« DES MOTS ASSASSINS »

Il m’arrive d’être un brin perverse…. Et pour en profiter
doublement, il faut raconter…

Dans ma coffee shop du matin, des journaux sont mis à
disposition des clients : quotidiens de diverses tendances, américain,
italien espagnol, journal sportif et magazines. Il y en a pour tous les goûts,
tendances et langues…

Je suis un peu chez moi dans cet endroit et je « tire
la gueule » intérieurement lorsque quelqu’un prend ma place ! Je me
créé des amitiés avec le personnel dont beaucoup sont étudiants, et nous continuons
d’entretenir des rapports via FB (salut Dana, Sylvie, Sandra) ou dans la vraie
vie (bisous Sheila). Bref, hier je m’accapare 2 journaux, l’américain et un
français et, plus tard, prise par l’écriture, j’oublie de les remettre à leur
place. Un type, habitué des lieux, la mine renfrogné, sans bonjour, alors que
je suis d’un naturel souriant, vient vers moi et m’engueule : « Vous n’avez
pas le droit de vous accaparer les journaux, vous devez les remettre à leur
place… » Tout ça avec une tronche de donneur de leçon, alors que je n’en
reçois plus depuis longtemps. Et puis il y a façon et façon d’obtenir quelque
chose. Je ne prétends pas obtenir tout ce que je veux avec un sourire, mais
franchement ça paye mieux qu’avec l’agressivité. Parce que de l’agressivité, on
passe vite à la violence verbale, de la violence verbale aux coups… Bon, ceci
dit, je n’ai jamais fait le coup de poing, même si parfois, mes petits poings
de scribouilleuse m’ont démangé. Toutefois j’ai trouvé plus de satisfaction à
me servir de mots. Bien plus assassins… et au moins je ne risque pas la prison.
(ou alors il faudrait que les personnes en question se reconnaissent dans mes
romans !)

Bref, aujourd’hui, je suis venue avec « mes »
journaux et je les ai laissés bien en évidence sur ma table.

Je vois mon « emmerdeur » s’installer, fouiner
dans les journaux, se servir, s’installer à sa table après avoir jeté un œil noir
sur « ma » table. A son air, je sais qu’il se prépare à se jeter sur
moi comme un vautour sur sa proie. Il s’assied, mâchouille son café et son goût
d’en découdre. Moi j’écris tranquillement en riant intérieurement. Je suis prête.

Il prend le prétexte d’aller aux toilettes pour passer à
côté de ma table, la bouche serrée prête au « sermon », à la « leçon
magistrale » du prolo à la bourgeoise, du gars qui est dans son droit et n’a
rien à se reprocher…

Je le regarde avec un grand sourire innocent. « Je
peux prendre ces journaux ? » me demande-t-il l’œil méchant, comme si
ces journaux lui revenaient de droit.

« Mais bien sûr Monsieur, je vous les prête volontiers.
Vous voulez lire La Croix ? » Et je tends les journaux qu’une voisine
qui les reçoit gratuitement m’a passés.

La tête du mec ! Il a rejeté ma proposition. Parce
que quoi ?

– vexé de ne pouvoir me donner une nouvelle leçon ?

– dégoûté de lire la Croix (il a tort, les cathos sont
tendance socialiste et il y a des articles     intéressants dans ce canard)

– humilié de s’être fait prendre au piège ?

Je ris, il a fait ma journée ! Une chose est sûre,
il ne reviendra plus jamais me réclamer les journaux qui traînent sur ma table.

Amusez-vous, la vie est courte et les gens souvent très
cons. Mais ne dit-on pas « à con, con et demi » ?