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Lebanon de Samuel Maoz : un parti-pris audacieux

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Ils sont jeunes, ils sont quatre, ils sont en guerre et ils sont confinés à l’intérieur d’un char. Le premier film de Samuel Maoz adopte un parti-pris audacieux en choisissant de construire une heure trente de métrage sans jamais quitter l’espace de l’intérieur du tank. A t’on déjà assisté à un huis-clos aussi étroit (sinon Phone Game éventuellement) ?

Venise 2009/Lion d’Or


L’intégralité du film se déroule bien à l’intérieur du véhicule, et c’est un véritable tout-de-force que réussit le cinéaste, faisant preuve d’une ingéniosité de tous les instants. Lebanon est dans la lignée d’un certain cinéma israélien, toujours prompt à raconter la guerre, souvent celles opposant Tsahal au Liban, de l’intérieur.

Le film de Samuel Moaz commence par rappeler Beaufort de Joseph Cedar (2008), également un huis-clos, à l’intérieur cette fois d’une forteresse bien placée. Moaz et Cedar partagent un goût commun pour l’esthétique. Les deux films ne nous plongent pas seulement au milieu de soldats dans des situations d’extrême tension, chacun des deux cinéastes fait aussi – voir surtout – de l’image. On revient dès lors au fameux débat lancé par Rivette dans Les Cahiers du Cinéma à la sortie de Kapo de Gillo Pontecorvo (1960). Reformulé par Godard, cela donne « Le travelling est-il affaire de morale ? ». Ici, l’exercice de style ne dissimule pas d’idéologie, bien que le film évoque une expérience personnelle et un point de vue très partial par rapport à  la réalité du conflit.

La réussite de Lebanon – comme celle, même si plus mitigée, de Beaufort – tient au fait que le travail esthétique répond à un soucis sensitif. Moaz cherche à faire partager l’expérience de la guerre claustrophobique au spectateur et cela passe par un travail visuel et sonore de fond. Ce que réussit Moaz est même franchement impressionnant. On est là dans le domaine de l’expérimental. Moaz utilise tous les moyens à sa disposition et l’on ressent l’urgence des situation extrêmes, la peur viscérales de ces jeunes soldats pas préparés à la guerre. La lunette de tir devient le seul recours possible pour offrir au spectateur, autant qu’aux soldats eux même, un contre champ. Le dispositif de mise en scène, culotté mais maîtrisé avec une maestria exceptionnelle , est tenu tout au long, avec une pression qui ne nous lâche jamais, et des moments d’intensité particulièrement stressants (cf la scène d’extraction par un hélicoptère).

Lebanon se vit littéralement, offre une expérience sensorielle unique, et constitue une proposition de cinéma tout autant singulière. Le cinéma israélien ne manque pas d’audaces, ni d’originalité dans ses initiatives. Lebanon repose d’abord sur un dispositif de mise en scène complètement maîtrisé et en cela, il est très proche dans l’esprit du documentaire animé d’Ari Folman, Valse avec Bashir, dont l’intérêt se trouvait là aussi, dans un premier temps, dans l’approche novatrice du réalisateur. Les deux films ont aussi en commun d’avoir une portée bien plus large que le seul cadre dans lequel ils s’inscrivent. Lebanon a quelque chose d’universel, de la même manière que Valse avec Bashir évoque toutes les guerres à travers une seule.

Benoît Thevenin


Lebanon – Note pour ce film :

Réalisé par Samuel Maoz
Avec Yoav Donat, Itay Tiran, Oshri Cohen, Michael Moshonov, Zohar Strauss, Dudu Tassa, Ashraf Barhom, Reymonde Amsellem, …
Année de production : 2009
Sortie française le 3 février 2010
httpv://www.youtube.com/watch?v=q3D_ZwodU1Y
Benoît Thevenin

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