Aller à la rencontre d’un voyageur, sur le net, ça peut manquer un peu de réalité. Là, nous avons choisi de faire une pose à la terrasse d’un café, comme on aurait pu le faire dans la vie réelle. Et j’ai découvert en Lodaberserker un être humain attachant, un vrai terrien, de ceux qui s’affranchissent des différences culturelles pour partager et se sentir à l’aise partout. Pas chez eux partout. Mais en accord avec les gens.
Lodaberserker, en voilà un nom à coucher dehors, mon jeune ami….
Je vous dis « Jeune ami », parce qu’avec mon grand âge, je finis par avoir plus de jeunes amis que de vieux amis. Surtout sur la toile. Enfin le net.
Alors, on voyage, on voyage de ci, de là ?
Au fait, vos papiers s’il vous plait ? Oui, oui, comme à la douane. C’est pas l’Europe ici !
C’est IDEOZ, un espace à part… On voudrait faire connaissance.
Vos papiers, Lodaberserker ?
Tout doux, internet à le privilège de ne pas connaitre de frontière alors pourquoi en mettre? Une douane sur Internet? Ça serait une idée. Mais que je désapprouve. Blague à part je me nomme Loïc Le Gall et j’ai 26 ans et je suis à la recherche d’un emploi. Pour réagir à ce que tu dis, les amis pour moi n’ont pas d’âges.
Oui, pour le nom, on sait, c’est imprononçable sans avoir la langue qui fourche. Quant à l’écrire, je préfère ne rien dire. Lodaberserker. Quoique, j’entends « Serre-cœur » dans ce nom. Comme un nom de compagnon, vous savez, ceux qui allaient d’un coin à l’autre de la France pour parfaire leur métier.
Vous l’entendez aussi ce « serre-cœur ou c’est un pur hasard. Enfin, ça veut dire quoi ce pseudo ?
Tout le monde le dit : mon pseudo est trop long, incompréhensible et imprononçable. Et pourtant quand on le voit, on sait le reconnaitre car il y en a qu’un comme le mien.
D’où cela est venu? A l’époque où je découvrais internet, (fin du 20ème siècle) j’en avais marre de ne jamais pouvoir m’inscrire sur les forums ou sur les boites emails car « Loïc Le Gall » était déjà pris. Je supporte déjà pas d’être un numéro dans la vie réelle, ce n’est pas pour l’être dans la cyber-réalité! (loiclegall23, ce n’est pas très accrocheur).
Et puis m’est venu le mot « Berserk » en tête.
Késako? Berserk c’est tout d’abord un manga que j’apprécie très particulièrement (et qui est d’ailleurs très peu connu. Il a la particularité d’être très violent mais en même temps très réfléchi).
Berserk à un également un sens : il désigne un guerrier fauve dans la mythologie scandinave, qui entre dans une fureur sacrée le rendant surpuissant et capable des plus invraisemblables exploits digne des dieux. Il apparait dans les sagas, les mythologies nordiques et Germaniques et même dans des cours d’histoire. Bref, un pseudo qui peut décrire ce que je suis ou ce que j’aurais voulu être.
Loda = en slang américain veut dire tout simplement = LO (comme Loïc) et DA (comme the)
En clair: Lodaberserker = Loïc the berserker = LO DA BERSERKER = Lodaberserker!
C’est un pseudo réfléchi plein de sens et qui me colle à la peau virtuelle depuis presque 10 ans maintenant. Et comme dans les peintures abstraites, de mon pseudo on peut se faire sa propre interprétation.
Le mystère de mon pseudo imprononçable est résolu!
A part ce pseudo, ça vous fait quel âge dans la vie ? Garçon ou fille ? Evitons les malentendus….
J’ai 26 ans et je suis de sexe masculin
Je plaisante mais j’ai envie de faire votre connaissance. Alors, ce bistrot avec la terrasse à l’ombre, au pied de l’Eglise Saint Rémy, vous avez votre bière, j’ai ma menthe à l’eau, ça va ? Ah, j’ai oublié de vous dire, par les vertus de mon pouvoir, moi, Channe, je vous ai, enfin je t’ai téléporté jusqu’à ce coin à l’ombre dans ma ville de Dieppe.
Hum !
Alors, avec un pseudo pareil vous arrivez à vous faire des amis sur la toile ? Rien que des voyageurs je parie, ou vous avez d’autres centres d’intérêt dans la vie ?
J’ai toujours su me faire des amis sur la toile, comme en vrai. Certains pseudos peuvent en effet provoquer plus facilement des rencontres comme « miss69 » ou « pussygroslolo ». Mais ce n’est pas mon cas et je ne pense pas que mon pseudo ai avoir avec mes relations avec les gens. En général les gens que j’apprécie et qui m’apprécie sont ceux qui ne se fient pas aux habits du moine.
J’aime énormément de choses dans la vie : les voyages, la musique, la photographie, l’animation Japonaise, l’art moderne, le sport (basketball, baseball, football et les arts martiaux), le cinéma en tous genre mais surtout les films asiatiques (chinois, Japonais et Coréen), la lecture (histoires vraies, autobiographie, romans historiques nippons), l’écriture (citations, nouvelles, articles), les soirées posées chez des amis, les soirées jeux vidéos entre hommes, rencontrer de nouvelles personnes en vrai ou sur internet, … je m’arrête là!
On voyage, et comment on fait pour avoir le temps de voyager ?
Les études, le boulot, vous savez, les trucs classiques qui entravent la vie des braves gens, comment vous vous débrouillez pour avoir le temps de voyager ? Et surtout les moyens. Sans vouloir être indiscrète. Enfin, juste un peu. Vous vous organisez comment ?
J’ai su aller décrocher des opportunités qui ont transformé ma vie : étant étudiant, c’est simple à chaque stage je trouvais le moyen de partir à l’étranger! J’ai donc réussi à joindre l’utile à l’agréable. Financièrement et bien il n’y a pas de secret : le travail. Je n’ai jamais refusé aucun travail : postier, distributeur de journaux, MC do, barman, Flunch, Hôte d’accueil, relecteur de base de données, magasinier, etc.
J’ai vite compris que la fin l’emportait sur les moyens. J’ai multiplié les jobs dès l’âge de 17 ans, en France ou à l’étranger. J’ai pu ainsi m’offrir tout ces voyages. N’étant pas boursier j’ai réussi quand même à obtenir quelques aides des facultés où j’ai étudié. J’ai également eu la chance d’avoir des parents compréhensifs qui m’ont aidé. Enfin j’ajouterais que mon dernier stage, aux USA était rémunéré à hauteur de 1200 $ par mois.
Il fait frais ici. Dans l’ombre de l’église St Rémy, vous avez une petite laine, j’espère. Là, pas loin, un parachutiste s’est accroché dans les gargouilles de l’église lors du débarquement raté des canadiens à Dieppe, les soldats allemands ne l’ont pas loupé eux. Vous savez, la deuxième guerre mondiale…
Au fait, quand vous voyagez, ça vous est déjà arrivé de traverser des pays en guerre ou juste après un conflit ? Ou alors une catastrophe naturelle ? Si ça ne vous est pas arrivé, ça vous ferait quoi ? Parce que vous êtes un touriste classique, voyageur-voyeur, ou plutôt du genre, je m’investis, je vais au devant ? Racontez-moi un peu ça
Je n’ai pas eu la chance (malchance?) de traverser des pays en guerre ou de visiter des endroits ravagés par une catastrophe naturelle. Je parle de chance car pour moi ça sera une opportunité de découvrir une part de l’humanité que j’ignore encore. Entendons-nous bien la guerre et les catastrophes naturelles sont un drame pour les personnes qui le vivent. Les être humains face à des évènements tragiques peuvent être transformés et changés. Ils se serrent et se soudent, d’autres au contraire perdent la raison. J’aurais aimé pouvoir vivre cela une fois dans ma vie, ne serait-ce que pour porter secours (aussi limités que mes pouvoirs puissent être), leur apporter un soutien morale et physique. J’ai toujours eu l’âme du « grand frère ». Je pense aussi que si cela m’arriverait je serais mort de peur, mais cela ne m’empêcherait pas de porter secours aux autres et d’être présent pour ceux qui en ont besoin (pour avoir vécu certains évènements je le sais). J’ai souvent eu le rêve de partir loin de toute civilisation pour aller aider les gens dans des pays qui en ont besoin.
Au fait, le pays de vos racines, c’est quoi ? Enfin, je veux dire, votre terre d’origine ? Moi, c’est la Normandie, la Seine-Maritime. Je me sens viking dans l’âme. Et vous ? Enfin toi ?
Je t’en prie, on se tutoie! Pas de chichi avec moi. Ma terre d’origine est le Nord et aussi bizarre que ça puisse paraître, malgré une étonnante ouverture d’esprit que j’ai acquis grâce à ces voyages, je fais preuve d’une fermeture d’esprit en ce qui concerne ma région…Le Nord. Je m’y sens bien et m’y suis toujours senti bien et je ne pense pas que ça changera!
Au fait, quand on voyage, tu dis, vous dîtes, « tu », « vous » ? Je suppose que ça dépend des pays. Comment on fait pour se dépatouiller avec les us et coutumes des pays ?
Exactement! Cela dépend des pays. La France est un des rares pays à utiliser le vouvoiement comme nous le faisons. Et étant donné que quand on voyage, on utilise l’anglais le plus souvent, la question ne se pose pas et … c’est tant mieux! Quelle liberté de pouvoir dire « You » sans se poser de question!
Tu es du genre « polyglotte » ou tu « baragouines » anglais et débrouillez-vous pour me comprendre ?
Polyglotte est un grand mot. Je ne dirais pas cela de moi. Il est vrai que l’anglais ne me pose aucun problème et je le parle couramment, ayant vécu 1 an en Irlande et 5 mois aux USA. En suite, je « baragouine » dans toutes les langues. Quand je vais dans un pays, j’ai toujours pour objectif de parler avec les locaux, alors j’apprends des mots de base. Je parle un peu Chinois ayant vécu 3 mois là-bas et l’ayant appris pendant 2 ans. Ensuite, je me débrouille un peu mieux en Japonais, ma femme étant Japonaise, et ayant visité le pays 5 fois. Je balbutie quelques mots d’allemand, comme tous les germanistes écoliers.
Ensuite c’est la soupe linguistique : je « parle » avec mes mots, dans la langue des pays que je visite, passant au mixeur l’anglais et la langue locale. Si je pouvais parler 15 langues je serais un homme comblé mais il faut la mémoire, le temps et l’intelligence qui va avec.
Comme voyageur, tu es « sac-à-dos », valise à roulette, camping car ou hôtel de luxe, chemins balisés par avance ? Tu pars au hasard ou tu prépares tout minutieusement avant le départ ?
Tu es du genre aventurier téméraire ou je réfléchis avant de partir ? J’ai un planning, je dois le tenir ?
Ou je voyage en groupe, voire en troupeau avec un guide, ou avec des amis ou en solitaire ?
Tout dépend du contexte. Si je pars seul je suis plutôt sac à dos, n’emportant parfois même aucune carte, demandant ma route aux locaux. Même si je pars à « à l’aventure » j’ai quand même une idée de ce qu’il y a à avoir. En revanche j’aime bien sortir des sentiers battus car j’ai ainsi pu découvrir de merveilleux coins non indiqué dans les guides et rencontré des gens quand je m’y attendais le moins!
- Tunisie, une plage sans touriste
Si je pars avec ma femme, c’est plutôt organisé je dirais. L’improvisation est un peu laissée pour compte au profit d’objectifs « touristiques ». Mais là aussi parfois on aime bien sortir des sentiers battus et aller farfouiner là où le vent souffle plus fort.
Voyager en troupeau? J’ai tout simplement horreur de ça. J’ai le souvenir d’avoir littéralement pété un plomb au bout de 3 jours enfermé dans l’hôtel, en Tunisie. Ma femme, aussi compréhensive soit-elle (la bronzette intempestive ne la dérange pas bien au contraire), a bien voulu me suivre et nous avons alors découvert le pays et les habitants de fort belle manière, nous liant d’amitié à un chauffeur de bus de ligne local (NON touristique) qui nous emmena en barque afin de boire quelques bières et de déguster des amandes fraiches tout en discutant. Dans les voyages, bien avant les paysages et les monuments, ce sont les gens qui m’intéressent. Et quand on a cette envie cela se voit. Il est donc tout à fait possible d’entrer en contact avec les locaux facilement.
Avec des amis? C’est une autre manière de voyager qui répond à d’autres besoins. Cela est plaisant aussi mais je suis toujours mitigé sur le fait qu’on s’ouvre moins quand on est en groupe… »la somme des intelligences diminue plus le groupe est important »… Un projet : faire le tour (UN tour) des USA en 3 semaines en achetant une épave américaine avec un couple d’ami! C’est pour 2010 si tout se passe bien.
Et comment te sont venues ces fourmis sous les pieds qui t’invitent à bouger toujours plus ?
Tu voyageais en famille quand tu étais petit ? Cela t’a pris à l’adolescence ?
Ton premier souvenir de voyage. Tu peux nous le raconter ?
Je me suis toujours débrouillé pour être dans les bons coups. Je suis persuadé que la chance se provoque et que la roue tourne que si on la fait tourner. Et c’est ce que j’ai fais depuis quelques années maintenant. J’ai rencontré une Japonaise qui m’a fait découvrir son pays à mainte reprise et qui m’a fait découvrir l’amour. Cette Japonaise est devenue ma femme récemment.
Une fois piqué par le virus du voyage, on n’en guéri jamais vraiment. Alors j’ai multiplié les aventures en me servant de mes études comme un moyen, un prétexte pour voyager : je suis parti en Chine 3 mois en stage. C’était réellement ma 1ère grande aventure car j’étais seul, et j’étais LE seul Français. Ensuite j’ai décidé de partir vivre 1 an en Irlande grâce au programme Erasmus. Comme l’argent appelle l’argent, le voyage appel le voyage, une fois en Irlande je me suis arrangé pour travailler un maximum afin de récolter des fonds. Alors que j’étais en Irlande, je suis parti 3 fois au Japon cette année là afin de rejoindre ma dulcinée : une mise en abime du voyage ou le voyage dans le voyage. Quand je suis revenu en France, je ne savais pas rester en place, des fourmis oui j’en avais plein les dessous de pieds! Sur un coup de tête j’ai roulé pendant 10h pour aller visiter des amis Tchèque à Prague pendant 1 semaine. Et puis je suis parti dans le continent opposé : 5 mois aux USA m’ont fait découvrir un pays et des gens d’une diversité incroyable, et ce toujours dans le cadre d’un stage.
Bien sûr ces « grandes » aventures se sont accompagnées entre deux de séjours plus touristiques avec des destinations plus commerciales : Tunisie, Italie (Venise), etc.
Mais à l’heure actuelle, je manque cruellement de « grande » aventure et ça me gratte sous les pieds…
J’ai effectivement voyagé étant enfant avec mes parents mais le virus ne m’a pas touché à cette époque, étant trop jeune pour apprécier vraiment le sens des mots « aventure, différence et découverte ». Le virus m’a pris à l’age de 21 ans réellement. Pour une fois dans ma vie j’ai su prendre une décision sans tergiverser et surtout qui avait du sens : aller visiter Yûri au Japon, celle qui deviendra ma femme 5 ans plus tard.
Mon premier souvenir de voyage… c’était pour moi le Japon. J’avais déjà voyagé avec mes parents en Italie et à Chypre mais j’étais trop jeune pour apprécier réellement. Ce qui est drôle c’est qu’une fois arrivé à l’aéroport de Charles De Gaulle j’ai réagit comme j’aurais dû réagir lors de mes précédents voyages : comme un enfant qui découvrit ces gros oiseaux métalliques. Je me sentais pousser des ailes, et même encore maintenant dès lors que je suis à l’aéroport et que j’aperçois des avions, j’éprouve le même sentiment : un sentiment mêlé à l’envie de fuir, l’envie de découvrir, la joie et la nostalgie en même temps se mêlent. C’est à la fois doux et dur, sucré et amère.
Et le meilleur souvenir ? Qu’est ce que tu as rapporté de plus insolite, de plus encombrant, dans ton sac à dos ou ta valise, ou bien dans ta vie ?
Je ne pense pas que ma femme soit très encombrante. C’est ce que j’ai ramené de plus cher à mes yeux, comme un prolongement de mon âme ou tout simplement la pièce de mon puzzle spirituel qui me manquait et que j’ai cherché pendant 21 ans…
Ta destination favorite ?
Question très difficile…pourquoi devoir trancher quand on a le choix? Pour moi chaque pays vaut son pesant d’or, comme chaque expérience que j’ai vécue à l’étranger, ainsi que tous les gens que j’ai rencontré. Dans tous les pays il y a du bon et du mauvais. En avoir conscience aide à mieux apprécier les différences quand on est sur place..Il m’est donc impossible de répondre. Mais pour ne pas faire ma tête de mule je dirais que j’apprécie de voyager au Japon avec ma femme car j’ai alors la possibilité d’apprendre un maximum de chose, de rencontrer un maximum de locaux et de comprendre le mieux ce qui m’entour (quoi que…le Japon est très difficile à comprendre et j’ai souvent entendu dire qu’une vie ne suffit pas pour en percer le mystère ,je ne peux qu’approuver)
Est-ce qu’un voyage a bouleversé ta vie au point qu’elle ne sera plus la même ? Histoire d’amour, rencontre amicale ?
Oui…bouleversé est le mot juste. C’est une histoire que je n’ai raconté qu’a très peu de gens da ns ma vie. Il s’agit d’une rencontre amicale. J’étais en Chine en 2005 pour un stage de 3 mois. J’étais logé et nourrit chez mon patron Chinois, que je ne connaissais pas avant de partir. Une fois sur place, j’ai découvert dans un premier temps une famille soudée et accueillante. La femme de mon patron, sa mère et lui même était à mes petits soins au point que j’en éprouve de la honte. La fille de mon boss avait le même âge que moi et parlait parfaitement anglais. Nous avons très vite sympathisé et on s’est assez vite rapproché. Nous prenions l’habitude de nous balader dans Pékin à la tombée venu, discutant de choses et d’autres, partageant nos cultures. Les soirs je lui apprenais le Français et cela était une source de rigolade incontestable. Elle était ma guide et ma « grande sœur » m’éduquant à la vie Chinoise. Son aide était précieuse car j’étais le seul Français, ne connaissant personne, parachuté en territoire inconnu. Un jour elle me confia alors qu’elle ressortait d’une histoire d’amour jamais commencée avec un chinois qui avait perdu sa petite amie. Un suicide. Ce mot je ne pensais pas l’entendre en Chine. Pour moi c’était propre au Japon. Mon voyage a alors basculé quand la fille du Boss à commencé à faire une dépression. Dépression que je n’ai pas vraiment pris au sérieux, ne comprenant pas vraiment toute l’ampleur des problèmes que mon amie me confiait. Mon boss nous avait « invité » à séjourner dans son hôtel, qui se trouvait à 5h de route de Pékin. Moi qui avait séjourné pendant 2 mois déjà à Pékin, était alors tout emballé de pouvoir voir autre chose. Et c’est une fois là-bas que Juan, mon amie, à commencé à sombrer dans la dépression. J’étais tout simplement aveugle, car pour moi tout était d’or, je découvrais tout, j’avais envie de tout et ne comprenait pas comment Juan pouvait avoir envie de rien.
Je suis ensuite parti visiter un ami Chinois que j’avais rencontré sur place dans une autre ville. Il se trouvait que la famille de cet ami était amie avec mon patron. J’y séjournai alors 2 semaines sans Juan. Quand je rentrai de ce voyage, je découvris une Juan diminuée mentalement et on ne peut plus mal dans sa peau. La preuve en était qu’elle avait coupé ses cheveux longs, et ressemblait à un garçon. Je me souviens avoir néanmoins essayé de la recoller, de la faire rire. Sa mère me demandait ce qui n’allait pas. Elle me confia qu’elle trouvait Juan bizarre depuis qu’elle était rentrée de son séjour à l’hôtel de son père. J’étais impuissant, je ne savais pas quoi lui répondre. Mais j’essayais néanmoins de redonner le sourire à Juan. Je me souviens d’une mauvaise blague alors qu’elle regardait le ciel par la fenêtre, le regard dans le vide : je lui dis « allez c’est bon Juan, tu vas pas te suicider non plus hein? tu vas pas sauter par la fenêtre, come on! »….
2 semaines après mon retour, j’appris par un ami chinois que c’est justement par cette fenêtre qu’elle se jeta dans le vide. A 21 ans elle perdit la vie de son plein grès et je peux affirmer que je ne me suis jamais senti aussi coupable de ma vie. Il m’a fallu du temps pour accepter d’une part que ma phrase n’était pas liée à sa mort et d’autre part pour accepter qu’elle soit partie de cette manière. Le suicide, je l’avais étudié durant mes études de sociologie, j’avais lu le livre du même nom d’Emile Durkheim. A l’époque c’était une notion abstraite pour moi, tout comme l’est le livre d’Emile Durkheim, rempli de tableau et de chiffres. J’avais toujours entendu des faits que l’on considère comme « divers » quand cela ne nous arrive pas personnellement : « un élève du collège @@@ se suicide ». La vie continue, je ne le connaissais pas de toute façon. C’est cruel mais c’est que la majorité des gens pensent.
- Juan, Chine.
Mais le jour où Juan est partie… J’ai compris la douleur des amis, des mères et des pères qui perdent un être cher car j’étais l’ami et elle l’être chère. Tous les jours je la voyais, matin, midi et soir, pendant 3 mois. C’était ma meilleure amie là-bas et j’aurais voulu qu’elle puisse l’être pour toujours, qu’elle vienne me voir en France, que je lui présente ma femme, et qu’elle me présente son mari…Je crois que sa mort à été un choc, et même un électrochoc qui a bouleversé ma vie, ma manière d’être et ma manière de penser. Je la garde dans mes pensées chinoises comme un trésor, que j’ai vécu il y a 5 ans. Elle vivra dans mon esprit à jamais…
Et quand tu ne voyages pas, ça t’arrive bien, tu fais quoi pour tes loisirs ?
Je crois déjà avoir répondu à cette question donc je vais m’abstenir de me répéter!
Et bien ravie d’avoir fait ta connaissance ? Si tu veux, pas loin, par cette ruelle très froide, oui, tu sens, c’est l’air de la mer. Tu peux aller marcher sur les galets dieppois. Du gros sable comme disait mes amis chiliens. Marcher dessus, c’est une expérience à ne pas louper. Et bonne route pour le prochain voyage.
A bientôt sur IDEOZ.
Pourquoi marcher seul quand je suis parfaitement accompagné? Suis-moi et continuons cette conversation aux sons des vagues avalant les galets dieppois!
J’arrive
Très joli texte de Channe, sensible, fin et très intéressant.
je partage ton avis Sandrine! Le fait de ne pas connaitre la langue parfois pousse à la communication. J’ai souvent rencontré des gens qui essayaient de sortir 2 ou 3 mots en Français, et je voyais leur visage s’éclairer quand je leur montrait que j’avais compris! En tous cas c’est super tes bouts de vie, j’adore !!
Au sujet des langues, si en parler plusieurs est utile et même indispensable, il arrive souvent que le fait de ne pas se comprendre et de ne pas parler une langue même de manière approximiative peut créer des rapports tout autres et extrêmement enrichissants. Mes meilleurs souvenirs de voyages et rencontres étaient avec des personnes que je ne comprenais pas sur le plan linguistique : je pense notamment à une vieille damée dans un village perdu de la Krajina (Bosnie, vers Bihac), première rencontre « réelle » après deux heures sans avoir croisé une âme dans les montagnes bosniaques juste après la guerre. Etonnée de voir des touristes, elle nous a offert un café spontanément alors qu’on s’était arrêté pour prendre une photo…
Puis il y a eu aussi cette dame croisée sur la route menant de Mostar à Sarajevo qui vendait son miel, ses pommes et autres productions maison … Elle n’avait sûrement pas eu depuis longtemps des clients comme nous qui achetions en nous demandant comment de tels prix pour des produits délicieux étaient praticables. 1€ le kilo de miel! Achetant sans regarder, elle se demandait comment elle allait faire pour nous remercier d’avoir acheté pour 10€ de marchandise… Elle n’en croyait pas ses yeux et nous tendait son porte-monnaie pour qu’on prenne la monnaie, car elle était perturbée par « tant d’argent »… Il faut dire que cette zone est assez déserte et que les affaires ne doivent pas être simples même si on passe à proximité de la nationale… Elle refusait de nous laisser partir sans prendre toutes ses pommes, tant elle nous était reconnaissante… Ce sont des souvenirs vraiment marquants, où pourtant nous ne nous comprenions pas…
Egalement, un homme en Serbie, croisé dans un restaurant qui essayait de nous expliquer l’état du pays en mélangeant un peu tous les mots étrangers qu’il pouvait connaître… C’était une langue mêlant les signes, les gestes, les rares mots étrangers communs comme yes, ya ou non…
J’ai éprouvé beaucoup de plaisir lors de mes déplacements dans les Balkans, précisément quand il n’était pas aisé de communiquer, même de manière approximative en anglais, en allemand, en espagnol…
Disons qu’il y a des lieux où la condition même de leur survie et de leur protection passe par des visites guidées. Cela peut sembler pénible, mais en même temps, il est difficile de faire abstraction des contraintes liées au tourisme surtout dans les lieux dits incontournables …
Merci à Channe pour cette interview et merci à Ideoz (donc Merci à Sandrine) de m’avoir donné l’occasion de m’exprimer. C’était une expérience agréable, un voyage dans mes pensées. Pour reprendre tes mots Sandrine, je suis bien d’accord qu’on ne peut pas jouer les baroudeurs tout le temps. Il faut savoir également être prudent. Mais quand on va dans un pays relativement libre et sécurisé, quel bonheur de pouvoir sortir des sentiers battus! Amicalement, Loic
Très rafraîchissant et agréable à lire… d’autant que le « personnage » correspond assez bien à ce que j’imaginais à travers son article ou ses commentaires sur le Japon, notamment.
Sinon, sur la remarque visite guidée ou en solitaire, il y a des lieux où de toute façon quoiqu’on fasse et veuille, on est obligé de passer par le groupe et le guide, car ils ne sont pas accessibles autrement… Pour mieux les respecter, visiblement… Mais forcément, cela influe sur ce qu’on rapporte comme souvenirs, car il est difficile d’apprécier un site sans possibilité d’intimité, de hasards…
J’avoue que je comprends tout à fait ta vision des voyages et tes expériences et je me retrouve grandement dans ce que tu exprimes. Les voyages, ce sont des expériences uniques, qui se ressentent au plus profond de soi et où la découverte des lieux, très touristiques ou pas, ne peut être que l’un des multiples aspects… Les rencontres restent la plus grande source d’enrichissement personnel… d’autant qu’elles ne peuvent pas se résumer à un cliché dans un appareil photo ou un camescope!