encore, ce qui fait que voir des os et des crânes empilés les uns sur les autres n’est pas vraiment une grosse surprise. Mais visiter la Ćele kula (Тоur des Crânes), la comprendre dans le contexte des évènements historiques, et comprendre ainsi la vocation de cette tour… fait de cet endroit un endroit affreux… et unique dans le monde.

cele kula cranes serbie

L’histoire de Cele Kula commence bien dans le passé, bien que, plus je vieillis, plus ce 19ème siècle ne me paraît pas aussi lointain comme quand j’étais élève et quand mes guerres des Balkans, les soulèvements contre les Ottomans et autres histoires guerrières me semblaient plutôt faits pour me faire perdre du temps. Il est peut être nécessaire de grandir, comprendre la fonction et la valeur de l’histoire, comprendre qu’une chose fait venir une autre, et que du coup, peut être on n’y serait pas là, dans ce contexte et sur cette terre, si quelque chose, dans le temps ne s’était pas produit.

Ainsi, nous savons que la Serbie fut occupée pendant de longs cinq siècles par les Turcs, cinq siècles faisant arrêter plein de choses… faisant venir une sorte de noir « médiatique », dans lequel que quelques petits points brillants pointaient (quelques constructions de monastères par exemple). Et c’est vrai! Avant les Ottomans nous découvrons les villes-citadelles, les constructions d’inspiration byzantine, la naissance du style Moravique, style si spécifique de l’architecture médiévale serbe… et une fois que les Ottomans arrivent, c’est comme si dans les livres d’histoire le monde s’était arrêté, gelé dans le temps et l’espace. Du coup, en lisant l’histoire, même les années deviennent très confuses… on découvre quelques rois, princes et héros qui apparaissent ça et là, et pourtant quand on regarde de plus près et de façon chronologique, nous comprenons que ce ne sont que des îlots dans l’Empire Ottoman – dont la fin s’annonce petit à petit avec les évènements dont certains liés étroitement avec cette Tour de Crânes que l’on connaît aujourd’hui.

cele kula serbie cranes

En fait, même si cela ne va aucunement désigner la fin du règne Turc, c’est en 1809 qu’un affrontement a eu lieu entre les troupes serbes, avec leur commandant (voïvoda) Stevan Sindjelic (immortalisé dans une chanson patriotique) et l’armée turque. Les affrontements duraient un petit moment sur le mont de Čegar (Tchegar), quand le commandant Sindjelic comprit que la situation est sans issue et que son armée sera battue. Préférant largement la mort en combat aux longues tortures que les Ottomans réservaient aux prisonniers, il décida de faire exploser toutes leurs réserves de poudre, en faisant sauter non seulement ses propres soldats et soi-même mais en emportant également avec eux un nombre important de soldats ennemis.

Ce qui suivra est, tout simplement sans précédent dans l’histoire, bien que les Ottomans étaient assez connus pour des pratiques plutôt sévères avec leurs ennemis (rappelons nous des gens empalés etc…): le Hursid-Pasha, ordonna alors qu’on récupère tous les corps des soldats serbes, qu’on les décapite, et que l’on fasse une tour, en se servant des têtes comme matériel au lieu des briques ou des pierres. Pour que ça soit encore plus effrayant, les visages (peaux et cheveux) furent enlevés et empaillés pour être envoyés à Istanbul comme souvenirs de guerre!!! Et voilà, j’écris ces mots… et même après avoir vu tout ça, je n’arrive pas à comprendre comment fonctionne l’esprit humain et comment ça se fait que l’humain soit aussi inventif quand il s’agît de faire mal à autrui!!!

Et comme le disait le gardien de ce lieu… c’est assez surprenant de les voir aujourd’hui ces crânes… mais on ne peut qu’imaginer quelles émotions soulevaient ces têtes de proches, de pères, frères ou maris… comment cela affectait le peuple occupé… faisant naître la peur qui, en quelque sorte, donnera raison à cette tour… vu que la fin des affrontements fut quand même repoussée. Pas pour longtemps, comme on peut le voir à la fin du XIXème siècle, quand l’état fut définitivement instauré.

La tour des Crânes fut longuement exposée au temps et les changements climatiques, ouverte et à portée de main de chacun. On le voit surtout aujourd’hui, car un bon nombre de crânes a disparu ; certains se désintégrèrent, certains furent volés, d’autres encore furent récupérés par des cousins et enterrés « comme il se doit ». Ainsi, au lieu des neuf cent crânes et des poussières, il y en a, aujourd’hui, que cinquante, ce qui a du être une des raisons de la construction de la chapelle qui va l’entourer une fois pour toutes. Et voilà… beaucoup d’années après la construction de la tour, qui se trouve à seulement quelques pas de l’hôpital militaire, et qu’on approche soit en passant par un petit square fleuri, soit en empruntant un petit pont en bois suivi d’une allée également fleurie, une chapelle a été construite, chapelle qui a failli nous faire passer à côté de cette attraction, et partir je ne sais où! Oh… il ne faut pas en rire: tous les livres et les documents que j’ai pu voir ou lire, ne montraient que le mur avec les crânes… et du coup c’était exactement ce que je m’attendais à voir… je n’avais pas pensé une seconde qu’une tour pourrait être à l’intérieur d’une autre bâtisse!

cele kula tour des cranes eglise

Et voilà. Même si l’accès est très très facile (il faut prendre n’importe quel bus avec départ du centre ville et en allant vers le site archéologique Medijana et Niška banja, et descendre chez la « Vojna bolnica » (lire voyna bolnitsa – hôpital militaire), il faut surtout penser d’aller à la boutique des souvenirs (c’est là qu’on montre ou achète nos tickets de toute façon), puis prendre le petit pont en bois … sinon vous risquez de passer à côté, sans même savoir que vous avez raté le truc! Ce qui ajoute un peu à la confusion, ce sont également les couleurs pastel de la chapelle (bien qu’elle est très jolie, faut le dire)… Bien sur, une fois que vous aurez visité la tour vous l’accepterez tel quel, mais la première fois c’est un peu bizarre, surtout que pour moi, la couleur pèche en combinaison avec du blanc ne se marient pas forcément bien avec la grisaille horrifique des crânes et du béton avec lequel ils ont été attachés à tout jamais. De la pierre serait peut être un meilleur choix… mais… finalement je m’arrête sur des détails plutôt sans beaucoup d’importance

La Ćele kula appartient également au Musée National de la ville de Niš, ce qui fait qu’il est possible de la visiter en trio avec deux autres grandes attractions de Niš, le site archéologique Mediana et le camp de concentration « Croix rouge » (qui, contrairement aux deux premières attractions se trouve de l’autre côté de la ville). Le prix du ticked d’entrée est carrément ridicule, surtout si on prend un ticket pour les trois. Le mieux est de visiter la tour en revenant de Mediana, qui demande quand même une visite bien plus longue. Le seul souci, à mon avis est incarné dans le fait qu’il n’y a que 2 stations entre la Médiana et la Tour… et que, si vous ne voulez pas marcher environ un kilomètre et des poussières, il faudra payer le prix entier du billet de bus. A priori, quand il ne fait pas trop chaud ce n’est pas un problème… mais quand on y a été… il faisait 40 degrés et du coup… le choix du bus s’est imposé.

Si déjà nous parlons de l’argent il faut bien mentionner le contenu de la boutique de souvenirs (qui n’existe qu’à côté de la Tour), et qui propose un joli choix, allant de dépliants très utiles et bien illustrés, jusqu’à des livres très complets et sérieux. Des souvenirs inspirés d’art romain sont très jolis, bien que je trouve dommage qu’on ne puisse pas les trouver sur le site de Médiana… ce qui serait plutôt logique.

Chapelle de Cele Kula : une émotion intense

Mais revenons à la chapelle et sa tour pleine de crânes à l’intérieur. Comme j’y allais avec mon enfant j’ai préféré lui en parler de façon très détaillée pour le préparer à ce qu’il verra, surtout qu’il n’est pas vraiment sympathique de voir plein de visages déformés et sans yeux. Mais finalement, le gentil gardien a également fait tout pour présenter ce lieu de façon détaillée, en nous expliquant la construction de la tour de façon si simple que du coup, mon fils a tout accepté beaucoup plus naturellement que j’aurais pu l’imaginer. (petit détail: je ne suis pas sure que le monsieur parle une autre langue que le serbe).

La chapelle de Cele Kula en elle-même est très petite. Ce qui devait sembler énorme au peuple d’antan, agrandi par la peur, la tristesse et les émotions n’est aujourd’hui qu’un grand mur tout gris, haut comme (à peu près) une maison avec un étage. Un mur plein de trous, parsemé de crânes aux horribles sourires semi édentés, qui dirigent leur regard aveugle vers les visiteurs. Mon fils s’arrête un moment « regarde comme ils sont différents ces crânes…on voit que ce ne sont pas des cousins »… et vraiment! Avec un enfant à côté de soi on a vite fait oublier le but principal de la visite et entrons dans une discussion très riche sur le thème d’anthropologie. De plus, certains crânes sont si petits, on dirait que certains de ces héros n’étaient pas beaucoup plus grands que des enfants… peut être à peine autour de la majorité. Que le monde humain est sans pitié! Et si plein de souvenirs de malheurs et de temps quand périssaient ceux qui devaient construire le futur… un leitmotiv qui se répète et revient toujours… malheureusement.

cele kula crane Sindjelic

Dans un coin de la chapelle de Cele Kula, fondée par l’architecte on peut voir une carte, et l’image représentant le Voïvode Sindjelic. Son crâne est là également, séparé de ceux de ses soldats, et placé sous une espèce de cloche en verre. Pendant un moment je me demande s’il aurait vraiment aimé ça, cet homme qui a préféré largement voler dans les mains de la mort au lieu de lâcher ses soldats, en les abandonnant aux mains des bourreaux ottomans. J’ai nettement l’impression qu’il aurait préféré rester uni avec ses hommes. Pourtant le fait d’être là, à part, c’est logique… ça donne la possibilité aux gens, visiteurs de lui montrer leur respect.

Visiter les murs de la tour ne prend pas beaucoup de temps. Peut être dix minutes, si vous vous permettez un peu de temps pour regarder chaque visage, pour, éventuellement, dire une prière. Mais même si ce qu’on peut y voir semble être horrible, ce n’est pas vraiment le contenu de ces murs qui fait cet effet, mais plutôt le motif des ottomans qui reste gravé dans l’air. J’ai même l’impression que ces crânes sont plus… hum… calmes, plus paisibles, que les murs des cellules pourtant vides du camp de concentration Croix Rouge. C’est peut être le fait d’avoir érigé une chapelle qui donne à ce lieu cette paix, une paix donnée par la religion et le pardon? Je ne saurais le dire. Une chose est certaine… la Cele kula n’est peut être pas l’attraction la plus jolie du monde, mais c’est un lieu qu’il faut visiter.

Pour aller plus loin à propos de Cele Kula:

Carine Markovic

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