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Performances en tous genres à Toulouse (3) : le compte-rendu

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puyjalon.1286228933.jpgComment rendre compte d’une performance passée ? C’est là toute la question qui sous-tend la programmation du Printemps de Septembre à Toulouse (jusqu’au 17 octobre).

reinert.1286228885.jpgMontrer la vidéo d’une performance qui a lieu, avant, ailleurs, est-ce suffisant pour en rendre compte ? On passe alors devant des écrans plus ou moins monotones, parfois agrémentés de quelques éléments du décor, comme la salle aux 25 écrans consacrée à Spartacus Chetwynd aux Abattoirs, où l’oeil ne sait où se fixer, où le spectateur ne sait combien de temps rester (sur l’écran tout en bas à droite, je me suis vu, spectateur il y a cinq ans de sa performance à l’ICA) ou bien des résultats de ladite performance, comme les déchets soigneusement recueillis par Santiago Reyes sur des passerelles de la rocade toulousaine, comme des preuves du travail bien fait. Ou bien vaut-il mieux n’avoir que des évocations, des indices, comme le fait Éric Stéphany, toujours aux Abattoirs, quand il expose des répliques d’objets utilisés par Bruce Nauman, Vito Acconci et Chris Burden pour une de leurs performances, objets refaits, historiques, morts, même si, comme avec Nauman, on entend le bruit de ses pas (mais pas les gémissements masturbatoires d’Acconci).

iasi.1286228981.jpgOu bien doit-on se contenter, comme Marie Reinert(Conditions) dans le hall des Abattoirs, des vestiges, des emballages, des caisses qui ont servi à transporter les pièces ? Doit-on, comme Guillaume Désanges à l’École des Beaux-arts (Child’s Play) faire revivre les performances en les confiant à de nouveaux performeurs, naïfs ceux-là puisque ce sont les enfants d’une école de Iaşi en Roumanie (ainsi Freeing the Voice, de Marina Abramovic, en vidéo et en dessin) ?

 

raychel.1286228908.jpgQuoi de commun entre la vidéo Fallas de Origen du Cubain Raychel Carrion Jaime (à la Fondation Écureuil) le montrant, hagard, lent, hésitant, comme un zombie au milieu des foules militantes joyeuses et bien organisées de la manifestation du 1er mai 2007 à La Havane, et la réalité ? Quel rapport entre notre curiosité de spectateur et l’expérience qu’il a vécue, poussé de côté avec ménagement par un membre du service d’ordre ? Que pouvons-nous saisir de l’action de ce Kovanda cubain ?

 
serra.1286228839.jpgC’est ainsi que, de vidéo en vidéo, la sensation s’émousse, la distance avec l’acte performatif s’agrandit, la prégnance diminue. Oui, regarder (aux Jacobins) Santiago Serra stopper des camions sur le port de Stockholm (One person obtsructing a line of containers), tel un manifestant de Bratislava ou de la place Tien-An-Men, est ‘intéressant’; oui, voir  David tellez.1286228822.jpg‘Human Cannonball’ Smith montrer son passeport à la caméra avant d’être projeté (le 27 août 2005 à 11h, tout est très précis ici) par un canon de cirque au-dessus de la frontière Tijuana – San Diego, après avoir été accompagné par une foule chantante et dansante sortie de l’hôpital psychiatrique voisin (Javier Tellez, One flew over the void), à deux pas de dessins de Francis Alÿs, qui fit le chemin inverse, est ‘intéressant’. Tout à fait révélatrice est Rote Fahne II, l’action par laquelle Felix Gmelin réitère la marche au drapeau rouge de son père, mais ailleurs (à Stockholm et non à Berlin), mais plus tard (en 2002 et non en 1968): nous aussi nous sommes ailleurs, pour nous aussi il est plus tard. Le sens s’est perdu, nous ne serons plus acteurs…

Restent ici et là, quelques autres promesses : la voix de Tim Etchells rappelant au passant, devant les Abattoirs, “This is a brief reminder that reverend.1286228850.jpg you are going to die”, le prêche du (véritable) Révérend Ethan Acres (Imago Pietatis : la vidéo et les sculptures magiques et grand-guignolesques à Saint-Cyprien auguraient bien) que je n’ai pu écouter, les traces des performances absurdes de Nicolas Puyjalon (en haut; Blue) travaillant sous la contrainte, déployant des efforts monstrueux pour ne quasiment philippe01_72dpi.1286228958.jpgrien faire (les traces sont à la Galerie lemniscate, mais je n’ai pas vu la performance) et le détournement de Philippe de Fayçal Baghriche (dont la Galerie GHP présente une belle exposition, lui aussi très Kovandien, par exemple quand il renverse la mendicité dans le métro) qui compose une statue de pharaon dans la rue, leurre bien connu pour les passants, mais double leurre puisqu’il s’agit d’une vraie statue (photo de la performance parisienne, à défaut de la toulousaine).

La performance a-t-elle encore un avenir ? Entre spectacle passif, danse (aussi excellente soit-elle), revisite après coup et vidéos de témoignage, quel espace lui reste-t-il ? Y a-t-il performance si le public n’est pas partie prenante ? Peut-être n’aurais-je pas dû commencer par le Château d’Eau, mais ce festival attrape-tout ne m’a pas apporté de réponses et m’a laissé sur ma faim.

Photos 2, 3, 4, 6 et 7 de l’auteur; photos 1 et 5 courtoisie du Printemps de Septembre; photo 8 courtoisie de la galerie GHP.

Marc Lenot

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