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Autoportrait à quatre mains, Armelle Barguillet répond à Channe

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armellePortrait à quatre mains, celui ou celle qui pose les questions. Celui ou celle qui y répond. De quoi se connaître mieux. De se dévoiler un peu plus… Un jeu de découvertes auquel nous pourrions jouer pour  aller les uns vers les autres. Un portrait-interview à réaliser entre deux personnes ayant envie d’aller un peu plus loin que les évidences et avec l’envie de partager ce moment avec les autres. Cela vous dit…  Pas de problème, proposez vos idées de portrait à 4 mains à Ideoz et à vos stylos. Aujourd’hui Armelle s’est prêtée au jeu des questions de Channe. Pour mieux connaître Armelle Barguillet…

Bonjour Armelle. Imaginons-nous toutes les deux, installées confortablement dans un espace entourés de livres, dans le coin d’une bibliothèque, l’un des espaces dans la réalité où nous aurions pu nous rencontrer.

Ou toutes deux assises dans un jardin parfumé par les senteurs de l’automne. C’est l’heure du soir que j’aime, la lumière tamisée, aquarellée qui nous enveloppe. Le bruit lointain d’un oiseau qui s’envole, le bruissement d’une feuille qui se détache.

Est que la Normandie est le pays de tes racines ou juste le pays où tu as choisi de vivre ? Et pourquoi choisit-on de vivre en Normandie ? Ou d’y rester ?

La Normandie vaut surtout pour sa campagne vallonnée avec ses bosquets d’arbres, ses coteaux, ses maisons à colombages, ses haras, ses prairies où paissent de paisibles troupeaux. Mais elle ne m’est familière que depuis une quinzaine d’années, lorsque mon mari et moi sommes venus rejoindre mes parents qui y avaient pris leur retraite. Trouville a le charme des ports de pêche. Nous nous sommes installés sur la colline face à la mer dont les lumières changeantes rythment nos jours. Je ne me lasserai jamais de contempler cette vue et d’assister à des couchers de soleil somptueux.

Et non loin, il y a un bateau pour les évasions. Yves, mon époux, est un voileux et j’avoue aimer moi-même les croisières mais, de préférence, en mer chaude.

Quel est ton principal trait de caractère, celui que tu ne pourrais gommer même si tu le voulais ?

Je réponds sans hésitation mon goût de l’indépendance. Mon travail de graphologue d’abord, d’écrivain ensuite, m’a appris à apprécier l’isolement et le silence. J’aime m’enfermer dans mon bureau pour rédiger, penser, composer, imaginer. J’ai un besoin vital de solitude. Heureusement mon mari le comprend et l’accepte, bien que ce soit parfois difficile. Mais il a de son côté son violon d’Ingres : la mer. C’est également quelqu’un qui se plaît dans la nature et que la solitude n’effraie pas.

Je tiens ce goût de mon enfance. Fille unique dans une famille peu nombreuse, j’ai dû très tôt m‘affronter à moi-même. Je me suis donc inventée un monde et, dès que j’ai su écrire, ai pris plaisir à rédiger des textes : poèmes ou contes. Ma vocation a été précoce. A 20 ans, à la fin de mes études de journalisme, je publiais Terre promise qui a été bien reçu de la critique. Mais ensuite, j’ai repris des études de psychologie et graphologie, me suis mariée et suis restée plusieurs années sans publier.

Quelques mots sur ta vie quotidienne, au jour le jour, comment se tisse la trame d’une journée pour toi ? En temps libre ou en temps encadré par un emploi du temps ?

Je travaille et pour me détendre j’aime marcher ou faire de la natation.

L’écriture est l’un des fils conducteur de ta vie. Pourquoi l’écriture ? Quel est, selon toi, le rôle de l’auteur dans notre société ? S’il en a encore un ? Et que penses-tu de notre société, de son avenir proche ? Sur ton site, « La plume et l’image », tu évoques l’avenir de la poésie et celui de la littérature, un avenir que tu cernes en ombres et en lumières. N’est ce pas du au fait qu’on marchandise tous les produits culturels ? Le ministère de la culture, dans son organisation, intègre le livre aux médias, n’est pas le désenchanter, lui enlever sa spécificité ? Le prix unique du livre est remis en cause ? Que penses-tu de la politique culturelle de ce nouveau gouvernement ? Penses-tu que l’accès à la culture soit l’un des moyens de réparer l’inégalité des chances ?

L’écriture est le point d’ancrage de ma vie. C’est un impératif, bien que je regrette de n’avoir pas travaillé davantage. Je pense, comme l’écrivain hongrois que je lis actuellement – Sandor Marai – que la littérature commence avec le superflu et que la nation commence avec la littérature. Notre langue est notre passé commun, elle sera aussi notre avenir, si nous nous en accordons un. On sait qu’une langue morte signifie une civilisation morte. La langue nous structure. Elle est le véhicule de la pensée, elle est aussi constitutive de la pensée. Elle est donc en quelque sorte notre patrie intérieure. Ce que je crains le plus est le désamour envers notre langue que nous parlons de plus en plus mal. Ce laisser-aller langagier va de pair avec le laisser-aller tout court. Je suis navrée lorsque j’entends la forme interrogative suivante : c’est quoi ? A ces petits détails, on mesure la dégradation progressive de notre société et de notre culture.

Pourtant on n’a jamais tant parlé de culture, une culture trop souvent formatée. Tout est culturel désormais. On voudrait nous faire croire, depuis quelques décennies, que les tags relèvent de l’art comme une fresque pompéienne ou byzantine. Il y a une perte des valeurs et de l’esprit critique.. Néanmoins, l’art est par excellence le lieu de l’échange, de l’émotion, du partage. Il est heureux que de nos jours chacun puisse avoir accès aux musées, aux expositions, aux bibliothèques, aux spectacles. Mais faut-il encore être réceptif à cette culture. Ne pas la recevoir passivement. La culture exige une réflexion personnelle. Je crains qu’elle soit dorénavant assimilée à un bien de consommation courant, à une forme de sociabilité. Il faut avoir lu, écouté, assisté à tel ou tel événement culturel pour être «  dans le coup ». Par ailleurs, on fabrique de la culture comme du fast food à bon marché et à bon compte. On vulgarise et banalise en permanence. Jadis, la culture se méritait. C’était une quête, un apprentissage, un but, une aspiration.

Je pense que l’enfance est un élément déterminant dans la vie. Dans la vie d’un créateur, elle semble rester à vif. C’était quoi l’enfance pour toi, l’enfance réelle ou l’enfance fantasmée ? Pourquoi avoir voulu écrire pour la jeunesse ?Est-ce plus facile d’écrire pour la jeunesse ?

L’enfance, on s’y replonge sans cesse. C’est là que le feu a pris, que les braises demeurent. L’homme qui tourne le dos à son enfance risque de se dé-construire, de même que celui qui tourne le dos à son histoire et à son passé. J’ai eu, il est vrai, une enfance fantasmée car solitaire et austère. Mes parents possédaient une maison de campagne dans le Loiret. Au bas de la pelouse, devant la maison, coulait une rivière qui s’appelait «  la Mauve ». Cette rivière, qui allait son bruit blanc sur les pierres, je l’ai encore dans l’oreille et je ne peux entendre chanter une tourterelle sans revoir le charme provincial de ma vieille demeure. Si je suis devenue poète, c’est bien dans le contexte de ce parc ombragé qui ouvrait sur une large plaine, labourée par le vent. Lorsque mes enfants étaient petits, j’ai une fille et un fils, j’éveillais leur imagination en leur racontant des histoires. Plus tard, ils m’ont encouragée à les écrire afin de les publier.

Non, il n’est pas plus facile d’écrire pour la jeunesse que pour les adultes. On leur doit pareille exigence, pareille transparence, pareille rigueur de récit et de style.

Quel est l’élément déclencheur qui fait naître ton acte d’écriture ?

Difficile de dire qu’est-ce qui, à un moment donné, déclenche l’inspiration. Pour la poésie surtout. Souvent une émotion, un tableau vivant, un silence, un visage. Il y a soudain une vision qui se prolonge. Elle ouvre la phrase, elle murmure le mot, elle appelle le rythme et le poème naît comme un songe. En poésie, il faut donner à voir autant qu’à entendre. La poésie doit être musicale, colorée, subversive, diamantée, harmonieuse. On taille le diamant que recèle chaque mot. On épure. Un mot de trop, tout s’effondre, un mot inexact, plus rien n’est vrai. Tu as envers la poésie une obligation d’excellence. Comme pour le tailleur de pierre, comme pour l’artisan. Il y a aussi dans le poème une architecture. Chaque mot doit s’ajuster parfaitement au suivant.

La mythologie est omniprésente dans nos vies même si nous l’ignorons le plus souvent par manque de culture. Qu’est-ce qui t’attire dans la mythologie et quelle est la mythologie qui t’attire le plus ? Sur ton site, j’ai trouvé cette citation de Patrice La Tour du Pin (il se trouve qu’elle est inscrite sur le mur à côté de mon bureau) :  » Les pays sans légende sont condamnés à mourir de froid « .

 

J’aime beaucoup cette phrase de Patrice de la Tour du Pin : «  Les pays sans légende sont condamnés à mourir de froid ». Mais l’homme sans idéal n’est-il pas condamné aussi à mourir d’inquiétude ? Parce qu’il est d’abord et avant tout un être spirituel. Privé d’espérance, on peut craindre qu’il ne revienne à une forme de vie primitive, peut-être même à la barbarie. En Crète où je me trouvais il y a quelques semaines, j’ai été émerveillée par les vestiges des civilisations minoenne et mycénienne. 20.000 ans av. J.C., ces hommes avaient déjà composé leur légende des siècles. Ils vivaient dans l’intimité des dieux et des déesses. N’était-ce pas leur seul moyen d’expliquer les mystères qui les entouraient et de se créer un fond historique qui leur conférait une ancienneté, une origine. A travers les mythes, les anciens véhiculaient nombre de leurs idéaux : la valeur du combat, la confiance en la vie, le culte de la beauté et l’intérêt pour l’homme en tant qu’individu. C’est ainsi qu’Hésiode raconte dans sa Théogonie la création du monde : la naissance de Gaia ( la terre ) et d’Ouranos ( le ciel ). La Crète occupe dans cette dramaturgie une place privilégiée.

Est-ce que l’actualité, la façon dont elle nous est assénée bouleverse le travail des créateurs à tel point qu’on manque de repères actuellement ?Pour moi la science fiction et la littérature fantastique m’ont semblé incarner, pour la littérature, la subversion dont j’ai besoin pour me remettre en question en évoquant toutes les problématiques du futur proche ou lointain?Qu’en penses-tu ?

Il est certain qu’un écrivain peut difficilement se mettre à l’écart de son époque. L’écriture est d’abord le témoignage d’un temps, d’une société, d’une vie. Cela depuis les premières écritures hiéroglyphiques. Mais je trouve intéressant la science-fiction. Adolescente j’ai lu des auteurs comme Jules Verne, Aldous Huxley avec passion ; par contre je n’aime pas du tout les films américains du genre, alors que j’apprécie un bon polar, davantage au cinéma qu’en livre.

Pour moi, le net est une vaste encyclopédie et j’y fais des dérives thématiques ce qui me permet de découvrir des créateurs de l’autre côté du monde. Et toi ?

Il y a tant de supercheries aujourd’hui… Quant au virtuel, il est totalement entré dans notre monde contemporain avec sa charge positive et négative, car on peut très vite déconnecter du réel et se séparer des autres.  Or nous ne sommes rien sans les autres. Ce sont eux qui nous permettent d’aimer, d’agir, de réagir. Le net a cela d’intéressant qu’il ouvre des pistes, éveille des curiosités. Mais rien ne vaudra le contact direct avec l’œuvre. L’image ne peut tout résumer.  Il nous faut aussi sentir, toucher, entendre et pas seulement voir. Mais le net est une sorte d’encyclopédie qu’il est formidable de pouvoir consulter à tous moments.

La rentrée littéraire était encore pour moi un évènement festif il y a quelques années. Disons une dizaine. (J’ai 54 ans). Maintenant, la fête n’est plus vraiment au rendez vous.

Je n’attendais rien de particulier de cette rentrée littéraire. Je me méfie des trompettes de la renommée. La plupart des auteurs dont on parle le plus sont médiocres, parfois même très mauvais. Par contre, je suis enchantée que Le Clézio ait eu le prix Nobel de littérature, parce que c’est un vrai écrivain. J’ai beaucoup aimé Désert, Le chercheur d’or par exemple. L’auteur use d’une écriture radio-active qui émet des ondes en permanence. Je n’ai pas lu comme toi  Jonathan Littell (Les Bienveillantes), bien que son livre soit à la maison. Le sujet me rebute et, en ce moment, je me consacre avec ravissement à la lecture de Sandor Marai. Quant au cinéma français, il me déçoit alors que le cinéma allemand, le cinéma asiatique m’ont à maintes reprises subjuguée. C’est la raison pour laquelle j’apprécie qu’il y ait un Festival du film asiatique chaque année ( en mars ) à Deauville. Le 7e Art a des ressources immenses dès lors qu’il est entre les mains d’un vrai créateur.

La rédaction « Ideoz vous invite à découvrir le site d’Armelle où elle décline sa passion pour le cinéma

Et si vous désirez lui poser d’autres questions, les commentaires sont là pour continuer le dialogue avec Armelle

4 commentaires sur “Autoportrait à quatre mains, Armelle Barguillet répond à Channe”

  1. Bonjour Gérald,

    Je vais répondre à votre question en vous félicitant d’abord de demeurer dans un si beau département. J’ai choisi de prendre ce pseudonyme lors de la publication de mes premiers poèmes « Terre Promise » à l’âge de 19 ans. Mon nom de famille ne me plaisait pas et c’est ainsi que j’ai pris celui de Hauteloire, alors que je n’avais pas d’attaches particulières dans cette région, simplement parce qu’elle m’enthousiasmait par ses aspects sauvages.

  2. Bonjour,
    D’où vient ce nom (pseudonyme) de Hauteloire
    La Haute Loire c’est le 43, mon département ! D’où la question…
    Amicalement.

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