People mountain People sea de Cai Shangjun est un film coup de poing qui raconte une histoire de meurtre et de vengeance dans le Guizhou, dans une Chine soumise à de brutales mutations.
People mountain People sea ; plus qu’un film, une secousse
Dès les premières images du film People mountain People sea d’une cruauté glaçante, je me suis trouvée transportée dans les paysages du Guizhou en Chine. Je ne savais rien de ce film en rentrant dans la salle, c’est ma façon aujourd’hui d’aller au cinéma. Je souhaite une découverte à l’état brut, pas après avoir entendu la énième interview de Marylou bidule sur un film de catcheuses. Bandes annonces, interviews, talk-shows me donnent l’impression d’avoir déjà vu le film alors j’aime me réserver des surprises. PEOPLE MOUNTAIN PEOPLE SEA (« Ceux de la montagne, ceux de la mer ») a été plus qu’une surprise, un choc, une secousse, une claque.
People mountain People sea est un film d’un lyrisme cru ; les paysages sont aussi importants que les acteurs (difficile de croire qu’il s’agit d’un jeu de comédiens en raison du réalisme saisissant) et tiré d’un fait divers de 2008. Une histoire de meurtre et de vengeance.
La Chine subit des mutations si brutales que le comportement des personnages peut le paraître également. Le nombre des usines explosent. A la campagne les paysans sont victimes d’accidents et voient leur environnement détruit ou se font voler leurs terres. Développement économique sauvage. Comment les hommes ne le seraient-ils pas aussi dans ces conditions ?
« Je voulais que mon film People mountain People sea ressemble à un os qu’on a cassé » !
Des carrières de poussière blanche… et des mines noires. On se sent claustrophobe lorsqu’on descend à 400 mètres au fond du puits, dans les entrailles de la terre dont on extrait le charbon pour alimenter les usines, pour fabriquer plein de trucs pas cher. Des paysans sacrifient leur jeunesse pour consacrer leur énergie au développement économique de la Chine. C’est à ce prix que nous sommes dépassés par elle.
« L’espace, l’image… avant les sentiments ». Des panoramas époustouflants. Une objectivité qui laisse au spectateur la possibilité de comprendre sans céder à l’émotion. Cai Shangjun dit avoir été influencé par les théories de Brecht sur la nécessité d’éviter l’émotion immédiate. C’est fait.
Comment vivent les gens dans ces paysages, ces silhouettes humaines minuscules perdues au milieu de l’immensité ou travaillant dans les profondeurs insondables de la terre. Des robots qu’on réveille, qui dorment les uns sur les autres, se prennent ou se frappent comme des bêtes, n’ont pas le temps d’avoir des rêves. Aimer n’a pas de sens parce que survivre, produire, se laver un peu, manger mal, dormir en tas, et recommencer encore et encore, sans même jamais assouvir sa fatigue.
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Les photos sont spectaculaires. Félicitations.