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L’île vintage ; la passion des iles lointaines

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Mais d’où vient la passion des confins et des iles lointaines?

« On peut voyager non pour se fuir, chose impossible, mais pour se trouver ».

Cette citation du philosophe Jean Grenier que je découvre aujourd’hui a dû résonner dans ma petite tête de l’enfant que j’étais en 1960, assis sur les genoux de ma mère et entouré de mes deux frères.

C’était l’époque où nous habitions à deux pas de l’océan, le vrai, celui qui rugissait quand je m’endormais. Le phare illuminait le ciel et balayait de son faisceau puissant les murs de ma chambre où dansaient les ombres des arbres.

photo de famille damien personnaz

C’était l’époque où mes parents lisaient Paris-Match, Life et Marie-Claire. C’était l’époque où les publicités s’étalaient dans ces magazines et dont certaines laissaient miroiter des destinations lointaines, heureuses et onéreuses.

mer et phareNous habitions à deux pas de chez mon parrain dont la maison croulait sous les livres de voyage, les atlas avec quelques terra incognita, les mappemondes. Entre deux averses, je dénichais des perles poussiéreuses porteuses de passion. Je me demande bien où ont atterri ces perles de rêve.

Tahitiennes

Plus tard, j’ai lu avec fascination les histoires de cannibales dans des albums d’Epinal et vu de mes propres yeux des films chromos où ils faisaient cuire des bons Blancs dans des marmites inspirées des contes de Grimm, version tropiques. Des histoires où des missionnaires allaient instruire le bon (mais sauvage et affamé) naturel des bienfaits du christianisme. Puis, mes parents donnaient au mystérieux « denier du culte » certains dimanches pour aider les missions à accomplir leurs missions.

Les dimanches après-midi, notre papa nous amenait voir les tempêtes dont l’origine naissait dans le nord et toujours à l’ouest, là-bas vers l’Amérique.

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Certains voyageurs en avaient de la chance. Ils partaient dans des hydravions transformés en paquebots volants luxueux. Du moins, c’est ce que prétendaient les publicités dans ces magazines. « Dis maman, on pourrait pas aller à Hawaii en hydravions ? ». « Plus tard, plus tard », répondait-elle invariablement, arguant le manque de temps, d’argent. Et toute casanière qu’elle était, elle voyageait dans les livres, elle, et certainement pas en hydravions « trop dangereux et de toutes façons plus personne ne voyage en hydravions ».

voyageurs hydravion tahiti

Les paquebots, les tramways et même les trains devenaient ringards. On se devait de rouler sur les autoroutes des années 70, dans des limousines qui engloutissaient des litres d’essence et de s’envoler de ces aéroports modernes, à l’architecture moderne tout en amiante où vrombissaient déjà les Caravelles et les 707 sonores.

Ce fut SLC, Salut les Copains, les transistors, les pick-up, les Beatles et Mai 68. Toujours à deux pas de l’océan et où les mois d’avril et de mai, pluvieux comme sous les tropiques, me laissaient le temps de lire Stevenson, Tintin, London et Enid Blyton.

Au cœur de ces histoires, il y avait l’île. Mystérieuse, hantée, noire ou au trésor, qu’importe. Je me laissais emporter et me disait que moi aussi quand je serais grand, j’irais taquiner du naturel, parfaitement !

Plus tard, ce fut les charters, Nouvelles Frontières et le franchouillard guide du routard. A moi les explorations ! Ce furent les Philippines, l’Indonésie, l’océan indien, bref, des endroits où les îles abritent des merveilles pas encore édulcorées.

un lecteur

Partir n’a jamais été une fuite pour moi. Il n’y a que les sédentaires, les crétins des Alpes, les snobinards des grandes capitales (« attends, j’hallucine, on a tout ici ») et les peureux qui peuvent rabâcher une telle ineptie, me disais-je. Et je me le dis toujours.

Depuis, j’ai vu, j’ai vécu et j’ai survécu à d’autres horizons. Envers et contre tout.

Le problème, c’est que je ne me suis pas encore tout à fait trouvé. La citation de Jean Grenier ne dit pas exactement comme se trouver, d’ailleurs. Il aurait pu, il aurait dû élaborer.

Il faut donc que je reparte, là-bas, là où l’île est toujours plus verte et l’océan toujours plus bleu.

Damien Personnaz
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