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Nusa Kambangan, l’île prison : les couloirs de la mort en Indonésie

Nusa Kambangan

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La mort rôde dans cette petite île indonésienne à priori sympathique nommée Nusa Kambangan. Et ce n’est pas près de se terminer. 

Nusa Kambangan, indonésie, peine de mort indonésie, trafic de drogue, Serge Atlaoui, île prison, Bali, Sur Nusa Kambangan, on y trouve des plages angéliques et désertes, enveloppées de cocotiers et de pandanus. Des grottes naturelles mystérieuses. Une jungle presque vierge dans laquelle résistent la panthère et des cerfs de Java, près de 71 espèces d’oiseaux, 14 reptiles, tous très protégés.

 La petite île indonésienne de Nusa Kambangan, située au sud de Java, constitue à première vue une destination sympathique qui fleure bon le dépaysement. Elle change des éternelles Bali et Lombok, phagocytées par un attirail touristique surfait et conventionnel. Bref, l’espoir d’une nature intacte et d’une population avenante vaquant à la pêche artisanale ou dans les plantations de caoutchouc et de teck. Tout cela  titille la fibre exploratrice de l’écotouriste qui boycotte les sentiers battus.

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Nusa Kambangan: ses plages, ses forêts…

 Hélas ! Il n’y aucune facilité touristique sur l’île Nusa Kambangan car les non autochtones n’y sont autorisés que l’espace d’une journée, en groupe, et encadrés par des escouades de guides sourcilleux et bavards. Bon, c’est pour la bonne cause, pense-t-on, car il est essentiel de fiche la paix aux Leptoptilos javanicus, aux Haliastur indus ou aux Spilornis pardus.

Oui. Mais en fait…non.

Oui, parce que toutes ces espèces sont protégées, c’est entendu. Non, parce que la vérité est ailleurs à Nusa Kambangan.

Nusa Kambangan, l’Alcatraz d’Indonésie

Nusa Kambangan est une île prison. Surnommée « l’Alcatraz indonésien », elle abrite dans son coquet 120 km2 neuf prisons de haute sécurité. Rien de mieux qu’une île pour y construire des centres de détention ou des bagnes, ont pensé des générations entières de gouvernants, enchantés de voir que la géographie pouvait être de leur côté. Toutes ces prisons, sauf une, sont construites sous la période coloniale hollandaise, dès 1905. A partir de 1908, l’île Nusa Kambangan est décrétée inaccessible au quidam lambda et ses pénitenciers considérés comme les plus inhumains d’Asie du Sud-est. Sitôt l’indépendance proclamée, les gouvernants indonésiens ont imité leurs prédécesseurs. Le despote Suharto y a enfermé des centaines de dissidents politiques, des communistes essentiellement, qui ne furent jamais jugés et dont beaucoup sont morts de faim ou de maladies.

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Les Hollandais ont construit neuf centres pénitenciers sur l’île. Travaux forcés, peines capitales, châtiments corporels, maladies ont décimé des milliers de prisonniers. 

Aujourd’hui, les prisons de l’île Nusa Kambangan abritent des trafiquants de drogue, des « terroristes » et des tueurs en série.

Depuis 2013, c’est aussi ici que la peine de mort est appliquée, selon un rituel bien établi. Les endroits où sont incarcérés les condamnés sont sujets à des mesures drastiques de sécurité lorsqu’ une exécution est prévue. Elle a lieu à minuit. Le prévenu peut être assis ou debout, bandeau devant les yeux ou pas. Il est fusillé par 12 soldats, et seulement une arme est chargée de balles réelles. Depuis 2001, 32 exécutions ont eu lieu, dont six dernièrement, en janvier 2015.

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Tout trafiquant de drogue, même en quantité limitée, risque la peine capitale dans la plupart des pays d’Asie du Sud-est. Au mieux, il s’en tire avec des années insupportables passées dans des geôles atroces. Fin 2014, le nouveau président indonésien Joko Widodo a décidé de punir de mort les trafiquants de drogue et leurs cohortes de complices aisément corruptibles (douaniers et policiers, avocats, passeurs clandestins) afin, dit-il, d’éradiquer ce fléau qui touche près de deux millions de personnes dans son pays.

Les exécutions se déroulent selon un rituel bien établi. 

Deux Australiens, accusés de trafic de drogue sur l’île de Bali, vont rejoindre sous peu une des geôles de l’île. Ils devraient être exécutés prochainement, leur demande en grâce ayant été rejetée par le Président, en dépit d’un appel à la clémence du Premier ministre australien.  

Quatre autres étrangers, dont un Français, devraient suivre prochainement.

 

Ce dernier, Serge Atlaoui, condamné également pour trafic de drogue en 2007, clame son innocence et a demandé dernièrement une demande en révision du procès, après avoir vu son recours en grâce rejeté.

 

Les efforts des chancelleries étrangères pour éviter la peine capitale à leurs ressortissants semblent inutiles. Les Premiers ministres et les ministres des affaires étrangères s’agitent, bien entendu, mais rien ne marche. Pourquoi ? D’abord, parce que le président nouvellement élu en a fait son cheval de bataille lors de sa campagne électorale. Ensuite parce que l’Indonésie demeure très pointilleuse lorsque sa souveraineté nationale est en jeu. Enfin, il est quasiment hors de question que le pays et son dirigeant perdent la face. La population indonésienne suit, estimant in petto que ces mêmes chancelleries questionnent moins les pratiques judiciaires de la Chine, de l’Iran, des USA ou de l’Arabie Saoudite, autres pays pratiquant la peine de mort.

A l’arrivée dans tous les aéroports de la région, l’étranger est averti à propos de Nusa Kambangan. Des panneaux signalent les risques encourus si l’envie vous démange de traficoter ou même de consommer des quantités infimes d’herbe. Le message est clair : DEATH PENALTY, en très grosses lettres.

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Pourtant, inutile de croire que le trafic de drogue cessera. Il y aura toujours des trafiquants sans scrupules et de jeunes naïfs pour se laisser tenter. Les cachots et les couloirs de la mort de Nusa Kambangan  ne sont pas de sitôt menacés de dépeuplement. Les touristes ne viendront qu’au compte-goutte sur cette île paisible.

 La panthère de Java peut se reproduire tranquillement.  

Damien Personnaz

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