Selon le recensement de la population de 2002, en Roumanie vivent environ 500 mille Roms. C’est là, en fait, le nombre de ceux qui ont déclaré appartenir à cette ethnie. Pourtant, selon les statistiques non officielles fournies par différentes ONGs, la Roumanie pourrait compter deux millions et demi de Roms.
Une minorité bien nombreuse, donc, et confrontée à des problèmes plutôt graves: pauvreté, accès réduit à l’éducation, manque de logements et mauvaise image de la communauté. Différents programmes ont été mis sur pied, au fil du temps, pour y remédier. Le plus complexe, parmi eux, est peut-être la Stratégie nationale pour l’amélioration de la situation des Roms, mise en œuvre par l’Etat roumain en 2001.
L’un des principaux buts de cette stratégie est de réaliser un rapprochement entre les communautés de Roms et la population majoritaire et démarrer une collaboration intercommunautaire en vue de mettre sur pied des projets communs. La plupart de ces projets sont proposés et réalisés par les autorités locales, en collaboration avec les ONGs des Roms. Mentionnons-en, parmi les plus importants, ceux concernant les médiateurs sanitaires, la bourse de l’emploi destinée aux membres de cette ethnie et plusieurs autres visant le domaine de l’éducation. Gelu Duminică, directeur exécutif de l’Agence de développement communautaire “Împreună” (Ensemble), nous fait part de ses conclusions.
« Bien souvent, nous sommes nous-mêmes partis de l’idée selon laquelle les Roms auraient surtout besoin d’eau, de savon et d’éducation. Mais quand nous avons parlé aux gens, ils nous ont dit que ce n’était pas cela qu’il leur fallait, que, s’ils avaient un emploi, ils pourraient se payer l’eau et le savon tout seuls. Car, si aujourd’hui il se voient offrir un savon qui demain est déjà consommé, il leur en faudra un autre. Théoriquement nous devrions faire autre chose: briser le cercle de la dépendance. Ce n’est pas facile. Nous avons essuyé de cuisants échecs dans des communautés que nous n’avons pas réussi à motiver suffisamment”.
Pour que de tels échecs soient évités, nous devons déterminer les Roms à participer eux-mêmes aux projets censés améliorer leur propre situation. Ainsi, selon la Stratégie nationale pour les Roms, a été créée la fonction d’expert local chargé des problèmes de cette ethnie, qui agit comme médiateur entre les communautés rom et les autorités.
William Oaie compte parmi ces experts. Il est actif au sein de la Préfecture du Département d’Ilfov, qui entoure pratiquement la capitale. Celui-ci compte 14 localités à forte population rom, ce pourquoi les autorités locales se sont donné pour tâche de former un grand nombre d’experts qui assurent la communication avec ces communautés. Ecoutons William Oaie:
«Le problème, c’est assurer l’interface. Grâce à ce projet, nous avons notamment réussi à embaucher 210 personnes dans les 42 départements du pays. Au niveau du département d’Ilfov, nous disposons actuellement de 10 experts actifs dans 10 localités différentes, 6 nouveaux experts s’étant ajoutés récemment aux 4 qui existaient déjà. »
Toujours dans ce département proche de la capitale, nous avons organisé des bourses de l’emploi destinées aux Roms. Les résultats ne sont pourtant pas du tout satisfaisants. L’expert William Oaie explique:
« Nous avons organisé cette bourse à chaque fois dans une autre localité. La mobilisation a été plutôt bonne, des Roms sont venus ainsi que plusieurs employeurs. Pourtant, malheureusement, il n’y a pas eu d’embauche. La formation des Roms est assez limitée et elle ne correspond plus à la demande actuelle du marché. Et puis, nous devons aussi reconnaître que les employeurs sont plutôt réticents. On trouve encore des annonces d’emplois qui excluent d’emblée les Roms. En outre, pendant la période d’une éventuelle qualification – qui peut durer entre 3 mois et un an – les Roms souhaitent que l’on assure la subsistance de leurs familles. Ils demandent toujours qui va entretenir leur famille pendant qu’ils vont suivre ces cours. A mon avis, la solution pourrait être un système intégré, leur assurant un niveau minimal d’éducation, un cours de qualification et un revenu décent”.
Les solutions – les vraies – ne sont certainement pas faciles à trouver. La tentation de recourir à une politique d’assistance ou d’entraide est grande. Mais cela ne fait que perpétuer le cercle de la dépendance – estime Gelu Duminică, directeur exécutif de l’Agence de développement communautaire Ensemble:
« Puisque la première source que les Roms se voient offrir est l’aide sociale, il est normal qu’ils s’y habituent. Et pourquoi, à la place de l’aide sociale, choisirait-il un emploi de balayeur de rue, le plus souvent offert aux Roms, vu que la somme d’argent qu’il recevrait serait quasiment la même? L’Etat devrait orienter ses politiques vers le développement et non pas vers la dépendance. »
Aut. : Christine Leşcu ; trad. : Dominique