Si un jour je devais vivre isolée sur une ile et qu’on m’offre la possibilité de ne recevoir qu’un seul quotidien, je choisirais sans hésiter The International Herald Tribune. La « une » de Libé aujourd’hui : « Les primaires », ras le bol. La « une » du Parisien : « le mystère du gagnant au loto », m’en fous ! La « une » du Herald Tribune : « Les femmes prix Nobel » C’est quand même plus classe !
Deux articles se font face aujourd’hui dans ce quotidien : « Fear of dragons » d’un côté et « The malefactors » de l’autre. La « peur des dragons » pour la Chine et les « malfaisants » pour l’Amérique. La Chine avec les commémorations du centenaire de la révolution de 1911 qui a fait tomber la dynastie des Qing – et l’Amérique avec la manifestation des « Occupy Wall Street » à New York. Aux Nations Unies de New York, a lieu en ce moment une exposition intitulée « La Chine en développement 1911/2011 ». Cette période de 1911 à 1927 a peut-être été la plus grande et la seule période de liberté en Chine durant ce 20e siècle ».
A New York « Quelque chose est en train de se passer. Ce n’est pas encore très clair mais il se pourrait que ce soit le début d’un vrai mouvement populaire. Lorsque « Occupy Wall Street » a commencé il y a 3 semaines c’est tout juste si la presse daigna mentionner l’évènement, les radios nationales publiques ne le couvrirent même pas … »
« En Chine, la liberté de ces premières années républicaines (1911/1927) ne fit pas long feu. Elle fut étouffée dans l’œuf. Les nombreux partis politiques d’alors jouèrent un rôle immense tandis qu’aujourd’hui, les soi-disant partis démocratiques ne sont que les serviteurs du Parti Communiste. Où en serait la Chine aujourd’hui si la démocratie naissante d’alors avait été autorisée à s’épanouir ? Quand on pense aux injustices et aux corruptions de la fin de la dynastie des Qing et les tensions à la veille de cette révolution de 1911, on voit que cette image de la Chine d’aujourd’hui n’est pas tellement différente de celle d’alors, avec la meme corruption et ses injustices ».
« A New York, avec les syndicats et des Démocrates soutenant le mouvement de protestation « occupy Wall Street », le mouvement continue et s’amplifie et ne peut être ignoré. Il pourrait marquer un tournant dans l’histoire des Etats-Unis. Les banquiers ont tiré tous les profits de la dérégulation et se sont sucrés un max. Certains manifestants sont peut-être drôlement nippés et agitent d’étranges slogans mais « So what » Ca choque moins que de voir les ploutocrates en costard cravate qui ne doivent leur richesse qu’aux garanties du gouvernement ».
« En Chine, certains blogueurs ont osé écrire : « pour le 100e anniversaire de la révolution nous nous attendions à une révolution qui renverse ce statu quo » Mais le gouvernement de Pékin a mis le paquet pour mater toute insurrection populaire ! Au Wuhan ou est né le mouvement de 1911, 250 000 caméras de surveillance fonctionnent 24 h/24… afin de « créer un environnement de paix pour le centenaire » !
A New York, « les hommes en costard n’ont pas le monopole de la sagesse. Il est clair qu’aucune demande formulée par les protestataires ne fera l’objet d’une loi mais le fait est que ces protestations vont changer le climat politique aux Etats-Unis. Les riches Républicains ont taxé ce mouvement de « guerre des classes » et de « malefactors of great wealth » : « Les malfaiteurs de la grande richesse »
En Chine, la veste Mao est revenue à la mode. A Wall street, verra-t-on un jour les banquiers en « ragtag » en « nippes » de jeunes contestataires dénonciateurs du consumérisme ?
Tout ce qui concerne la Chine a été écrit par Yu Hua qui publie un livre « China in 10 words » et pour la partie New York : Paul Krugman
SHAKESPEARE ? SHAKE BEER ? ….TRAGICOMÉDIE AU ROYAUME DE THAILANDE
A l’occasion de la (non)sortie du film « Shakespeare tong tai » » Shakespeare doit mourir », relatant la tragédie de Macbeth de William Shakespeare… je me suis amusée à faire quelques petites interviews autour de moi.
D’abord situons l’histoire dans son contexte. Le film a été censuré pour des raisons aussi vagues sur la forme que précises sur le fond (du moins pour le ministre de la culture. Film dangereux qui «risquait de saper l’unité du peuple thaï dans le pays » (sic)
La tragédie de Macbeth écrite en 1606 s’inspire d’un personnage des chroniques « Macbeth roi d’Ecosse » et comporte un grand nombre d’éléments surnaturels (sorcières prédictions… c’est surement ce qui a plu à Manit le metteur en scène), mais s’écarte toutefois très vite de la biographie historique du roi des Pictes qui régna en Ecosse de 1040 à 1057.
Macbeth est la tragédie la plus courte mais surtout la plus sanguinaire de Shakespeare. Les raisons non évoquées par le ministre de la culture se trouvent-elles dans la paranoïa, l’arrogance, la folie, la culpabilité, la tyrannie, le gout du pouvoir, l’absurdité, la barbarie, les règlements de comptes évoqués dans la pièce et donc dans le film…. ou se situent-elles à un niveau plus mystérieux ? Seul le ministre pourrait répondre à cette question, bien que le journaliste Kong Rithdee, dans le « Bangkok Post’ écrive : « Ce film est une allégorie contemporaine sur une nation qui n’existe pas ou un politicien populaire grimpe les échelons du pouvoir » (mais avec quels moyens !)
A mon avis, interdiction ou censure sont plus dangereuses que le film lui-même.
Dans mes petites interviews auprès de jeunes… « Shakespeare » ? « Connais pas ».
Auprès d’étudiants d’université : « Ah yes, Romeo and Juliet… ! »…
Auprès d’un enseignant : « Shake beer » ? (secouer la bière ?)… Je n’invente rien.
Qui serait allé voir ce film ? Quasiment personne, en tout cas pas plus que ceux qui ne sont pas allés voir « Oncle Boonmee » d’Apichatpong Weerasethakul, Palme d’or au festival de Cannes en 2010… Alors vraiment « Much ado about nothing »… autre pièce de Shakespeare… ou « the « taming of the shrew » (ça, ça pourrait être pour moi éventuellement) !!!
Les petits princes de Mae Hong Son, eux, n’ont rien à voir avec la cruauté, la démence, le goût du pouvoir et la dictature… ils sont encore purs comme l’évoque l’autre nom de cette sublime cérémonie : « Look kaeaw » » les enfants purs comme le cristal » mais qui « rigolent » bien quand meme !
C’est toujours mieux ailleurs ? Voire !
Est-ce qu’on se sent mieux lorsqu’on pose des questions auxquelles il faut bien dire, on ne reçoit pas ou peu de réponses ? Questions pouvant avoir ici le sens d’indignation (Le mot est un peu à la mode ces temps-ci).
Par exemple :
– Ou en sommes-nous du sommet sur « Sauver la planète » à Durban, Afrique du sud ?
– Je lis dans « The International Herald Tribune » que le prochain Président des Etats-Unis risque d’être le marchand de pizzas, le républicain qui a détruit plus de jobs qu’il n’a créé d’emplois (On a les présidents qu’on mérite ?). Le journaliste Paul Krugman le compare au personnage de Gekko du film d’Oliver stone « Wall Street » qui disait : « Je ne créé rien, je possède » et « Eh mec ! tu ne crois quand même pas qu’on est en démocratie ? » Les Etats-Unis, une democratie ?
Oui on peut la vendre la Démocratie, l’imposer, la porter en étendard, la vanter, clamer qu’il n’y a rien de mieux mais…
La démocratie c’est en principe la voix du peuple…. Mais que lui dit-on au peuple ? « Fais d’abord ci, et ça ira mieux après ». « Elis-moi d’abord et je m’arrangerai avec ceux qui détiennent le vrai pouvoir, celui de l’argent » ?
En France lorsqu’on accueille des gens venant de pays étrangers et qu’ils ne se comportent pas selon les lois de la république, on ne peut imaginer qu’on laisserait qui que ce soit dire : « Pliez-vous à nos lois ou quittez ce pays ». Aucune organisation, association, medias ne le supporterait – à tort ou à raison – Alors on accepte. Au nom du respect de l’autre mais au détriment de la loi. Eh bien oui, en tant que française je me tais dans mon pays (bien que j’ai pris quelques distances avec lui). Par respect pour les autres et parce que je n’ai pas le choix.
Mais lorsque les lois ne sont pas appliquées dans un pays, est-ce qu’on ne laisse pas la place aux hors la loi ?
En tant que française vivant momentanément dans un autre pays démocratique (je n’ai pas mis de guillemets donc sans ironie ! quoi ! il y en a quand même ? alors c’est vous qui l’avez pensé ! ). Donc en tant que française vivant en Thailande, je me tais AUSSI (on peut lire des trucs bizarres sur FB.. genre « si tu n’aimes pas ce pays, dégage »)
Je la boucle d’un côté. Je la boucle de l’autre !!
Il y a belle lurette que je ne pose plus de questions à personne. Je me les pose à moi-même. « A quoi ça sert de penser ? » me demande continuellement mon ami (très thaï). Je regarde, j’écoute, j’observe, et je pense… ah oui, j’écris un peu aussi. Ça peut être dangereux par les temps qui courent.
Alors mon sujet d’indignation aujourd’hui (aussi nombreux que mes sujets d’admiration, mais ne melons pas tout) : Lu dans le « Bangkok Post » y a quelques jours :
A l’occasion de la fête des pères, « On » a gracié :
– Docteur Wiset qui a tué sa femme, elle-même médecin, en 2001 et l’a disséquée pour la faire disparaître (ça devait être un bon chirurgien). Ceux qui habitent en Thailande se rappellent des « unes » de cette histoire.
– Chalermchai, mêlé au meurtre du gouverneur de Yasothon (Isan)
– Le lieutenant Général de police Chalor qui a tué deux membres de sa famille à propos d’un trafic de pierres précieuses
– Serm, autre étudiant en médecine qui a tué et démembré sa petite amie, elle-même étudiante en médecine. Par jalousie et condamné à vie.
Bigre, mon voisin est étudiant en mdecine et il fait hurler sa copine de temps en temps (et je peux jurer que ce n’est pas de plaisir).
N’ont pas été graciés ceux qui ont parlé tout haut et qui, aujourd’hui, portent des chaines aux pieds (J’ai ecrit : liberte d’expression ??)
Bon, je me tais là-bas en tant que francaise. Je me tais ici aussi. En tant qu’étrangère, je n’ai pas droit à la parole. On ne m’a pas encore interdit de penser, ni d’écrire. Si ?
Ce que j’aime dans ce pays ce sont ceux les regards de ceux que l’on n’entend pas.
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