Aller au contenu

« Teacher, c’est aussi ça la Thailande »

Votre séjour en Croatie est unique ; notre expertise l’est aussi! Pour mieux préparer vos vacances, consultez le guide voyage Croatie et téléchargez les Ebooks gratuits : conseils pratiques, idées de visites et bonnes adresses.  

 

L’évènement a fait la première page du « Bangkok Post » hier et ça le méritait bien ! Un chauffeur de taxi singapourien de 70 ans, considéré comme héros après qu’il ait  retourné une pochette contenant 26 millions de bahts à un couple de thaïs venus en vacances « faire son shopping à Singapour » ! (26 millions de bahts : 700 000 euros, sept cent mille euros ! de quoi acheter plus de 15 maisons enThailande !). J’espère que ce grand-père chauffeur a reçu une récompense qui lui permettra de s’acheter un petit appartement pour finir ses vieux jours à Singapour…

Lorsque je disais à  mon ami, ex-étudiant, An Sarot, que les vrais riches en Thaïlande étaient les thaïs, ceux qui se payaient les hôtels 5 étoiles de Chiang Mai et s’achetaient des voitures que les occidentaux ne pouvaient plus s’offrir depuis des lustres,  ce jeune garçon qui a les yeux bien ouverts sur le monde, l’esprit curieux et pas du tout « endoctriné » par une certaine forme de « pensée thaïe » où la « face » occupe la première place, me répondait : « Teacher pourquoi est-ce qu’il y a tant d’ONG étrangères en Thaïlande ? » « Pourquoi ces « volontaires » viennent-ils ici travailler  alors que la Thaïlande pourrait s’occuper elle-même des plus défavorisés ? »

BLOG _6140

Poser la question c’est déjà y répondre…Il est allé à bonne école An Sarot. Faut dire que lorsque je l’ai connu il n’avait pas plus de 18 ans,  je lui ai appris àposer des questions, à penser par lui-même, à s’indigner.

Donc An Sarot  a soulevé 3 questions :

– Pourquoi les étrangers interfèrent-ils dans les affaires de mon pays ?

– Pourquoi ne sommes-nous pas capables – nous, thaïs – de prendre en charge, non pas les « pauvres » (terme péjoratif pour parler d’ethnies qui ont plus de richesses et de valeurs que les gens des villes), mais « défavorisés » ?

– Pourquoi ne fait-on pas confiance aux différents chefs de villages (Phou Yaï)* qui connaissent bien les vrais problèmes de leur peuple ?

Bien sûr, on évoquait là, les peuples des montagnes (chaao khao), ces ethnies laissées à  l’écart de la modernité du monde et de sa course folle au fric…

Blog _6150

Après cette conversation, An m’a montré deux choses intéressantes.

–  La première – à  Ban Maee Sou – Dans une école de montagne  à 60 kms de Mae Sariang où nous sommes allés porter des centaines de chaussettes pour les mômes qui ont froid dans les montagnes la nuit et le matin pendant cette « saison fraîche » (naa nhao). La majorité des enfants est d’origine Karen et ne rentre pas au village trop éloigné de l’ecole. Alors les enseignants, « mutés » dans ces villages, partagent leur « maison de prof » prévue pour deux, avec une vingtaine de ces mômes. Ils nous montrent des ordinateurs alignés, éteints définitivement. Ont-ils jamais fonctionné ? J’ai posé la question. « Non, enfin pas longtemps, car au premier problème il n’y a pas eu de technicien pour réparer ». Donc les ordinateurs sont abandonnés à la poussière et aux toiles d’araignées. Ces ordinateurs ? cadeaux de politiciens ou de riches qui se donnent bonne conscience en faisant des cadeaux inutiles à ces enfants dont une partie ne parle même pas le thaï.

J’ai vu pire dans d’autres villages : des vélos offerts par le gouvernement à des écoles de montagnes. Même Lance Amstrong, chargé à mort, n’aurait pu grimper les chemins de boue de ces villages paumés.

Blog _6151

– La deuxième chose intéressante : Un temple perdu dans la nature, à des kilomètres de la route. Un temple clinquant d’une richesse dégoulinante, que même les 26 millions de bahts du couple thaï en vacances n’auraient pas suffi à construire. A côte du temple, une villa digne de celles de la côte d’Azur : la maison du moine (luang Phaw). Personne dans ce temple, excepté le balayeur de feuilles mortes.

 « Teacher » me dit An Sarot, « c’est un groupe de riches thaïlandais de Sri Racha (près de Pattaya) qui a fait construire ce temple, pour acquérir des mérites (tham boon) pour la vie future ».

Blog 6132
enfants de l’ecole de Baan Mae Sou…ordinateurs « morts » dans le fond

Bordel de merde ! – oui je dis bordel de merde et j’assume,  lorsque je suis en colère – (« ai hia oey » un équivalent masculin en thaï !) « A 10kms d’ici les mômes ne peuvent pas rentrer chez eux et vivent entassés dans une  baraque sans confort… et dans ce temple isolé, des millions dépensés en dorure pour un groupe de riches qui ne viendront qu’une fois par an… tout ça pour le bénéfice de leur vie future. Fuck leur vie future. J’assume parfaitement ma grossièreté !

« C’est ça la Thailande teacher. Un pays où les gens riches sont égoïstes et pensent d’abord à leurs mérites et leur vie future plutôt que d’aider les plus démunis, et laissent ainsi la place aux ONG étrangères qui nous considèrent comme un sous-peuple »

* Lire « LA OU S’ARRETENT LES FRONTIERES » qui raconte la vie dans ces villages Karen de la montagne. (auteur : Michele Jullian, Les editions de la Fremillerie)

J’adore mon élève…

Michèle Jullian

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

 

  1. Accueil
  2. /
  3. Derniers articles
  4. /
  5. TRIBUNE
  6. /
  7. CHRONIQUES NOMADES
  8. /
  9. « Teacher, c’est aussi ça la Thailande »