“L’Etat roumain semble enfin décidé à faire des efforts significatifs pour se rapprocher de la République de Moldova. La visite du chef de l’Etat roumain à Chisinau a été peut-être le signal le plus clair que Bucarest ait lancé depuis 20 ans sur un avenir commun des Roumains vivant des deux côtés de la rivière Prut et qui sépare nos pays. Elle a donné à croire que, dans un avenir plus ou moins proche, ils pourraient vivre de nouveau ensemble.”
C’est ce qu’affirmait le quotidien bucarestois “România Libera” après les pourparlers qui se sont déroulés fin janvier entre le président roumain, Traian Basescu et son homologue de la République de Moldova, Mihai Ghimpu. Précisons que la République de Moldova est un ex-Etat soviétique à majorité roumanophone.
Après 8 ans de relations glaciales dues à la roumanophobie viscérale de l’ancien pouvoir communiste de Chisinau, la détente qui a suivi l’installation, l’automne dernier, d’une nouvelle administration moldave pro-occidentale a été vite ressentie et mise en valeur à Bucarest. Détail éloquant, le président Traian Bàsescu, récemmement réélu pour un nouveau mandat, a choisi Chisinau pour sa première visite à l’étranger. Il a également qualifié l’européanisation de la République de Moldova de „projet qui lui tient à coeur”. La déclaration de Mihai Ghimpu fut tout aussi éloquante:
„A mon avis, à l’heure actuelle, il n’y a pas de problèmes que les pouvoirs de Bucarest et de Chisinau ne puissent résoudre. Nous sommes deux Etats, certes, mais qui sont fondés sur la męme culture, la męme langue, la męme identité”.
Par son incompétence proverbiale, le gouvernement communiste de Chisinau n’avait fait qu’amplifier les effets de la crise économique mondiale. Le nouveau gouvernement moldave a obtenu un prêt de plus d’un demi milliard d’euros accordé par le FMI et un autre, de quelque 260 millions de dollars octroyé par les Etats-Unis. Pourtant, ce pays, le plus pauvre d’Europe, a encore désespérément besoin de fonds. C’est pourquoi, le président Basescu s’est senti obligé de déclarer:
“La Roumanie a décidé d’accorder à la République de Moldova une aide financière non-remboursable de 100 millions d’euros, s’étalant sur 4 ans – soit de 2010 à 2013.Cet argent, accordé par tranches annuelles de 25 millions d’euros, est destiné à des projets dans le domaine de l’infrastructure locale et de l’éducation – notamment à la modernisation des écoles”.
La délégation roumaine a également proposé à la République de Moldova des projets censés la rapprocher de l’UE – via la Roumanie. Il s’agit en tout premier lieu d’une interconnexion entre les infrastructures des deux pays.
Parmi eux, le branchement des conduits de gaz et des réseaux électriques censés réduire la dépendance énergétique de Chisnau envers Moscou. Le chef de l’Etat roumain a en outre plaidé en faveur du renouvellement des voies ferrées moldaves, dont l’écartement devrait être réduit pour devenir compatible avec le système européen. L’expert moldave Valeriu Prohnitchi explique l’enjeu de ce changement souhaité. “L’ écartement des rails, différent des standards européens, confine la République de Moldova dans l’espace commercial de l’est et détermine, de ce même fait, l’orientation de son système économique”.
Selon Armand Gosu, analyste roumain et adjoint au rédacteur en chef de l’hebdomadaire 22, toutes ces initiatives relèvent de la manière dont les autorités de Bucarest entendent étayer les aspirations d’intégration européenne de Chisinau. Et ce dans les conditions où Bruxelles n’a pas été favorable à l’idée d’inclure cet ex-Etat soviétique sur la liste des candidats balkaniques les plus proches de l’adhésion à l’espace communautaire:
“La Roumanie n’a pas réussi à faire inclure la Moldavie dans le groupe des pays des Balkans occidentaux concernés par la prochaine vague d’intégration européenne, dans le sens où elle n’a pas abouti à l’accélération du processus ni à la mise en place d’un calendrier d’adhésion. Nous en sommes toujours loin et, selon toute vraisemblance, joindre la République de Moldova à ce groupe-là n’a pas été la meilleure solution”.
Sociologue et spécialiste de la problématique de l’espace ex-soviétique, le professeur roumain Dan Dungaciu se félicite des résultats politiques de la visite officielle de Traian Basescu à Chisinau. Des résultats qui n’ont pas leur égaux depuis 1991, date à laquelle Chisnau proclamait son indépendance à l’égard de l’URSS. Toutefois, un long chemin reste encore à faire d’ici la mise en oeuvre de ces projets, avertit Dan Dungaciu.
“Au niveau des déclarations, c’est une première dans l’histoire des relations entre la Roumanie et la République de Moldova, mais tout cela doit être couché sur le papier et puis concrétisé. A mon sens, la rhétorique – très encourageante d’ailleurs – de cette rencontre, devrait être suivie d’actes concrets de part et d’autre, de sorte que les belles paroles deviennent réalité et que le partenariat roumano-moldave pour l’intégration européenne prenne corps. C’est là l’enjeu des événements attendus dans le sillage de la visite du président roumain Traian Basescu à Chisinau, car le plus dur ne fait que commencer”.
Aut: Bogdan Matei ; trad: Mariana Tudose, Dominique
Actualisation : 28/02/2010
Accords – L’accord sur le petit trafic frontalier entre la Roumanie et la République de Moldova est entré en vigueur ce vendredi.
Aux termes du document, les ressortissants moldaves domiciliés dans les localités se situant dans un périmètre de 50 kilomètres tout au plus de la frontière avec la Roumanie pourront entrer sur le territoire roumain munis seulement d’un permis spécial et non pas de visas comme ce fut le cas jusqu’ici.
Ces permis seront délivrés gratuitement, jusqu’à l’adhésion de la Roumanie à l’espace Schengen, a assuré le ministre roumain de l’Intérieur, Vasile Blaga.