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La Fille du RER d’André Téchiné : un film à thèse au cheminement intellectuel passionnant

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Deux ans après Les Témoins, film fondamental qui évoque très brillamment toute l’histoire des années SIDA, de l’émergence du virus à aujourd’hui, André Téchiné nous revient. Le cinéaste s’intéresse avec La Fille du RER à un fait-divers qui défraya la chronique à l’été 2004. Au mois de juillet de cette année-là, une jeune femme prétend être victime d’une agression dans une rame du RER D. L’agression revêt un caractère antisémite bien que la victime ne soit pas de confession juive et suscite une excitation médiatique outrancière, largement instrumentalisée par les responsables politiques de l’époque et, en particulier, le cabinet du président Jacques Chirac.

L’affaire est d’autant plus sensible qu’elle apparaît dans un contexte particulier et ou la mort dans des conditions de barbarie insoutenables du jeune Ilan Halimi réagite le spectre d’une résurgence particulièrement violente de l’anti-sémitisme en France. Cette histoire est d’abord évoquée sur le ton de la fiction par une pièce de théâtre de Jean-Marie Besset, et c’est de cette pièce que Téchiné s’est inspiré pour son film.

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On retrouve dans La Fille du RER quelques acteurs familiers de l’univers du cinéaste, Catherine Deneuve et Michel Blanc, avec pour ce dernier un rôle très proche de celui qu’il occupait dans Les Témoins, et une façon très semblables d’interpréter d’ailleurs ses deux personnages. Le cinéma de Téchiné est un cinéma bourgeois, qui se situe pour beaucoup dans les beaux quartiers de Paris avant de s’évader souvent en campagne, au coeur des hautes herbes ou des roseaux, là ou on peut retrouver calme et sérénité. Alors, même si les personnages principaux sont de jeunes personnes quelques peu en difficulté socialement, reste que tout tourne essentiellement autour d’un cabinet d’avocat réputé situé près du parc du Luxembourg. Ceci est dit non pas pour discréditer d’une quelconque manière le travail de Téchiné. En revanche cela rend compte de la façon de plus en plus évidente que Téchiné a de faire du cinéma en ce moment.

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Comme Les Témoins, La Fille du RER est un film à thèse. Le contenu est riche, il y a tout ce qu’il faut d’idées, de développement, d’argumentation. Le déroulement est parfaitement construit et équilibré, en chapitres bien distincts. Il y a donc cette impression d’un cinéma très scolaire, universitaire plutôt. Il y a là la hauteur et la rigueur intellectuelle des meilleurs maîtres de conférences de faculté et un esprit parfaitement didactique.

En celà, Les Témoins et La Fille du RER se ressemblent donc énormément. Celà réussissait beaucoup pour le premier, introspection vaste et ambitieuse sur « les années SIDA » ; mais le procédé est nettement moins convainquant concernant La Fille du RER.

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Reste que le film est intéressant pour tout ce qu’il souhaite évoquer. C’est un film à thèse et le cheminement intellectuel qu’induit la narration est tout à fait passionnant. On ressort du film avec l’envie de réfléchir. La Fille du RER questionne le spectateur. Mais c’est une des limites du film aussi, qui même s’il n’est absolument pas plombant, peut tout de même ne pas intéresser du tout, peut paraître justement trop démonstratif et pas assez entraînant. Le propos autour de ce fait divers est en plus beaucoup moins dense que l’évocation complète des années SIDA, beaucoup plus anecdotique aussi.

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La Fille du RER réussit là ou il s’aventure. La dissertation est convaincante et mérite une très bonne note. D’un point de vue plus cinématographique, le film est en revanche moins convaincant, malgré quelques belles scènes, notamment lorsque Emilie Dequenne chausse ses rollers, sa rencontre avec Nicolas Duvauchelle etc. Les acteurs sont d’ailleurs très bien, surtout Emilie Dequenne, fraîche, légère et magnifique, et qui supporte sur ses frêles épaules quasi tout le poids du film. Il y avait réellement un gage à supporter cette responsabilité là, mais Téchiné ne s’est pas trompé dans son choix de casting (il est d’ailleurs rarement pris en faute de ce point de vue) et Emile Dequenne s’en sort admirablement. On note aussi la présence au générique de l’actrice israélienne Ronit Elkabetz, qui éclabousse une fois encore le métrage de toute sa classe.

B.T


La Fille du RER – Note pour ce film :

Réalisé par André Téchiné
Avec Emilie Dequenne, Nicolas Duvauchelle, Michel Blanc, Catherine Deneuve, Mathieu Demy, Ronit Elkabetz …
Année de production : 2008
Sortie française le 18 mars 2009
httpv://www.youtube.com/watch?v=8KsRxXqFWv8

 

Benoît Thevenin

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