Il semble impossible de visiter Belgrade sans découvrir le temple de Saint Sava (Храм Светог Савe), tant cet édifice représentant la réunification des peuples orthodoxes des Balkans et plus globalement d’Europe, est symbolique et révélateur d’une histoire complexe. Son nom, Sveti Sava, se veut un hommage à celui qui fut le fondateur de l’église orthodoxe en 1209, le premier saint Serbe et une figure culturelle et religieuse majeure.. Dès qu’on pénètre dans la capitale, ce temple apparaît et éblouit par sa blancheur immaculée… Ce n’est pas la cathédrale orthodoxe de Belgrade contrairement à ce que pensent certains touristes vu sa majesté.
Le temple Saint Sava à Belgrade : un projet controversé
Saint Sava : Histoire d’une figure religieuse et culturelle majeure en Serbie
Selon tous les témoignages, de son vivant Rastko Nemanjic, destiné à être Roi, fut un grand homme qui se souciait grandement du destin de son peuple ne se limitant pas seulement à récupérer de nombreux fils en vue des guerres de tous genres. Il fut aussi profondément religieux, et du coup il refusa le trône, allant se réfugier dans un monastère, et prenant le nom de Sava, (pour la petite histoire, son père Stefan Nemanja, plus connu sous son nom monastique Simeon suivit plus tard l’exemple de son fils, devenant également une figure importante dans le paysage religieux et culturel Serbe, bien qu’à mon humble avis, s’il est célébré aujourd’hui, reconnu Saint par les Orthodoxes, il le doit surtout au fait dêtre le père de Sava).
Bref, Rastko, devenant moine (puis plus tard le premier archevêque Serbe), pris le nom de Sava, et, il continua d’œuvrer afin de faire connaître au plus grand nombre, une bonne part des écrits de lépoque, en les traduisant en langue slave. Bien sur, l’époque d’or de la culture Serbe ne viendra qu’après, avec l’apparition des premiers écrits originaux comme « L’Evangile de Miroslav » du XIIe siècle (l’original de celui-ci est aujourd’hui gardé comme grand trésor au Musée National de Belgrade) et l’école Raska et Moravska (XVe siècle) qui furent à l’origine de la naissance d’un style architectural serbe, sans parler d’un grand nombre de différents ouvrages. Reste que Sava fut celui qui, en quelque sorte, par son œuvre, incita les débuts de tout cela.
Quand il mourut, il fut, pourtant enterré comme un moine normal. Ce ne fut que par la suite, à l’occasion de l’ouverture de sa tombe (pour une raison qui demeure pour moi relativement inconnue, quoi que, à l’époque il paraît qu’il fut assez normal qu’en cas de danger on transfère les restes mortuaires des personnes importantes ailleurs, vu quelles étaient souvent enterrées avec leurs biens personnels – le plus souvent de grande valeur), qu’on se rendit compte que son corps était resté intacte, et qu’il présentait tous les aspects nécessaires pour qu’on puisse le considérer en tant que personnalité sainte. De plus, apparemment il y eut des miracles, des guérisons… Bref, il devint le premier Saint Serbe, et son corps fut vénéré en tant que tel, et précieusement gardé. D’ailleurs on dit que le culte que le peuple Serbe lui vouait était tel, que ce fut l’une des raisons pour les Turcs, de brûler son corps, pensant que cela causerait une perte de foi et de patriotisme chez les Serbes. Son corps fut brûlé en 1595 à l’emplacement même où aujourd’hui s’élève le Temple, prenant place à une petite église détruite au cours d’une des nombreuses guerres sur ce territoire.
Temple Saint Sava, la plus grande église orthodoxe du monde
Le Temple Saint Sava devant être un symbole de réunification des peuples Orthodoxes dans les Balkans comme ailleurs, il semble qu’il fut décidé depuis très longtemps qu’il prenne une allure inspirée de Sainte Sophie de Constantinople. Rien à dire, l’église est imposante et sa capacité permet d’accueillir plus de 10 000 fidèles. Elle occupe 3500 mètres carrés, elle mesure 91 mètres d’est en ouest et 81 mètres du nord au sud. Sa coupole à une hauteur de 70 mètres depuis le sol est surplombée d’une croix de 12 mètres, ce qui en fait le monument le plus visible de l’espace urbain de Belgrade.
Construction et choix de l’emplacement
L’emplacement de cette « deuxième mise à mort » du Saint Sava se situant sur un terrain assez éloigné du centre ville de l’époque, est bien accessible aujourd’hui : a deux pas de la Place Slavija (lire Slàviya) – un carrefour important reliant le centre ville avec de nombreuses rues menant vers d’autres parties de Belgrade et sa banlieue, à deux pas également de l’autoroute Beograd-Nis, sans parler que plusieurs moyens de locomotion y mènent: voiture, bus ou tramway, trolley également (arrêt Place Slavija), sans parler du train suburbain (une sorte de RER assez archaïque) tout y est pour faciliter l’accès. De plus, la rue menant vers le Temple est presque directement reliée à l’artère principale de la Ville de Belgrade, la Rue du Roi Milan, qui mène, en ligne directe et en s’attachant à la zone piétonne Knez Mihailova, à Kalemegdan, la forteresse de Belgrade.
Mais si son emplacement ne fut jamais un problème, l’histoire de sa construction fut semée d’embûches. En effet, même si depuis l’acte Ottoman (jugé barbare par les Serbes), il y eut toujours un petit lieu de culte à cet emplacement, même si l’idée d’y construire un vrai temple germa dans les esprits depuis très longtemps, l’application de celle-ci prit énormément de temps. En effet, les plans eurent finalement leur aval qu’au début du XXe siècle, et les premiers travaux commencèrent en 1939. La construction de l’édifice a commencé selon des plans de l’architecte Aleksandar Deroko, assisté par son confrère Bogdan Nestorović et par l’ingénieur Vojislav Zađina. Bien sûr, avec la Guerre et l’occupation nazie, puis l’arrivée de Tito, tout fut stoppé, bien que même sous le règne communiste, le Patriarche de l’époque, German, défendit avec beaucoup de verve la cause de cette future église, auprès des autorités gouvernementales et de Tito lui-même. Finalement, ce fut que quand Milosevic accéda au gouvernement, et dans une tentative d’avoir les autorités religieuses de son côté (à tort), que la construction fut autorisée, et la première pierre de l’édifice fut posée (en 1985, si je ne m’abuse).
Architecture orthodoxe et inspirations byzantines
Dès les premiers dessins crées pour ce monument de la religion Orthodoxe, il fut question de réparer en quelque sorte le mauvais destin d’un autre édifice célèbre de l’architecture Chrétienne, et surtout symbole d’Orthodoxie au vu de sa position géographique. Et cela se voit dès le premier regard sur différents détails de l’architecture! En effet, le Temple Saint Sava avait pour ambition d’être un symbole de réunification des peuples Orthodoxes. Pour s’en convaincre, l’idée était d’en faire la réplique de l’église Sainte Sophie de Constantinople, la « mère des églises » orthodoxes, celle qui fut longtemps la plus grande basilique du monde chrétien, avant de devenir Hagia Sophia, et d’être transformée en mosquée (puis en musée).
Du coup, en effet, la création même de cet édifice Orthodoxe à Belgrade, ainsi que son architecture, ont une grande valeur symbolique: une sorte de gloire finale devant les Ottomans qui n’hésitaient pas de transformer les lieux de culte chrétiens en mosquées (du moins ceux qui avaient une valeur importante). Ainsi, les constructeurs du Temple Saint Sava reprennent les anciens préceptes de l’architecture byzantine, et la suivent, en réalité, presque à la lettre.
Le temple Saint Sava est en forme de croix grecque (croix aux branches égales dessinées sur une base carrée). Le corps de l’église est surplombé par le dôme central, soutenu par 4 arches principales et entouré de 4 éléments de taille moins importante, surplombés par de plus petites coupoles. D’autres petites coupoles s’ajoutent là plutôt comme une sorte de décoration, chacune portant une croix en or. Ce principe permet, comme c’est le cas à Hagia Sophia, de faire des constructions bien plus hautes: sans parler dune certaine légèreté, qui provient de l’espace, complètement ouvert. Le dôme central est maintenu par ce qu’on appelle « des triangles sphériques », appelés aussi « pendentifs » par les spécialistes, ce qui est, l’une des particularités de l’architecture byzantine. Ainsi, malgré une structure très massive à l’extérieur, une fois à l’intérieur de la bâtisse, on a l’impression d’un léger flottement: toutes ces constructions massives donnent l’impression d’être suspendues dans l’air, et d’une légèreté sans pareil.
Autre point de ressemblance avec Hagia Sophia les fenêtres. Il y en a beaucoup ! Et même si la pierre fait que tout ait l’air sombre, les différents détails sont éclairés par de nombreuses ouvertures, faisant que même sans être terminée, l’église est bien plus lumineuse que la plupart d’églises d’architecture orthodoxe classique. Les ouvertures maintenant le dôme central forment comme une sorte d’aura solaire, et on peut bien imaginer à quel point la mosaïque du Christ Pandokrátor, prévue dans le centre, sera ainsi magnifiée. Il faut savoir que cette présentation de Christ est traditionnelle dans l’architecture Orthodoxe, il est toujours au milieu de l’église, gardien de la foi.
Un autre point fort de cette église, ou ce temple, si vous préférez, c’est la reprise des voûtes ciselées, des chapiteaux reprenant les motifs de feuilles d’acanthe, posés sur des piliers en marbre noir, comme pour donner un nouveau soupçon de légèreté à la pierre bien solide.
Comme je l’ai déjà mentionné, à l’image de sa grande sœur à Istanbul, le Temple ne sera pas couvert de fresques – si typiques pour l’architecture et l’art religieux de ces contrées. Toutes les présentations seront faites dans la technique de mosaïque, le reste sera, selon toutes les vraisemblances, couvert également de marbre.
Ma visite du temple Sveti Sava : Un Voyage vers la lumière
Je suis venue ici par une journée ensoleillée Comme par l’habitude, je prenais un tas de cadres de l’extérieur la prise de photos à l’intérieur des églises traditionnelles orthodoxes étant compliquée à cause de la fragilité des fresques. Première surprise donc pour moi… cette massivité tout en donnant l’air de flottement. C’est peut être à cause du fait qu’on a posé deux fontaines juste devant, du coup, avec la chaleur, en approchant, on a l’impression que l’édifice s’élève bien au-delà de sa base marbrée entourée de verdure de la pelouse bien entretenue des alentours. A ce moment, le gardien m’approche me disant que je lui semble bien intéressée par cette bâtisse, qui, je dois l’avouer, commence à me plaire vraiment, d’autant plus qu’au-delà de sa blancheur, je trouve de plus en plus de similitudes avec d’autres merveilles architecturales, et bien sur, Hagia Sophia. Je lui explique que je prends des photos pour un site d’informations touristiques sur internet, pour montrer le temple à mes amis en France… et du coup, il me propose gentiment de me servir de guide, et surtout, de me montrer les meilleurs détails à photographier. Car oui, en effet, vu qu’il n’y a pas de fresques, on peut photographier sans problème !
Un premier pas vers le portail, et déjà tout devient noir. Il faut dire qu’avec l’étincelante blancheur du Temple en ce jour ensoleillé, on est vite aveuglé ! Du coup, franchir le portail emporte dans quelque chose de sombre et confiné, du moins au premier instant… Car une fois traversé la première rangée de chapiteaux, les yeux s’adaptent, et au lieu du sombre habituel, interrompu ça et là par des rayons discrets de lumière des églises ordinaires, voici une véritable puits de lumière dorée ! J’avance vers le centre du Temple, à droite un petit autel improvisé et tout droit devant moi le vide… là, où plus tard, viendra se poser sur nous l’œil du Christ. Eh oui ! les murs sont encore vides: de la pierre grise partout entrecoupée ça et là par des frises ciselées, dans le pur art byzantin. Et, bien sur, les chapiteaux… je pourrais passer des heures à détailler chaque petite feuille, chaque courbe et petite fente dans cette pierre blanche, tellement blanche qu’on a l’impression qu’elle est nacrée, par rapport au reste, encore si gris !
Tout doucement, les voix masculines s’élèvent autour de moi… elles sont si basses, le son est si doux, que je ne les entends presque pas, je les sens avec tout mon corps. Oui, je sais, j’en suis bien consciente que c’est un truc bien publicitaire, que de diffuser des chants de chorales orthodoxes dans ce Temple qui est loin d’être terminé! Mais… A ce moment même, au centre, là où la lumière est la plus intense, je lève les yeux vers le centre de la grande coupole. Il est exactement midi, et pendant un moment, j’ai l’impression de regarder le soleil, tellement la lumière semble puissante par rapport au reste dans l’ombre, la musique est prenante et douce aussi, triste et forte en même temps et jai l’impression que le temps s’arrête et que mon corps s’élève au dessus de la pierre poussiéreuse, haut, et encore plus haut, jusqu’au centre de lumière! Comme si l’univers nous enveloppait, petit être indigne sur cette terre minuscule, petit mais précieux aux yeux des cieux! J’imagine une future iconostase qu’encore personne n’a vue en vrai… et toutes les merveilles encore à venir!
C’est presqu’à regret que je reviens sur terre il faut retourner vaquer à ses obligations ! Un dernier regard vers ce qui sera un jour le « saint des saints », le sanctuaire, où le pied de la femme ne pourra plus se poser, et je retourne vers le chapiteau, là où le portail se dessine comme une fenêtre de lumière dans l’ombre profonde. Je ressors sur le parvis de pierre blanche, si blanche que je suis à l’instant aveuglée par autant de lumière… devoir revenir sur terre semble écrasant. Un dernier regard vers le sanctuaire, qui désormais brille d’une lueur rouge dans l’ombre du temple… et je m’en vais, en me promettant de revenir.
Maintenant je comprends ce que cette bâtisse énorme, si prétentieuse dans son immensité doit apporter au peuple ici. D’un côté l’esprit des temps passés, de l’autre, l’espoir de meilleurs demain ! C’est aussi très symbolique : une sorte de revanche pour tous les malheurs vécu par les Ottomans, sans parler de cette reconstruction symbolique de la Sainte Sophie, dont les signes chrétiens, ont quand même été partiellement effacés… Ceux qui savent lire ces symboles, sauront qu’il est temps désormais de tourner la page, une fois pour toutes, et le Temple du Saint Sava, est là pour le rappeler.
Si jamais vous venez par ici, ne le manquez pas – c’est tout simplement impressionnant…!
Bonjour, j’ai une question, combien de temps faut-il idéalement pour visiter saint sava et a quelle heure ouvre-t-elle