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« Balzac, une vie de roman », de Gonzague Saint-Bris

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Il n’est pas facile de s’attaquer à la biographie du monstre sacré de la littérature qu’est Honoré de Balzac. Plusieurs écrivains s’étaient déjà essayés à cet exercice, comme André Maurois, Félicien Marceau et Stefan Zweig, avec des fortunes diverses. Seul Roger Pierrot, ancien conservateur en chef à la Bibliothèque nationale, grand érudit et personnage fort courtois, était parvenu à écrire un Balzac (Fayard, 582 pages, 27,50 €) dont la dernière édition remonte à 1999, mais qui fait toujours autorité.

C’est aujourd’hui au tour de Gonzague Saint-Bris de proposer une nouvelle biographie, Balzac, une vie de roman (Editions Télémaque, 448 pages, 22 €). Certes, il ne faut pas chercher dans cet intéressant essai l’approche scientifique qui caractérise les biographies de Baudelaire par Claude Pichois et Jean Ziegler ou de Théophile Gautier, par Stéphane Guégan. L’absence regrettable de notes de bas de page et d’un index alphabétique en témoigne. Pour autant, l’ouvrage conviendra tout à fait au néophyte désireux d’aborder la vie de l’écrivain. Car Gonzague Saint-Bris (descendant de Louis Mame, éditeur de Balzac) traite son sujet avec une réelle sensibilité et une plume alerte. De plus, à la fin de chaque chapitre, il insert de courtes parenthèses thématiques qui lui permettent de développer quelques aspects insolites ou paradoxaux de l’homme et de l’œuvre. Ainsi, les trois pages consacrées à la liberté d’écriture d’un romancier capable d’exploiter, dans la première moitié du XIXe siècle, des thèmes aussi tabous que l’homosexualité, la zoophilie et la prostitution, apportent un éclairage tout à fait bienvenu, de même que les quatre pages où sont traités les relations de l’écrivain avec la presse ou encore celles qui mettent l’accent sur l’importance qu’il accordait à la gastronomie.

Reste un chapitre curieux, intitulé « Epilogue », dans lequel l’auteur se risque à la « biographie-fiction » : « Et si Balzac n’était pas mort le 18 août 1850, que serait-il devenu ? Ami de Tourgueniev, traduit par Dickens, défenseur de Manet, sénateur du second Empire, fait baron par Napoléon III. » Ces cinq pages n’apportent malheureusement rien à la gloire de Balzac, tout au contraire. L’imagine-t-on franchement sénateur de l’Empire et membre de l’Académie française, réduit au même statut que Sainte-Beuve ?

Ces pages furent-elles mûrement réfléchies ou plutôt ajoutées au dernier moment, à la hâte et non relues ? Deux erreurs s’y sont en effet glissées, qui mériteraient correction lors de futurs retirages. Ainsi, il est question, p. 359, de la « guerre de 1878 » (lire : 1870). Une double perle plus grave que cette probable coquille, se trouve p. 358 où il est écrit : « Le 20 octobre 1875, au milieu des feuilles mauves, Balzac se rend à Bougival à l’invitation d’Ivan Tourgueniev […]. En vieillissant, Balzac se révèle, lui aussi, un rebelle. Déjà, il a témoigné huit ans auparavant, en faveur de Baudelaire au procès des Fleurs du mal et à celui de Flaubert pour Madame Bovary. Cette solidarité littéraire n’est pas seulement due au fait qu’un soir, à l’hôtel de Lauzun, le poète maudit lui avait fait fumer jadis pour la première fois du haschisch… » Or, les procès des Fleurs du mal et de Madame Bovary n’eurent pas lieu en 1867, comme le texte le suggère, mais dix ans auparavant ! Quant à l’allusion au haschisch, il convient de préciser que celui-ci n’était jamais fumé lors des fantasias de l’hôtel Lauzun, mais consommé sous forme de confiture (le dawamesk), comme le rapporte Baudelaire qui, d’ailleurs, précise dans Les Paradis artificiels : « On lui [Balzac] présenta du dawamesk ; il l’examina, le flaira et le rendit sans y toucher. »

On pourra donc faire l’impasse sur ce chapitre abracadabrantesque, et lui préférer largement, en fin de volume, la présentation, en de courtes fiches, d’une sélection d’ouvrages connus (« les incontournables ») ou plus confidentiels (« les pépites ») de l’auteur du Père Goriot. Celle-ci se révèlera fort utile pour des choix de lecture. De même, le « catalogue de la Comédie humaine », qui dresse la liste des 142 titres de l’écrivain, permet de se repérer facilement dans son extraordinaire jungle éditoriale, laquelle réserve toujours de belles surprises littéraires et de vrais plaisirs de lecture et, plus encore sans doute, de relecture.

Illustration : Balzac, portrait gravé, timbre poste surtaxé au profit des « chomeurs intellectuels ».

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