Ah, grimper un phare et ses 271
marches… c’était la première fois que je l’attaquais ce phare allumé pour la
première fois le 15 octobre 1848. Je « l’attaquais » car il avait illuminé ma jeunesse de son
faisceau lumineux d’une portée de 43 kms. Ma chambre était dans son axe, Quai
de la Loire, a à peine 1 km.
Pas de volets à ma fenêtre, de simples
rideaux qui atténuaient à peine son rayon obstiné et régulier. Je ne sais pas
si j’aimais ou non cet éclair sauveur de marins en détresse, qui zébrait ma chambre
d’enfant et d’ado, il faisait juste partie de mes nuits. Avec lui, pas besoin
de compter les moutons, je comptais les tours : toutes les 15 secondes, et
à intervalles réguliers.
Donc j’attaquais allégrement ses 271
marches (l’habitude de grimper les marches de temples asiatiques), avec un
objectif : photographier le port et les douces falaises de Douvres.
Arrivée vers la 230è, l’escalier en
colimaçon, brisé à la suite de je ne sais quel accident, a été remplacé par une
échelle métallique aux marches étroites et abruptes. J’en franchis trois et me
retourne, appréhendant déjà la descente. Et là, prise de vertige, je stoppe net ma montée, pas très fière alors
que j’étais si près du but. Je redescends donc, privée de ma vue à 360°.
Je croise des escaladeurs plus
téméraires à qui j’explique mon incontrôlable vertige. « Vous ne sentez
rien ? » me demande l’un d’eux. Je prends le temps de humer l’air du
vieux phare, un peu décrépi, un peu colmaté par-ci par-là. Pas d’odeur de
moisissure mais une subtile odeur florale plutôt inattendue dans cette tour. « Bizarre,
ça sent la rose » dis-je « Moi aussi je la sens » dit l’homme. Devant
mon regard surpris, il continue : « Ce phare a été construit sur un
ancien bastion militaire. (Érigé par le duc de Lancastre en 1348) Calais était
alors une ville forte enviée par les anglais, et mon compagnon de hasard continue :
« Vous ne saviez pas que ce phare était hanté, FR3 est venu faire un
reportage. Hanté par un couple, plutôt bienveillant paraît-il, d’où cette odeur
de rose qui est la manifestation de leur présence ».
Eh bien peut-être ce couple m’a-t-il
fait signe de ne pas grimper ces dernières marches si vertigineuses. Que me
serait-il arrivé si j’avais perdu l’équilibre, perchée sur mes talons de 10 cms ?
Alors merci aux fantômes du phare de
Calais !
Le blog de Michèle, une femme à la croisée des cultures : https://michjuly.typepad.com/blog/
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