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Visiter Grasse, capitale mondiale du Parfum sur la Côte d’Azur

Parfumerie Fragonard Grasse usine

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musee parfum grasseSi Grasse m’était conté, ce serait un parfum… Grasse n’a pas qu’un joli nom assez romantique qui tranche avec son statut de sous-préfecture des Alpes Maritimes. Grasse a surtout une réputation sans faille. Comme vous le savez tous sûrement, à Grasse, capitale mondiale du Parfum, sont fabriqués par quelques nez et une cinquantaine d’usines la plupart des parfums que vous utilisez régulièrement bien qu’ils se nomment Chanel, Dior, Yves Saint Laurent et non Galimard, Molinard ou Fragonard. Si vous faîtes du tourisme sur la Côte d’Azur, consacrez une journée à la découverte de l’univers du parfum, en vous rendant dans les principales usines, qui proposent des visites guidées et des ateliers.

Un parfum révèle un peu de nous, de ce que l’on est charnellement, spirituellement, mais aussi de ce que l’on aime… Qu’on l’utilise comme signature ou comme touche de fantaisie au gré des humeurs, le Parfum est une ivresse de tous les instants… En route pour un pèlerinage au coeur du monde de tous les parfums… Grasse est une invitation à la découverte d’émotions olfactives incroyables qui combleront celles et ceux qui aiment le Parfum et souhaitent lui rendre hommage.

Car à Grasse, tout est permis : des centaines de parfums y sont de A à Z produits, c’est-à-dire, élaborés, créés par des nez, fabriqués incognito dans les usines par les chimistes avant d’être traités du point de vue de la présentation et des publicités par d’autres agents. Une petite balade historique permet de replonger dans des siècles de parfumerie afin de comprendre comment le parfum est devenu un « produit de luxe ».

Grasse : des tanneurs aux parfumeurs…


A l’origine, Grasse s’est mis au parfum, au propre comme au figuré, au XVème siècle, époque où les tanneurs monopolisaient l’industrie avec des dizaines d’usines qui dégageaient des odeurs fortes et très désagréables. Vint alors l’idée de lancer une usine de parfums pour contrarier cette malchance et surtout parfumer les gants des dames de la haute société, ce que fit Fragonard, un homme bien établi et très aisé, en 1547! 90% de la ville de Grasse serait aujourd’hui dédié de près ou de loin aux activités du luxe et du cosmétique !

A l’époque, le parfum se présentait surtout sous forme d’absolus, à savoir d’essences pures : il n’avait ni la sophistication des fragrances qu’on lui connaît actuellement, ni la dimension de recherche esthétique des emballages. Tout ceci n’est apparu que tardivement après la fin de la 2ème Guerre mondiale sous l’impulsion de Coco Chanel (mis à part quelques rares exceptions en Lalique créées dans le courant du XXème siècle). De jolis flacons bien éloignés des bouteilles d’1 litre sans aspect ont point le bout de leur nez, ils n’étaient au début que rectangulaires comme le Chanel numéro 5 – le premier à inaugurer cette tendance – mais ils donnaient du cachet et surtout ils abritaient des parfums qui portaient un nom propre sur des étiquettes ornementées même à la main et ne se contentant pas de nommer l’essence. De nos jours, on se souvient plus d’un flacon que du parfum dans certains cas : je pense aux extravagants corps de Gaultier par exemple.

Le parfum était évidemment l’apanage de la noblesse qui dès le XVIIème siècle a succombé à cette nouvelle mode importée d’Italie par Catherine de Médicis. Il faut dire que les gens de l’époque, malgré tous leurs moyens financiers et leurs attentions esthétiques orientées vers la surcharge, ne se lavaient quasiment pas (une ou deux fois par an) par peur des épidémies dont on estimait qu’elles provenaient surtout de l’eau. Cela permit à un autre grand actuel, Galimard, Seigneur très puissant, de s’imposer dans la ville par ses créations. La rose sous des dizaines de déclinaisons faisait l’objet des principales cueillettes dans les champs embaumant tous les alentours et il est toujours possible sur rendez-vous de découvrir cette activité impressionnante qui se fait encore à la main pour préserver l’authenticité et la senteur des fleurs.

Grasse et le parfum comme produit de luxe


Après la Révolution française durant laquelle les nobles ont perdu de leur superbe et tous leurs privilège, le parfum est rentré dans une crise profonde et durable jusqu’au second Empire, vers la moitié du XIXème genre. Cela faisait mauvais genre dans les mentalités de se parer de parfum à l’excès : cet acte était assimilé à une féminisation mal vue par ceux qui étaient attachés à une image de virilité de l’homme bien sur lui mais sans guère d’apprêts. Alors que les hommes étaient les premiers à recourir jusqu’alors à ces subterfuges pour camoufler leurs odeurs, les femmes ont eu envie de ne pas se contenter de parfumer leurs gants !

Le parfum a redoré son blason par une nouvelle mode : celle de l’élégance, de la subtilité et de la délicatesse. Une utilisation légère s’est imposée sur les mouchoirs en particulier que l’on utilisait pour se rafraîchir et qui sont même progressivement devenus l’atour symbolique de l’engagement amoureux. Si vous donniez votre mouchoir parfumé à une gente demoiselle, il était entendu que vous lui faisiez officiellement la cour et que vous la demandiez en fiançailles.

Au fur et à mesure, le Parfum est devenu à nouveau un produit de luxe, une fois que se fut dissipé le spectre du produit phare de cette Noblesse tant rejetée dont les têtes tombèrent sous les guillotines : son association à l’amour, à la séduction et non plus aux élémentaires nécessités hygiéniques l’a transformé en produit d’exception, à nouveau convoité, rare, précieux et donc de plus en plus élaboré avec diverses essences, à l’intention des bourgeoisies tout d’abord. Alors qu’auparavant, un parfum (la concentration maximale) se constituait d’un seul absolu sans grande possibilité d’originalité ce qui n’était d’ailleurs pas le but, il se compose aujourd’hui de 80 à 600 essences selon les créations. Leur mélange offre une alchimie, une âme et un sillage. La moyenne des parfums courants, y compris ceux que vous achetez dans l’industrie dite de luxe, varie entre 150 et 300 essences. On répartit les essences pour 100 ml d’eau de toilette à raison de 30 ml en fond, 35-40 pour la tête et le fond. Pour information, à Grasse, c’est Habanita de Molinard, le classique des classiques, inimitable oriental fleuri boisé, qui remporte la palme du parfum le plus « essentiel » avec 630 essences d’une richesse pour l’instant inégalée même si Eau du Soir de Sisley, mon parfum préféré, le talonne…

grasseInitialement, donc, il n’existait que l’absolu : puis naquit LE Parfum avec une concentration de 22% d’essences, c’est-à-dire l’extrait. C’est la raison pour laquelle les parfums sont quasiment inabordables en magasin et coutent environ 90€ les 7 ml, 200 les 15ml, 250€ et plus les 30 ml! Le parfum est la quintessence du luxe, vous l’aurez compris au vu des prix. En revanche, si l’investissement semble énorme au début, le parfum devient vite bien plus rentable puisqu’il en faut une quantité infime pour être parfumée toute la journée sans faille et qu’il s’applique au doigt !

A Grasse, l’eau de parfum reste chère mais très abordable (7€50 chez Galimard les 16 ml en promotion par 6 ; 30€ les 15 ml chez Fragonard jusqu’à 75€ les 150 ml ; 55 € en moyenne les 30 ml chez Molinard) car il est présenté dans des flacons d’usine qui permettent non seulement de le conserver mieux même si ce n’est pas aussi élégant mais aussi de ne payer que le produit ce qui semble élémentaire mais ne l’est pas dans cette industrie où l’on joue autant sur le visuel que sur le contenu!

La particularité du parfum est de s’appliquer du du bout du doigt ou avec l’embout du flacon d’usine directement au creux du cou, du poignet et de toutes les zones que vous voulez emplir d’une sensualité unique qui reflète votre identité olfactive en se mêlant à la senteur naturelle de votre épiderme ! Geste d’une redoutable féminité, l’application du parfum confine au plaisir quand on sent les fragrances se développer…

La « tête » émerge tout d’abord avec ses notes volatiles, qui donnent la première impression forcément évanescence puisqu’elle ne dure qu’une quinzaine de minutes. Se dégagent ensuite le « coeur » qui incarne l’Esprit, l’alchimie fleurie, boisée, orientale, fruitée, fraîche ou gourmande selon les grandes familles et enfin le fond, une senteur à peine perceptible dont le but est de servir de fixateur avec des essences puissantes et si possible tenaces comme l’iris (la fleur la plus chère du marché extraite des racines) ou la tubéreuse produite à Grasse comme les autres fleurs qui ont fait la renommée de la ville : la rose, le jasmin, l’iris. Sachez aussi que les parfums n’ont qu’une faible durée de vie : cela explique que dans ces usines, on vous les vende dans des flacons en aluminium pour les tenir à l’abri de la chaleur, des variations de températures, de l’humidité et de la lumière comme on les trouve dans les cuves qui ne vont pas sans rappeler celles des caves viticoles.

Avec la démocratisation du parfum dans les années 50 qui prolonge le mouvement de mode et de liberté des années Folles où les femmes découvrent la joie des fragrances pour séduire les hommes, les fabricants ont décidé de développer de nouveaux produits à côté de l’extrait et de la concreta, le très chic parfum-crème que l’on a adapté des Égyptiens anciens… C’est ainsi qu’a vu le jour l’eau de toilette (10-14% de concentration) – la plus vendue au monde pour des raisons de prix abordables (condition sine qua non) même si à la réflexion on réalise que compte tenu de la qualité moindre, du moins de la concentration deux fois plus légère que le parfum et la tenue jusqu’à 5 fois moins longue, c’est le produit le plus cher à long terme.

L’eau de parfum est une amélioration de l’eau de toilette, elle tient entre 4 et 5 heures dans le meilleur des cas au lieu de 2 heures pour l’eau de toilette et elle jouit d’une concentration de 14 à 16% d’essences (le reste étant toujours composée d’alcool, un alcool qu’il faut laisser sécher quelques secondes sur la peau avant de sentir les effluves réelles du parfum). Et bien sûr, mais vous devez le tenir de vos grands mères et grands pères, il existe l’eau de Cologne, fabriquée dans la ville éponyme d’Allemagne et qui comporte 4% de concentration.

Fragonard, Molinard et Galimard ; visites guidées


Outre toutes ces considérations parfumées, j’insisterais sur l’attrait concret de Grasse, à savoir ses usines parsemées dans tout l’arrière pays des Alpes-Maritimes! Trois d’entre elles sortent du lot, non seulement car elles ont été fondées depuis des siècles et ont imposé leur prestige, mais parce qu’elles sont aussi les seules à proposer une visite de certains ateliers, des musées du parfum et des boutiques avec des tarifs défiant toute concurrence et permettant aux amoureuses toutes catégories de s’offrir les parfums de leurs rêves. L’avantage de ces usines est la gratuité de la visite pour tous et la myriade de produits qui vont du parfum aux eaux de toilette, eaux de parfums et eaux de Cologne en passant par les parfums d’ambiance, les gels douches, les crèmes, les savons et les absolus!

Par ordre de préférence, je citerais Molinard, une maison d’époque créée en 1849, à l’architecture renforcée par un certain Gustave Eiffel (et cela se voit, croyez moi) ! Molinard est selon moi le plus grand, une marque dont se dégage une noblesse naturelle, un fleuron qui a gardé sa gestion totalement familiale depuis 5 générations ce qui est un exploit dans ce milieu. La visite (qui existe dans toutes les langues) dure environ 30 minutes et est la plus riche en informations avec quelques éléments du décor encore authentiques depuis plus d’un siècle et une rétrospective historique qui a procuré un grand plaisir à l’ancienne étudiante en histoire que je suis. La dernière est à 18h. Molinard produit une gamme de parfums extrêmement élaborés qui vous donnent vraiment le sentiment de sortir de l’ordinaire même s’ils sont un peu diffusés pour deux ou trois références dans les Séphora et autres Nocibé! Je vous recommande Habanita, Molinard de Molinard, un fleuri ambré, Héliotrope, une eau de toilette qui regorge d’essences rares et exceptionnelle, Nirmala et un Air d’Habanita pour les amatrices de légèreté ultra féminine, M2M pour les hommes sensuels, romantiques et sûrs de leur virilité!

Chez Galimard, l’esprit est très différent, tout aussi convivial mais peut-être plus léger! La visite dure une vingtaine de minutes et avec un peu de chance, comme chez Fragonard un peu plus formaté cependant, vous pourrez voir sur certains ateliers, les chimistes, le nez, les employés travailler. C’est surtout la fabrique du savon qui est montrée aux visiteurs avec la fabrication des blocs, des spirales, des spaghettis, puis des barres découpées et métamorphosées avec les formes les plus variées. Chez Galimard, on insiste plutôt sur des notions pratiques du parfum, à savoir les coûts entre l’usine et la boutique, les différences entre parfum, eau de toilette, eau de parfum et eau de Cologne. Chez Fragonard, je dirais que l’esprit est moins personnel, moins recherché, on traverse un long couloir qui condense les diverses étapes de la fabrication depuis les alambics pour extraire les essences des pétales, des fleurs et des plantes. On apprend que l’enfleurage utilisé à l’origine (on dispose des pétales et des fleurs sur de la graisse et absorber les essences de la graisse tous les jours) et abandonné pour des causes de coût et de temps, a laissé la place à la distillation par l’alambic où l’on exige jusqu’à 7 tonnes de fleurs – la rose notamment – pour produire 1 litre d’essence. Après plusieurs étapes, le « nez » ensuite n’a rien de mieux à faire que les marier pour créer le parfum de vos rêves…

Galimard et Fragonard proposent quasiment une centaine de parfums à eux deux et on n’a que l’embarras du choix même si l’effet de saturation propre aux effluves ne permet pas d’en essayer plus de trois ou quatre à moins de ne plus vouloir rien distinguer ! Personnellement, je suggèrerais aux femmes amatrices de naturel, Pêle Mêle de Galimard, un fleuri fruité, suave et frais qui se porte en toutes occasions. Gelsomino est une réussite pour celles qui aiment le jasmin, tout comme Journal intime, Soir de Grasse et Grasse à toi qui envoûtent par leurs mariages de fleurs. Yavana et Frisson submergeront les femmes sûres d’elles-mêmes sous des effluves orientales ambrées, chaudes et raffinées. Chez Fragonard, Rêve Indien et Murmure iront aussi dans cet esprit là, tandis que Fragonard préfèrera la fraîcheur fleurie, Eau Fantasque, un frais fleuri un peu vert, Baroque le fleuri ambré et Emilie un bouquet de roses, de roses sauvages, de jasmin et d’Iris…

Malgré les milliers (3000 au moins pour chaque nez) d’essences auxquelles recourent les nez pour fabriquer un seul parfum, force est de constater qu’il existe de nombreux parfums qui se ressemblent étrangement et qui même parfois, même s’ils arborent une grande marque, sont des copies, ou plus élégamment des jumeaux, des cousins pour les cas moins flagrants.

Cet article est finalement aussi une invitation à partager les impressions parfumées et à découvrir des parfums méconnus mais très proches des grands… que vous adorez! Inutile de dire que quand on voit l’économie substantielle réalisée pour certains parfums et la différence de qualité puisque souvent au prix de l’eau de toilette, vous pouvez avoir carrément le parfum, beaucoup plus concentré et de meilleure tenue donc, dans les boutiques-fabriques de Grasse, la ressemblance vaut le coup d’oeil ! Seriez-vous prêt(e) à troquer vos marques de luxe dont vous payez pour 60% la publicité et le packaging pour de vrais parfums très ressemblants ou pour des « jumeaux » et « cousins » très proches ?

Quelques références de parfums de Grasse

A Grasse, vous trouverez sans nul doute quelques fragrances qui vous rappelleront vos références de grandes marques. Angel de Mugler qui a sûrement pas mal inspiré Magnetism d’Escada ressemble beaucoup à Nirmala de Molinard, d’ailleurs il y a eu un procès… Peut-être que par sa légèreté il va plutôt dans le sens de Angel Innocent maintenant? Angel coute environ environ 75€, Nirmala environ 40€.

Trésor de Lâncome se rapproche de Lune de Miel de Fragonard et Printemps Japonais de Galimard.

Baby Doll d’YSL ne va pas sans rappeler Journal Intime de Galimard (9€ en eau de parfum 15ml). Certes, ce n’est pas exactement la même fragrance, mais certaines pourraient apprécier le compromis

Voleurs de roses de l’Artisan parfumeur renvoie à Rose poivrée de The Different Compagny.

Cinnabar d’Estée Lauder serait-il Murmure, de Fragonard ? Shalimar de Guerlain, Galimard de Galimard  ?
Fracas de Robert Piguet ne se confond-t-il pas aux tubéreuses de Mon coeur de Fragonard, cousin de La Chasse aux Papillons de L’Artisan Parfumeur ? Et que dire d’Amarige de Givenchy quand on sent Arielle de Fragonard ; L’Or de Torrente, cousin de Maman Chérie, de Fragonard ; Frisson et Yavana de Galimard proches d’Opium d’YSL?

Je vous souhaite sur ces bonnes fragrances une belle visite odoriférante de Grasse et de ses usines de parfum… Je m’étonnerais que vous ne trouviez pas là-bas le parfum de vos rêves à des prix bien plus intéressants pour une qualité meilleure (l’extrait au lieu de l’eau de toilette). D’ailleurs, ce n’est pas pour rien que Galimard et son Studio de Fragrances et Molinard avec son institut personnalisé vous offrent la possibilité de créer vous-même votre parfum avec vos essences bien à vous avec le nom de votre choix ! Le mien s’appelle Fuchinran et ce fleuri semi oriental m’a vraiment bien convaincue même si j’avais peur de ne pas réaliser un parfum de Grasse qui ressemble à ce que j’apprécie! Retrouvez toutes les informations sur la Vieille source du parfum pour fabriquer votre parfum à Grasse …

Pour vous renseigner sur Grasse:

Prévoir une journée complète pour parcourir les 3 usines et ateliers et terminer par une ballade dans la ville de Grasse!

Sandrine Monllor (Fuchinran)

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