Peut-être comme nous, aviez-vous appris que le zéro était une invention arabe et on se souvient bien sûr que les arabes furent de bons mathématiciens. D’ailleurs le terme algèbre, comme on s’en souvient tous vient du mot arabe « al-jabr » signifiant littéralement « restauration » (mais là rien à voir avec Mc Do ou le couscous!). Mais comme souvent des certitudes que l’on croyait bien ancrées doivent céder la place à des vérités scientifiques et il est grand temps d’actualiser vos connaissances en matière de zéro. Voilà donc une histoire très excitante, presque zérotique !
Le fabuleux destin du zéro commence en fait avec les Babyloniens mais dont le mérite est somme toute (sans jeu de mot pour ce petit article sur les mathématiques) relatif car ils ont attendu 1000 ans avant de ressentir le besoin de distinguer une place vacante dans l’écriture des nombres ! Toujours est-il que vers 400 ans avant J.-C (certains pensent que c’est vers -700), deux petits crochets indiquaient qu’une place dans le nombre était vacante (il y avait 1, 2 voire 3 crochets). Seul hic, si on pouvait distinguer 27 de 207, on ne pouvait pas faire la différence entre 27 et 270 ! Mais sans doute n’avaient-ils pas trop de contraintes avec l’affichage des prix !
Chez les Grecs, le zéro posait un gros problème ! Avec sa connotation de néant et de non existence, l’esprit grec avait un peu de mal ! Certains croient que ce sont les Grecs qui ont pourtant inventé le zéro : de fait, les astronomes grecs emploient dans leurs tables un zéro, l’omicron, noté o qui ressemble à notre zéro actuel mais il s’agit vraisemblablement d’une coïncidence. Les grecs comprennent l’utilité d’un zéro pour leurs calculs mais le rejettent pour des croyances philosophiques. Comme l’infini, le zéro fait peur aux grecs. Selon la conception aristotélicienne, le vide et l’infini n’existent pas, bien qu’elle conçoive un infini potentiel au sens d’une éventualité utopique impossible à réaliser. De là à dire qu’il y a incompatibilité enre la philo et les maths…
En Inde, ce sont les marchands indiens qui vers -300, inventèrent une manière plus pratique de noter les chiffres ; au lieu de répéter l’unité comme le faisaient les Babyloniens, les indiens ont tout simplement inventé les neuf symboles représentant les chiffres de 1 à 9, chiffres que, après plusieurs transformations graphiques, nous utilisons encore aujourd’hui ! Et un bon point pour les indiens !
Vers le V° siècle le zéro était matérialisé par un point par les indiens et prendra ensuite la forme d’un rond. Inventer le rond c’est bien mais encore fallait-il lui donner une définition ! Et c’est Brahmagupta qui a eu l’idée géniale de le définir comme le résultat de la soustraction d’un nombre par lui-même ! (jusque là vous devriez suivre sans problème).
Réalisez-vous bien toute la différence entre la vie avant le zéro et la vie après le zéro ? Avant le zéro, lorsqu’un marchand d’esclaves avait revendu les 5 esclaves qu’il avait achetés (on aurait pu dire, un grossiste en esclaves, profession qui n’existe plus de nos jours…), il disait : « il me reste cinq moins cinq esclaves ». On était donc incapable d’exprimer le nul par un signe symbolique !
Mais revenons à la chronologie des événements; en l’an de grâce 458 on note la première apparition (bien avant Lourdes !) d’un mot « çunya » signifiant « le vide » qui représente le zéro dans un traité de cosmologie indienne. Mais c’est en 629 que le mathématicien et astronome indien Brahmagupta publie son Brahmasphutasiddhânta (avec un tel titre çà commence mal) qui révèle une parfaite maîtrise de la notation décimale de position au moyen de 9 chiffres et du zéro!
Et ce zéro va vite voyager ! A la fin du VIII° siècle, la numérotation décimale positionnelle et du zéro est introduite dans la culture islamique, par un astronome indien à la cour du calif Al-Mansur à Bagdad ! La caravane indienne venait s’incliner devant le calife et lui offre, entres autres, des livres de calcul ! Tout ceci bien avant l’invasion de l’Inde par les arabes au XII° siècle. On pense ensuite que ce savoir fur transmis par les arabes en Occident via l’Espagne. En 972 lors d’un voyage en Espagne, le moine auvergnat (enfin un français dans cette histoire) Gerbet d’Aurillac (qui deviendra, comme vous vous en souvenez, quand même Pape en 999 sous le nom de Sylvestre II) s’intie aux chiffres arabes et les introduit en Europe occidentale (en réalité il n’importa que les 9 chiffres et pas le zéro et ce Pape se heurta à une grande résistance). Mais ce n’est qu’à partir du XII° siècle que la graphie des chiffres « arabes » se stabilise et donne naissance aux chiffres que nous connaissons aujourd’hui.
En ce qui concerne ce génial mathématicien indien Brahmagupta,on peut ajouter qu’il ne s’est pas contenté du zéro, mais qu’il a défini les règles de calculs comme la multiplication des nombres négatifs et aussi qu’il est l’auteur d’une méthode de multiplication très proche de celle que nous utilisons aujourd’hui !
Le mot zéro a aussi son histoire puisque le terme indien « sunya » est devenu en arabe « as-sifr » (le terme « sifr » arabe a donné notre « chiffre »), lequel terme passe en Allemagne et devient « cifra » puis « zyphra », puis « zephirum ». En Italie il se transforme en « zephiro », « zeuero », « cero » et enfin « zéro » en français.
Finalement on comprend mieux pourquoi les indiens sont si bons en informatique, tout s’explique !
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