Fragments d’une femme perdue de Patrick Poivre d’Arvor

« C’est l’histoire d’une petite fille jamais en repos. Tout bouillonnait en elle, son cœur, beaucoup trop gros pour une enfant de son âge, mais aussi son sang, d’un rouge très clair, qui lui montait parfois au visage quand elle était amoureuse ou qu’elle mentait, et qui pouvait soudainement faire place à une pâleur mortelle.
Son cerveau n’était pas en reste. Une excitation permanente l’animait…
La petite fille qui jamais n’était au repos avait une excuse, mais ne le savait pas.
Son père avait voulu pour elle l’excellence… Son père attendait trop d’elle ; jamais elle ne pourrait lui offrir la réussite par procuration qu’il convoitait…
Leurs chemins se séparèrent… Elle avait perdu l’estime du père, elle perdait son amour-propre. De mois en mois, d’année en année, elle abandonna toute confiance en elle et se réfugia dans des tentatives d’émancipation qui toutes échouèrent. Vint le jour où il ne lui parla même plus… »

Cette fille « perdue » (pour elle-même ? pour celui qui prend le risque d’en être follement épris ?) s’appelle Violette, comme l’héroïne de « La Traviata ». Elle est très belle, insaisissable, fourbe, redoutable, mais, malgré cela, à cause de cela, elle devient l’obsession d’un homme, le fol attachement d’Alexis…

Portrait en éclats de points de vue, fait de lettres, de réflexions,, de sms.. des fragments .
Par brèves séquences, on passe d’un point de vue à un autre , Eux, Lui, Elle,L’autre, Violette, Alexis .
Personne ne détient la vérité. .. Chacun est libre de s’aveugler à sa guise…
Mouvant à l’image d’un kaléidoscope ce roman raconte des souffrances mais aussi des bonheurs. Les deux héros se perdent, à eux-mêmes et à l’autre.
Pas d’avenir radieux pour ceux qui ne savent jeter le passé,guérir des peurs de l’enfance.

Roman triste et sombre qui me laisse un goût amer, le personnage féminin est imbuvable, exécrable. Cette femme égarée en elle-même au point d’en perdre toute structure et de ne plus pouvoir être saisie que par fragments dont on ne sait plus lequel est plus vrai que l’autre. Redoutable et fragile…

” Pour son malheur, il croisa son chemin et ne s’en remit pas. Pour son bonheur, il connut des instants de passion déraisonnée qui lui firent croire en l’existence de Dieu. Mais Dieu est mort ce soir. Toi aussi, le fantôme aussi, tout le monde est mort. N’ont survécu que les pâles illusions qui flottent encore sur les champs lorsque vient l’automne et qui ne sont que les plaintes envolées des amants morts”.

“Fragments d’une femme perdue”,  Patrick Poivre D’Arvor, éditions Grasset
crédit photo Liliroze

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