Aller au contenu

Caucasien, Malais et Nègre ; élucubrations et mythe de l’Europe blanche

Votre séjour en Croatie est unique ; notre expertise l’est aussi! Pour mieux préparer vos vacances, consultez le guide voyage Croatie et téléchargez les Ebooks gratuits : conseils pratiques, idées de visites et bonnes adresses.  

 

Petit aperçu des élucubrations prétendument scientifiques autour du caucasien, du malais et du nègre, établies par des anthropologues sur la base des retours des missionnaires, aventuriers et conquérants européens à propos des caractères moraux selon la physionomie des peuples (sauvages) au XIXème s. Ou comment les scientifiques servaient le mythe merveilleux de l’Europe blanche triomphante.

Elucubrations autour du Caucasien, du Malais et du Nègre

Homme de la nouvelle HollandeDéniché au hasard dans la bibliothèque familiale, le petit ouvrage sur la « physionomie des peuples », écrit par un anonyme à une date anonyme (probablement fin XIXème/début XXème siècle) est une pure merveille.

Une pure merveille de raccourcis d’une Europe blanche, conquérante et triomphante, laquelle sévissait à l’époque dans le monde entier, grâce à ses aventuriers, ses missionnaires, ses hommes d’affaire, ses pionniers et tutti quanti.

Le titre exact, délicieusement peu porté sur le politiquement correct qui nous pourrit actuellement l’existence, n’y va pas par quatre chemins: « Physionomies nationales des peuples ou les traits de leur visage comparés à leurs mœurs et caractères avec vingt-huit planches ». Publié à Paris chez Delaunay libraire. Pas de date, pas d’auteur, donc.

 

Le Caucasien, le Blanc dominant

D’abord, le Blanc, ou Caucasien, c’est-à-dire moi, en quelque sorte, même si mes origines obscures me mettent un peu hors-jeu, à l’instar des Finnois et des Lapons: « couleur blanche, cheveux bruns ou blonds, tête presque sphérique, face ovale, traits médiocrement prononcés, front uni, nez légèrement arqué, bouche petite, lèvres mollement étendues, menton plein et rond, et point de proéminence aux os et aux pommettes ».Physionomies nationales

 

Le Malais et le nègre

Maintenant le Malais (que l’on rencontre aussi, dixit l’auteur inconnu, dans le Pacifique) : « basané, cheveux noirs, mous et épais, face comprimée, front bombé, nez gros, large et épaté, bouche grande et charnue, traits saillants, surtout vus de profil ».

L’Allemand et l’Anglais : « Ils ont des têtes dont les dimensions suffisent à les caractériser (…). La coloration de ces deux peuples est celle de l’Europe du nord : mais chez l’Anglais, elle est plus belle, parce que le tempérament sanguin domine plus chez lui que chez l’Allemand ».

On y apprend que l’Allemand a de l’imagination, « mais ce n’est pas cette imagination qui égare trop souvent l’Italien. Celle de l’Allemand reproduit, et l’imagination de l’Italien crée ».

Pour le Français, « à cheval entre toutes les nations blanches », tout va bien : « le caractère moral des Français présente les mêmes caractéristiques que sa physionomie, et l’équilibre qui résulte de cet heureux mélange, de cette combinaison de facultés diverses, le rend à la fois propre à l’étude de toutes les sciences, à la pratique des beaux-arts, à la guerre et au commerce. »

Rien sur l’Helvète, en revanche, mon peuple d’adoption, qui passe son temps à essayer de s’y retrouver dans son puzzle fédéral. Mais comme il se situe entre l’Allemagne et l’Italie, avec un chouïa de Français morose sur son aile gauche, on peut conclure qu’il reproduit et crée en même temps et qu’il est bon en tout, y compris savoir compter.

Le Nègre et le Malais en prennent pour leur grade. « Sournois, sauvages, primitifs, proches du singe, violents, déséquilibrés, enclins à la paresse »  (…) Le Malais est bon navigateur tandis que le Nègre ne sait même pas barboter dans ses fleuves boueux ».

Malais

Les peuples sauvages du Pacifique

Vers la fin de l’ouvrage, déboulent « les peuplades sauvages » du Pacifique. Là, faute d’informations anthropologiques, l’auteur semble presque avide d’en finir. Son argumentation, déjà fragmentaire, prend la direction de la conclusion hâtive propre aux politiciens en campagne électorale.

« Les insulaires de Tanna [Nouvelles-Hébrides, actuellement Vanuatu, note de la rédaction], n’ont aucun rapport avec les autres insulaires du Pacifique ». Ce qui n’empêche pas l’auteur de les comparer tout de même avec les autres insulaires du Pacifique : « les traits du Tannan n’ont rien de féroce ; mais ils n’ont point cette noblesse qui caractérise souvent ceux des Taïtiens et des habitants des îles Sandwich ; ses yeux et sa physionomie mâle et ouverte annoncent à la fois la douceur, la vivacité et le courage ; mais ennemi du travail et enclin à la paresse, il abuse de sa force pour opprimer le sexe faible ».

 

Homme de l'Ile de Tanna

 

Rien ne va plus pour le pauvre bougre de la Nouvelle-Hollande [actuellement Nouvelle Irlande, en Papouasie-Nouvelle Guinée] : « les bois et les montagnes de l’intérieur recèlent une race d’hommes encore plus extraordinaires que celles que nous venons de décrire. Des bras et des jambes d’une longueur démesurée leur donnent presque l’aspect du singe. Ils rendent plutôt des sons qu’ils ne profèrent des mots et leur intelligence parait à peine surpasser celle de la brute. Nous regrettons de ne pouvoir offrir des notions plus étendues sur cette peuplade encore inconnue ».

A l’heure où les sermons occidentaux vacillent sous le joug de la sélection naturelle ou de l’impitoyable loi de la démographie, il est captivant de voir à quel point certaines certitudes sont incertaines devant l’Histoire.

En observant le spécimen caucasien ci-dessous, peut-être un insulaire de Tanna pourrait-il écrire : « couleur sanguine, menton tombant, yeux plissés, rides marquées, peau flasque, profil et avenir incertains ».

 

Caucasien XXieme siecle
Caucasien du XXIème siècle (Photo Damien Personnaz/ XXIème siècle)

 

N.B – Les phrases tirées de cet ouvrage sont en langue originale.

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

 

  1. Accueil
  2. /
  3. Derniers articles
  4. /
  5. TRIBUNE
  6. /
  7. CHRONIQUES NOMADES
  8. /
  9. Caucasien, Malais et Nègre ; élucubrations et mythe de l’Europe blanche