Arriver en taxi depuis l’aéroport, check-in à l’hôtel et se poser une heure, le temps de faire revenir les idées perdues dans les nuages, de réintégrer pleinement corps et esprit. Se resynchroniser avant de partir en visite, à la découverte d’une ville inconnue. Toujours la même technique d’exploration, se laisser aller au hasard des pas, faussement se perdre sans itinéraire, à l’instinct…
Se laisser surprendre, pérégriner dans les rues et ses pensées…Il fait nuit, choc visuel. Le marché central dans une lumière jaune, architecture métallique fin 19ème, une lignée d’écrans plats suspendus qui publicisent en quadri dans le silence et l’absence. Même ici, la société du veau d’or ne s’arrête jamais…
Athènes, reliance philosophique et une écriture qui me trouble. L’alphabet cyrillique est si loin de mes fondamentaux. Je reste comme un étranger transi d’amour par l’histoire de la pensée si féconde ici il y a si longtemps. Mais interdit d’accéder à la sève intellectuelle grecque contemporaine. Etre à l’étranger, et pourtant, ressentir une appartenance esthétique forte, comme si j’étais un peu chez moi dans un ailleurs familier. Comme si ce voyage me faisait remonter vers des racines profondes, au-delà de la généalogie. Racines euro-méditerranéennes…
Visite de sites archéologiques au cœur de l’agora athénienne. Au milieu des pierres, réflexion sur le temps et les aléas civilisationnels. On ne vivait pas fondamentalement différemment il y a 2500 ans. Déjà un temple, une librairie, un auditorium, un théâtre, … On construisait richement, des vestiges de marbre témoignent de l’opulence. Et pourtant, malgré son avance, ce phare qui a fait briller l’aventure humaine il y a plus de 2000 ans, n’est plus un centre de gravité depuis longtemps. Après l’apogée, il a cédé sa place à d’autres, et ne participe plus qu’humblement au concert des civilisations. Traces de l’homme avérées il y a 5000 ans. 3 millénaires pour briller, et 2 autres pour redevenir un petit halo dans la globalisation. A Athènes comme à Rome, l’impression de marcher sur les siècles, reliance avec ceux qui ont précédés dans l’aventure européenne.
Nature humaine : cultiver, commercer, guerroyer, … cela occupe l’humanité depuis des lustres. Mais toute cette agitation humaine n’a peut-être qu’une seule finalité : s’entourer de beauté. C’est ce que me raconte l’histoire de ces vestiges, ici à Athènes. Qui ne fait que confirmer d’autres histoires, ailleurs, en Chine, au Mexique, … Il n’y a que le bon et le beau qui vaillent. C’est l’accessible élévation de la condition humaine, la possible transcendance terrestre, sans attendre un dieu ou un autre. Fort de cet enseignement athénien, interroger le présent, débusquer le médiocre qui habite ma vie, qui m’éloigne d’une belle vie.
Que reste-t-il de la civilisation helléniste ? Des pierres et des ruines, vestiges d’une opulence à jamais disparue. Et des idées, des mythes et des concepts qui ont traversé le temps sans s’abîmer. Le matériel s’effrite, se dissout dans l’épaisseur des siècles. Alors que seuls le goût du beau, la philosophie, la démocratie, … ont pu s’enrichir et s’apprécier en deux millénaires. Que restera-t-il de notre société contemporaine dont la priorité semble fixée sur l’accroissement de biens matériels ?
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