Jean Pierre Sergent, plasticien français à l’imagination fertile, explore à travers deux expositions le lien spiritualité, sacré et érotisme. Si vous avez l’occasion d’aller en Suisse durant l’été, vous y découvrirez probablement entre Bâle et Montreux ses oeuvres de sérigraphie jusqu’au 22 août 2015.
Les deux expositions estivales de Jean Pierre Sergent témoignent de son incessante recherche créatrice, de sa capacité de travail. Dans son atelier de Besançon, l’artiste plasticien continue de creuser son sillon ; sa démarche, dont il a été à plusieurs reprises question dans ces colonnes, se poursuit toujours autour d’un même médium (la sérigraphie sur plexiglas et sur papier) et d’une thématique spirituelle qui repose sur l’union, la juxtaposition d’images érotiques et de motifs sacrés (ces derniers le plus souvent répétitifs, formant une géométrie singulière) empruntés aux cosmogonies de l’Inde ou des antiques civilisations de l’actuelle Amérique latine.
Jean Pierre Sergent entre Union et juxtaposition, érotisme et sacré
Parler ici d’union ou de juxtaposition peut soulever l’incompréhension d’un public occidental marqué par l’influence des monothéismes pour lesquels érotisme et sacré sont deux notions antinomiques. C’est pourquoi, afin de s’immerger dans l’univers de Jean-Pierre Sergent, il nous faut avant tout abandonner nos présupposés, nos préjugés.
Car, au prix de cet effort, apparaît tout le sens de ses œuvres, fondées sur un assemblage de fragments qui, isolés, ont une signification propre, mais dont la mise en relation construit une nouvelle harmonie, d’une portée tout à fait différente – portée qui efface tout paradoxe apparent.
Jean Pierre Sergent s’en explique d’ailleurs : « Les graffitis pornos sont très souvent utilisés dans mes peintures comme des points de repères et d’ancrages pour signifier la présence de l’animalité de l’Homme (l’attraction sexuelle de l’homme et de la femme). Ils sont toujours, pour la plupart paradoxalement : enfantins et virils, ridicules et fondamentaux, moraux et immoraux, spontanés et éternels… Ils sont la porte secrète de l’âme et de la Libido, les haïkus du désir, l’extase sublimatoire et transcendante ; mais également génériquement et violemment les anti histoire, progrès, esthétiques, doxas, souvenirs et bourgeoisie. […] Ces dessins sont la liberté première de l’être et de son incontrôlable désir devant l’autre sexe désiré. Abruptement, ils sont la vérité, l’oubli, le rêve, la puissance et l’essentiel amour. À contrario les patterns géométriques s’inscrivent dans la culture esthétique sacrée et tribalement organisée. Ils sont la beauté aboutie formellement, les témoins des structures composant la matière et peut-être le Vide même ! Ils symbolisent l’ordre, la méditation, la tradition et le détachement… […] Ces mélanges intimement liés d’ordre et de chaos, créent de facto l’image générale plénipotentiaire et pertinente de notre Vie, tout simplement. »
Par « notre Vie », sans doute faut-il entendre notre rapport au désir, à la Nature, aux forces cosmiques qui semblent attirer le spectateur à l’intérieur de chaque œuvre dont il découvre, derrière une première apparence chaotique, voire abstraite, la signification, au fur et à mesure qu’il en discerne et décrypte les strates, en s’embarquant pour un voyage autant initiatique qu’hypnotique.
Ces deux expositions de Jean Pierre Sergent, qui proposent des sérigraphies sur plexiglas de grand format et d’autres, sur papier, de petits et moyens formats, ont lieu en Suisse. La première, Erotic Graffities and Sacred Patterns, se tiendra jusqu’au 22 août à la Galerie Art & Context 101 (101, rue Allschwiler, Bâle) ; la seconde, Earth is the Region of the Fleeting Moment (titre inspiré à l’artiste par un vers du Prince-poète aztèque Ayocuan Cuetzpaltzin – Mexique, XVème siècle) , à la Idecor Art Gallery, 35, avenue des Alpes, Montreux.
Illustrations : Plexi rouge N004, 2014 – Suite Enthropique N027, 2011 © Jean-Pierre Sergent.
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