Hans Lebert, Elfriede Jelinek, prix nobel de Littérature, ou encore Musil et Arthur Schnitzler sont parmi les plus fameux écrivains autrichiens. Litterature autrichienne pour un voyage culturel passionnant en Autriche à travers les livres …
Dans cette Europe riche de sa diversité, partons en Europe Centrale et traversons l’ex-rideau de fer pour pénétrer au cœur de ce qui fut le Saint Empire romain germanique et qui est redevenu l’Autriche après un épisode nazi bien malheureux qui a laissé des traces très profondes dans la littérature autrichienne. Et, déjà, notre premier hôte, Arthur Schnitzler, dès la fin du XIX siècle attirait notre attention sur l’antisémitisme qui sévissait à Vienne et qui annonçait déjà des lendemains ténébreux.
Litterature autrichienne : pour que l’Autriche se souvienne…
Ces lendemains, nous pourrons mesurer les stigmates, mal refermés, qu’ils ont laissés dans la population autrichienne qui n’a jamais pu, ou su, évacuer ses démons, dans les œuvres de nos deux autres hôtes, Hans Lebert et le Prix Nobel de littérature local, Elfriede Jelinek, qui s’efforcent de faire sortir la vérité de la gangue dans laquelle elle est engluée et ou certains veulent la maintenir. Pour accomplir ce chemin plutôt douloureux, pour faire vivre la mémoire de ceux qui ont tant souffert, nous prendrons la compagnie d’un des plus grands intellectuels autrichiens, Robert Musil, qui a tellement contribué à la compréhension des hommes et de leur comportement sans toutefois que nous puissions encore comprendre l’inacceptable qui fut . La litterature autrichienne est une littérature rude, parfois âpre, mais toujours instructive.
Les désarrois de l’élève Törless de Robert Musil ( 1880 – 1942 )
« Je ne veux pas faire comprendre, mais faire sentir» annonce Musil dans une lettre mise en préface dans l’édition que j’ai lue. Il veut nous faire sentir tout ce que ressent ce jeune aristocrate autrichien que ses parents placent dans une école réservée aux fils de bonnes familles tout là-bas aux confins de l’Autriche, vers l’Est.
Le jeune Törless débarque dans cette pension où il ne connaît rien, ni personne, et doit faire le deuil de son passé, couper le cordon ombilical avec son pays, sa famille, son enfance et toutes les cajoleries dont il a été l’objet dans une famille aimante et attentionnée. Il doit faire face à une nouvelle vie avec des amis dont beaucoup sont ses aînés, dans une forme de huis clos où il devra trouver sa place en s’affranchissant de son enfance. «Il voulait se débarrasser ainsi de son ancien bagage, comme s’il s’agissait maintenant de porter son attention, libre de toute gêne, sur les pas qui lui permettraient de progresser.» Je n’ai pu, à cet endroit du livre, éviter de penser à Julien Green et au héros de «Moïra» que j’ai lu récemment, qui doit lui aussi s’intégrer dans un monde universitaire qui lui est totalement étranger.
Et, dans cet univers de jeunes mâles en pleine maturation, Törless découvre des notions et des sensations qui ne faisaient pas partie de sa vie antérieure, la sexualité, l’obscénité, le désir, la tentation, la culpabilité mais aussi la compétition, l’amitié, la tromperie, la trahison, … toutes notions qui contribuent à affirmer sa personnalité et sa place dans la meute où se manifeste un véritable attrait pour la virilité allant jusqu’à la brutalité et même au sadisme. Ces rites initiatiques qui marquent le passage à l’âge adulte perturbent le jeune étudiant qui ne comprend pas ce qu’il va devenir, comment il va le devenir et avec qui il va le devenir.
Pour en savoir plus sur les désarrois de l’élève Törless …
Vienne au crépuscule de Arthur Schnitzler ( 1862 – 1931 )
C’est une belle image de la fin de l’empire des Habsbourg avec ces dandys qui déambulent sur le Ring à la conquête des jolies viennoises sans se soucier du quotidien qui leur est assuré.
C’est l’image de la déliquescence d’une civilisation en fin de cycle qui est déjà minée par les tares qui lui seront fatales. C’est l’image d’une société qui n’a pas vu le monde changer et qui vit encore au siècle où les rois et les empereurs régnaient, selon « l’étiquette », en maîtres absolus sur l’Europe.
C’est la montée en puissance des fléaux qui accableront le XX° siècle de leurs malheurs et notamment de l’antisémitisme. C’est le reflet dans le miroir de nos faiblesses devant les responsabilités individuelles (reconnaissance de l’enfant conçu dans la frivolité) ou collectives (abandon tacite des familles juives qui sombrent lentement dans la bordure sociale).
Un très beau livre, très bien écrit, dans un excellent style mais aussi un document historique de première qualité pour les historiens de la période.
La peau du loup de Hans Lebert ( 1919 – 1993 )
Une lecture qui me hante toujours plus de trois ans après avoir refermé le livre. L’histoire d’un matelot qui débarque dans un village encerclé par les montagnes autrichiennes où la nature se déchaîne, vent, pluie, neige et froid soumettent les habitants à de fortes tensions alors qu’ils vivent déjà dans une ambiance délétère où personne ne veut rien dire bien que des événements étranges les intriguent et les inquiètent vivement. Dans ce village au nom évocateur, silence en allemand, le matelot et une compagne de circonstance essaient de percer le mystère qui entoure l’ancienne briqueterie malgré la réprobation des notables du village qui se réunissent régulièrement autour d’une table au bistrot local. Ce livre est le symbole du mutisme des Autrichiens qui ont jeté très pudiquement un voile de plomb sur leur passé pendant la période nazie et qui veulent maintenir ce passé dans l’ombre la plus épaisse au risque de voir le monstre ressurgir.
Les exclus de Elfriede Jelinek ( 1946 – … )
Le Prix Nobel autrichien s’est inspiré d’un fait divers réel pour écrire l’histoire de ces quatre jeunes qui rejettent la société dans laquelle ils vivent et dont ils ne veulent plus. Gosses de riches, petits bourgeois ou prolétaires, ils sont les enfants de cette Autriche qui n’a pas évacué ses démons, qui n’a pas su, ou pas voulu, faire le ménage après la période nazie au risque de mettre sa jeunesse dans une situation impossible avec un héritage trop lourd à porter. Et, nourris des thèses de Camus ou de Sartre, ces jeunes trouvent l’existence absurde et transforment leur révolte en une rage assassine qui les conduit à des actes extrêmes. C’est l’histoire d’une génération qui rejette un passé de bons catholiques, comme il faut, qui ne veulent pas assumer leur passé, c’est l’histoire de ces soldats sanguinaires qui perpétuent leur violence au sein de leur famille et c’est aussi l’histoire de ceux qui ont été persécuté dans les camps de la mort. C’est l’histoire de l’Autriche qui est toujours en proie aux démons qu’elle na pas su mater et qui hantent toujours les coulisses du pouvoir.
Je suis tentée par » Les désarois de l’élève Törless ».
– La transgression, petite dose de poison indispensable pour préserver l’âme d’une santé trop quiète et trop assurée et lui en donner une plus subtile, plus aigue, plus compréhensive –
J’avoue que j’ai souvent été tentée de découvrir Jelinek mais ne lisant que très peu, je n’ai pas eu l’occasion de passer à l’acte…
comme quoi il vaut mieux être non lectrice comme moi… Je me demande s’il y a un livre que j’ai oublié, même ceux que je n’ai pas aimés…?
Le peu que j’ai lu (un livre en fait, que je me suis forcé à finir) m’a vacciné.
J’ai pas ce souvenir mais cette lecture remonte déjà à quelques années au moins et certainement plus !
Le style, des phrases pénibles à lire malgré la qualité de la traduction, beaucoup d’imprécations… Très laid.
Pourquoi donc?
Jelinek est illisible…