Srebrenica est indissociable du mot massacre. C’est dans cette petite ville de Bosnie Orientale que se déroula l’un des pires massacres perpétrés lors de la guerre de Bosnie Herzégovine ou du moins le plus médiatique a posteriori … Malgré la présence de casques bleus impuissants et obéissant à l’ordre de ne rien faire face à l’arrivée des trouves de Mladic, le destin de milliers de familles de bosniaques, musulmans donc, a basculé en ce 11 Juillet 1995…. Le massacre de Srebrenica a incarné la politique d’épuration des serbes de Bosnie notamment dirigés par Ratko Mladic.
Il y a en moi comme une attache, forte et irrépressible à ces terres sombres, terres de convoitises, si souvent partagées, trop ravagées d’ancienne Yougoslavie… Pourtant, tout m’y ramène sans cesse, au cours de mes divers voyages, car ce coeur des Balkans qui n’a rien de commercial ou de touristique est aussi une source de leçons pour la modeste et curieuse voyageuse que je suis, loin de l’enfer de cette guerre qu’a connue l’Ex-Yougoslavie avec toutes ses conséquences territoriales et loin de l’enfer du présent sans perspective … J’entends presque les tambours, les pleurs, les chants d’enfants qui montent vers des cieux qui ont vu en silence tant d’horreurs à quelques milliers kilomètres de notre confortable pays… Je vois presque les ombres, celles des vivants qui n’ont pas perdu encore tout espoir et celles des morts qui hantent les souvenirs … A quoi bon?
Massacre de Srebrenica ; entre horreur et passivité de l’Occident
8372 hommes de tous âges ont été exécutés froidement par les Serbes et aujourd’hui encore, quasiment personne en République Bosniaque de Serbie ou en Yougoslavie (Serbie) reconnaît le massacre le plus important en Europe depuis la Shoah ! En tout plus de 20 000 personnes auraient été sacrifiées dans cette guerre sale qui a sanctionné l’impuissance de l’Europe à assurer la paix en dehors des frontières de l’Europe Unie…
Mémoires de Srebrenica : Mémorial à l’heure des prières
Les deux principaux responsables de ce massacre sont Radovan Karadzic aujourd’hui capturé et en attente de son procès et Ratko Mladic, inculpé également par le Tribunal pénal international (TPI) de génocide en 1995, et longtemps en fuite. Ils ont continué pendant des années après la guerre à se balader probablement en Ex-Yougoslavie, sûrement en Bosnie ou à Belgrade, sans que personne s’en soucie … Il a fallu le début de négociations des politiciens serbes et européens pour prétendre à intégrer l’Union européenne… A partir de ce moment, les services de police serbes ont plus activement recherché leurs criminels, ou tout simplement ont-ils décidé de les livrer aux européens, en gage de bonne foi, afin de confirmer qu’ils étaient prêts à entamer une nouvelle page de leur histoire en Europe.
Dans cette curieuse région de Serbie, autonome, reconnue par les Accords de Dayton et pourtant non officielle, qui ampute la Bosnie-Herzégovine d’un tiers de son territoire mais continue à s’appeler « République serbe de Bosnie », il ne reste plus beaucoup de Musulmans, ils ont fui, sont morts ou n’ont pu faire autrement que rester et subir la barbarie ou en être les témoins … A Banja Luka, la capitale, seuls 5% sont revenus, alors qu »ils étaient 20% avant la guerre et le chômage estimé à 50% cache mal le malaise dune économie toujours menacée par un boycott, puisque la Bosnie reste un protectorat dirigé par les grandes puissances et qu’on reproche aux Serbes de ne pas faire leur travail de mémoire, au point qu’ils réécriraient l’histoire. Difficile en effet d’oublier que les Serbes sont les principaux responsables, mais que les choses ne sont pas si simples et que 1269 Serbes auraient aussi été tués dans des circonstances semblables par des activistes bosniaques. Les Serbes ne manquent pas de le rappeler, au risque de réécrire l’Histoire, pour se dédouaner…
Même 15 ans après, ces Musulmans parlent peu, ont peur, subissent la latente haine de leur voisin, qui il y a 40 ans était Yougoslave comme eux sous le règne certes dictatorial mais finalement unificateur de Tito. Au mieux, ils ont pu abandonner leurs maisons pour un camp de réfugiés de fortune, avant de revenir faute de mieux peupler des ruines, remplies de souvenirs de morts, de sang et d’impacts sur les pierres. Et la cohabitation est difficile, parfois même qualifiée d’impossible par les Serbes qui estiment être les victimes et qui jugent que les Musulmans leur volent toutes les chances de voir leur République réhabilitée.
Procès de Milosevic, entre mascarade et quête de justice
Le procès de Milosevic qui s’est éternisé n’apportera pas grand chose au constat actuel. L’Ex-Yougoslavie a cédé la place à 5 pays, pauvres, chargés de souffrances, riches pourtant de leurs cultures, de leur Histoire, de la différence de leurs peuples qu’ils n’ont pas su accepter. Certains sen sont bien sortis, l’un deux a même rejoint l’Union Européenne qui faisait aussi rêver la Croatie, de plus en plus eurosceptique depuis que son adhésion a l’Europe est différée sans date pour l’instant et quelle est priée de rester dans la salle d’attente de l’Union, car elle na pas encore livré Gotovina, le « héros » défenseur de Zadar et probable criminel de guerre comme tant d’autres.
Mais la Serbie est démantelée, moralement écrasée sous le poids de son passé quelle n’accepte pas. La Bosnie-Herzégovine n’existe plus guère que dans les esprits avec deux régions qui survivent entre les aides de Bruxelles et la foi des survivants. La mise en place des institutions d’un tel Etat est d’autant plus complexe que les accords de Dayton de 1995 qui amorçaient la possibilité d’un cesser-le-feu durable et d’une solution de partition territoriale acceptable pour tous les camps des Serbes de Bosnie et de la fédération croato-musulmane ne répondent pas aux nouveaux enjeux liés à la cohabitation des minorités ethniques et religieuses après une aussi longue guerre que celle de Bosnie.
Sarajevo est presque redevenue une capitale ordinaire, mais toujours aussi fière. Banja Luka, la capitale accordée à la Serbie en Bosnie et pour laquelle les Serbes se sont battus pendant plus de quatre ans, est une ville en apparence, mais seulement en apparence, paisible et moderne. Puis, il y a les autres villes, dont Srebrenica, toujours ravagée. Seule une petite partie de la population est restée sur cette terre brûlée, dans ces maisons qui ont masqué les privations, les souffrances, les blessés, les morts, derrière ces frontières imaginaires qui ont caché un massacre sans nom. Il ny a pas une maison qui ne soit pas éventrée par les armes de fous, d’inconscients, de gens aveuglés par des enjeux politiques, raciaux, religieux et civils qui les rendaient incapables d’accepter que la Bosnie échappe à la Serbie et inversement… La domination à quel prix ?
Entre la négation du crime, souvent qualifié de génocide, et les représailles économiques et d’embargo annoncées contre la République Serbe de Bosnie (capitale Banja Luka) si elle ne collabore pas mieux à l’arrestation et la traque de ces criminels, que penser de la situation dans cette zone ? Faut-il encore accabler ces régions ou les aider à s’intégrer ? L’Europe Unie peut-elle aider ces Européens à se réconcilier ou à participer à la reconnaissance génocidaire par les Serbes qui restent incrédules, sceptiques voire carrément convaincus du mensonge des Musulmans à propos du carnage, du grossissement des chiffres des morts… ? Reconnaissance aussi de l’incapacité de lONU à sauver des vies, à protéger des civils…
J’ai visité Srebrenica, il y a cinq ans encore, huit ans après mon premier passage, j’en garde une image indicible qui ne rend pas justice à la Douleur des regards que j’ai croisés, des larmes que j’ai perçues, du fatalisme si « balkanique » que j’ai éprouvé comme tous ces gens face à leur Avenir (peut-être ?) vain…
Extrait du film Résolution 819 :
Voici un petit exemple à méditer…aujourd’hui (13/07) a été posé à l’entrée du palais de justice à Srebrenica une plaque commémorative à toutes les victimes serbes innocentes…immédiatement elle a été retirée ?
Ah… C’est tellement vrai… pourquoi perdre son temps à flâner dans le vieux quartier de la Bascarsija, alors qu’à quelques centaines de kilomêtres de là, il est encore possible d’aller visiter des charniers ?
Quel bel état d’esprit….Eprouver le besoin de se rendre sur de tels lieux d’horreurs, pour en tirer des leçons et se dire qu’au final, on devrait pas autant se plaindre. Vu qu’on a la chance d’habiter un pays comme la France. Visiter Srebrenica, pour en tirer des leçons, et nous dire que la guerre, c’est pas bien. Pour apprendre l’humilité.
Ce qui est tout de même étrange, c’est que des gens qui ne l’ont pas connu se permettent d’en parler, de disserter, et de compatir. Alors qu’au contraire, les gens qui ont connus la guerre et qui en ont souffert n’en parlent pas et ne veulent plus en parler. La guerre… la guerre… personne n’a envie d’en tirer des leçons. Parce que personne n’a envie de la vivre.
Il y a une grande différence, je crois, entre « entendre presque des tambours, des pleurs », et les avoir entendu en réalité, par une journée de juillet 1995. Celles et ceux qui les ont presque entendu pensent qu’un sourire peut redonner le goût et la joie de vivre. Ils prêchent le pardon, ils clament haut et fort qu’aujourd’hui, il est grand temps de réapprendre à vivre ensemble. Celles et ceux qui ont presque entendus ces pleurs sont ceux là même qui pleurent, en voyant un charnier. Qui réfléchissent, devant des cadavres, et qui se demandent comment cela a pu être possible. Qui posent ensuite leur grosse peluche pleine de compassion sur l’épaule d’une vieille femme. Et qui sortent le soir pour prendre un verre et se distraire. Et puis ensuite, on rentre à Paris et la vie reprend son cours. On organise un diner au cours duquel on s’empressera d’émouvoir ses convives avec ses histoires. Un repas où l’on partagerera son expérience de voyage peu banale. On parlera de ce charnier, de ces gens croisés, puis on lancera un débat sur la guerre, et puis surtout, levons nos verres, avec le sourire, en nous disant qu’on est bien loti… Paris, et ces lumières éblouissantes, à cent milles lieux de ces sombres contrées où règne encore l’odeur de la putréfaction.
A l’opposé, il y a celles et ceux qui ont entendus ces cris et ces pleurs. Pour ces gens, la vie est comme suspendue. Et je doute fortement que ça leur plaise, de voir débarquer dans leur ville des touristes motivé par la curiosité malsaine et par la volonté de sortir des sentiers battus..
Alors petite question. Quand enterre t’on ton père ou ta mère, afin que je vienne assister à la cérémonie juste pour en apprendre un peu plus sur la douleur que peuvent ressentir des gens qui me sont étrangers face à la mort ?
Les gens de Srebrenica n’ont pas besoin des curieux. Juste de pouvoir enterrer leurs morts, et qu’on leur rende justice.
Ah la sacrosainte polémique sur la légitimité d’écrire ou non…
Votre opinion demeure votre opinion.
Elle se veut moralisatrice….elle sous-entend toutefois que l’on ne devrait pas se rendre à Auschwitz, a Burchenval, à Dachau, parce que cela est dérangeant que d’affronter la réalité de l’indignité et de l’abjection humaine dans le paroxysme de sa haine envers les autres.
Voyez-vous j’avais fait un autre choix..et probablement plus courageux que le votre. Je suis allé en BIH non pas après le 16 janvier 1996 mais en 1994 et en 1995… pour faire ouvrir les yeux au Monde et surtout à l’Europe et à cette France mitterrandienne peuplée de couards et de lâches qui refusait d’intervenir et laissait mourir ses soldats sous les balles des snipers serbes et tchetniks, quant aux populations civiles, mitterrand s’en foutait complètement.
Oui j’ai vu des soldats serbes joués au foot avec des têtes humaines fraichement coupées, ou j’ai vu des enfants en haillons en plein hiver 94 et 95 courant après les voitures des humanitaires pour qu’on leur donne à manger, ou j’ai vu le stade de Sarajevo reconvertit en cimetière, oui j’ai vu des soldats du contingent Français pleurer devant les tas de cadavres en décomposition de Bosniaques…
Et aujourd’hui vous venez écrire vos conneries moralisatrices ? Ou étiez -vous donc durant la période 1992-1996 ? Derrière votre petit clavier?
les Bosniaques n’ont pas besoin de gens comme vous , vous êtes nauséabondes avec votre morale qui ne sert à rien.
Restez donc la tête dans le sable, et laissez aux Bosniaques le droit d’organiser leur vie? leur pays et leur devoir de mémoire sans y mettre votre stupidité de pseudo intellectuelle à deux balles !
Ohhhh mon Dieu… qu’est ce qui ce passe dans le monde entier!!! Mais c’est genial et terrible en meme temps.