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Pieds nus sur le sol rouge : Pedro Casaldaliga, une vie d’engagements au service des déshérités

Pieds nus sur la terre rouge

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Pieds nus sur le sol rouge (Descalç sobre la terra vermella), c’est l’histoire d’un prêtre espagnol envoyé en mission au Brésil, Pedro Casaldaliga. Au mépris de tous les dangers et épris d’idéalisme et de justice sociale, le prêtre devenu évêque, s’engagea pendant près de 4 décennies au service des plus pauvres, des opprimés et des sans-terre en Amazonie.


Pedro Casaldaliga ; entre mission pastorale, idéaux et impuissance


Pedro Casaldaliga Pieds nus sur la terre rouge

Dans cette terre il est facile de naître et de mourir mais difficile de vivre” C’est la région de Sao Felix do Araguaia dans le Mato Grosso au Centre-ouest du Brésil au coeur de la forêt amazonienne, qu’évoque en ces termes le prêtre catalan devenu évêque, Pedro Casaldaliga.

La mini série espagnole Pieds nus sur le sol rouge, en dépit d’un accent hagiographique et d’un côté mélodramatique peut-être trop prononcés, mérite d’être visionnée, d’autant qu’elle évoque un sujet rarement traité à l’écran : la dictature militaire au Brésil qui débuta en 1964 et perdura jusqu’à l’élection de Tancredo Neves en 1985. Le téléfilm inspiré du livre éponyme de l’écrivain et journaliste catalan Francesc Escribano, raconte l’histoire vraie de celui qui deviendra l’une des figures de proue du courant progressiste et représentant de la Théologie de la Libération latino-américaine. D’ailleurs Casaldaliga adopta à ce point le Mato Grosso qu’il ne revint jamais en Espagne, malgré les menaces multiples auxquelles son combat l’a confronté.

pieds nus sur la terre rouge Pedro Casaldaliga

Dans le téléfilm, on ne suit pas le voyage plein de péripéties qu’on devine jusqu’à Sao Felix de Araguaïa, mais bien l’atterrissage brutal dans cet autre monde où on mesure immédiatement les distances géographiques, sociologiques et spirituelles qui façonnent pourtant des mondes entrelacés. Sur ces terres lointaines et hostiles, Pedro Casaldaliga envoyé comme missionnaire en 1968 comprit vite le sens qu’il souhaitait donner à sa mission dans un diocèse misérable, gangrené par la corruption, la terreur et la violence de la dictature militaire, un système d’esclavage privant les paysans de toute terre et de tout espérance, au profit d’une poignée de puissants et riches propriétaires fonciers sans foi ni loi et ayant droit de vie ou de mort sur quiconque…

descalç sobre la terra vermella

Engagé, Pedro Casaldaliga l’est aussi bien comme humain animé par l’idée de justice sociale et de défense des opprimés que comme chrétien et agent pastoral. Entre idéalisme et esprit révolutionnaire, c’est pour faire de cette terre, une terre de tous les possibles qu’il a embrassé la cause face à l’injustice du latifundisme, non sans subir et engendrer par ses choix un supplément de violences, voir tomber pendant des décennies trop de martyrs ou de prêtres torturés dans les geôles, en raison de la totale inertie des gouvernements. Il n’a eu de cesse de lutter aux côtés des indiens Xavantes, des « sans-terre », des plus démunis pour restaurer leur humanité et un espoir de liberté, en tentant de mettre fin au « négoce » et à l’esclavage dont étaient victimes les paysans et indigènes. “Aujourd’hui, plus que jamais, l’Eglise devrait être la voix de l’espoir”. Ce qui devrait être une évidence ne l’est finalement pas…

En fondant la Commission Pastorale de la Terre et du Conseil indigéniste missionnaire, Pedro Casaldaliga ne limita pas sa philosophie à des mots, mais contribua à la réforme agraire, ce qui lui valut de nombreuses menaces de mort et tentatives d’assassinat. Si Pedro Casaldaliga plaida toujours pour l’engagement de l’Eglise aux cotés des plus pauvres, il se heurta aussi à la relative indifférence (ou sens de la real politique de l’Etat du Vatican?) et au conservatisme de la curie romaine qu’il rapporta notamment au travers de sa rencontre avec le Cardinal Ratzinger (futur Benoît XVI) en 1988. Car comme d’autres représentants du progressisme, Casaldaliga subit un procès du Vatican pour ses prises de position ; il en sortit sans condamnation de Jean Paul II. En filigrane un affrontement édifiant qui prête à réflexion tout autant que le volontarisme et la lutte souvent tragique sur le terrain.

Pedro Casaldaliga n’est pas exempt de tout reproche ou erreur de jugement que le téléfilm ne met pas forcément en évidence. Mais son personnage n’en reste pas moins passionnant, précisément parce qu’il n’est pas un Héros et qu’il admet ses contradictions face à l’Eglise, ses colères, ses tensions intérieures, sa rage parfois, sans jamais haïr … On y comprend une partie de l’impuissance qui saisit le prêtre puis l’évêque, alors qu’il devenait de plus en plus conscient de tous les rouages du pouvoir religieux et politique permettant aux possédants de s’assurer que rien ne change.

Si vous ne l’avez pas vu, je vous recommande Pieds nus sur le sol rouge… Et pour ceux qui l’auraient vu, n’hésitez pas à partager vos impressions et critiques!

Sandrine Monllor (Fuchinran)

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